Les pesticides et les frontières
- Par Thierry LEDRU
- Le 29/01/2020
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Je pourrais mettre sur ce blog des dizaines d'articles par semaine...Je fais beaucoup de recherches...
Des dizaines d'articles qui rendent compte de la folie de ce monde moderne.
De notre impuissance.
De notre empoisonnement.
De notre insignifiance face à la puissance des marchands.
De notre lâcheté aussi devant cette habitude à ne plus pouvoir concevoir la moindre révolte individuelle, le moindre combat, le moindre engagement. Comme si tout cela relevait désormais d'une falatité épouvantable, inéluctable, d'un cauchemar dont nous ne pourrons plus jamais nous réveiller.
Interdit dans huit pays européens, le pesticide chlorpyrifos traverse les frontières Le chlorpyrifos, neurotoxique et perturbateur endocrinien, est toujours présent dans les produits alimentaires importés en France.
Par Stéphane Horel Publié le 17 juin 2019 à 00h45 - Mis à jour le 17 juin 2019 à 14h46
La libre circulation des marchandises en Europe comporte quelques désagréments. Les résidus de pesticides peuvent voyager à bord de fruits, légumes et autres aliments jusqu’aux pays où ils sont pourtant interdits, et aux organismes de leurs habitants. C’est le cas du chlorpyrifos.
Lire notre enquête : Les dangers ignorés du chlorpyrifos, pesticide toxique
Dans l’Union européenne (UE), huit pays interdisent l’insecticide pour tous ses usages (Allemagne, Danemark, Finlande, Irlande, Lettonie, Lituanie, Slovénie, Suède). Depuis 2016, la France ne le tolère plus que pour la culture d’un seul légume, les épinards, qui bénéficient d’une exception à la suite d’une évaluation de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail qui a conclu à une absence d’effets nocifs dans les conditions d’usage. Cette année-là, il s’en était vendu plus de 156 tonnes dans le pays sous la forme d’une quarantaine de produits commerciaux portant les noms de Kregan, Nelpon ou encore Pyrinex, selon les données du ministère de l’agriculture.
En 2013, par exemple, une étude menée en Suède a détecté la présence de chlorpyrifos dans les urines de femmes âgées de plus de 40 ans alors que l’insecticide n’a jamais été homologué pour un usage agricole dans le pays. Au Danemark, où l’usage du chlorpyrifos est très restreint, plus de 140 « couples » d’écoliers et leurs mères ont participé à un projet de recherche européen de biosurveillance, Democophes. Les urines de la quasi-totalité d’entre eux contenaient des traces d’organophosphorés, de la famille du chlorpyrifos.
Chaque année, dans toute l’UE, les autorités nationales effectuent des tests aléatoires sur des échantillons d’aliments. Le chlorpyrifos figure parmi les pesticides les plus détectés. C’était aussi le pesticide perturbateur endocrinien le plus présent sur les fruits et légumes testés en 2015, selon un rapport de l’ONG Pesticide Action Network (PAN Europe) à partir de ces données officielles centralisées par l’Autorité européenne de sécurité alimentaire (EFSA).
Le chlorpyrifos, insecticide toxique, reçoit un avis négatif de l’Agence européenne pour la sécurité des aliments L’exposition à ce pesticide pendant la grossesse ou lors des premiers mois de l’enfant est associée à des déficits de QI ou à un retard de développement mental.
Le Monde avec AFP Publié hier à 15h47, mis à jour hier à 16h55
Lecture 2 min.
Un pas vers un retrait du marché ? L’Agence européenne pour la sécurité des aliments (EFSA) estime vendredi 2 août que le chlorpyrifos, un insecticide dont les effets nocifs ont été prouvés par des études scientifiques, ne remplit pas les critères pour que son autorisation soit renouvelée dans l’Union européenne (UE).
Au mois de juin, Le Monde et plusieurs journaux européens avaient publié une enquête sur la toxicité du chlorpyrifos, longtemps ignorée par l’UE.
Lire aussi Chlorpyrifos : les dangers ignorés d’un pesticide toxique
L’article relevait que les données scientifiques venant de plusieurs études de suivi des populations, menées aux Etats-Unis, se recoupaient. Elles montrent qu’une exposition au chlorpyrifos ou à ses cousins organophosphorés, avant la naissance ou dans les mois qui suivent, est associée à des déficits de QI, à un retard de développement mental, une mémoire de travail réduite, des troubles de déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité.
« Effets génotoxiques et neurologiques »
Le chlorpyrifos fait actuellement l’objet d’une évaluation scientifique menée par l’EFSA dans le cadre de sa demande de réautorisation – sa licence dans l’UE expire à la fin de janvier 2020. Si l’étude n’est pas tout à fait finalisée, l’EFSA affirme d’ores et déjà que la substance « ne répond pas aux critères requis par la législation pour le renouvellement de son autorisation dans l’Union européenne ». Selon nos informations publiées en juin, la Commission européenne s’apprête à proposer son retrait du marché.
La Commission européenne, qui chapeaute les comités d’experts chargés d’étudier les demandes d’autorisation en matière de pesticides, a demandé à l’EFSA de fournir une première évaluation des résultats disponibles en matière de santé humaine, explique l’agence.
« L’EFSA a identifié des problèmes sur de possibles effets génotoxiques ainsi que des effets neurologiques pendant le développement, soutenus par des données épidémiologiques indiquant des effets sur les enfants. Cela signifie qu’aucun niveau d’exposition sûr – ou de valeur de référence toxicologique – ne peut être fixé pour la substance. »
Déjà interdit dans certains pays de l’UE
Après la mise sur le marché de l’insecticide en 2005, dans le cadre d’une procédure différente, car l’EFSA n’en était alors qu’à ses débuts, l’agence européenne a effectué depuis plusieurs mises au point, en révélant certains risques et en abaissant les niveaux résiduels autorisés.
L’EFSA avait également indiqué à la mi-juin que son évaluation en cours inclurait une étude réalisée aux Etats-Unis et publiée en mars. Selon Le Monde, cette étude « montre une augmentation de la fréquence de l’autisme et de lésions cérébrales précoces chez des enfants exposés au chlorpyrifos avant et après la naissance ».
Huit pays de l’UE ont déjà interdit sur leur territoire des produits contenant du chlorpyrifos. Depuis 2016, la France ne permet plus qu’une exception, pour les épinards.
Pour être commercialisée dans l’UE, une substance doit être autorisée par un comité d’experts composé de représentants des Etats membres et présidé par la Commission européenne. Chaque pays est ensuite responsable d’autoriser au non les produits qui contiennent cette substance.
Chlorpyrifos : les dangers ignorés d’un pesticide toxique
Associé notamment à des déficits de QI chez l’enfant, l’insecticide est toujours autorisé malgré des études scientifiques accablantes. Son processus de renouvellement dans l’UE arrive à son terme.
Par Stéphane Horel Publié le 17 juin 2019 à 00h08 - Mis à jour le 17 juin 2019 à 09h40
Cultures de légumes à El Ejido, dans la province d'Almeria (Espagne), en juin 2017. Le chlorpyrifos y est couramment utilisé. MARCOS GARCIA REY
C’est une famille de pesticides qui vole en moyenne 2,5 points de quotient intellectuel (QI) à chaque enfant européen. Son principal représentant, comme beaucoup de produits chimiques, porte un nom compliqué qui lui garantit le confort d’un certain anonymat. Pourtant, il contamine notre vie quotidienne. D’abord pulvérisé sur les cultures pour éliminer pucerons ou chenilles, le chlorpyrifos poursuit son existence sous la forme de traces dans les oranges, les pommes, la laitue, l’urine des enfants et le cordon ombilical des femmes enceintes.
Au fil d’un demi-siècle de pulvérisation, les données scientifiques se sont accumulées sur les effets nocifs de cet insecticide. Censé remplacer le DDT et ses effets délétères en 1965, le produit de la firme américaine Dow endommage en fait le cerveau des enfants de manière irréversible.
Les éléments scientifiques sont désormais si accablants que, d’après les informations du Monde, la Commission européenne s’apprête à proposer son retrait du marché. Or, notre enquête démontre que les autorités ont mis près de vingt ans avant d’évaluer les données du fabricant. Des données qui, de plus, étaient erronées.
Huit pays européens n’autorisent pas, ou plus, le chlorpyrifos pour un usage agricole. Depuis 2016, la France ne permet plus qu’une exception pour les épinards. Une évaluation de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail a conclu à une absence d’effets nocifs dans les conditions d’usage. Mais l’exposition à l’insecticide ne s’arrête pas aux frontières : elle perdure par le biais des produits importés.
« Neurotoxique et perturbateur endocrinien »
« On peut se demander pourquoi il n’a pas déjà été interdit, déplore Barbara Demeneix, professeure de biologie au laboratoire Evolution des régulations endocriniennes (CNRS-Muséum national d’histoire naturelle) à Paris. Le chlorpyrifos est toxique pour le système nerveux central, c’est-à-dire neurotoxique, et c’est un perturbateur endocrinien qui agit notamment sur la signalisation thyroïdienne. Il peut donc interférer avec le développement du cerveau. »
Mis au point comme gaz innervant pendant la seconde guerre mondiale, les organophosphorés, dont fait partie le chlorpyrifos, ont ensuite été adaptés pour tuer les insectes à des doses plus économiques. Pour ce faire, ce dernier inhibe les circuits d’une enzyme qui dégrade un neurotransmetteur essentiel au bon fonctionnement du système nerveux central, l’acétylcholine. Or, de nombreux animaux sont également équipés de ce circuit. Parmi eux : les êtres humains...
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