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Les Communs : Vandana Shiva
- Par Thierry LEDRU
- Le 06/02/2022
Bravery in battle est un groupe musical de post rock.
Ils ont invité Vandana Shiva pour lier la musique et le texte sur les Communs.
" Parce que nous vivons dans un monde interconnecté et que les sociétés humaines dépendent profondément de ce que la nature leur prodigue, toutes les sociétés qui se sont souciées du bien-être humain et de l'intérêt public ont toujours défini, administré, protégé et renouvelé les Communs.
Puisque les Communs sont le fondement du bien-être commun, leur enfermement, leur privatisation, leur saisie est la base de la pauvreté. La pauvreté n'est pas l'état original des sociétés. La pauvreté est le résultat de l'exploitation, de la privatisation et de l'enfermement des Communs.
Les Communs, ce sont les prés, les champs, les forêts, les semences, les Communs, c'est la biodiversité, c'est la culture du partage et du soin qui se développe quand les semences sont des Communs. Et comme nous avons transformé les plantes en marchandises, considérées comme de la propriété privée ou de la propriété intellectuelle, parce qu'elles sont soumises à la collecte de royalties, nous sommes passés de dix mille espèces qui composaient le régime alimentaire des humains à quelques centaines et maintenant seulement à quatre : le maïs, le colza, le soja et le coton.
La biodiversité est la base de la santé. Ce corps incroyable qui est le nôtre est profondément relié à la terre. Nous sommes la terre. Le mot humain vient du mot humus qui signifie "sol". Enfermer le Commun de la biodiversité a aussi des conséquences économiques : les services pris en charge gratuitement par la biodiversité deviennent les produits à coût élevé que vendent les entreprises. Mais les Communs, ce n'est pas seulement ce que la nature nous offre. Tout ce que la communauté crée dans l'intérêt collectif et conservé dans le domaine public est un Commun. C'est pourquoi nos sociétés ont beaucoup lutté pour créer des systèmes de santé qui soient des systèmes publics, des systèmes d'éducation qui soient des systèmes publics, des systèmes de transport qui soient des systèmes publics, des systèmes dénergie qui soient des systèmes publics. Nous avons besoin de tout cela pour créer des sociétés bienfaisantes. Nous avons besoin de tout cela pour apporter la justice et l'égalité dans nos sociétés."
Vandana Shiva
Staying Alive: Women, Ecology, and Development (d), The Violence of the Green Revolution: Third World Agriculture, Ecology, and Politics (d), Earth Democracy: Justice, Sustainability, and Peace (d)
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Vandana Shiva, née le 5 novembre 1952 à Dehradun (Uttarakhand), est une conférencière, écrivaine et militante féministe et écoféministe indienne1.
Elle dirige la Fondation de la recherche pour la science, les technologies et les ressources naturelles (Research Foundation for Science, Technology and Natural Resource Policy). Elle a reçu le prix Nobel alternatif en 1993.
Biographie
Après avoir obtenu une licence de physique en 1972, puis un master en 1974, à l'université du Panjab, à Chandigarh en Inde, Vandana Shiva poursuit ses études au Canada. Elle y obtient un master de philosophie des sciences à l’université de Guelph en 1977, puis un doctorat dans la même discipline obtenu en 1978 à l'université de Western Ontario. Elle réoriente ensuite ses recherches dans le domaine des politiques environnementales à l'Indian Institute of Science2.
Elle est l'une des chefs de file des écologistes de terrain et des altermondialistes au niveau mondial, notamment pour la promotion de l'agriculture paysanne traditionnelle et biologique, en opposition à la politique d'expansion des multinationales agro-alimentaires et au génie génétique. Elle lutte contre le brevetage du vivant et la biopiraterie3.
Dès les années 1980, elle a été très active dans le « Narmada Bachao Andolan » (Mouvement Sauvons le Narmada) qui s'oppose à la construction d'énormes barrages sur la rivière Narmadâ, barrages bouleversant les écosystèmes et obligeant aux déplacements de millions de paysans pauvres4.
En 1991, Vandana Shiva fonde l'association « Navdanya », association pour la conservation de la biodiversité.
Elle est membre du comité de parrainage du Tribunal Russell sur la Palestine dont les travaux ont commencé le 4 mars 20095.
Engagements et critiques
Intervention de Vandana Shiva au Salon international du goût (it) - Terra Madre 2012, Turin.
Tout en poursuivant sa lutte contre l'introduction des OGM dans son pays6,7, Vandana Shiva s'engage dans une forme d'activisme mondial en faveur de la paix, la biodiversité et du droit des peuples de disposer d'eux-mêmes.
En 2001, Vandana Shiva, avec quatorze lauréats du Prix Nobel alternatif ou du Prix Goldman, demande au Congrès mexicain la reconnaissance constitutionnelle des peuples autochtones et de leurs droits, au Mexique, en insistant sur leur rôle dans le développement et la conservation de la biodiversité naturelle et culturelle8.
En 2004, après deux ans de combat, Vandana Shiva obtient la fermeture de l'usine Coca-Cola du Kerala9.
Combat contre les OGM : sa fondation de recherche a surveillé les activités liées aux OGM depuis 1997 et mené une campagne anti-OGM au niveau national et international.
Elle accuse les OGM du coton Bt introduits en 2002 d'être responsable des suicides des paysans indiens qui se seraient endettés et n'auraient pas eu les rendements prévus. Ces accusations sont reprises par diverses organisations, par exemple par le Centre pour les droits de l’Homme et la justice mondiale (CHRGJ) de la faculté de droit de l'Université de New York (NYU) dans un rapport datant de 201110 (dont la co-autrice, la professeure Smita Narula évoque dans une vidéo le rôle des OGM dans la recrudescence des suicides chez les paysans indiens11). Mais les études portant sur les suicides d'agriculteurs en Inde réfutent ces affirmations, constatant qu'il n'y a pas eu d'augmentation du taux de suicides depuis l'adoption massive du coton Bt en 200212,13, l'une d'elles indiquant même une diminution du taux de suicides à partir de 200513. La principale cause des suicides serait en réalité un surendettement des agriculteurs, induit par un ensemble de facteurs incluant le manque d'irrigation ou la diminution des prêts accordés aux agriculteurs14. Les théories de Vandana Shiva concernant une supposée forme de « totalitarisme alimentaire » orchestrée selon elle par les laboratoires et certaines fondations caritatives15 sont donc déconsidérées par certains sceptiques16. Elle est également critiquée pour ses nombreuses positions anti-scientifiques17.
Œuvres
(en) Staying alive : women, ecology and development, Londres, Zed books, 1988, 224 p. (ISBN 0-86232-822-5, notice BnF no FRBNF36638978).
The Violence of the Green Revolution - Third World Agriculture, Ecology and Politics, Paperback, 1991, 264 p.
Ecoféminisme (1993) avec Maria Mies (ISBN 2738471773)
Vandana Shiva, Ethique et agro-industrie. Main basse sur la vie, L'Harmattan, 1996, 128 p. (ISBN 978-2-7384-4409-7)
Vandana Shiva, Le terrorisme alimentaire, Fayard, 2001, 197 p. (ISBN 978-2-213-61080-1)
Vandana Shiva, La Guerre de l'eau : Privation, pollution et profit, Parangon, 2003, 162 p. (ISBN 978-2-84190-097-8)
India Divided, Seven Stories Press, 2005
Globalization's New Wars: Seed, Water and Life Forms Women Unlimited, New Delhi, 2005 (ISBN 81-88965-17-0)
Earth Democracy; Justice, Sustainability, and Peace, South End Press, 2005 (ISBN 0-89608-745-X)
Manifestos on the Future of Food and Seed, editor, South End Press 2007 (ISBN 978-0-89608-777-4)
Democratizing Biology: Reinventing Biology from a Feminist, Ecological and Third World Perspective, author, Paradigm Publishers 2007 (ISBN 978-1-59451-204-9)
Soil Not Oil, South End Press, 2008 (ISBN 978-0-89608-782-8)
Staying Alive, South End Press. 2010 (ISBN 978-0-89608-793-4)
Biopiracy: The Plunder of Nature & Knowledge, Natraj Publishers, 2011 (ISBN 978-8-18158-160-0)
Monocultures of the Mind: Perspectives on Biodiversity, Natraj Publishers, 2011 (ISBN 978-8-18158-151-8)
Making Peace With The Earth, Pluto Press, 2013 (ISBN 978-0-7453-33762)
"Etreindre les arbres", dans Reclaim. Recueil de textes écoféministes choisis et présentés par Emilie Hache, Paris, Cambourakis, 2016
1 % : Reprendre le pouvoir face à la toute-puissance des riches, Rue de l’Échiquier, 2019
Médias
Un monde à vendre (titre anglais : Life running out of control), film de Bertram Verhaag et Gabriele Kröber de 2004, diffusé sur Arte le 11 mars 2004 et le 9 février 2006, relate son combat18
Vandana Shiva apparait en outre dans les films documentaires suivants :
Solutions locales pour un désordre global de Coline Serreau.
Le Monde selon Monsanto de Marie-Monique Robin.
The True Cost d'Andrew Morgan.
En quête de sens de Nathanaël Coste et Marc de la Ménardière.
Demain de Mélanie Laurent et Cyril Dion.
La Guerre des graines de Stenka Quillet et Clément Montfort20.
SEED: The Untold Story de Taggart Siegel et Jon Betz.
Internet ou la révolution du partage (55 min) de Philippe Borrel version courte de son film La bataille du Libre [archive] (87 min) aka Hacking for the Commons [archive] .
Distinctions
Prix et récompenses
1993 : Prix Nobel alternatif « pour avoir placé les femmes et l'écologie au cœur du discours sur le développement moderne »
2007 : Prix de la Planète bleue21
2010 : Prix Sydney de la paix22
2008 : LennonOno Grant for Peace (en)
2011 : Prix Thomas Merton
2012 : Prix de la culture asiatique de Fukuoka
2012 : Das Glas der Vernunft (de)
2016 : MIDORI Prize for Biodiversity 23
2016 : Prix Danielle Mitterrand, de la Fondation France Libertés
2019 : BBC 100 Women
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Courir
- Par Thierry LEDRU
- Le 30/01/2022
La musique, la course dans les bois, des forêts traversées sur des chemins ancestraux, bordés de murs de pierre, l'énergie en soi, le souffle, le rythme, la musique...des heures de bonheur.
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Démission du Pr François Alla
- Par Thierry LEDRU
- Le 29/01/2022
Regardez bien la source de cet article ; il ne s'agit pas d'un site "complotiste". Il est nécessaire de le préciser désormais tellement la désinformation rend les choses compliquées...
Pr François Alla : « J’ai démissionné du Haut Conseil de la santé publique car les experts n’ont pas joué leur rôle durant la crise sanitaire »
janvier 25, 2022
Crédit photo : DR
Le 5 janvier, le journal officiel (JO) actait la démission du Pr François Alla du Haut conseil de la santé publique (HCSP). Ex vice-président de la commission « maladies chroniques » du HCSP, le praticien hospitalier, chef du service de soutien méthodologique et d’innovation en prévention au CHU de Bordeaux, confie au « Quotidien » les raisons de son départ. Il considère que le « Haut conseil » ne dispose pas des moyens suffisants pour mener à bien ses missions. Et juge que les expertises des scientifiques du HCSP sont dévoyées par les politiques.
LE QUOTIDIEN : Pourquoi avez-vous démissionné du Haut conseil de la santé publique ?
Pr FRANÇOIS ALLA : Je voulais tout d’abord dégager du temps pour remplir ma nouvelle mission à la présidence de la Conférence régionale de santé et de l’autonomie (CRSA) de Nouvelle Aquitaine. Mais j’ai également démissionné parce que les experts du HCSP et les agences (HAS, Santé publique France, etc.) n’ont pas joué leur rôle durant la crise sanitaire. Celui-ci consiste à élaborer de l’aide à la décision, y compris quand elle ne va pas dans le sens du décideur ! Or, cette aide à la décision s’est transformée en service après-vente de décisions qui étaient déjà prises en amont.
Dernier exemple en date, l’article récent sur l’impact du passe sanitaire sur le taux de vaccination, la santé et l’économie. Il ne s’agit pas véritablement d’une expertise, mais d’un « travail alibi ». Il a été porté par le Conseil d’analyse économique (CAE), qui est rattaché à Matignon et présidé par Philippe Martin, ancien conseiller économique d’Emmanuel Macron.
Parmi les signataires de ce papier, il y a aussi un membre du Conseil scientifique, le Pr Arnaud Fontanet, qui a milité pour le passe sanitaire. Donc, ce n’est pas un travail scientifique indépendant, au sens d’absence de conflits d’intérêts avec le pouvoir politique. D’autant plus que ce focus a été publié le 18 janvier, soit deux jours après le dépôt d’une saisine du Conseil constitutionnel sur le passe vaccinal.
En dehors du passe sanitaire ou vaccinal, en quoi l’expertise scientifique n’a pas joué son rôle depuis le début de la crise ?
Souvenez-vous des positions sur le masque au début 2020. Le HCSP, comme les autres instances d’ailleurs, a clairement suivi les positions publiques des politiques qui affirmaient que le masque ne servait à rien. Or, son rôle d’instance sanitaire aurait dû consister à dire : « Le masque est nécessaire, c’est un outil de réduction des risques ». Ce sont des choses que les experts savaient, mais ils se sont censurés pour « ne pas mettre le ministre de la Santé en difficulté », comme cela m’a été dit.
Macron avait dit : « On est en guerre ». Donc, on ne pouvait pas contredire les affirmations du directeur général de la santé ou du ministre qui avaient dit que c’était inutile, voire dangereux. Sur le masque, même si on pensait autre chose, il ne fallait pas le dire. Dans l’avis que j’ai écrit en mars 2020, j’ai parlé du masque. Le ministère de la Santé m’a clairement fait remarquer que cela n’était pas politiquement correct d’en parler.
On assiste aujourd’hui à un processus de décrédibilisation de toute voix discordante. C’est devenu très dur pour un expert de dire : « Je ne suis pas tout à fait d’accord avec les politiques ». Car on risque de nous faire entrer dans le camp des complotistes. Il est par exemple devenu difficile d’émettre le moindre doute sur la politique de vaccination. Les gens sont tétanisés, ils ont peur de passer pour des antivax ou des complotistes.
D’autres raisons vous ont-elles poussé à démissionner ?
Le HCSP manque cruellement de moyens. À titre d’exemple, j’ai piloté un avis complexe, relatif aux bénéfices-risques de la cigarette électronique, publié en novembre dernier. 6 000 articles sont sortis ces dernières années sur le sujet, j’ai dû me charger moi-même de la revue de la littérature, le soir et le week-end ! Pire, pour nous accompagner, nous avons un seul chargé de projet salarié du Haut conseil, mais il est mobilisé sur dix avis à la fois…
On ne peut pas s’appuyer uniquement sur du bénévolat sur des sujets aussi complexes qui nécessitent de faire la revue de la littérature, des entretiens, de rédiger, de communiquer sur l’avis. Durant la crise sanitaire, le HCSP a fourni un travail exceptionnel. Les experts ont travaillé jour et nuit sur leur temps personnel, n’ont pas pris de vacances. Cela n’est même pas reconnu par le recrutement de deux à trois chargés de projet… Je pense aussi que le HCSP doit se donner les moyens au niveau de la prévention et de la promotion de la santé.
C’est-à-dire ?
Un peu avant mon départ du HCSP, j’ai milité pour que l’on se dote à nouveau d’une commission dédiée à la prévention. La France a des performances médiocres dans le domaine : mortalité prématurée extrêmement forte, inégalités sociales et territoriales importantes. Tout le monde est d’accord pour faire ce virage préventif qui nécessite une expertise sur la prévention. Or, ce champ est aujourd’hui complètement vierge, car le HCSP et les agences sanitaires ne s’emparent pas du sujet. C’est dramatique.
Pourquoi affirmez-vous que le HCSP ne s’empare pas du sujet de la prévention ?
Parce que l’expertise en prévention dérange les décideurs. Par exemple, sur le sujet de la couverture vaccinale, on sait que la moitié des non vaccinés ne sont pas des antivax, mais des personnes âgées isolées qui vivent loin des centres de vaccination, des SDF, des migrants qui parlent mal le français, des personnes qui n’ont pas accès à internet… Une politique de prévention efficace, c’est aussi s’intéresser à ces déterminants structuraux : l’aménagement du territoire, les inégalités socio-économiques. Mais tout cela dérange, car cela remet en question les politiques.
Durant la crise sanitaire, le HCSP a émis de nombreux avis techniques mais aucun avis stratégique. Il a pourtant, normalement, une mission stratégique mais c’est le Conseil scientifique qui a fixé les axes stratégiques importants durant la crise : confinement, couvre-feu, stratégie de vaccination, etc. Le HCSP se contente d’émettre des avis techniques de mise en application. On assiste à un dévoiement complet de l’expertise.
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"La théorie du ruissellement"
- Par Thierry LEDRU
- Le 29/01/2022
Théorie du ruissellement
Définition de théorie du ruissellement
La locution "théorie du ruissellement" est la traduction de l'anglais trickle down economics. C'est une théorie économique d'inspiration libérale qui affirme que, hors destruction ou thésaurisation, les revenus des personnes les plus riches sont, en fin de compte, réinjectés dans l'économie au moyen de la consommation et de l'investissement. Elle affirme que les revenus des plus riches contribuent à la croissance de l'activité économique et à la création d'emplois, dont profite l'ensemble de la société.
Si la théorie du ruissellement apparait au cours du XXe siècle, c'est dans les années 1980 avec les politiques économiques très libérales mises en oeuvre par Ronald Reagan aux Etats-Unis et par Margaret Thatcher au Royaume-Uni qu'elle fait son apparition dans le débat public. Elle permet de justifier une politique de baisse d'impôts et de réduction des moyens de l'Etat, en assurant une hausse des revenus des particuliers. Par le biais de la consommation et des investissements, ces revenus servent à rémunérer différents prestataires sous forme de salaires et à soutenir l'économie, se substituant ainsi aux dépenses de la collectivité (salaires de fonctionnaires, indemnités aux chômeurs, grands travaux, etc.) qu'assurait l'Etat.
"Donner les réductions d'impôts aux tranches supérieures, aux individus les plus riches et aux plus grandes entreprises, et laisser les bons effets "ruisseler" à travers l'économie pour atteindre tout le monde."David Stockman, Directeur du budget de Ronald Reagan - interview à The Atlantic - 1981
En 2017, la politique fiscale du gouvernement français, notamment la suppression de l'ISF et l'instauration du prélèvement forfaitaire unique (PFU) dit "flat tax" pour les revenus du capital, est dénoncée par la France Insoumise comme s'appuyant sur la "théorie du ruissellement", ce que conteste le ministre de l'économie Bruno Lemaire. Le président de la République Emmanuel Macron, quant à lui, défend sa politique en utilisant la métaphore des "premiers de cordée".À l’automne, lors d’une interview télévisée, le président avait déclaré que "Si l'on commence à jeter des cailloux sur les premiers de cordée, c'est toute la cordée qui dégringole", comme le rappelle le Huffington Post. Des propos qui avaient fait bondir l’opposition, et qu’il clarifie aujourd’hui:
"Ce n’est pas le premier de cordée qui tire les autres sur la corde. Chacun doit aller, aspérité après aspérité, prendre sa propre prise. Mais quelqu’un a ouvert la voie", a déclaré le président.
Pour certains économistes, la théorie du ruissellement n'est défendue par personne et ne serait utilisée que de manière péjorative par les opposants aux politiques libérales. Pour d'autres, elle n'est qu'une utopie, une fable, ... un moyen de justifier des politiques en faveur des plus riches et des grandes entreprises, avec pour conséquence l'accroissement des inégalités.
>>> Thème : Economie
>>> Bibliographie : Le mythe de la "théorie du ruissellement" (Arnaud Parienty, Ed. La Découverte, 2018)Théorie du ruissellement
La théorie du ruissellement ou théorie du ruissèlement (en anglais, trickle down economics) est une théorie économique non démontrée et critiquée par une majorité d'économistes selon laquelle l'État doit permettre l'enrichissement des personnes les plus riches afin que celles-ci réinjectent dans le système économique — par le biais de l'épargne (investissement) ou de la consommation — les revenus engrangés. Cela contribuerait à augmenter l'activité économique et l'emploi du reste de la société, davantage que si les revenus ainsi investis avaient été prélevés et redistribués via les impôts et les prélèvements sociaux.
Sommaire
3.2Propension marginale à consommer décroissante
3.4Accroissement des déficits et de la dette
3.5Accroissement des inégalités et ralentissement de la croissance
Concept[modifier | modifier le code]
La théorie du ruissellement estime qu'une politique favorisant les revenus des plus riches, notamment par une réduction de leurs impôts, profite à toute l'économie. Cette réduction d'impôts permettrait de dégager des revenus auparavant ponctionnés par l’État, qui seraient réinvestis par les plus riches dans l'économie. Ce réinvestissement « ruissellerait » ainsi jusqu'aux classes populaires1.
Arnaud Parienty distingue en 2018 trois types de ruissellement. Le ruissellement « naïf » consiste à affirmer que la redistribution vers les plus favorisés est consommée par ces derniers et améliore le sort des plus pauvres. Le ruissellement « faible » consiste à affirmer que les sommes redistribuées aux plus favorisés permettront de mettre en branle des mécanismes favorables à la croissance, améliorant les salaires des plus pauvres ; l'épargne des plus riches serait canalisée sous forme d'investissement. Le ruissellement « fort », enfin, serait un ruissellement où le gain de richesses permis par les dépenses et investissements des plus riches permettrait non seulement de générer de la croissance, mais en plus, d'augmenter les recettes fiscales de l'État2.
Selon Nicholas Kaldor, lorsqu'une économie se trouve en situation de sous-investissement, l’État peut essayer de provoquer une hausse de l'investissement des plus riches par le biais d'une redistribution des richesses vers le haut3.
Histoire de l'expression[modifier | modifier le code]
En économie[modifier | modifier le code]
Le terme de « ruissellement » est employé par Arthur Okun afin de désigner les bienfaits de la diffusion large de l'innovation dans une économie. Ces bienfaits profitent à tous en partant du haut au fur et à mesure que l'innovation est vendue au grand public4. Or, l'innovation affecte la distribution des revenus, puisque le surplus de l'innovation prend notamment la forme d'augmentations des salaires réels, qui se diffusent dans toute l'économie, selon le prix Nobel d'économie Paul Romer5. L'économiste William Baumol remarque que « l'augmentation générale sans précédent du niveau de vie du monde développé depuis la Révolution industrielle n'aurait pu avoir lieu, pour sa plus grande part, sans les innovations de cette révolution »6.
Le dictionnaire Merriam-Webster note que le premier usage du mot « ruissellement » dans le sens économique remonte à 19447, et celui de « théorie du ruissellement » à 19548.
Dans la culture populaire[modifier | modifier le code]
William Jennings Bryan critique la théorie du ruissellement lors du discours de la Croix d'or de 1896.
En 1896, William Jennings Bryan, candidat démocrate à l'élection présidentielle, utilise le premier la métaphore du ruissellement, sans utiliser ce terme, lors du discours de la Croix d'or :
« Il y a deux conceptions du gouvernement. Il y a ceux qui croient que si on légifère simplement pour laisser prospérer les plus riches, leur prospérité retombera sur ceux en-dessous. La conception démocrate veut que si on légifère pour rendre les masses prospères, leur prospérité remontera à travers toutes les classes qui se reposent sur elle »9,10.
L'humoriste Will Rogers plaisante dans un journal de 1932, pendant la Grande Dépression11 :
« Cette élection a été perdue il y a quatre et six ans, non pas cette année. Ils [les Républicains] n'ont commencé à penser au commun des mortels qu'au début de la campagne électorale. L'argent a été attribué en totalité aux classes supérieures en espérant qu'il parviendrait aux nécessiteux. M. Hoover était ingénieur. Il savait que l'eau ruisselle. Mettez-la en haut d'un versant et laissez-la partir, elle atteindra le point le plus sec. Mais il ne savait pas que l'argent remonte. Donnez-le aux gens au bas de l'échelle, les gens en haut l'auront avant la nuit, d'une façon ou d'une autre. Mais au moins, il sera passé entre les mains des pauvres. Ils ont sauvé les grandes banques, mais les petites sont parties en fumée. »12
En politique[modifier | modifier le code]
La théorie du ruissellement apparaît dans le débat public dans les années 1980 avec Ronald Reagan et Margaret Thatcher13.
Ronald Reagan présente son plan de baisse d'impôts en 1981.
Ronald Reagan, président des États-Unis de 1981 à 1989, met en pratique les Reaganomics. Le taux marginal d'imposition passe de 70% en 1980 à 28% en 1987. Les inégalités et la dette augmentent, et la croissance est plus faible14.
Interrogé en 2017, Emmanuel Macron, président de la République française, défend quant à lui la métaphore des « premiers de cordée »15.
Critiques et limites[modifier | modifier le code]
Déficit d'arguments[modifier | modifier le code]
La théorie du ruissellement n'est soutenue par presque aucun économiste. Il est quasiment impossible de trouver un économiste qui, depuis les années 1990, ait pu prouver l'existence d'effets bénéfiques d'une baisse d'impôts sur les plus riches sur la croissance16. Cela conduit le journaliste économique Jean-Marc Vittori à écrire que si la théorie économique du ruissellement n'existe pas dans le monde académique, elle continue d'être proposée politiquement17,18.
Le sociologue et historien Richard Sennett considère que la théorie du ruissellement est efficace car elle permet de faire rêver d'une économie et donc d'une vie meilleure aux pauvres, de manière analogue à la promesse du paradis de la Bible19.
Propension marginale à consommer décroissante[modifier | modifier le code]
Un argument utilisé à l'encontre de la théorie du ruissellement est que la propension marginale à consommer décroît en fonction des revenus. Le sociologue Jean Ziegler remarque ainsi que les besoins n'étant pas illimités, il est peu probable que quelqu'un qui gagne 150 000 € par mois dépense, comme celui qui gagne 1 500 €, 20 % de son revenu dans l'alimentation19.
Thésaurisation[modifier | modifier le code]
La théorie du ruissellement se fonde sur l'hypothèse selon laquelle un gain de revenus des plus riches serait immédiatement et en grande partie réinvesti dans l'économie. Cela n'est pas démontré. Une étude de 2012 du Tax Justice Network tend à montrer que l'épargne des très riches, plutôt que de ruisseler vers le bas, ruissellerait vers les paradis fiscaux où elle n'est pas taxée20.
Accroissement des déficits et de la dette[modifier | modifier le code]
Ziegler remarque que l'échec des politiques de ruissellement se traduit par la perte de revenus de l’État, due à ce que les baisses d'impôts sur les plus riches ne sont pas compensées par un accroissement des revenus suffisant pour accroître la base d'imposition. Cela entraîne des déficits budgétaires importants. La baisse des revenus mène également au démantèlement des services publics, qui a été à la source de la paupérisation croissante des couches inférieures des sociétés occidentales21.
Accroissement des inégalités et ralentissement de la croissance[modifier | modifier le code]
Les années après la crise économique mondiale de 2008 voient la publication de plusieurs recherches tendant à montrer que l'accroissement des inégalités ralentit la croissance économique et fait augmenter le chômage22,23. Certaines études régionales ou nationales, comme aux Philippines, montrent que les baisses d'impôts sur les plus riches n'ont ruisselé qu'en infime partie sur les classes non-aisées, qu'elles n'ont pas stimulé l'investissement, et qu'elles ont mené à une augmentation des inégalités24.
Le papier du FMI conclut que « si la part du revenu des 20 % les plus riches augmente, la croissance du PIB diminue sur le moyen terme, ce qui suggère que les bénéfices ne ruissellent pas. A contrario, une augmentation de la part des 20 % les plus pauvres est associée avec une augmentation du PIB »25. Les canaux de l'épargne, de l'investissement, du crédit et de la consommation sont moins efficaces pour générer de la croissance lorsque les inégalités sont fortes26.
Effets sur l'emploi[modifier | modifier le code]
Une étude de 2019 du Journal of Political Economy analysant des données de différents pays montre que les baisses d'impôts sur les plus riches n'ont aucun effet ou seulement une faible influence sur le niveau d'emploi. L'étude montre une relation importante entre la baisse d'impôts sur les plus pauvres et la création d'emplois27.
Une étude de 2020 menée par des chercheurs de la London School of Economics analyse les conséquences de baisses d'impôts sur les plus riches dans dix-huit pays membres de l'OCDE. Les résultats indiquent que ces baisses d'impôts n'ont eu aucun effet significatif sur l'emploi, ainsi que sur la croissance. Elles ont toutefois fait augmenter les inégalités28.
On voit ici ce que ça donne chez les ultra riches. Quant au "ruissellement", on l'attend toujours. Et à propos des premiers de cordée, ça fait longtemps qu'ils ont coupé la corde.
Publié le 29/01/2022 06:54Mis à jour le 29/01/2022 17:36
Temps de lecture : 6 min.
De gauche à droite : Françoise Bettencourt-Meyer, Gérard Wertheimer, François Pinault, Alain Wertheimer et Bernard Arnault, les cinq Français les plus riches. (PHOTOS : AFP, GETTY – MONTAGE : PIERRE-ALBERT JOSSERAND / FRANCEINFO)
La fortune des Français les plus riches a davantage augmenté pendant la pandémie que ces dix dernières années, selon un récent rapport d'Oxfam.
Ils sont deux fois plus riches qu'avant la crise. Entre le début de la pandémie en mars 2020 et la fin de l'année 2021, la fortune des cinq Français les plus riches a augmenté de 173 milliards d'euros, selon Oxfam (PDF). C'est plus que ce qu'a coûté la crise sanitaire et économique liée au Covid-19 en 2021. Cet enrichissement massif concerne d'ailleurs la quarantaine de milliardaires que compte la France. Sur cette période de dix-neuf mois, "les richesses des grandes fortunes françaises ont bondi de 86%, soit un gain de 236 milliards d'euros", écrit Oxfam. A titre de comparaison, "elles avaient augmenté de 231 milliards d'euros en dix ans, entre 2009 et 2019". Une augmentation fulgurante qui interroge, alors que la crise sanitaire a dans le même temps fragilisé les plus précaires.
Comment expliquer cet enrichissement d'une poignée de personnes ? Cette situation française est-elle exceptionnelle ? Franceinfo répond, graphiques à l'appui, aux questions que soulève cette augmentation des grandes fortunes.
Cette hausse est-elle exceptionnelle ?
C'est du jamais vu pour Bernard Arnault, le dirigeant de LVMH, numéro 1 mondial du luxe avec des marques comme Louis Vuitton ou Dior, Françoise Bettencourt-Meyer, actionnaire majoritaire de L'Oréal, François Pinault à la tête de Kering, dont font partie les marques Gucci ou Yves Saint Laurent, et les frères Alain et Gérard Wertheimer qui se partagent la propriété de Chanel. La fortune de ces cinq milliardaires, les plus riches de France, a plus que doublé en un an et demi. Le champion incontesté est Bernard Arnault, avec une hausse de presque 100 milliards entre mars 2020 et octobre 2021.
"Il faut garder à l'esprit que mars 2020, c'est le point bas. C'est le moment où la Bourse a beaucoup chuté au début de l'épidémie de Covid, et donc la comparaison avec mars 2020 rend les écarts particulièrement impressionnants", précise Catherine Lubochinsky, économiste à l'université Paris 2 et spécialiste de la finance, auprès de franceinfo.
Le classement de Challenges, qui fait le point en septembre de chaque année sur les grandes fortunes françaises, permet d'observer l'évolution sur dix ans. Ce palmarès est légèrement différent puisqu'il est calculé par famille. Ces cinq milliardaires sont bien présents, mais les frères Wertheimer sont comptés ensemble, ce qui fait entrer la famille Hermès dans le top 5.
Le constat reste le même que celui d'Oxfam : l'augmentation de 2021 est la plus importante jamais constatée. Leur fortune cumulée était déjà en hausse presque permanente depuis dix ans et ce phénomène s'était déjà accéléré depuis 2016. Ces dix dernières années, la fortune des cinq familles les plus riches de France a ainsi été multipliée par 6,5.
Comment se sont-ils enrichis ?
"Leur fortune est principalement composée d'actions. La valeur de ces actions a augmenté", explique à franceinfo Pierre-Noël Giraud, économiste spécialiste des inégalités. Si les Bourses mondiales ont chuté lourdement en février et mars 2020, elles sont rapidement reparties à la hausse. En France, le CAC40 a retrouvé son niveau d'avant-crise dès le mois de mars 2021 et a même atteint un nouveau record historique au début du mois de janvier 2022.
En Europe, la BCE a créé un programme d'achats d'urgence face à la pandémie. En tout, 1 850 milliards d'euros ont été injectés par la BCE pour acheter aux banques des titres de dettes, privées ou publiques, dans une logique de "quoi qu'il en coûte" financier. Cet argent n'a pas directement servi à acheter des actions, mais à rassurer les investisseurs et à faire baisser les taux d'intérêts, ce qui a profité in fine aux marchés boursiers et fait monter le prix des actions. Des programmes similaires existaient déjà depuis 2007, mais la somme dépensée lors de la crise sanitaire est sans commune mesure.
"Le but de la Banque centrale, quand elle mène sa politique d'achat, n'est pas d'enrichir les plus riches, détaille Pierre-Noël Giraud. Elle le fait pour éviter une crise financière qui se répercuterait sur l'économie réelle. L'enrichissement des grandes fortunes financières en est une conséquence mécanique connue depuis le début." Quentin Parrinello, responsable du plaidoyer chez Oxfam France, souligne de son côté que "l'enrichissement des ultrariches pendant la crise n'est pas dû à leurs bonnes décisions, mais à l'intervention publique".
Y a-t-il une exception française ?
Des programmes similaires à celui de la BCE ont été mis en place un peu partout dans le monde et le rebond rapide des marchés financiers a donc été observé à l'échelle mondiale. De nombreuses places boursières ont enregistré des niveaux records ces derniers mois, selon Capital.
"La hausse des grandes fortunes est un phénomène mondial, mais les fortunes françaises ont particulièrement progressé. Bernard Arnault est le deuxième homme qui s'est le plus enrichi au monde depuis le début de la crise, derrière Elon Musk", fondateur de Tesla et Space X, précise Quentin Parrinello. En Asie, la palme de l'enrichissement revient à l'industriel indien Gautam Adani, spécialisé dans la production d'énergie fossile, dont la fortune a été multipliée par huit pendant la crise sanitaire.
Les grandes fortunes françaises profitent de la bonne santé du secteur du luxe. "Comme les riches s'enrichissent globalement malgré la crise, ils continuent à consommer du luxe", explique Catherine Lubochinsky. Par exemple, le groupe LVMH de Bernard Arnault a vu son chiffre d'affaires baisser en 2020 à cause des confinements stricts partout dans le monde. Mais le rebond ne s'est pas fait attendre puisque le chiffre d'affaires en 2021 a dépassé de près de 20% celui de 2019, avant l'épidémie de Covid-19.
C'est surtout au niveau boursier que la comparaison avec les niveaux d'avant-crise est la plus impressionnante. Entre janvier 2020 et janvier 2022 la hausse de LVMH au CAC40 est de plus de 70%. Il a profité de l'augmentation globale des marchés financiers et de la chute d'autres secteurs plus fragilisés par la crise du Covid-19, comme le tourisme, pour devenir plus attractif auprès des investisseurs.
Les milliardaires français sont-ils mis à contribution pour rembourser la "dette covid" ?
Pour Oxfam, l'équation est simple : "Puisque c'est l'intervention publique de la BCE qui a aidé ces ultrariches à accroître leur fortune, ce serait normal que soit à eux de contribuer pour rembourser la dette covid." Les près de 2 000 milliards d'euros dépensés par la BCE ne sont pas de l'argent public issu de taxes ou d'emprunts d'Etat, mais de la création monétaire, ce qui peut notamment créer de l'inflation. Cette dernière est justement en hausse mais l'augmentation des prix de l'énergie, liée à la reprise économique, semble en être davantage responsable que l'argent injecté sur les marchés par la BCE.
Pour faire contribuer les plus fortunés, Catherine Lubochinsky estime qu'il est difficile de taxer la hausse de valeur d'une action, car il s'agit de plus-value potentielle. "La plus grande valorisation d'une action ne crée directement de l'argent pour son propriétaire que lorsqu'elle est vendue, explique l'économiste. C'est comme quand la valeur de votre logement augmente : si vous ne le vendez pas, cette augmentation ne vous rend pas plus riche en réalité. En plus, cette hausse de valeur est temporaire et peut très bien repartir à la baisse ensuite. Mais au moment de la vente, là il y a possibilité d'une taxation." Cette taxation des revenus du capital a précisément été allégée par Emmanuel Macron en 2018, via la "flat tax".
"Il pourrait également y avoir une vraie politique de taxation sur les très hauts revenus, car aujourd'hui ils arrivent largement à échapper à l'impôt et c'est vraiment un problème", ajoute l'économiste. Selon Quentin Parrinello, d'Oxfam, ce n'est cependant pas la piste privilégiée par la France : "Le gouvernement est en train de réfléchir aux solutions pour payer la facture de la crise et pour l'instant les milliardaires ne semblent pas devoir être mis à contribution."
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Juste une citation
- Par Thierry LEDRU
- Le 29/01/2022
« Il y a trois sortes de violence.
La première, mère de toutes les autres, est la violence institutionnelle, celle qui écrase et humilie des millions d’hommes, la violence aux rouages silencieux et bien huilés.
La seconde est la violence révolutionnaire qui naît de la volonté d’abolir la première.
La troisième est la violence répressive, qui se fait l’auxiliaire et la complice de la première violence, celle qui engendre toutes les autres.
Il n’y a pas pire hypocrisie que de n’appeler violence que la deuxième, en feignant d’oublier la première qui l’a fait naître et la troisième qui la nie. »
Dom Helder Camara
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Aurore Stephant : les ressources minières
- Par Thierry LEDRU
- Le 28/01/2022
Une interview absolument passionnante. A écouter et réécouter tant toutes les données sont nombreuses et les analyses argumentées.
Il est effarant d'entendre cette ingénieure dire qu'elle a très peu de contact avec le milieu politique. Alors que tout l'avenir de la civilisation actuelle se fonde sur l'idée incontestable que nous consommons à outance des ressources non renouvelables. Juste un exemple : si comme le veulent les gouvernements, le parc automobile devient à moyen terme un parc essentiellement électrique, les réserves de cobalt disponibles seront épuisées en 2050.
Il est tout aussi effarant de l'entendre expliquer à quel point les masses populaires sont conditionnées. L'exemple de l'ampoule à incandescence est révélateur. La voiture électrique en est donc un autre et le matraquage médiatique est permanent.
En conclusion de cette interview, j'en reviens toujours à la même chose : il est impensable et même totalement fou de considérer que nous pouvons continuer à exploiter la planète de la sorte. Et donc, il ne reste qu'une solution : la décroissance.
Oui, je sais, aucun politicien ne s'y engagera car cela signerait son arrêt de mort professionnel étant donné que la majorité des individus refuse d'emblée d'envisager une autre existence que la leur en dehors du fait qu'ils aimeraient pouvoir consommer davantage.
Il n'en reste pas moins que les commentaires sous la vidéo sont réjouissants et montrent qu'une certaine frange de la population a les yeux ouverts.
Aurore STEPHANT
Ingénieure géologue minier, spécialisée dans les risques environnementaux et sanitaires des filières minérales
Paris, Île-de-France, France+ de 500 relations
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Entretien — Mines et Gaz de schiste
Les ravages ignorés de l’activité minière
Déchets dans les eaux, dégâts en Europe, pollution… Dans un rapport impressionnant qui paraît ce mardi, l’association SystExt démontre que les « mines durables » sont un mensonge et que les techniques minières sont « de plus en plus prédatrices et dangereuses ». Aurore Stephant, ingénieure géologue minier, l’explique à Reporterre.
C’est un état des lieux saisissant. Dans un rapport volumineux ultradocumenté publié ce 16 novembre, les géologues miniers et les ingénieurs de l’association SystExt [1] s’attaquent à certains aspects méconnus de l’extraction minière. Ce panorama des « controverses minières » permet de comprendre pourquoi cette industrie cumule le triste record d’être la première productrice de déchets toxiques et la responsable du plus grand nombre de conflits socioenvironnementaux à l’échelle du globe. Il montre aussi qu’on ne pourra pas lutter contre le réchauffement climatique par des technologies qui accroissent notre « dépendance minérale ». Impacts des mines, pollution, pertes en vies humaines… Aurore Stephant, ingénieure géologue minier au sein de SystExt, révèle les conclusions de ce rapport.
Reporterre — Dans le rapport « Controverses minières » qui sort mardi 16 novembre, quelles « contre-vérités » sur les mines révélez-vous ?
Aurore Stephant — Lors du dernier congrès de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), qui a réuni des États et des agences gouvernementales du monde entier, nos équipes ont constaté une chose étonnante : certains représentants des gouvernements croyaient qu’aucun site minier ne rejetait aujourd’hui ses déchets directement dans les fleuves ou la mer. Ils pensaient cette pratique révolue ou interdite. Pour eux, les résidus miniers sont systématiquement stockés dans des barrages, des digues — qui posent elles-mêmes de gros problèmes, mais passons. Or, non seulement cette pratique aux conséquences dramatiques existe bel et bien, mais elle est répandue et tout à fait légale ! Des dizaines d’opérateurs jugent plus simple de bazarder chaque année en pleine nature des millions de tonnes de boues acides et/ou fortement concentrées en métaux toxiques. Sur le site de Grasberg, en Indonésie (première mine d’or et troisième mine de cuivre au monde, en volumes produits), l’entreprise Freeport déverse chaque année 87,6 millions de tonnes de résidus chargés en plomb et en arsenic dans le fleuve Ajkwa.
Sites miniers concernés par des déversements volontaires en milieux aquatiques identifiés par SystExt et volumes de déchets déversés annuellement. Rapport SystExt/octobre 2021/CC BY-SA-NC 3.0
Nous nous attaquons à d’autres idées reçues : la croyance que les impacts de l’industrie minière seraient bien plus importants dans les pays en voie de développement que dans les pays développés. On pense que si les mines polluent et sacrifient des vies humaines, c’est parce qu’elles se situent dans des pays où la réglementation est peu exigeante. C’est faux.
D’une part, l’exploitation minière demeure le secteur d’emploi le plus dangereux si l’on tient compte du nombre de personnes exposées au risque, y compris aux États-Unis et en Europe. D’autre part, les méthodes d’extraction et de traitement sont les mêmes partout. Que l’on soit aux États-Unis, au Pérou ou en République démocratique du Congo (RDC), pour extraire 10 kg de cuivre, il faudra broyer et réduire en poudre 1 tonne de roche, puis la traiter aux xanthates (hydrocarbures). En quelques années, vous aurez obtenu un lac de résidus toxiques qui resteront dangereux entre 5 000 à 10 000 ans et qu’il faudra confiner tant bien que mal. Vous aurez nécessairement des fonderies, qui dégageront du dioxyde de soufre, et donc amplifieront les pluies acides et la pollution de l’air.
La mine de cuivre de Palabora (Afrique du Sud) : à gauche, la représentation imagée de la quantité de cuivre métal produite par la mine jusqu’à environ 2007 ; à droite, l’emprise en surface des déchets miniers en vue satellitaire. © Dillon Marsh/Google 2021/Création SystExt/septembre 2021
Pourquoi vous a-t-il paru urgent « d’en finir avec certaines contre-vérités sur les mines et les filières minérales » ?
Nous constatons avec nos équipes que le niveau général de connaissance sur le fonctionnement réel des mines et des industries métallurgiques est très faible, à la fois dans le grand public, mais aussi chez les responsables politiques et institutionnels. C’est déjà très préoccupant, étant donné que toutes les marchandises qui nous entourent contiennent des métaux, depuis les pigments présents sur les emballages, le dioxyde de titane dans les dentifrices, jusqu’à la soixantaine de métaux différents dans un smartphone.
C’est d’autant plus grave que l’accélération de la numérisation, l’industrialisation des pays du Sud et la transition énergétique telle qu’elle est promue aujourd’hui (par exemple les véhicules électriques) risquent d’induire une multiplication par au moins trois de la production de métaux dans le monde ces prochaines décennies. Cela signifie produire dans les seules trente-cinq prochaines années plus de métaux qu’il n’en a été extrait dans toute l’histoire de l’humanité. Impensable !
« Le “foudroyage par blocs” provoque des séismes et des effondrements incontrôlables. »
Sur cette industrie qui risque d’être l’un des enjeux majeurs — et des problèmes majeurs — du XXIe siècle, tout se passe comme si nous étions directement passés de la non-information à la désinformation. Jusqu’à la fin des années 2000, les mines n’existaient quasiment pas dans l’espace public. Maintenant que l’on commence à s’y intéresser, les filières minérales sont recouvertes de discours-écrans qui en masquent le fonctionnement et les impacts réels. Une foule d’éléments de langage à connotation positive sont apparus dans les rapports pour justifier l’accroissement de ce secteur : « mine durable », « meilleures pratiques », « techniques révolutionnaires », etc. Nous voulions faire comprendre ce qu’elles recouvrent.
Par exemple, quand on passe en revue les « techniques révolutionnaires » vantées par les opérateurs, on constate que les pratiques récentes sont encore plus destructrices et moins maîtrisées que les précédentes. Ainsi, le « foudroyage par blocs », qui consiste à dynamiter massivement le sous-sol, provoque des séismes et des effondrements incontrôlables. La « lixiviation en tas », elle, vise à se débarrasser tout bonnement de l’usine de traitement du site minier en traitant chimiquement la roche en plein air, à grande échelle. On déverse directement des millions de litres d’agent extractif sur la montagne de roches broyées dont on veut extraire les minéraux. Cela revient à asperger une colline de 200 mètres de haut de cyanure ou d’acide sulfurique. Ces « techniques révolutionnaires » servent à exploiter des gisements à très faible teneur avec des coûts très bas.
Usine de traitement de nickel de Doniambo, en Nouvelle-Calédonie. Flickr/CC BY-NC-ND 2.0/Tim Waters
Pourquoi faites-vous très peu de recommandations dans ce rapport pour améliorer cet état des lieux ?
Il nous aurait fallu des milliers de pages pour formuler des propositions précises : le champ est immense, les filières minérales sont diverses et chacune se caractérise par des dizaines d’étapes de production, du forage au raffinage des métaux. Nous nous limitons à deux recommandations urgentes. L’une est, évidemment, l’interdiction du déversement volontaire de déchets miniers dans les milieux aquatiques. L’autre est l’interdiction de toute exploration ou exploitation minière des grands fonds marins.
« En l’état, l’industrie minérale ne peut qu’augmenter ses impacts. »
Le 12 octobre dernier, Emmanuel Macron s’est prononcé en faveur de leur exploration, qualifiée de « levier extraordinaire de compréhension du vivant, peut-être d’accès à certains métaux rares ». Des centaines de rapports scientifiques montrent déjà qu’il est impossible de mener ne serait-ce que de l’exploration à 2 ou 3 kilomètres de profondeur sans causer de dommages graves et irréversibles : intoxication des planctons et des espèces marines par la mise en solution des métaux présents, perturbation lumineuse et sonore, etc. Ici, la « compréhension du vivant » est incompatible avec l’activité minière : nous détruirions ces milieux avant même de les connaître. C’est pourquoi nous argumentons en faveur d’une interdiction pure et simple, et non pour un moratoire qui laisserait cette possibilité ouverte. Nous avons de bonnes raisons de craindre que l’explosion de la demande en métaux dans les années à venir ne laisse pas indemnes les ultimes barrières morales que nos sociétés tentent de se fixer.
Fumeur noir à 3 000 m de profondeur, au niveau de la dorsale médio-atlantique. MARUM − Zentrum für Marine Umweltwissenschaften, Universität Bremen · 2015 · cc by 4.0
Enfin, au-delà de l’amélioration des pratiques, il faut bien voir qu’en l’état, l’industrie minérale ne peut qu’augmenter ses impacts : en exploitant des gisements dont la concentration minérale est de plus en plus faible, nous utilisons de plus en plus d’énergie et générons des volumes de déchets toxiques de plus en plus ingérables, quelles que soient les techniques utilisées. La seule issue ne peut être que de limiter les volumes extraits.
Déchets électroniques dans une installation de traitement à Kigali (Rwanda), en 2017. Flickr/CC BY-ND 2.0/Rwanda Green Fund
Des politiques de recyclage ambitieuses pourraient-elles réduire ces problèmes ?
Oui, c’est incontournable. Les métaux recyclés seraient largement compétitifs par rapport aux métaux issus de l’extraction si les opérateurs miniers payaient le coût social et environnemental de leur activité, qui est exorbitant. Mais le recyclage est quasiment impossible quand les métaux sont utilisés de manière dispersive, comme dans l’électronique. Et il ne suffirait pas à satisfaire la demande, qui est exponentielle. Il faut donc changer notre rapport aux matières premières minérales, et cela doit passer par une transformation radicale du mode de vie des pays dits « développés ».
C’est maintenant que tout se joue.
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Vaccinés/Non vaccinés
- Par Thierry LEDRU
- Le 25/01/2022
Cette scission, cette distinction, cette opposition, c'est encore et toujours l'ego encapsulé. Le fonctionnement terriblement puissant du jeu des étiquettes.
"Tu es dans ce groupe, moi je suis dans celui-là. Et le mien est meilleur que le tien. " - N'importe quoi, c'est évident que tes arguments ne tiennent pas la route. -Ah,bon, et tu peux me dire pour quelles raisons ? "etc etc etc
Les influences subies, les manipulations, les conditionnements, les formatages, les prétentions, les certitudes, les idées figées, l'absence de lucidité, l'adhésion à la masse ou la rébellion contre le nombre, tout ça n'est qu'un vaste fatras conçu et entretenu par l'ego. Le positionnement d'un côté ou d'un autre n'est bien souvent qu'une recherche d'appartenance, la quête frénétique de l'individu qui ne veut pas être esseulé, qui a intellectuellement besoin d'être reconnu en tant que tel, un vacciné ou un non vacciné, de gauche ou de droite ou dans les extrêmes, un athée ou un croyant, un agnostique ou un panthéiste, un bouddhiste ou un musulman, un vegan ou un omnivore, un spéciste ou un anti-spéciste etc etc etc.
Nous sommes sans cesse amenés à nous positionner et dès lors à défendre nos positions comme si notre existence même en dépendait.
Je trouve assez déprimant que ce besoin d'étiquettes soit encore présent quand il s'agit d'une démarche spirituelle et finalement, ça me laisse penser que ce moi dérivé qui a besoin de s'identifier exerce toujours son influence, même au cœur de cette sphère spirituelle qui se devrait d'être détachée de ces appartenances limitatives.
Je ne suis pas bouddhiste. Il n'y a que Bouddha qui l'était.
À la limite, je pourrais dire que je suis "ledruiste" mais ça serait encore plus ridicule.
Je ne suis rien qui puisse exercer sur moi un signe d'appartenance ou d'adhésion pleine et entière.
Je ne suis pas Français, je suis né sur un bout de terre que des hommes ont nommé France.
Je n'étais pas instituteur, j'exerçais le métier d'instituteur.
Je ne suis pas écrivain, j'aime écrire.
Je ne suis pas un humain, je suis une forme de la vie qui s'est attribuée le nom d'humain.
Mais tout ce fatras ne fait pas de moi autre chose que ce que la vie est en moi. Elle existe et le nom prise par la forme n'est pas l'énergie qui s'y trouve.
Tant que les humains s'égareront dans ce genre de limitations, il n'y aura aucun changement possible. On sera toujours dans ce registre du moi qui cherche à exister à travers des illusions dérisoires et éphémères.
Et il y a des jours où cette immobilité spirituelle me désespère. Cette impression que le progrès matérialiste, scientifique, social, technologique a usé de toute l'énergie disponible et que l'évolution spirituelle s'est trouvée vidée de tout. Une vieille peau abandonnée, flétrie, pourrie, liquéfiée, cadenassée par l'ego.
Même ceux et celles qui se sont intéressés à cet espace spirituel, se sont dit que ça serait bien qu'ils se retrouvent ensemble pour en discuter, se reconnaître, comparer, débattre, tenter de s'élever un peu de la masse qui s'étend, s'étend...Et au fil des rencontres, ils ont créé des groupes pour pouvoir se positionner vis à vis des groupes qu'ils critiquaient.
Quelle misère, quelle épouvantable misère...
Nous serons sans doute réellement des êtes spirituels le jour où nous n'éprouverons plus le besoin d'identifier une différence entre nous, ni même une différence entre l'ensemble des êtres vivants, le jour où il n'y aura plus de conflits entre vaccinés et non-vaccinés, entre gauche et droite, entre blancs, noirs, gris, jaunes ou violets, entre les méchants loups et les gentils chiens, entre les vilains virus et les bons, entre la vie et la mort. Le jour en fait, où nous n'aurons rien d'autre à l'esprit que la paix.
Oui, je sais, c'est totalement utopique. L'humain est un être fondamentalement conflictuel.
Pour une seule raison : il est seul dans son monde intérieur et a absolument besoin de combler ce vide par des adhésions multiples.
Parfois, je me dis que celui qui ne connaît pas les noms des plantes, des arbres, des animaux, qui ne connaît rien à la science dans les livres, qui n'a aucune idée de tous les pays du monde, qui ne sait rien de la vie des gens à l'autre bout de la planète, qui ne connaît pas le nom des étoiles, ni des océans, ni des fleuves, ni des mégapoles, mais qui vit sereinement avec les plantes de son potager, avec les arbres qui l'entourent, avec les animaux qu'il voit parfois, qui aime s'asseoir sous les cieux étoilés et contempler, qui prend soin du ruisseau qui passe près de son lieu de vie, qui n'abîme rien et se montre infiniment respectueux de la vie, celui-là en sait beaucoup.
J'essaie parfois d'identifier les connaissances qui me sont utiles, réellement utiles, non pas dans le registre de l'accumulation mais dans l'agir, des savoirs qui sont par conséquent immédiatement exploitables, dans ma vie quotidienne. Je réalise alors l'incroyable masse de connaissances qui ne sont rien d'autres que des savoirs intellectuels et qui ne me sont d'acune utilité. Et je ne dis pas ça en m'octroyant un quelconque titre de savant, bien au contraire. Je ne sais au final pas grand-chose d'utile au regard de tout ce que je pense savoir. Et à 60 ans, c'est loin d'être glorieux. Il y a d'ailleurs dans toutes les fenêtres médiatiques que nous ouvrons constamment sur le monde une forme d'empêchement à apprendre ce qui nous serait utile. C'est pour ça que parfois, lorsque vraiment, je n'en peux plus de ce chaos, je ferme toutes les fenêtres et je vais m'assoir dans l'herbe.
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Scission populaire
- Par Thierry LEDRU
- Le 24/01/2022
Dans le petit village à quelques kilomètres de la maison, il y a une bibliothèque, dépendante de la médiathèque de Guéret.
N'étant pas vaccinés, nous n'avons pas le droit d'entrer dans le local.
Depuis plusieurs mois que nous y allons, nous avons dû croiser cinq adhérents.
Les deux dames responsables de la bibliothèque nous passent par la fenêtre les livres que nous avons réservés. Elles en sont très gênées.
Par contre, quand nous allons à Guéret dans le magasin de bricolage, on entre bien évidemment sans problème.
Serait-ce donc que la culture est sans importance pour qu'elle puisse ainsi être limitée ?
J'ai eu le malheur d'évoquer le sujet sur les réseaux de France info et je me suis fait "incendier" :
"T'as qu'à faire ta piqûre, espèce de danger public".
"Tu n'as que ce que tu mérites."
"On s'en fout de ton problème de bouquins, c'est secondaire."
"C'est à cause d'irresponsables comme toi que cette pandémie est toujours là."
Juste un aperçu.
Il est clair aujourd'hui que les scissions dans la population sont très fortes.
Quand j'étais plus jeune, les discussions qui pouvaient mener à des conflits tournaient principalement autour de la politique, droite-gauche, machin contre trucmuche, etc etc. Désormais, c'est vaccinés et non vaccinés. Mais, en fait, quand on y réfléchit un peu, il s'agit toujours de politique.
Plus de 600 artistes et professionnels de la culture s’opposent à la dérive autoritaire en cours
Plus de 600 artistes et professionnels de la culture s’opposent à la dérive autoritaire en cours
"Comment ne pas se souvenir qu’à chaque fois qu’un État a souhaité stigmatiser et attaquer une partie de sa population, le totalitarisme est alors sorti de l’ombre ?"
18 janvier 2022 - La Relève et La Peste
Générations, notre nouveau livre qui marque dans le temps l’esprit d’une génération qui se bat pour préserver notre monde
- Thème : Changements climatiques, répression policière, inégalités, agroécologie, politique, féminisme, nature…
- Format : 290 pages
- Impression : France
L’appel à sortir du silence lancé par des bibliothécaires le 14 janvier dernier semble avoir été entendu. Plus de 600 artistes et professionnels du secteur culturel (dont nombre d’acteurs du livre) s’associent pour dénoncer une politique « dangereuse » et stigmatisante, et appellent le plus grand nombre à refuser un projet de société discriminant et autoritaire.
Nous ne sommes toujours pas dupes !
Depuis le mois de juillet 2021 et la mise en place d’un pass dans des lieux du quotidien (malgré les promesses faites au printemps que cela n’arriverait jamais), le gouvernement mène une dangereuse politique de ségrégation à l’encontre d’une partie de la population.
Un grand nombre de citoyennes et de citoyens s’est brutalement vu privé de droits élémentaires et ce dès l’âge de 12 ans. Avec la mise en place du pass vaccinal, l’accès aux loisirs et à la culture est désormais interdit à plusieurs millions de personnes, devenues des parias. Des lieux, pourtant essentiels aux plus modestes, aux plus isolés, pour accéder à l’information, à la culture, au sport, au lien social, ferment à présent complètement leurs portes aux « sans pass ».
Même l’accès équitable aux soins est remis en cause, ce qui est sans doute le plus grave.
Qui n’a pas encore en tête ces déclarations de ministres, d’élus et d’éditorialistes aussi méprisants que méprisables?
« Rendre la vie impossible aux non-vaccinés », « Il faut aller les chercher avec les dents et avec les menottes », « les personnes qui refusent le vaccin, ces jusqu’au-boutistes, sont une faille dans notre système », « faire porter le poids des restrictions aux non-vaccinés », « les non-vaccinés nous pourrissent la vie », « une minorité de connards »etc…
Des propos outrageants et discriminants qui ont largement trouvé écho auprès des médias.
Ces stigmatisations atteignent un point culminant lorsque le Président de la République déclare : « Les non-vaccinés, j’ai très envie de les emmerder. Et donc on va continuer de le faire jusqu’au bout, c’est ça la stratégie ! »
Lire aussi : Pour la CNIL, le pass sanitaire brise le secret médical et banalise le contrôle de la population
Il va même jusqu’à ajouter qu’un « irresponsable n’est plus un citoyen ». Il dresse ici un mur entre les Français et les Françaises, désigne des coupables, et appelle ni plus ni moins à la déchéance de citoyenneté pour ceux qu’il accuse de « saper la solidité d’une nation » et d’incarner « le mensonge et la bêtise, qui sont les pires ennemis en démocratie ».
Le « Nous sommes en guerre » semble aujourd’hui prendre un nouveau sens, celui d’une incitation à la haine.
En mai 2019, face au traitement médiatique du mouvement des Gilets jaunes et à la répression inouïe qui s’exerçait sur les manifestants, nous étions nombreux et nombreuses à affirmer que nous n’étions pas dupes dans une tribune parue dans Libération
Aujourd’hui, le gouvernement cherche à désigner des boucs émissaires dans la population alors qu’il se défausse systématiquement de toutes ses responsabilités dans la gestion de la crise. Dans le même temps, il orchestre la casse de l’hôpital public depuis des années en plus de la fermeture de lits en pleine crise.
Crédit : Les Essentiels.org
Nous ne sommes toujours pas dupes. La dérive autoritaire se poursuit et se démasque de plus en plus.
Le pass est avant tout un outil puissant de division, de discrimination de la population, de stratification de la société. C’est une véritable porte ouverte vers le contrôle social d’État et entre les individus.
Aujourd’hui, le statut vaccinal comme marqueur de citoyenneté. Et demain ?
Aujourd’hui, l’exclusion sociale, culturelle et sanitaire comme mesure répressive. Et demain ?
Comment ne pas se souvenir qu’à chaque fois qu’un État a souhaité stigmatiser et attaquer une partie de sa population, le totalitarisme est alors sorti de l’ombre ?
Le gouvernement bafoue actuellement la Constitution française, le secret médical, le serment d’Hippocrate, la loi Kouchner dans le but d’imposer son « obligation vaccinale déguisée ».
Il trahit la Déclaration universelle des droits de l’Homme et du citoyen qui stipule que :
« Les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits » et que « tout ce qui n’est pas défendu par la Loi ne peut être empêché, et nul ne peut être contraint à faire ce qu’elle n’ordonne pas ».
Il va même totalement à l’encontre de la Résolution 2361 du parlement européen votée par la France le 27 janvier 2021 qui prévoit « de s’assurer que les citoyens et citoyennes sont informés que la vaccination n’est pas obligatoire et que personne ne subit de pressions politiques, sociales ou autres pour se faire vacciner, s’il ou elle ne souhaite pas le faire personnellement » et « de veiller à ce que personne ne soit victime de discrimination pour ne pas être vacciné, en raison de risques potentiels pour la santé ou pour ne pas vouloir se faire vacciner. »
Nous refusons d’être désignés comme « vaccinés » ou « non vaccinés » et d’être poussés au rejet de l’autre.
Nous ne voulons être ni les actrices ou acteurs, ni les complices de ce séparatisme forcé.
Nous, artistes, professionnelles et professionnels, actrices et acteurs de la culture, sommes révoltés par la répression, la manipulation et l’idéologie de ce gouvernement. C’est un moment charnière de notre histoire.
Utilisons notre pouvoir, celui des mots, de la parole, de la musique, de l’image, de la pensée, de l’art, pour dire non à ce projet de société. Nous appelons toutes et tous à entrer en résistance face à ce discours de haine et de division et à être solidaires pour que « liberté égalité fraternité » ait encore un sens.
Les sous-marins jaunes (collectif.yellow.submarine@gmail.com)
Avec le soutien du collectif Lesessentiels.orgCrédit photo couv : Alain Pitton / NurPhoto / NurPhoto via AFP
Premiers signataires :
Corinne Masiero, comédienne
Dominique A, chanteur
Alexandre Jardin, écrivain
Edmond Baudoin, auteur-dessinateur
Alain Damasio, écrivain
Bruno Podalydès, réalisateur
Antoine Peillon, journaliste, écrivain
Anny Duperey, comédienne, écrivaine, photographe
Swann Arlaud, comédien
Anne Alvaro, comédienne
Ludovic Bource, compositeur
Christophe Alévêque, humoriste, chroniqueur
Marion Mazauric, éditrice
Inès Léraud, journaliste, documentariste
Elodie Menan, comédienne
Ilya Green, autrice-illustratrice
Bernard Friot, auteur, traducteur
Yvan Le Bolloc’h, comédien musicien
Laëtitia Carton, réalisatrice
Agathe Girard, violoniste
Grégoire Girard, violoniste
Hughes Girard, altiste
Lucie Girard, violoncelliste
Marie-Rose Guarnieri, libraire (librairie Les Abbesses, Paris)
Jean-Marc Rochette, auteur-dessinateur
Laurent Bonneau, auteur bd
Germano Zullo, écrivain
Flore Vesco, autrice
Thea Rojzman, scénariste BD
Alain Marc, poète et écrivain
Emile Jadoul, auteur-illustrateur
Antoine Guilloppé, auteur-illustrateur
Isabelle Merlet, coloriste
Jérôme Jouvray, auteur de BD
Olivier Jouvray, scénariste, professeur et éditeur de bandes dessinées
Florence Dupré la Tour, autrice de bande dessinée
Abdourahman Waberi, écrivain et enseignant
Albertine, dessinatrice
Bruno Gaccio, auteur, comédien, producteur
Lionel Chouin, auteur BD
Aya Cissoko, autrice, actrice, championne de boxe
Benjamin Flao, auteur-dessinateur
Christos, auteur
HK, chanteur
Viktor Coup-K, artiste, rappeur
Brigitte Giraud, écrivaine
Alexandre Bergamini, écrivain
Simonetta Greggio, écrivain
Veronique Genest, comédienne
Xavier Laîné, écrivain
Eric Pessan, auteur
Ohazar, auteur BD
Julien Seri, réalisateur
Nina Mélo, actrice
Guillaume Farley, auteur, compositeur, interprète
Joanna Concejo, autrice-illustratrice
Matthieu Maudet, auteur-illustrateur
Michaël Escoffier, auteur-illustrateur
Karine Dubernet, comédienne-auteur
Christophe Léon, auteur
Hélène Vignal, auteure
Martine Bourre, autrice-illustratrice
Jo Witek, auteure
Marin Ledun, auteur
Bruno Heitz, auteur-illustrateur
Frédéric Sther, auteur-illustrateur
Marc Boutavant, auteur-illustrateur
Alain Frappier, dessinateur
Désirée Frappier, scénariste
Jean-Christophe Menu, auteur
Camille Jourdy, autrice-illusratrice
Serge Quadruppani, auteur, traducteur, journaliste
Pascal Dessaint, auteur
Négar Djavadi, auteur-scénariste
Mathilde Domecq, autrice BD
Yamina Benahmed Daho, écrivaine
Isabelle Simler, auteur-illustratrice
Antoine Gavory, écrivain
Sophie Guerrive, autrice-illustratrice
Lætitia Bourget, plasticienne et actrice jeunesse
Anaïs Vaugelade, autrice-illustratrice
Kalune, artiste
Kitty Crowther, autrice-illustratrice
Praline Gay-Para, conteuse, auteure
Natalie Tual, autrice-compositrice
Aurélien Maury, auteur-dessinateur
Benoît Broyard, auteur-dessinateur
Ghislaine Herbéra, autrice-illustratrice
Ingrid Chabbert, scénariste
Thibault Balahy, auteur de BD
Alexis Vitrebert, scénariste-dessinateur
Aude Picault, scénariste-dessinatrice
Natacha Thiéry, enseignante-chercheuse, cinéaste
Lucie Cauwe, journaliste, critique littérairePour voir les 600 signataires de cette tribune et la signer, cliquez sur ce lien https://lesessentiels.org/tribune-des-sous-marins-jaunes/
18 janvier 2022 - La Relève et La Peste