Liberté et responsabilité

 

 

« Là liberté des uns s’arrête là où commence celle des autres ». 

"Formule exécrable en ce qu’elle place la liberté dans une logique de la concurrence alors que la liberté ne peut être véritablement comprise que dans une logique de solidarité." Christian GODIN (Au fil de la philosophie)

 

Je mets de côté toute la problématique liée au fait que nous sommes des êtres "déterminés", que cette fameuse liberté n'est qu'une illusion et que cette liberté ne peut s'acquérir entièrement qu'au regard du travail intérieur qui consiste à identifier tout ce qui agit en nous. Je suis juste libre d'identifier l'étendue de ma geôle avant de tenter d'y creuser des ouvertures.

Ce qui m'intéresse ici, c'est de reprendre une phrase souvent entendue chez les individus qui réclament le droit de manger des animaux (et donc de valider leur souffrance), de prendre l'avion comme bon leur semble, de partir en croisière, de consommer à outrance, bref, de se lover confortablement dans le déni d'une situation planétaire qui relève de la destruction. 

Cette liberté d'agir comme bon leur semble porte atteinte à ma liberté de vivre dans un monde préservé, autant que faire se peut. Et se pose dès lors ce problème de la responsabilité et de la solidarité. 

Si je rejette cette responsabilité qui consiste à participer à des phénomènes mortifères, c'est donc que j'ai décidé de ne pas me montrer solidaire envers mes condisciples et encore moins envers les générations futures. 

Bien entendu, les cas de conscience peuvent révéler une situation très complexe. Le cas présenté par Sartre est très représentatif : un jeune homme qui se demande s'il doit s'engager dans la Résistance ou rester auprès de sa mère dépendante. 

La réponse est que nous sommes "condamnés" à prendre une décision, condamnés dans le sens où les conséquences ne peuvent se poser simplement du côté du bien ou du mal mais se combinent, s'entremêlent et génèrent une crise qui n'a pas de solution. Il n'y a pas de juste milieu. 

Dans le cas d'un positionnement envers l'état de la planète, il ne s'agit pas de se heurter à un dilemme insoluble : ne pas manger d'animaux, ne pas prendre l'avion pour du tourisme, ne pas partir en croisière, ne pas consommer à outrance, ce sont des décisions qui ne mettent aucunement en péril notre intégrité physique ou celle d'autrui. Ces décisions ne nous privent pas de notre liberté puisque ce choix est libre. Personne ne peut me contraindre à ne pas manger d'animaux etc... Cette décision relève de ma liberté et cette liberté que je m'octroie prend forme parce que je décide de me montrer responsable et solidaire. 

Le repli sur soi dans une "liberté égoïste" (Lévinas) doit être contrée par la responsabilité envers autrui. 

Par conséquent, les individus qui viendraient me reprocher mon "intransigeance" en m'accusant de porter atteinte à leur liberté, je suis en droit de leur répondre que leur liberté individuelle participe à la condamnation de tous à en subir les effets. 

Le problème actuel, c'est qu'il y a beaucoup plus d'individus prônant l'entière liberté que d'individus oeuvrant à établir une responsabilité inconditionnelle.

"Tout ce qui augmente la liberté augmente la responsabilité. Etre libre, rien n'est plus grave. La liberté est pesante et toutes les chaînes qu'elle ôte au corps, elle les ajoute à la conscience." Victor HUGO

 

 

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