Je ne m'attendais pas à autant de plaisir dans un roman d'aventures, hors de ma zone de confort …
En 1885, le Territoire de l'Alaska est rattaché aux États Unis depuis 20 ans mais est encore à découvrir et à cartographier. L'expédition du Lt Cl Allen Forrester part pour de longs mois vers le nord, remontant un fleuve encore inexploré en terres indiennes, dans des conditions extrêmes face au climat et aux dangers d'une nature vierge et chaotique. Le militaire laisse derrière lui Sophie, une jeune épouse enceinte, qui va devoir vivre avec l'inquiétude et la solitude due à l'absence. Et contre toute attente, son quotidien va apparaître au lecteur tout aussi passionnant que les exploits de son mari, par son désir de modernité et par son travail de photographe ornithologue. Pour nourrir ce récit inspiré d'une véritable expédition géographique, Eowyn Ivey en fait un montage narratif passionnant, associant des chapitres courts à des cartes, photos, et documents de recherche. Les deux journaux parallèles des époux Forrester illustrent une époque et une société corsetée pour les femmes quand les hommes font face à des dangers qui les dépassent. le tout reste pour autant un roman, avec des personnages forts, avant-gardistes et solidement construits, un réalisme à couper le souffle et une certaine forme de magie du monde. Une bien belle histoire d'hommes dans les terres inhospitalières de l'Alaska du 19e siècle. |
"Au bord de la terre glacée"
- Par Thierry LEDRU
- Le 01/11/2020
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Il y a quelques livres qui m'auront marqué cette année et celui-là en fait partie.
C'est magnifiquement bien écrit, c'est très prenant, très bien documenté et ça m'a renvoyé à toutes mes lectures d'adolescent lorsque je dévorais tous les récits vécus d'expéditions.
La description de la vie des femmes de la bourgeoisie et le caractère atypique de la femme du militaire, déterminée à ne pas perdre de vue ses rêves, ses désirs et ses passions, malgré le regard et les jugements de ses "amies", les effets annoncés de la confrontation des Occidentaux, avides d'aventures et de richesses et les peuples autochtones, la distance immense entre les cultures, des phénomènes inexpliqués qui relèvent du chamanisme et qui sont si bien intégrés à l'histoire qu'on ne se pose pas la question de leur véracité, c'est une Terre qui se prête à ce genre de choses...
J'ai toujours éprouvé une certaine déception de ne pas avoir vécu à ces époques de découvertes de la planète.
Je suis né dans un monde déjà cartographié, géographiquement mais également socialement. Existait-il une réelle liberté à ce que je trace ma propre voie, ma propre exploration ? Il aurait fallu que je me rebelle à dix ans...Et je n'en éprouvais aucunement le besoin. J'ai fait ma scolarité avec en tête que c'était pour avoir un travail, que j'aurai une femme et des enfants et puis une maison...
J'aurais pu aussi décider d'aller vivre dans les forêts du nord Canada mais il aurait fallu que je découvre les livres des explorateurs encore plus tôt. Il y a aussi un manque de courage évident au regard de tout ça. J'ai choisi sans vraiment la choisir ce qui semblait être une "voie royale". Très loin de celle d'André Malraux.
624 pages
Éditeur : 10-18 (14/11/2019)
Note moyenne : 5 (sur 46 notes) /
J'avais beaucoup aimé la fille de l'hiver, et je renouvelle mon plaisir avec ce deuxième roman. L'ambiance est tout aussi glaciale, et les paysages aussi grandiose.
C'est un livre intéressant de par sa construction, la diversité du genre : épistolaire notamment donne un rythme et des échanges entre les personnages, le côté journal intime aussi amène une originalité dans le récit enrichi par des photographies ou croquis. C'est varié et on ne s'ennuie pas une minute à suivre cette troupe en exploration en Alaska. Puis la vie de l'épouse restée à demeure qui elle explore la nature et s'intéresse ornithologie et à la photographie. On parcourt divers lieux et peuple indien , bien sûr le chamanisme règne en maître. Un bon gros pavé qui nous tient à l'affût de toutes les descriptions, et informations de l'époque qui se situe à la fin du XIX siècle. De plus, nous avons l'échange de 2 personnages, sur l'étude de l'ensemble des documents retrouvés et mis au jour qui fait donc l'objet de ce roman. Original, intéressant et bien écrit, un très bon moment de lecture. |
Alaska – 1885
Ce roman alterne entre le journal du Colonel Forrester en expédition pour cartographier l'Alaska en particulier la Rivière Wolverine et celui de son épouse, Sophie, qui elle, est restée (enceinte) à Vancouver. Sophie est passionnée d'ornithologie ; elle aime également dessiner les oiseaux et devient peu à peu férue de photographie. Ce parallèle, sur une année de séparation, entre les deux trajectoires des époux est pour moi la force de ce livre, qui sait renouveler ainsi l'intérêt : sans les sentiments de Sophie, les aventures d'Allen en territoire inconnu seraient bien fades et inversement sans Allen, les tentatives de Sophie de capter la lumière et les oiseaux lors de séances photos auraient moins d'intérêt. Pour relier le tout, ce roman fait également état de la correspondance de deux hommes : le premier est l'arrière-petit-neveu d'Allen et Sophie. le deuxième est le conservateur du musée à qui le premier a envoyé les journaux intimes de ces deux aïeux. Plus d'un siècle plus tard, Sophie et Allen semblent revivre dans cet échange épistolaire… Il y a d'un côté les rapports officiels du Colonel Forrester pour sa hiérarchie et de l'autre des carnets plus personnels empreints de réalisme magique et de légendes indiennes Midnouskis dans cette contrée âpre et sauvage….J'ai particulièrement aimé l'histoire de la naissance de Moses Picéa… De nombreux croquis d'animaux et de cartes complète cette odyssée où j'ai appris (entre autre) que l''Alaska a été « racheté » par les USA à la Russie en 1867. |
C'est la couverture du livre qui m'a attirée, cet oiseau semblant foncer sur sa proie et ce paysage glacial en arrière-plan. Je me suis dit que j'allais voyager. Et effectivement, le roman mêle le journal du colonel Allen Forrester qui doit s'aventurer dans des territoires encore mal connus de l'Alaska et celui de son épouse, enceinte, qu'il a dû laisser derrière lui, dans sa garnison. J'ai préféré d'ailleurs les passages consacrés au colonel, non pas que la vie de Sophie soit inintéressante mais je ne suis pas une passionnée ni des photos ni des oiseaux et j'ai eu un peu de mal à m'enthousiasmer sur les heures qu'elle passe à photographier le moment où un oiseau prend son envol.
Ce que vit son mari, par contre, m'a passionnée. Quand il suit la Wolwerine River pour en cartographier les abords, quand il traverse des territoires encore vierges de la présence des « blancs », on a l'impression d'être avec lui, marchant des jours durant parfois avec entêtement, malgré la fatigue et souvent la faim qui creuse son estomac, sans savoir exactement quel est le but de cette expédition. La nature qu'il traverse est sauvage, violente et cruelle pour la mission qu'il conduit et il manque plusieurs fois d'être anéantis lui et ses hommes : emportés par les courants trop forts, égarés dans la montagne, assaillis par des êtres fantomatiques ou bien est-ce une hallucination ? Au bout de sa mission, le colonel Forrester retrouve sa femme mais restera marqué à jamais par ce voyage « au bord de la terre glacée ». Je mets 4 chats pour ce souffle épique venu d'Alaska. Lien : HTTPS://LABIBDENEKO.BLOGSPOT.. |
1885. le lieutenant-colonel Allen Forrester est chargé de mener une expédition de reconnaissance en Alaska le long de la rivière Wolverine afin de cartographier le territoire et de recueillir des renseignements concernant les tribus indigènes. Accompagné des soldats Pruitt et Tillman, d'un trappeur et de guides indiens, le lieutenant a laissé au fort son épouse Sophie, sans savoir qu'elle est enceinte.
Le texte inclut cartes, dessins, photos de paysages et images d'objets de l'époque. L'histoire se découvre à la lecture, en parallèle, des carnets d'Allen, du journal intime de Sophie et des échanges épistolaires d'un de leurs descendants et d'un conservateur de musée. C'est un vrai récit d'aventure à l'ancienne qui mêle la grande aventure du lieutenant-colonel et l'aventure intime de Sophie. le premier défriche une terre vierge de la présence de l'homme blanc, conscient que si sa mission se réalise, elle ouvrira la porte à une colonisation de masse où les indiens ont forcément tout à perdre. de son côté sa femme aspire à briser le carcan d'une société patriarcale pour gagner une forme d'autonomie et de liberté à travers sa passion pour la photographie. C'est une superbe histoire d'amour et un hymne à la beauté de la nature sauvage qui invite à la contemplation tout en dressant le portrait d'un couple soudé malgré l'éloignement. Il y a également une surprenante dimension fantastique, étroitement liée aux croyances autochtones. C'est ainsi que l'on voit un enfant naître dans le creux d'un épicéa, que l'on retrouve les soldats aux prises avec un monstre lacustre, que des femmes se métamorphosent en oies ou que des fantômes hantent la montagne chaque nuit. Ce mélange entre fantastique et réalité, entre pragmatisme des explorateurs et légendes indiennes ne sonne jamais faux et fonctionne au final à merveille. Un pavé très « romanesque », traversé par le souffle d'une épopée digne des grands pionniers de l'Amérique. Lien : HTTP://LITTERATURE-A-BLOG.BL.. |
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