Viande et réchauffement climatique

Oui, je sais, c'est un thème que j'ai déjà servi ici, à maintes reprises.

Mais je sais aussi que c'est une idée qui a besoin d'être répétée pour qu'elle fasse son chemin.

 

Pourquoi la viande réchauffe le climat ? Avec Pénélope Bagieu

 

Mardi 28 mars 2023

ÉCOUTER (54 MIN)

Pourquoi la viande réchauffe-t-elle le climat ? ©Getty - VICUSCHKA

 

La terre au carré

Provenant du podcastLa Terre au carré

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Dans le cadre de la semaine "Carte blanche Pénélope Bagieu". Dans les émissions de gaz à effet de serre liées à notre alimentation, l’essentiel provient de la viande. Pourquoi la production et la consommation de viande émettent-elles tant de gaz à effet de serre ?

C’est une recommandation que l’on entend de plus en plus : si l’on veut réduire notre empreinte carbone, l’une des premières choses à faire est de manger moins de viande. En effet, la viande pèse lourd dans nos émissions de gaz à effet de serre. Mais pourquoi la viande contribue-t-elle autant au réchauffement ?

Au-delà des émissions de gaz à effet de serre, la viande a un coût environnemental important lié à son mode de production intensif et industriel, entrainant déforestation et pollution des eaux… Selon la FAO, la consommation mondiale de viande a quintuplé depuis les années 1960.

Aujourd’hui en France, nombreuses sont les personnes qui comprennent qu’il faut changer ses habitudes de consommation. Mais dans la pratique, les résistances persistent…. Alors que plus de 60% des Français sont favorables au fait de réduire leur consommation de viande, dont près de 70% des 25-34 ans, seulement 2,2% de la population est végétarienne.

Serons-nous prêts à manger moins de viande pour protéger le climat et la planète ?

Extraits de l'entretien

La diminution de la consommation de viande utile pour le climat

Pénélope Bagieu s'interroge sur les conséquences réelles de la consommation de viande sur le climat. Pour Carine Barbier, ingénieure au CNRS, spécialiste de l'impact de l'alimentation sur le climat : "Se tourner vers des viandes de qualité issues d'élevages extensifs, et réduire la consommation de viande fait partie de la solution contre le dérèglement climatique. Mais le lobby de la viande est encore très actif, en particulier dans les écoles."

Laure Ducos, experte en alimentation : "L'élevage émet beaucoup de gaz à effet de serre. Or, la France s'est engagée à les réduire pour atteindre la neutralité carbone en 2050. L'une des voies majeures est de réduire notre consommation de viande.

La production globale de notre alimentation participe pour un quart des émissions françaises. Et à l'intérieur de cette pollution atmosphérique, la moitié provient de l'élevage. Ces gaz à effet de serre proviennent soit des ruminants, qui émettent du méthane au moment de la digestion, soit de l'alimentation animale faite à partir de grandes cultures de maïs, de blés, d'oléoprotagineux, qui elles-mêmes utilisent des engrais azotés minéraux à l'origine d'émission de protoxydes d'azote qui ont un fort pouvoir de réchauffement climatique."

L'incidence des surfaces agricoles

Et si ces terres étaient consacrées à notre alimentation directement ? Laure Ducos explique : "Si on regarde la surface agricole utile de la France, on s'aperçoit que les trois-quarts servent à alimenter les élevages, que ce soient les ruminants, mais aussi le porc ou les volailles… Or il faut effectivement sept ou huit calories végétales pour faire une calorie animale. L'efficacité du système n'est pas performante.

Alors que si on produit directement des végétaux pour l'alimentation humaine, on libère des terres. Si on a moins de terres utilisées à produire des céréales, ou autres végétaux, pour les animaux, il y aura moins de pression sur les terres. On pourra se permettre d'avoir un élevage un peu plus extensif, meilleur du point de vue de la biodiversité, ou de la consommation d'eau… Et on va pouvoir cultiver en agriculture biologique, qui a des rendements plus faibles, ou produire soit de l'alimentation pour les humains, soit de l'énergie…"

Les consommateurs de viande restent majoritaires

 

À réécouter : Se passer de viande, est-ce vraiment la solution ?

La chronique "Detox" de Caroline TourbeÉCOUTER PLUS TARD

4 min

Manger moins, mais de meilleure qualité. Laure Ducos : "Aujourd'hui, le problème de l'accès à une alimentation digne n'est pas une question de quantité. Aujourd'hui, la faim en France, n'est pas due à une question de quantité, mais de qualité. On a besoin de redonner à l'alimentation son vrai prix, de mieux rémunérer les agriculteurs, et agricultrices. Le nombre de petites fermes chute. Il y a un profond mal-être dans les campagnes. De plus en plus d'agriculteurs se suicident. Les petites fermes disparaissent au profit des très grandes fermes.

Auparavant, c'étaient les riches qui mangeaient le plus de viande. Aujourd'hui, c'est dans la classe populaire que l'on trouve les plus gros mangeurs d'alimentation carnée. Si on regroupe les protéines (poissons, œufs, viande, fruits de mer, laitage, etc.) ce sont toujours les plus aisés qui en consomment le plus. Donc, quand on dit qu'il faut réduire la consommation de viande, que faut-il diminuer exactement ? La part de tout le monde. Aujourd'hui, les végétariens et végans représentent moins de 2% de la population. Il faut diminuer toutes les formes de viandes, sans oublier la volaille."

Se méfier des produits laitiers

 

À lire aussi : Quand les fermes laitières œuvrent pour réduire leurs émissions de gaz à effet de serre

Certains se tournent vers les produits laitiers lorsqu'ils abandonnent la viande. Or pour Laure Ducos : "La moitié de la viande consommée en France vient de l'industrie laitière. Une fois que les vaches ont produit du lait, on les envoie en réforme au bout de quelques années. C'est très rapide parce qu'elles sont plus assez productives selon les standards industriels, et donc on les envoie se faire transformées en steaks hachés.

Pour faire des produits laitiers, il faut des bébés : des chevreaux, des agneaux, des veaux… Les vaches ne peuvent pas produire du lait ad hoc. Donc on produit des petits. Les mâles, qui ne vont pas renouveler le cheptel de vaches, comme on ne les consomme pas, on les envoie dans des centres d'engraissement au mieux en France, et au pire dans d'autres pays. Et ils sont transportés sur de longues distances dans des conditions absolument terribles en termes de bien-être animal !

Il faut savoir que la France est une très, très grande productrice de lait. On exporte beaucoup de fromage qui nécessite beaucoup de litres de lait, à tel point que l'industrie laitière en France émet presque autant de gaz à effet de serre que l'industrie de la viande rouge. Ça, c'est peu connu !"

La suite, dont les moyens de se passer de viande, est à écouter...

Avec :

Carine Barbier, économiste et ingénieure de recherche au CNRS, membre du CIRED. En 2022, elle a coordonné une étude intitulée « Simulation prospective du système alimentaire et de son empreinte carbone », qui est une somme de données et d’analyses qui permet d’imaginer à quoi ressembleront nos assiettes (et donc nos vies) en 2050.

Laure Ducos, experte des enjeux environnementaux en agriculture et alimentation

 

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