Prise de conscience
- Par Thierry LEDRU
- Le 05/05/2021
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Je suis né en Bretagne. J'ai mangé du poisson et des fruits de mer. J'adorais ça.
Avec ma grand-mère, on ramassait des coques, des pieds de couteaux, on cherchait des crabes. Des souvenirs impérissables.
Je pêchais aussi et j'étais fier de rentrer avec mes poissons. Parfois, je les faisais cuire sur un feu de bois à la plage. J'étais Robinson sur son île.
Je tuais les poissons dès que je les ramenais au bout de ma ligne. Un coup sur la tête et je les vidais aussitôt. Je ne voyais dans tout ça que ma puissance, mon adresse, ma débrouillardise. J'étais un gamin juste heureux de mes qualités de pêcheur.
Bien plus tard, alors que j'étais devenu instituteur et que j'étais en poste dans un petit village côtier, j'avais installé dans ma classe un très grand aquarium. Avec les enfants, on était allé à la plage et on avait ramené divers animaux, crevettes, crabes, bigorneaux ...
Un matin, alors que j'arrivais de bonne heure, bien avant l'arrivée des enfants, en montant l'escalier qui menait à ma classe, j'ai trouvé un crabe qui descendait. Il se laissait tomber du haut d'une marche, avançait sur le carrelage et retombait sur la marche suivante. Je suis resté sidéré. Comment était-il sorti de l'aquarium, je n'en sais rien.
La porte de la classe était ouverte.
Il s'enfuyait.
Je l'ai mis dans une caisse en plastique et je l'ai ramené à la mer.
J'ai eu beaucoup de mal à travailler pendant toute la journée. Je n'ai rien dit aux enfants.
Quelques jours plus tard, je suis allé voir mes parents. Ma mère avait acheté deux énormes "araignées". Nos crabes préférés. Elle avait mis l'eau à bouillir mais comme le récipient était trop petit pour y cuire les deux en même temps, elle a plongé le premier alors que le deuxième était prostré au fond de l'évier. Lorsque le premier crabe a été plongé dans l'eau bouillante, j'ai vu le deuxième "bondir", se détendre et gratter au fond de l'évier, cherchant à se hisser sur les bords.
Je n'ai pas pu en manger.
Et puis, jour après jour, l'émotion est passée et le plaisir du goût a repris le dessus.
Il y a dix ans maintenant que je ne mange plus aucun animal, ni terrestre, ni marin, ni de rivière. Rien. Et il me revient parfois en mémoire, tous ces animaux que j'ai mangés.
"La noix de veau" que mon père nous faisait, avec de la crème fraîche. Je n'ai jamais imaginé le veau. Je ne voyais que la tranche de viande. Tout autant que les steacks, ou les tranches de jambon, ou le saucisson, ou les rillettes ou les multiples pâtés bretons. Je ne voyais pas l'animal. Tout le problème est là. On mange de la "viande", on ne mange pas un animal. Et pourtant, c'est bien d'un animal dont il s'agit.
Hier, quand on est allé courir dans les bois, on est passé près d'un pré où paissait un troupeau de vaches et de multiples veaux. Ils étaient tout jeunes, ils gambadaient puis venaient se blottir contre leurs mères ou têtaient goulûment. La Creuse compte un grand nombre d'exploitations produisant de la viande...De la viande de veau. Entre autres.
On les a regardés courir, vivre, se nourrir, se frotter à leurs mères. Insouciants. Futurs "noix de veau".
Il me reste moins d'années à vivre que je n'en ai vécu mais au moins, ce qui reste à faire ne comptera plus aucun animal dans mon assiette.
Et il m'arrive de demander pardon à tous ceux que j'ai mangés.
Les pêcheurs demandent d’interdire la pêche sur le plateau de Rochebonne, un réservoir de biodiversité
https://lareleveetlapeste.fr/les-pecheurs-demandent-dinterdire-la-peche-sur-le-plateau-de-rochebonne-un-reservoir-de-biodiversite/
« Dans le contexte actuel, où la filière est confrontée à des difficultés majeures, cette proposition des structures professionnelles doit répondre à une volonté forte des pêcheurs, accompagnée des pouvoirs publics, d’assurer la pérennité des activités socio-économiques face à la montée d’objectifs souhaitant répondre à des enjeux écologiques », indique le CNPMEM dans son communiqué.
21 avril 2021 - Laurie Debove
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BREVE – Les mentalités seraient-elles en train de changer ? Le Comité national des pêches a créé la surprise : il souhaite interdire la pêche dans la zone du plateau de Rochebonne, afin de laisser prospérer la faune et la flore maritimes uniques de ce lieu.
Les pêcheurs commencent à prendre conscience de l’impact de la surpêche sur l’état des Océans, et aussi de la pérennité de leur activité. Afin de préserver le stock de poissons, le Comité national des pêches (CNPMEM) a regroupé l’ensemble des structures professionnelles de la façade Atlantique (comités régionaux et organisations de producteurs), pour demander à la ministre de la Mer Annick Girardin l’arrêt de la pêche sur le Plateau de Rochebonne.
Au large de l’île de Ré, le plateau de Rochebonne est un espace de plus de 9700 hectares qui abrite de nombreuses espèces telles que les dauphins communs, les grands dauphins, les marsouins communs, les globicéphales noirs, les requins pèlerins, mais aussi de nombreux oiseaux marins. Cette zone classée Natura 2000 est un espace censé être protégé par la loi, à travers un régime de protection des mammifères marins dont le dauphin commun fait partie.
« C’est un lieu absolument magique qui concentre énormément d’algues notamment des grands laminaires qui, compte tenu de la clarté et de la transparence des eaux, arrivent à 40 mètres de haut, avec énormément d’autres algues, ce qui attire beaucoup de poissons et des oiseaux pélagiques qui pêchent au-dessus des pitons du plateau de Rochebonne, des mammifères marins comme des tortues, etc. » explique Dominique Chevillon naturaliste, Président de Ré Nature Environnement et Vice-Président de la LPO, pour La Relève et La Peste
Fin 2019, la Préfecture de la Nouvelle Aquitaine a pris une décision forte pour protéger ce réservoir de biodiversité : la pêche au chalut, trop meurtrière, est désormais interdite sur le plateau de Rochebonne.
Lire aussi : Des milliers de bars et de dauphins sauvés grâce à l’interdiction de la pêche à chalut
Restait donc les autres bateaux de pêche, autorisés à venir dans la zone une année sur deux. Une vingtaine de navires continuent d’y pêcher, et entre 300 et 400 autres navires ratissent les eaux alentours en quête de poissons. Au fil du temps, l’endroit est devenu un symbole.
« Dans le contexte actuel, où la filière est confrontée à des difficultés majeures, cette proposition des structures professionnelles doit répondre à une volonté forte des pêcheurs, accompagnée des pouvoirs publics, d’assurer la pérennité des activités socio-économiques face à la montée d’objectifs souhaitant répondre à des enjeux écologiques », indique le CNPMEM dans son communiqué.
Carte du plateau de Rochebonne
La montée en puissance des écologistes face au massacre de dauphins qui continue chaque année aurait-il convaincu les plus récalcitrants de l’importance primordiale d’épargner certaines zones de pêche ? Le communiqué ne le précise pas.
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Concrètement, le CNPMEM demande que l’interdiction concerne tous les engins de pêche pendant dix ans avec une dérogation pour la pêche à la ligne, plus sélective, du 1er avril au 30 septembre. Les bateaux battant pavillon étranger et les espagnols qui fréquentent le plateau de Rochebonne doivent aussi y être soumis. Un suivi scientifique serait mis en place.
« Cet endroit est au large des côtes, c’est un massif récifaire quasiment unique en poche de biodiversité : si ça se fait c’est une bonne nouvelle. » conclut Dominique Chevillon
21 avril
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