Préparation de classe

Demain matin.

Les élèves entrent en classe. 

Ils ne sortent aucune affaire. C'est toujours comme ça. Un rituel.

Une fois que le silence sera installé et qu'ils seront prêts à entendre, je donnerai la consigne.

"Vous allez regarder une vidéo. C'est très court. On appelle ça un "court-métrage". Je la passerai trois fois pour que vous ayez bien le temps de noter ce qui vous semble important. Ensuite, vous ferez un résumé de l'histoire puis vous décrirez ce que vous avez éprouvé, vos émotions. Toutes vos émotions. Donc, pendant le visionnage, vous devez retenir les événements, les situations, les lieux, les personnages mais vous devez également observer ce qui se passe en vous. On peut considérer que c'est un travail d'expression écrite mais pour moi, c'est surtout un travail d'expression émotionnelle. Il ne s'agit pas juste de raconter l'histoire mais de raconter les effets de l'histoire sur vous."

Une fois que ce travail sera fait, il me restera à travailler la langue française avec eux, leur montrer à quel point, il est nécessaire de bien maîtriser la langue pour pouvoir s'exprimer et surtout quand il s'agit de soi... Certains maîtrisent les accords et d'autres pas, certains ont un vocabulaire riche et précis et d'autres pas, certains savent raconter de façon claire et d'autres pas. Très peu, par contre, savent exprimer ce qui se passe en eux.

C'est là tout le problème et même l'absurdité de l'enseignement.

Est-ce que les enfants doivent quitter l'école primaire en possédant tout le programme de français ou en ayant principalement exploré ce qu'ils sont ?

Les jours suivants, on parlera, on lira les textes de ceux qui ont envie, on approfondira...

Il y a de quoi faire et je le fais depuis bien longtemps :

Conscience morale et empathie.

 

Animaux et empathie

 

"Dans les livres, vous pouvez apprendre beaucoup de choses sur la psychologie mais vous découvrirez vite que cette psychologie ne sert pas à grand-chose dans la vie pratique. Toute personne chargée de s'occuper des problèmes de l'âme devrait posséder une certaine sagesse de la vie, reposant non seulement sur les mots mais surtout sur l'expérience. La psychologie telle que je la comprends n'est pas seulement un quantum de savoir, c'est aussi une connaissance de la vie. Si tant est que l'on puisse inculquer une telle connaissance, ce n'est possible qu'à partir d'une expérience personnelle de l'âme humaine et cette expérience ne peut être acquise que par un enseignement personnel, c'est-à-dire individuel, et non collectif. En Inde, la coutume veut depuis fort longtemps que toute personne quelque peu cultivée ait un gourou, un guide spirituel qui lui apprenne, et à elle seule, ce qu'elle doit savoir. Tout le monde ne doit pas savoir la même chose, et le savoir en question ne peut jamais être transmis à tous de la même façon. C'est là ce qui fait totalement défaut dans nos universités : la relation entre l'élève et le maître. Et c'est aussi ce dont devraient disposer tous ceux qui, comme vous, souhaitent recevoir une formation en psychologie. Toute personne se sentant une vocation pour guider les âmes devrait d'abord se laisser guider par sa propre âme afin d'apprendre ce que signifie la rencontre avec l'âme humaine. Connaître la face obscure de sa propre âme est la meilleure préparation qui soit pour savoir comment se comporter face aux parties obscures des autres âmes. La simple étude des livres ne vous servirait pas à grand-chose, bien que ce soit aussi indispensable. Ce qui vous aidera le plus, c'est de pénétrer personnellement dans le secret des âmes humaines. Sans cela tout ne sera toujours qu'artifice intellectuel ingénieux, paroles creuses et discours creux. Peut-être essayez-vous de comprendre ce que je veux dire dans mes livres; si vous avez un bon ami, essayez donc de regarder ce qui se trouve derrière sa façade afin de vous découvrir vous-même. Ce serait un bon début."
Carl Gustav Jung : L'Âme et la vie.

 

Ça n'est enseigné ni à l'université, ni avant. Alors que c'est parfaitement possible. Mais encore faudrait-il que les enseignants entrent dans cette voie en ayant œuvré eux-mêmes à cette conscience du soi. Et non du moi, de son ego, de sa valeur sociale, de son cursus scolaire.....

Je vais quitter ce milieu en ayant assisté pendant 37 ans à un immobilisme existentiel digne des strates géologiques les plus profondes...Ils existent pourtant ces enseignants qui ont conscience de l'immensité de la tâche et qui explorent leur propre espace intérieur. Non pas pour être "bien noté" (ce qui est loin dêtre gagné, d'ailleurs) mais bien pour accompagner les enfants dans leur propre développement personnel et non dans un formatage commun dévastateur. 

 

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