Solastalgie
- Par Thierry LEDRU
- Le 21/09/2024
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Non, je ne suis pas anxieux, je ne suis pas dépressif, je n'ai peur de rien au regard des années à venir. Pour une seule raison : je n'y peux rien.
La haute montagne m'a enseigné le contrôle. Si je décide d'aller risquer ma vie sur un sommet, je dois être dans le contrôle. Il n'y a pas d'anxiété car je suis dans l'action.
Dans le cas de la dégradation continuelle du Vivant, je pourrais être anxieux puisque je ne peux pas agir sur le réchauffement climatique planétaire. Oui, mais je peux agir dans mes choix de vie. Et c'est ce qui me maintient dans un état d'esprit qui ne laisse pas de place à l'éco-anxiété ou à la solastalgie. Il m'arrive par contre d'être en colère ou d'être triste mais ça ne dure pas. Ma colère contre certains, elle ne les changera pas et ma tristesse envers le Vivant ne le soignera pas. Ce sont des émotions qui n'ont pas d'intérêt et par conséquent, je les laisse s'éteindre en ne leur accordant pas mon attention. Elles passent doucement et s'éteignent.
Il n'empêche que lorsque j'avais 17 ans, je n'aurais jamais imaginé que des années plus tard, je sois en train de m'interroger sur la pérénnité du Vivant.
J'étais insousciant et surtout considérablement naïf au regard de la confiance que j'accordais a priori à l'espèce humaine.
Mais, ça, c'est fini.
Qu’est-ce que la solastalgie ?
Le terme solastalgie, ou « dépression verte », provient du mot latin solacium qui signifie « réconfort » et du suffixe grec algia relatif à la douleur. La solastalgie renvoie à la douleur liée à la perte de ce qui nous réconforte, en l'occurrence, notre environnement.
En effet, les personnes atteintes de solastalgie sont dans un processus de prise de conscience par rapport à l’état de la planète en raison de différents maux :
dérèglement climatique ;
migration de populations ;
perte de la biodiversité ;
coût d’extraction grandissant des énergies fossiles ;
système interdépendant ;
effondrement ;
etc.
La solastalgie est une expérience immédiate s’illustrant par des émotions négatives intenses telles que :
la tristesse ;
l’impuissance ;
la dépression.
À l’inverse, l’éco-anxiété est une peur par anticipation qui renvoie à une réaction émotionnelle et ne peut pas donner lieu à une pathologie telle que la solastalgie. Ainsi, toute personne ayant conscience de l’ampleur de l’enjeu écologique actuel, présente de l’inquiétude quant à l’état de la planète et souffre donc d’éco-anxiété. L’incertitude, c’est-à-dire le fait de ne pas réussir à se projeter, ni à imaginer son avenir, fait également partie des symptômes de l’éco-anxiété.
Quels sont les symptômes de la solastalgie ?
La solastalgie, qui touche des millions de gens, impacte psychologiquement et physiquement les personnes qui en sont atteintes.
Différentes émotions, troubles et questionnements sont rattachés à l’état de solastalgie, tels que :
le sentiment d’impuissance ;
le sentiment de perte de contrôle ;
le sentiment de perte de sens ;
le sentiment d’injustice ;
le sentiment de frustration ;
la colère ;
la peur de l’avenir ;
la tristesse ;
le regret ;
l’anorexie ;
l’angoisse ;
le pessimisme ;
les troubles anxieux allant d’une anxiété chronique à des attaques de panique ;
l’insomnie ;
le questionnement autour du projet d’enfant ;
la dépression.
Cette multitude d’émotions et de questionnements peuvent apparaître de façon progressive ou soudaine. Le développement des symptômes de la solastalgie sont liés à un stress dit pré-traumatique.
Qui est touché par la solastalgie ?
La solastalgie peut concerner tout un chacun. Néanmoins, certaines personnes sont plus susceptibles d’être touchées, telles que :
les personnes ayant été directement exposées aux répercussions du réchauffement climatique : inondation, incendie, canicule, etc. ;
les personnes ayant vécu un choc tel qu’un paysage complètement différent comparé à ses souvenirs ;
les climatologues, qui côtoient quotidiennement les catastrophes écologiques et qui sont à l’origine d’un vaste mouvement sur Twitter avec le hashtag #solastalgie en vue de sensibiliser la population ;
la jeune génération qui se montre particulièrement inquiète quant à son avenir.
Il apparaît aujourd’hui que 85 % des Français sont inquiets face au réchauffement climatique et, parmi eux, 29 % se montrent très inquiets. Un chiffre qui monte à 93 % parmi les jeunes âgés de 18 à 24 ans.
Comment faire face à la solastalgie ?
Dans tous les cas, la solastalgie n'est pas à minimiser. Si le besoin s'en fait sentir, elle peut faire l'objet d'un suivi psychologique.
Voici quelques conseils pour faire face à la solastalgie :
Prendre du recul sur la situation
La première chose à faire lorsque les symptômes de la solastalgie se font ressentir est de prendre du recul sur cette situation que nous ne maîtrisons pas. Il est essentiel de ne pas tout prendre à cœur et d’accepter le fait qu’il est impossible d’endosser l’entière responsabilité de la lutte contre le réchauffement climatique. Agir à son échelle constitue déjà un premier pas de taille que ce soit par des actions concrètes ou en sensibilisant son entourage.
S’engager pour l’environnement
Chaque individu préoccupé par la situation climatique peut s’engager en rejoignant une ONG environnementale par exemple. Cette solution permet, non seulement de sensibiliser le plus grand nombre pour faire avancer la cause environnementale, mais aussi de vivre en cohérence avec ses valeurs.
Adopter des écogestes
Que ce soit au sein de sa vie quotidienne, comme sur son lieu de travail. Par exemple : se déplacer via des transports vertueux tels que le bus, le train, le vélo, la trottinette, la marche à pied ou encore le covoiturage ; réduire le gaspillage et diminuer la production de déchets ; maîtriser son impact numérique ; consommer mieux et moins en refusant, réduisant, réutilisant, recyclant et rendant à la terre, c'est-à-dire en compostant ; changer sa manière de voyager notamment en réduisant les vols en avion.
Réduire son empreinte carbone
En s’informant sur les causes du réchauffement climatique, à savoir une trop forte émission de gaz à effet de serre dans l’atmosphère, afin de mieux les limiter en adoptant notamment les écogestes précédemment évoqués.
Valérie Dollé
Journaliste scientifique
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