"Les zones gérées par les peuples autochtones sont les plus préservées"...
Mais, nous, on est des gens civilisés et pas eux.
Il me semble, en fait, que le commencement de la dévastation est marqué par la colonisation et non pas, plus tard, par la révolution industrielle. La colonisation et l'extermination totale ou partielle des peuples autochtones présageaient de la révolution industrielle. D'abord, il a fallu marquer les esprits, ensuite on pouvait marquer le territoire...
Un million d'espèces menacées d'extinction, des trajectoires économiques et politiques qui ne permettront ni d'atteindre les objectifs fixés pour 2020, ni les prochaines échéances... Voici quelques-unes des conclusions très inquiétantes du rapport sur la biodiversité publié par l'IPBES lundi 6 mai.
"Nous dépendons très fortement de cette biodiversité que nous sommes en train de dégrader". Voici le bilan exposé par Paul Leadley, professeur à l'université Paris-Sud et coauteur du rapport de la Plateforme intergouvernementale sur la biodiversité et les services écosystémiques (IPBES) publié ce lundi 6 mai.
Ce rapport alarmant est le fruit du travail de plus de 150 experts de la biodiversité réunis au sein de l'IPBES. Aussi surnommé "le Giec de la biodiversité", ce groupe d'experts dresse un constat d'une dégradation de la biodiversité sans précédent : "On estime qu’il y a autour d’un million d’espèces qui sont menacées d’extinction, parmi les huit millions d’espèces qui existent très probablement sur Terre", explique Paul Leadley. Le rapport de l'ONU fait aussi le constat que 75% du milieu terrestre est "sévèrement altéré par les activités humaines". Est aussi mentionnée l'augmentation des émissions de gaz à effet de serre, qui ont doublé depuis 1980.
"On a besoin des pollinisateurs"
Le rapport pointe l’évolution des systèmes financiers et économiques comme "un élément clé" pour des politiques plus durables. Il indique aussi très clairement que les politiques actuelles ne favorisent pas la biodiversité. Pour preuve, la plupart des objectifs d'Aichi (lien PDF), prévus pour 2020, ne pourront être atteints.
Si ces conclusions sont aussi inquiétantes, c'est avant tout car la biodiversité assure nombre de services dont nous dépendons. "Par exemple, on a besoin des pollinisateurs comme les abeilles pour polliniser des fruits et légumes, insiste Paul Leadley. On a aussi besoin de forêts pour stocker le carbone et éviter qu'il ne se retrouve dans l'atmosphère et contribue au réchauffement climatique."
"Je vais peut-être exagérer un petit peu mais, pour le public, on est un petit peu 'les amoureux de la nature' mais il faut porter comme message que c'est important pour tout le monde la biodiversité",explique le chercheur.
Le document met également l'accent sur la conservation des savoirs autochtones, car il souligne que les zones gérées par ces peuples, qui représentent un quart du globe, sont les plus préservées de la planète.
Biodiversité : l’humanité face à ses responsabilités
Alors qu’un million d’espèces animales et végétales, terrestres ou marines, sont menacées de disparition, la réponse à l’alerte des scientifiques est désormais entre les mains des gouvernements.
"L’alerte mondiale lancée, lundi 6 mai, par la Plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques – le « GIEC de la biodiversité » –, est d’une gravité sans précédent. Le taux de disparition de la vie sauvage est aujourd’hui des dizaines, sinon des centaines de fois plus élevé que durant les derniers dix millions d’années. Un million d’espèces animales et végétales, terrestres ou marines – soit une sur huit –, sont menacées de disparition. Et le rythme s’accélère dramatiquement."
NATURE & ENVIRONNEMENT
Les peuples autochtones, gardiens assiégés de la nature mondiale
Des Waorani dont la présidente du Conseil Waorani de Pastaza, Nemonte Nemquimo (C), célèbrent un jugement contre un projet du gouvernement -qui a fait appel- de faire entrer les compagnies pétrolières sur leurs terres, à Puyo (Equateur) le 26 avril 2019 AFP/ARCHIVES - RODRIGO BUENDIA
De l'Amazonie à l'Océanie, les peuples autochtones ont réussi par leurs savoirs ancestraux à freiner le déclin des écosystèmes, mais la pression extérieure sur ces "gardiens de la nature" est de plus en plus difficile à supporter.
Pour la première fois à un tel niveau, le rapport du groupe d'experts de l'ONU sur la biodiversité (IPBES) publié lundi intègre les savoirs, les problèmes et les priorités de ces communautés, aux côtés des contributions scientifiques classiques.
"Ils sont clairement les gardiens de la nature pour le reste de la société", insiste Eduardo Brondizio, un des auteurs principaux de ce rapport qui a nécessité trois ans de travail avant six jours de négociations plénières à Paris la semaine dernière.
Ces peuples qui représentent quelques centaines de milliers de personnes réparties sur tout le globe, de l'Arctique au Pacifique, s'occupent en effet, "sous divers régimes fonciers, d'un quart des terres de la planète. Et c'est là qu'on trouve la nature la mieux conservée", précise-t-il à l'AFP.
Une reconnaissance accueillie avec grande satisfaction par ces communautés parfois regardées de haut.
"Ce rapport fait entendre la voix des peuples autochtones et essaie même de la renforcer au niveau international", se réjouit Lakpa Nuri Sherpa, de l'organisation Asian Indigenous Peoples Pact.
"Le rapport prouve aux décideurs que les peuples autochtones sont ceux qui protègent, conservent, et encouragent une gestion durable de la biodiversité", indique-t-il à l'AFP.
Un membre d'une tribu autochtone brésilienne se rafraîchit dans une fontaine au dernier jour d'un rassemblement des indigènes pour faire entendre leurs revendications au droit à la terre, à Brasilia le 26 avril 2019 (AFP/Archives - CARL DE SOUZA)
Une réussite qui s'explique notamment par leur dépendance encore plus forte aux fruits de cette nature, et le retour de bâton immédiat en cas de mauvaise gestion, note le rapport.
Et aussi parce que "nous avons une relation spirituelle, sacrée avec nos ressources naturelles", insiste Lakpa Nuri Sherpa.
- 'Poule aux oeufs d'or' -
Malgré tout, ces écosystèmes déclinent aussi, sous l'influence d'appauvrissement des savoirs ancestraux, du dérèglement climatique et surtout d'un changement d'utilisation des terres principalement imposé de l'extérieur.
"La pression qui pèse sur eux est énorme", souligne Eduardo Brondizio.
Déforestation pour faire place à des monocultures, mines, infrastructures... "Nous repoussons constamment les frontières de l'extraction des ressources à travers le monde. Les peuples autochtones ont été repoussés par ceux qui empiétaient sur leur territoire depuis 500 ans. Mais on les rattrape à chaque fois", poursuit le chercheur.
Des enfants jouent sur de la glace en train de fondre dans le village d'Esquimaux Yupiks de Napakiak en Alaska, le 19 avril 2019 (AFP/Archives - Mark RALSTON)
Alors leurs représentants demandent depuis longtemps une protection.
"Si leurs droits ne sont pas reconnus, les peuples autochtones auront du mal à continuer à gérer ces ressources", plaide Lakpa Nuri Sherpa, dénonçant notamment des "accaparements de terres".
Une question encore plus sensible aujourd'hui en Amazonie avec l'arrivée au pouvoir au Brésil de Jair Bolsonaro.
Le discours du président brésilien orienté vers l'exploitation des ressources et les exportations "vilipende les peuples autochtones" et "méprise les richesses de l'Amazonie", estime Eduardo Brondizio, s'exprimant sur ce point à titre personnel.
"C'est comme d'utiliser la poule aux oeufs d'or pour faire une soupe de poulet", lance l'expert brésilien.
A l'inverse, il plaide pour que le reste du monde tire des "leçons" de la façon dont ces communautés gèrent leurs terres. "Certaines choses peuvent être transposées à plus grande échelle", note-t-il, prenant en exemple la culture agro-forestière de l'açai, fruit énergétique en vogue.
Une fillette indienne arara se repose au creux d'un hamac dans un village traditionnel du territoire des Arara en Amazonie brésilienne, le 13 mars 2019 (AFP/Archives - Mauro Pimentel)
Aroha Te Pareake Mead, représentante du Forum international des peuples autochtones sur la biodiversité et les services écosystémiques (IIFBES) lors de la réunion de l'IPBES à Paris, va plus loin.
Elle est persuadée que le concept maori de "kaitiakitanga", qui décrit la responsabilité de "gardien" de la nature transmise de génération en génération, doit être adopté au niveau mondial.
"Nous aurions peut-être une chance de sauver notre planète et toute sa biodiversité", lance-t-elle.
« Pour étouffer par avance toute révolte, il ne faut pas s’y prendre de manière violente. Les méthodes du genre de celles d’Hitler sont dépassées. Il suffit de créer un conditionnement collectif si puissant que l’idée même de révolte ne viendra même plus à l’esprit des hommes.
L’idéal serait de formater les individus dès la naissance en limitant leurs aptitudes biologiques innées. Ensuite, on poursuivrait le conditionnement en réduisant de manière drastique l’éducation, pour la ramener à une forme d’insertion professionnelle. Un individu inculte n’a qu’un horizon de pensée limité et plus sa pensée est bornée à des préoccupations médiocres, moins il peut se révolter. Il faut faire en sorte que l’accès au savoir devienne de plus en plus difficile et élitiste. Que le fossé se creuse entre le peuple et la science, que l’information destinée au grand public soit anesthésiée de tout contenu à caractère subversif.
Surtout pas de philosophie. Là encore, il faut user de persuasion et non de violence directe : on diffusera massivement, via la télévision, des divertissements flattant toujours l’émotionnel ou l’instinctif. On occupera les esprits avec ce qui est futile et ludique. Il est bon, dans un bavardage et une musique incessante, d’empêcher l’esprit de penser. On mettra la sexualité au premier rang des intérêts humains. Comme tranquillisant social, il n’y a rien de mieux.
En général, on fera en sorte de bannir le sérieux de l’existence, de tourner en dérision tout ce qui a une valeur élevée, d’entretenir une constante apologie de la légèreté ; de sorte que l’euphorie de la publicité devienne le standard du bonheur humain et le modèle de la liberté. Le conditionnement produira ainsi de lui-même une telle intégration, que la seule peur – qu’il faudra entretenir – sera celle d’être exclus du système et donc de ne plus pouvoir accéder aux conditions nécessaires au bonheur.
L’homme de masse, ainsi produit, doit être traité comme ce qu’il est : un veau, et il doit être surveillé comme doit l’être un troupeau. Tout ce qui permet d’endormir sa lucidité est bon socialement, ce qui menacerait de l’éveiller doit être ridiculisé, étouffé, combattu. Toute doctrine mettant en cause le système doit d’abord être désignée comme subversive et terroriste et ceux qui la soutiennent devront ensuite être traités comme tels. »
« Diane, comment tu expliques cette impression de vide qui m’envahit parfois ? Comme si je n’étais plus là et que pourtant, j’avais pleinement conscience de la vie en moi. »
Elle le regarda en souriant et glissa une main contre la sienne.
« J’ai écrit quelque chose là-dessus dans un de mes livres.
- J’aimerais encore mieux que tu me le racontes, lança-t-il immédiatement.
- C’est bien mon intention, mon amour. J’essaie juste de voir comment commencer, répondit-elle en posant une bise sur sa joue. Je vais essayer de ne rien oublier dans la description. C’est partie de la réflexion d’un auteur que j’aime bien. Il fait une analogie entre notre perception de notre moi et un trou dans un morceau de bois. Ce trou peut être décrit par rapport à la couleur du bois, sa forme, sa dimension, la texture du bois, la régularité du contour, etc… mais il ne s'agit réellement jamais du trou lui-même, c'est à dire du vide qui le constitue, de la qualité de l'air qui s'y trouve, en fait de tout ce qui se trouve dans l'espace même de ce trou et non de ce qui l'entoure.
- Difficile à décrire effectivement, commenta Paul.
- Les qualités du vide dans le trou sont trop abstraites pour être clairement définies et surtout nous avons l'habitude par notre conditionnement de porter notre attention vers l'environnement plutôt que vers le sujet lui-même.
- C’est ce que j’ai fait toute ma vie, Diane.
- Eh bien, c’est cette habitude qui constitue notre "moi". Notre sens d'identité personnelle est généré par notre environnement et toutes les expériences vécues dans cet environnement. Nous construisons nos schémas de pensées en fonction de nos interactions avec cet environnement, notre capacité à nous y insérer, à y prendre forme, à nous modeler en fonction de toutes les influences que nous subissons. Possessions, rôles, appartenances, croyances, statuts, sont des données rapportées au fil de l'existence et nous les érigeons en identité. Mais ce "moi" n'est qu'un ectoplasme fabriqué sur mesure, par l'individu lui-même en fonction des influences projetées par l'environnement. Il se moule en choisissant l'atelier de poterie qui répond à ses désirs ou en subissant la puissance des influences. »
Elle s’arrêta quelques secondes. Elle regardait l’horizon.
Il ne la quittait pas des yeux. Il aimait la profondeur de sa voix, il aimait ses paroles et ce regard intérieur.
« Mais tout autant que ses désirs, le moi est empli de peurs et de souffrances diverses. Même le statut de victime est identitaire et le moi s’y reconnaît tout autant que dans le bonheur.
- C’est ma vie que tu décris, Diane.
- Ton ancienne vie, » Paul.
Il lui sourit.
- Oui, tu as raison.
- Et elle était nécessaire pour que la suite du chemin se dévoile.
- Continue Diane, je ne t’interromps plus.
- Cette identité devient par conséquent son bien le plus précieux et il s'efforcera de la renforcer par des rencontres, des expériences, des situations qui valideront ces choix et le convaincront de la justesse de son raisonnement. Là, où il ne s’agit pourtant que de phénomènes inconscients. Qu'en est-il si par malheur pour lui cet environnement vient à être perturbé à un tel point que les repères s'estompent ou disparaissent ? Que reste-t-il de l'individu ? À quoi peut-il se raccrocher pour ne pas tomber dans le vide existentiel qu'il avait justement toujours évité d'explorer ? Cette conscience du vide survient avec une telle violence que tous les repères volent en éclat. Il n'y a plus de bois autour du trou. C’est le vide qui surgit. Et la peur qu’il génère. Divorce, chômage, dépression, maladie, accident, décès d'un proche, les éléments capables de ronger le bois comme des animaux xylophages sont nombreux et redoutables. Le plus souvent inattendus. Jusque-là, le moi se nourrissait de tout ce qui était le non moi et il entretenait l'image de cette identité. Si l'environnement devient une source de peur et de danger, ce vide jamais exploré n'offre aucun ancrage. C'est le néant qui apparaît, un néant aussi terrifiant que l'image que l'on a de la mort. Il ne reste rien, l'individu a disparu parce que l'environnement connu ne le maintient plus en état. Et c’est ce que j’ai vécu à la mort de Tyler.
- Et c’est ce que j’ai vécu quand mon cœur a lâché.
- Et sans doute ce vécu commun nous a-t-il rapprochés.
- Comme une reconnaissance de conscience alors ?
- Oui, Paul, c’est comme ça que je vois les choses.
- Alors que se passe-il concrètement quand tout s’est effondré ?
- C’est la possibilité pour le trou d'exister enfin. Mais le vide dans le trou ne peut pas être éprouvé dans le même champ d'expériences que l'environnement, avec les mêmes outils de compréhension. Il existe une entité immuable qui a le pouvoir de considérer ces changements sans que ces changements n'influent sur elle. C'est l'identité véritable, le Soi. Un expérimentateur qui est parvenu à se dessaisir de lui-même. C’est un état de conscience pure, dépourvu de tout contenu. Il ne s'agit pas là de s'observer dans les évènements extérieurs mais d'entrer dans un espace sans expérience et que cette observation ne devienne pas elle-même une expérience. Au risque de renvoyer l'expérimentateur face à son objet. Il s’agit d’être conscient de n'être conscient de rien en soi.
- Une conscience désidentifiée en quelque sorte.
- C’est exactement ça, Paul. Et je pense que c’est la raison de tes tourments. On peut voir ça comme un conflit intérieur entre ton mental et ses propres schémas de pensées et cette conscience.
- C’est l’âme qui contient cette conscience ?
- C’est ce que je pense.
- Et c’est l’âme libérée des chaînes du mental qui entre en conscience avec l’esprit ?
Grimper, glisser, marcher ou tout simplement regarder. Tout (ou presque) ce que l'on peut faire ou voir en montagne (et parfois aussi ailleurs).
Qui a peur du grand méchant loup ?
Publié le 4 Mai 2019
Lettre à Mme Véronique Pueyo, journaliste
Lettre à la rédaction de France Bleu Isère
Lettre à M. Thomas Guillet, maire de Corrençon-en-Vercors
Lettre à M. Gilles Ruel, président de la société de chasse de Corrençon-en-Vercors
Lettre à M. Lionel Beffre, préfet de l'Isère
Bonjour
Je réagis à un article publié par France Bleu Isère intitulé "Corrençon-en-Vercors, un loup achève sa proie dans le centre du village" et paru ce samedi 4 mai 2019. Ce billet entretient la psychose du loup de manière inutile et il était impératif de rétablir un minimum d'objectivité.
Je passe rapidement sur le titre et le chapeau, peut-être destinés à faire cauchemarder les gens pas (ou peu, ou prou, ou mal) informés sur le loup, en particulier les habitants du Vercors. Quelle belle idée ! Je m'attarderai un peu plus sur le corps du billet en question :
- Vous tirez des conclusions (sur le loup) avant même le moindre résultat d'une étude ADN, étude ADN qui, même si elle prouvait que ce soit un loup, ne confirmera jamais le lieu de la scène. Il y a en effet suffisamment de personnes mal intentionnées "anti-loup" dans nos campagnes pour qu'il soit même possible que ce cadavre ait été rapporté ici par l'un d'entre eux en pleine nuit.
- Sans les mêmes conclusions, vous autorisez des tirs d'effarouchement. Et quand bien même : si les louvetiers venaient à abattre un loup, on n'aurait aucune preuve que ce soit le "coupable". Je m'intéresse à cet animal à titre personnel et je peux vous affirmer que l'espace de quelques heures, ils peuvent être à des kilomètres de là et ne pas y revenir avant plusieurs semaines. Cette mesure fait un peu l'enfant qui veut se venger de quelque chose. Puéril et sans effet. D'autant qu'il n'est même pas prouvé que la régulation des loups ait un effet "positif" pour ceux qui se disent gênés par l'animal. On le voit ; le loup est maintenant présent partout sur le territoire français, peut-être en partie à cause de cette dispersion causée par les tirs et l'éclatement des meutes.
- On peut lire que "le loup n'a plus peur de venir jusque dans les villages". Le loup n'a pas peur tant qu'il ne croise pas son ennemi de toujours. Il se "promène" la nuit : pour être heureux, vivons caché vous dira-t-il. Parfois, il se fait surprendre par un randonneur, un citadin qui passe par là. Après quelques secondes d'hésitation et d'identification, il fuit. Le loup craint l'homme et "gère tranquillement" cette crainte.
- "Le cerf a cru qu'il serait protégé du loup en entrant dans le village". Là, j'ai failli m'étouffer. Le cerf n'a rien cru du tout. On parle quand même d'un cerf !! Encore une fois, s'il n'a pas été déposé ici "artificiellement", ce cerf s'est retrouvé là suite à la panique lors de l'attaque (que ce soit un loup, un chien...) et lors de la poursuite. Point. A noter qu'il y a eu récemment le même type de conclusions sur un loup aperçu se nourrissant du cadavre d'une biche aux portes d'un autre village isérois. On a crié à l'entrée des loups dans les villages. En réalité, le cervidé avait été tué par percussion avec une voiture et l'opportuniste et intelligent canidé en avait profité. Simplement.
- Vous craignez les attaques de loup sur l'homme. Pour parler de ce que je connais à savoir, depuis la date du retour du loup en France en 1992 soit bientôt trente ans, aucune humain n'a été tué par un loup. Et même aucune blessure véritable n'a pu être trouvée. Et chaque année, "on" continue à perdre de la salive en entretenant cette psychose de l'enfant qui finira par se faire manger. L'être humain est suffisamment intelligent et prendra les mesures adéquates le jour où cela arrivera, si cela arrive. En attendant, arrêtons d'entretenir ces inepties et, au contraire, contentons-nous des faits. Et là, il y a du travail. Zero attaque de loups mais combien de chiens ? Dans le même laps de temps, sur une trentaine d'années, les accidents de chasse causent entre 15 et 20 morts par an soit peut-être 500 depuis le retour du loup et les autres "usagers" de la nature attendent toujours des mesures pour réduire les risques (diminution des zones géographiques autorisées à la chasse, réduction de la durée avec un jour de non-chasse le week-end, les vacances etc).
Réapparu en 1992 en France, le loup est effectivement un prédateur et le fait qu'il se nourrisse d'animaux n'est pas un scoop. Dans l'état actuel de notre biodiversité dont je ne vais pas faire la liste ici, il est impératif que tout être vivant soit protégé et que, lors de conflits avec l'homme (dans le cas du loup, je ne vois que celui avec les éleveurs), nous trouvions des réponses (et il y en a toujours) qui mettent la protection de la biodiversité en priorité. La presse peut aussi contribuer à tout cela en cessant ces billets "à grands titres" et se contentant de relater les faits.
Surprise au réveil pour les habitants de Corrençon-en-Vercors, petit village de montagne de 350 habitants. Ils ont découvert en plein centre de la commune la carcasse d'un cerf, à moitié dévo...
« Khalil Gibran a écrit que nous sommes comme des noix. Pour être découverts, nous avons besoin d’être brisés. Et bien nous avons été brisés, avoua difficilement Daniel.
- Notre fils est mort quand il avait dix ans, continua Maryse d’une voix sombre. Tué par un chauffard dans une rue de Paris. Sa sœur jumelle a été gravement blessée mais elle a survécu. »
Il baissa les yeux et ramassa un petit caillou sur le sol. Il le fit rouler nerveusement dans ses doigts. Il imagina Rémi mort et Marine grièvement blessée. Un immense frisson le secoua. Il préféra parler pour chasser cette image.
« Je suis désolé, ça a dû être terrible.
- Ce drame a tué les non êtres que nous étions, continua Maryse. Nous aurions pu mourir physiquement et c’est ce qui serait arrivé si Lydie aussi était morte. Nous étions en partie responsables de la mort de Mathieu. Nous aimions l’agitation de Paris, les rencontres, les spectacles, la vie trépidante de la ville, la concentration humaine nous étourdissait et nous nous pensions heureux. Nous étions en fait des êtres endormis en train d’entraîner avec eux leurs deux enfants. Nous avons été brisés et nous le devons à la disparition de Mathieu. Si nous n’avions pas su en retirer une nouvelle connaissance, nous aurions tué Mathieu une deuxième fois. »
Daniel, silencieux, fixait le lac. Maryse baissa la tête.
« Vous êtes peut-être trop sévères avec vous-mêmes quand vous affirmez que vous êtes en partie responsables de ce drame. Vous ne pouviez pas prévoir.
- Prévoir, cela signifie voir en avance, répondit Daniel. Nous, nous étions en permanence en retard. Nous ne faisions que réagir à tout ce qui nous arrivait avec la prétention stupide de croire que nous maîtrisions quelque chose. Mais l’homme ne décide rien. Tout lui arrive. Vous croyez par exemple que vous avez décidé de venir ici mais ce sont les événements de votre vie qui vous ont conduit ici. En fait, quelqu’un qui saurait lire dans la vie d’un homme aurait deviné que vous alliez venir ici. Pour pouvoir faire quelque chose, c’est à dire en avoir l’idée, ensuite la volonté de l’exécuter, le courage de passer à l’acte avec énergie, la capacité d’en retirer les enseignements, il faut déjà être quelqu’un. Il faut déjà exister. Sinon, vous vous contentez de subir des pressions extérieures qui vous poussent dans des directions qui vous dominent. Tant que vous refusez d’accepter cette terrible réalité, vous ne pouvez pas être.
- Et si je pense le savoir et que je l’accepte, que me reste-t-il à faire ?
- Le plus difficile. Beaucoup de personnes atteignent cet état de conscience dans lequel il découvre la futilité de leur vie et l’absence de contrôle. Une grande partie refuse d’aller plus loin. C’est souvent à cette occasion que surviennent les dépressions, les conflits familiaux, les difficultés professionnelles. Alors, on continue à se mentir. En général, la faute retombe sur les proches. On se sent incompris alors que c’est soi-même qu’on ne comprend pas. Mais ça, c’est une vérité trop douloureuse. Et d’avoir entrevu ainsi une nouvelle source de lumière et de prendre conscience aussitôt de son incapacité à la saisir pleinement, par faiblesse, par manque de courage et de volonté, accentue considérablement les états de dépendance. Les gens vont se plonger avec furie dans l’agitation pour tenter d’oublier et surtout de s’oublier. C’est pour cette raison qu’il faut être prudent et ne pas amener à la porte de cette nouvelle conscience une personne dont la faiblesse pourrait s’avérer destructrice.
- En tout cas, pour y parvenir, reprit Maryse, il est indispensable d’établir la liste des pressions extérieures et tenter ensuite d’échapper à ces états de dépendance. Les états de dépendance, ce sont ceux dans lesquels nous n’avons plus aucune réflexion réelle car l’agitation qui leur est afférente empêche toute observation claire. Parfois, on croit dans ces états que l’on est encore capable de discerner ce qui nous arrive mais c’est un subterfuge du mental. Sinon, le dégoût de nous-mêmes nous éloignerait de cette source de plaisir. Car la récompense de ces états et le fait que nous les recherchions, c’est uniquement le plaisir. La conscience de l’homme dépendant est prête à toutes les ruses pour en obtenir sa dose quotidienne. Tous ces individus sont des drogués. Le mensonge est la ruse principale pour satisfaire la soif de plaisir. Il faut donc comprendre que nous nous mentons sans cesse pour commencer le vrai travail et savoir que ce sera douloureux. Les années de soumission créent une dépendance dont il est très difficile de se défaire. C’est ce qui explique l’aveuglement de telles masses. C’est aussi pour cette raison que les adultes soumettent le plus rapidement possible les enfants. Ils sont malléables mais ne le resteront pas. Ceux qui auront résisté jusqu’à l’âge adulte seront des révoltés de toutes sortes. Parfois, leur révolte sera destructrice et violente, parfois ils se détruiront eux-mêmes, souvent ils deviendront des marginaux. Quelques-uns parviendront à garder cette clairvoyance qui les a surpris un jour et ils la développeront, l’approfondiront, l’enrichiront à travers de nouvelles expériences ou des rencontres avec d’autres individus illuminés. On se moque des gens qu’on traite d’illuminés. On ne veut pas comprendre qu’ils ont découvert une vérité qui nous dépasse. »
Il y a déjà quelques temps que j'ai lu des alertes lancées par les scientifiques sur le problème du permafrost et de sa fonte accélérée.
On y est.
Et ça n'est que le début.
Ce qui "m'amuse" ou me désole, selon les jours, c'est de penser aux individus vivant en France et qui s'imaginent encore que le réchauffement climatique ne les atteindra pas.
Croire que les climats de la planète ne sont pas étroitement imbriqués et ne seraient pas tous atteints par le déréglement d'une zone précise, c'est d'une naïveté désespérante.
L'épaisseur de la bulle dans laquelle ces individus vivent est consternante...
Emmanuel Grynszpan, Moscou
Publié vendredi 3 mai 2019 à 11:52, modifié vendredi 3 mai 2019 à 14:49.
RUSSIE
En Sibérie, la fin du permafrost
En Yakoutie, le réchauffement climatique provoque la fonte de sols jusqu'ici gelés toute l'année. Des milliers d’habitations menacent de chavirer dans la boue en été, tandis que les villages du nord sont submergés par des inondations noires
Economie, politique, société, culture, sport, sciences : les enjeux écologiques traversent toutes les strates de notre société. Comment passer de l'analyse à l'action? Quelle est la part de décisions individuelles et celles qui relèvent de choix politiques? Pourquoi la complexité du défi ne doit pas nous décourager?
Découvrez pendant la première quinzaine de mai, et à tout moment sur une page dédiée, une série d'enquêtes sur le thème de la transition écologique. Retrouvez le 9 mai, une édition spéciale du Temps à ce sujet, à l’occasion du Forum des 100.
On l’appelle en Russie le «gel éternel» et rien n’est plus fallacieux. Les Yakoutes sont en train de l'apprendre à leurs dépens. La totalité de cette république perdue au fin fond de la Sibérie orientale, grande comme 72 fois la Suisse, repose sur le pergélisol (ou permafrost), une couche de terre gelée d’une profondeur dépassant parfois 1000 mètres. Où que l’on creuse le sol – même au milieu du bref été continental, au cours duquel la température atteint les 40°C – on tombe rapidement sur une terre dure comme du béton. Enfin, c’était le cas avant le réchauffement global. Désormais, la couche dégelée (ou «couche active» en jargon scientifique) descend jusqu’à 3 mètres de profondeur.
«Tous les Yakoutes ont remarqué le phénomène», raconte Valentina Dmitrieva, présidente d’Eyge, une association locale de protection de la nature. «Nous enterrons traditionnellement nos défunts en été 2 mètres sous terre. Avant, il fallait verser de l’eau bouillante pour dégeler les 50 derniers centimètres. Aujourd’hui, la terre est déjà molle», poursuit Dmitrieva, qui est aussi directrice des programmes de recherche à l’Université fédérale du Nord-Est à Yakoutsk.
Des pilotis de béton
Les conséquences de ce dégel accéléré font penser aux sept maux de l’apocalypse: déformation du sol, érosion ultra-rapide des berges de l’océan Arctique, inondations d’eaux noires, marais et lacs engloutissant les pâturages, «forêts ivres» où les arbres s’inclinent de manière chaotique, réveil de microbes et bactéries centenaires capables de déclencher des épidémies…
Même en milieu urbain, le phénomène saute aux yeux. A Yakoutsk, la capitale de la région, le pergélisol offrait une fondation d’une dureté sans égale aux bâtiments. Mais les 400 000 habitants de la ville «la plus froide du monde» ont du souci à se faire. Tels des mille-pattes de béton, toutes les constructions sont perchées sur des pilotis plantés dans le pergélisol. Un espace de 1 à 2 mètres est laissé vide entre le rez-de-chaussée et le sol pour que la chaleur des habitations ne fasse pas fondre le sol les supportant, et afin que l’air glacial refroidisse la «couche active». Jusqu’en 2000, la norme obligeait les constructeurs à planter des pilotis de 8 mètres pour les immeubles. Ce qui signifie qu’aujourd’hui, pendant plusieurs mois, ces constructions de cinq étages ne sont plus maintenues que sur les 5 derniers mètres. Conséquence: des fissures lézardent des dizaines de bâtiments construits à l’époque soviétique. Elles sont vite colmatées par la mairie, mais pas assez pour empêcher de faire jaser. D’autant que certains bâtiments se sont déjà effondrés. Officiellement, 331 constructions ont été déclarées «inutilisables» par les autorités. Seules 165 seront effectivement détruites, faute de financement.
Les lacs débordent, tout se transforme en marais, c’est un désastre et de nombreux villages doivent être reconstruits
«Les autorités ont tendance à fermer les yeux et à autoriser la construction d’immeubles dépassant les 15 étages, alors que nous avons toujours recommandé de ne pas aller au-delà de cinq niveaux», prévient Semion Gotovtsev, directeur du laboratoire de géo-cryologie à l’Institut du pergélisol de Yakoutsk. Pour lui, de nombreuses maisons risquent de s’effondrer et «personne ne sait combien de temps elles vont tenir car on ignore à quelle vitesse la couche active va descendre». En outre, le scientifique note que Yakoutsk connaît aussi «de gros problèmes avec les lignes électriques, les canalisations d’eau et de gaz qui traversent des sols différents».
«Nous allons avoir de mauvaises surprises»
Pour pallier le plus urgent, des rangées de «thermosiphons» sont plantées le long des immeubles les plus menacés. En forme de «Y», ils ressemblent à des radiateurs inversés dont le pied est planté dans le sol. Ces appareils captent l’air glacial et, grâce à un liquide de refroidissement, injectent du froid dans la couche active pour qu’elle regèle plus rapidement. Très inquiet, Semion Gotovtsev pointe aussi un phénomène encore mal étudié, appelé «thermokarstique» (érosion du sous-sol). «On sait que des grottes se forment sous terre, mais nous ne disposons pas aujourd’hui des moyens techniques et financiers pour les détecter. Nous allons avoir de mauvaises surprises, y compris dans le centre de Yakoutsk, car ce phénomène va s’accélérer», redoute-t-il. La presse locale s’est déjà émue d’affaissements de terrain durant l’été dernier.
Il est déjà trop tard pour les centaines maisons en bois de deux étages appelées ici «baraques». Elles sont presque toutes complètement déformées et en piteux état, ce qui ne les empêche pas d’être toujours habitées. En devenant instable et mouvante, la couche active a aussi fait valser des infrastructures posées à la va-vite sur le sol à l’époque soviétique, comme des chemins de fer et des routes. Plus grave, la pollution provoquée par des milliers de fuites venant de gazoducs et d’oléoducs hâtivement construits alerte Greenpeace.
Beaucoup plus marqué dans le Grand Nord, avec déjà 3°C de plus qu’il y a trente ans, le réchauffement climatique engendre des cercles vicieux dans un milieu très fragile. Auparavant, le climat continental hyper-sec ne donnait que 40 mm de précipitations par an. «Il arrive aujourd’hui qu’on ait 80 mm en une seule journée», note Valentina Dmitrieva. Résultat: l’intensité des inondations est décuplée. Celles, habituelles, qui accompagnent la fonte des neiges fin mai, accélèrent l’érosion des bords de rivière. Une seconde vague d’inondations survient fin juillet à cause des pluies anormales. Mais le plus terrible, c’est la troisième inondation, fin août. Elle est provoquée par les lacs qui débordent [la Yakoutie en compte plus d’un million] et les eaux noires résultant de la fonte du pergélisol, juste avant le retour de l’hiver. Les habitations n’ont pas le temps de sécher que le gel survient et tout doit être abandonné. Il n’y a pas de budget pour aider la population, le gouvernement de la république n’est pas préparé pour ce genre de catastrophe. Les villages du nord de la Yakoutie, où vit 10% de la population de la république, sont très isolés. Même les aéroports sont inondés.
Les pluies anormalement importantes viennent de la rétraction de la calotte glaciaire polaire, qui découvre depuis une décennie l’océan Arctique, note Semion Gotovtsev. Ces masses humides venues du nord dérèglent le climat et décuplent les précipitations. En hiver, elles créent un manteau neigeux épais, qui isole le sol de l’air glacial. Le froid de la surface ne peut plus pénétrer en profondeur. Le surplus neigeux contribue ainsi à l’apparition de «talik», c’est-à-dire de couches dégelées toute l’année. «Le cycle de l’eau est bouleversé, insiste Gotovtsev. Les lacs débordent, tout se transforme en marais, c’est un désastre et de nombreux villages doivent être reconstruits. De très nombreuses digues de pergélisol doivent être renforcées, parce qu’en fondant, elles vont s’effondrer. C’est un processus très rapide et on observe une nette accélération au cours de la dernière décennie.»
Quelques craintes exagérées
Le péril touche particulièrement la toundra couvrant le nord de la Yakoutie. Dans le sud, la forêt (taïga) résiste mieux aux changements climatiques, mais les processus thermokarstiques déforment à ce point le terrain que les arbres se mettent à pencher dans tous les sens, d’où l’expression locale de «forêt ivre». La taïga est toutefois menacée par les incendies (à 60% causés par l’activité humaine) et par la coupe de bois excessive à des fins commerciales, assure Trofim Maximov, directeur du centre de biochimie et de climatologie à l’Institut des sciences naturelles de Yakoutsk. «Si nous étendons la forêt, nous pouvons contrer le réchauffement climatique, et pas uniquement en Yakoutie. Mais il faut des financements et c’est pourquoi nous devons convaincre la population et les politiques.»
Dans la vague de fléaux s’abattant sur la Yakoutie, il semblerait que quelques exagérations aux contours eschatologiques se soient glissées. Par exemple l’annonce que de monstrueuses poches de méthane formées par la fonte du pergélisol pourraient monter à la surface et éclater (voire exploser). «C’est une erreur due à l’utilisation d’une modélisation erronée basée sur des mesures épisodiques lors de périodes trop courtes. Quinze ans, c’est trop peu pour étudier l’évolution du terrain», rassure Trofim Maximov. Le terrifiant dégel de microbes et bactéries centenaires, voire millénaires, connus ou inconnus, ne s’est pas non plus vérifié. La «peste sibérienne», appelée chez nous fièvre charbonneuse, a effectivement refait surface à cause du dégel de charniers, mais la maladie est aujourd’hui facilement traitée par des antibiotiques. La maladie rongeant le «gel éternel» semble en revanche plus incurable que jamais.
« Nous avons choisi d’habiter un lieu d’une profonde poésie qui n’est pas animé par une haine du système, mais habité par du beau et du vivre-ensemble. La désobéissance fertile s’oppose à la destruction du vivant pour régénérer notre environnement. En assumant ce choix de vie, nous souhaitons que celles et ceux qui veulent vivre au plus près de la Nature ne soient plus traités comme des marginaux. » Jonathan Attias, pionnier dans la désobéissance fertile
29 avril 2019 - Laurie Debove
La révolution aurait-elle lieu dans les bois ? Vivre au plus près de la Nature tout en participant à la régénération du vivant, sans attendre que la législation évolue en faveur de notre environnement : voici venu le temps de la désobéissance fertile.
Peuple de la forêt, hors-la-loi ?
Après la désobéissance civile, place à la désobéissance fertile ? Partout en France, des personnes expérimentent d’autres modes de vie, au plus près possible de la Nature, avec pour « objectif absolu de régénérer la Vie, sans se préoccuper des lois existantes ». Où la désobéissance civile dénonce une injustice perpétrée par une institution pour la changer, la désobéissance fertile veut permettre l’expérimentation et la création de nouvelles sociétés respectueuses du vivant, sans que ses habitants soient inquiétés par les forces de l’ordre.
« Aujourd’hui, c’est toujours l’économie qui prend le pas sur la Nature pour promouvoir de nouvelles lois. En étant obligés de chiffrer les bénéfices de la Nature pour la protéger, on perpétue unsystème basé sur l’accumulation de richesses et de profits, comment alors espérer un vrai changement ? Face à l’urgence climatique, il y a une réelle nécessité d’apprendre à vivre autrement, de sortir de l’anthropocène pour aller vers un « Naturocène ».Ces quatre dernières années, je me suis beaucoup investi dans les lois et j’ai vu la lenteur avec laquelle les choses évoluent. La loi peut faire jurisprudence sur une situation donnée, mais il faut que nous puissions avant toutexpérimenter par nous-mêmes.» Jonathan Attias, pionnier dans la désobéissance fertile
Jonathan et Caroline ont choisi d’habiter dans une forêt en Corrèze avec leurs deux enfants de façon autonome dans une communauté d’une dizaine de personnes. La maison leur a coûté moins de 1 000 euros alors qu’elle est bioclimatique. Ils ont construit eux-mêmes leur cabane de 40m2 avec des matériaux trouvés sur place : du bois, de la terre et du foin. Ce choix de vie radical n’est pas un long fleuve tranquille, ils ont énormément réduit leurs besoins pour vivre en accord avec leurs valeurs : récupération de baies vitrées en déchèterie, un poêle à bois pour la maison, une machine à laver avec pédalier, un chauffe-eau solaire, et bientôt la transformation d’huile de friture en carburant. Ils refusent également toute aide sociale comme le RSA.
Crédit Photo : Jonathan et Caroline
Créer une solidarité
Ce droit à l’expérimentation se veut populaire et accessible à tous. En effet, de nombreux éco-lieux restent assez élitistes avec un prix d’achat pouvant aller de 300 000 à 1 million d’euros, loin d’être à la portée de toutes les bourses, même quand des personnes se constituent en groupe pour les acheter. Jonathan veut ainsi créer une plateforme internet pour que les propriétaires de terrains sensibles au concept puissent le mettre à disposition des gens qui veulent créer ce genre de projet. Les propriétaires pourraient en échange bénéficier de biens produits sur les lieux : nourriture, vannerie, menuiserie…
Ses créateurs proposent de voir la désobéissance fertile comme une posture philosophique que chacun-e peut s’approprier, pas besoin d’adopter soi-même ce mode de vie pour y participer : un médecin peut décider de soigner gratuitement les habitants, un magasin mettre à disposition ses invendus, un urbain décider d’investir dans un terrain, des soutiens intellectuels ou pragmatiques, etc.
« Nous avons choisi d’habiter un lieu d’une profonde poésie qui n’est pas animé par une haine du système, mais habité par du beau et du vivre-ensemble. La désobéissance fertile s’oppose à la destruction du vivant pour régénérer notre environnement. En assumant ce choix de vie, nous souhaitons que celles et ceux qui veulent vivre au plus près de la Nature ne soient plus traités comme des marginaux. » Jonathan Attias, pionnier dans la désobéissance fertile
Crédit Photo : Jonathan et Caroline
Vivre en régénérant la forêt et le vivant
Jonathan et Caroline n’ont pas choisi de s’installer en forêt par hasard. Les forêts françaises sont en danger : elles souffrent de malforestation et deviennent peu à peu d’immenses monocultures sans vie, bradées pour les secteurs privés. La désobéissance fertile souhaite encourager le rachat et la protection des forêts pour empêcher leur annihilation, et leur laisser le temps de se régénérer.
Dans cette lignée, l’association Faîte et Racines s’est ainsi constituée en Corrèze pour acquérir une forêt mixte de 8ha, comprenant principalement des châtaigniers et pins sylvestres, mais aussi du hêtre, du chêne, du bouleau, de l’épicéa, du charme et du merisier. L’association veut empêcher la coupe rase de cette forêt pour favoriser des usages vivriers ou professionnels en accord avec son rythme de vie, et sans détruire toutes les espèces qui y vivent.
Dès juin et juillet, Jonathan, Caroline et leurs pairs vont ouvrir leur lieu de vie pour former gratuitement ceux qui le souhaitent à la construction de cabanes à partir de matériaux naturels, et de la vie en pleine nature. Leur but : inspirer la création d’autres lieux de désobéissance fertile.