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  • Potagers urbains aux USA

     

    Puisqu'en France, on finit toujours par copier les USA, on peut espérer que ça finira par prendre ici aussi...

    De toute façon, la misère sociale va aller en s'amplifiant, les restos du coeur n'arrivent plus à fournir, des centaines de milliers d'étudiants ne mangent pas à leur faim, des enfants d'école primaire arrivent le matin le ventre vide...

    Il faudra nécessairement que des communautés s'organisent, partout, à la ville comme à la campagne.

    https://www.culturesenville.fr/blog/detroit-renouveau-agriculture-urbaine/

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    Détroit : le renouveau par l’agriculture urbaine

    Accueil > Blog > Détroit : le renouveau par l’agriculture urbaine

    Détroit compte aujourd’hui 105 000 parcelles inoccupées, qui abritent une biodiversité inhabituelle, dont une végétation pionnière comme le « palmier ghetto » (Ailanthus altissima), ainsi que des ratons laveurs, des renards et des faisans. Une fois mises en valeur par l’agriculture, ces terres en friche peuvent créer des opportunités pour les mouvements sociaux qui luttent pour la justice alimentaire et qui visent à transformer le système alimentaire en faisant pression pour un plus grand contrôle de la production et de la consommation par ceux qui sont socialement marginalisés. Par exemple, entre 350 et 1 600 jardins communautaires et fermes urbaines ont été recensés à Detroit, la plupart étant gérés par des groupes ou des organisations qui ont récupéré de manière informelle les espaces vacants.

    Transformation de Détroit par l’agriculture

    Alors que le système urbain complexe de Détroit s’est effondré et que la ville a perdu des capitaux, des ressources humaines, des entreprises et des structures organisées diverses ; de nouveaux espaces urbains se sont développés. Les changements les plus visibles dans le paysage de Détroit sont les projets d’agriculture urbaine qui se sont étendus à tous les terrains vagues du comté et l’émergence d’une nouvelle morphologie et d’un nouveau métabolisme urbain. On pourrait dire que la transformation en une agriculture de type rural de l’ensemble du paysage des petits îlots urbains pourrait être le futur de Detroit.

    Le document explore la scène contemporaine de l’agriculture urbaine à Detroit en analysant l’éventail des projets et des organisations de l’agriculture urbaine. Detroit démontre le rôle important de la base, des ONG, des entrepreneurs et de la planification et de la politique gouvernementale. L’étude de cas révèle la valeur de l’agriculture urbaine dans la conception des paysages urbains et des systèmes alimentaires des villes en déclin et l’importance d’un réseau systémique dans ce processus. Cette approche pourrait être transférée aux villes européennes plutôt qu’à des projets et stratégies individuels qui doivent toujours être soigneusement contextualisés.

    De nombreux habitants sont venus créer leur propre jardin

    C’est ainsi que quelques 1 500 jardins et fermes urbaines, comme la ferme Suzanne à Paris, ont été repris sur des centaines d’hectares vacants de la ville, dans les arrière-cours des familles et des écoles. Dès lors, la première agriculture durable d’Amérique se développe, lentement mais sûrement, à Detroit grâce à la Michigan Urban Agriculture Initiative ou au Greening of Detroit et à d’autres associations également.

    L’association Greening of Detroit cultive un jardin urbain. De nombreux habitants sont venus créer leur propre jardin. Dans l’espace vert du marché de l’est, il y en a plus d’un millier qui ont suivi des cours. Certains pour leur propre production, d’autres pour démarrer leur entreprise. Il y aura 350 à 5 000 emplois disponibles dans toute la ville.

    La Michigan Urban Agriculture Initiative est une organisation à but non lucratif, mais sa mission est d’utiliser l’agriculture urbaine comme une plateforme pour promouvoir l’éducation, la durabilité et la communauté dans un effort pour élever et responsabiliser les quartiers urbains.

    détroit création de jardins en ville

    Avec le soutien de partenaires tels que des marques durables, BASF, General Motors et Herman Miller, ils ont commencé à rénover un bâtiment vacant de trois étages et de 3 200 pieds carrés que l’IMF avait acheté aux enchères, pour créer un centre de ressources communautaires (CRC) durable et éco-énergétique.

    D’autres travaux pour l’agriculture comprennent la restauration d’une maison pour l’hébergement des étudiants stagiaires et d’une maison conteneur à deux chambres. Ils ont également entrepris de transformer une maison endommagée par un incendie (dans laquelle il ne restait que le sous-sol) en une citerne de collecte d’eau pour irriguer le jardin.

    Que ce soit pour l’initiative d’agriculture urbaine du Michigan ou le verdissement de Détroit, la récupération des terres a été la réponse à un sentiment légitime d’abandon de la part de la population. Tee Rushdan explique : « si je ne peux pas faire confiance au gouvernement, je le ferai moi-même ».

    Les premiers succès sont visibles

    Dan Pitera, professeur d’architecture à l’Université de Detroit Mercy, affirme que la perception de l’extérieur a changé. « De l’apocalypse à un état de changement plein d’espoir. » Il a également la vision d’un Detroit écologique et socialement juste. Quelle est cette vision à l’ordre du jour ? Dan Pitera secoue la tête. « Nous avons d’abord besoin de l’engagement des gens, puis nous pensons à l’agriculture et à l’urbanisme.

    La ville propose un nouveau plan d’occupation des sols « sur une toile verte » qui donnera le ton de la ville et de son développement. Elle propose une sorte de « refondation » d’une grande ville industrielle en une ville plus verte, plus diversifiée et plus vivante tant sur le plan social qu’économique.

    L’agriculture urbaine à Détroit, un moyen de changement

    Un refrain familier de plusieurs milliers de personnes impliquées dans l’agriculture urbaine à Detroit est qu’elles ramènent la ville à ses racines préindustrielles. À la fin du XVIIIe siècle, Detroit était un petit comptoir commercial entouré de champs et de fermes. « Vous savez, cette région a commencé comme une terre agricole et nous y retournons tout simplement », explique Rich Wieske, qui gère plus de 60 ruches dans le centre-ville de Detroit et vend le miel qui en résulte à des fins commerciales.

    En effet, l’agriculture urbaine à Détroit apparait comme un moyen de résoudre et d’atténuer une série de problèmes liés au déclin urbain structurel. Loin de se limiter à son objectif nutritionnel, elle a trouvé un rôle en tant que pratique multifonctionnelle ayant des impacts sur l’éducation, le développement économique, les interactions sociales, l’urbanisme et la santé des habitants et des écosystèmes. Ainsi, l’agriculture urbaine à Détroit est susceptible de contribuer à lutter contre les « déserts alimentaires » c’est-à-dire les zones à faibles revenus dépourvues de commerces de détail alimentaires et où les taux d’obésité sont extrêmement élevés.

    La création de chaînes d’approvisionnement alimentaire locale, gérées par la communauté, offrirait non seulement des possibilités d’emploi, mais permettrait également l’émergence de systèmes plus inclusifs, écologiques et sensibles à la nourriture pour les groupes ethniques minoritaires. Les mouvements pour la justice alimentaire utilisent l’agriculture urbaine comme stratégie pour défendre les droits de la communauté afro-américaine. L’agriculture urbaine offrirait également des possibilités d’emploi dans la production, la distribution et la commercialisation.

    De plus, l’agriculture urbaine pourrait être un moyen de lutter contre le déclin de la solidarité provoquée par l’effondrement des réseaux sociaux professionnels et de voisinage. Certains auteurs ont également fait valoir que le verdissement des terrains vagues pourrait avoir un impact sur le sentiment de sécurité des habitants.

    Par |16 avril 2020|Agriculture Urbaine

     

     

  • Vive le réchauffement climatique...

    Avec le fourgon, on est parti une semaine en Gironde, dans les forêts des Landes. 

    On n'a pas croisé beaucoup de monde, voire même personne à certains endroits qu'on affectionne mais dans un magasin, j'ai entendu une dame, la soixantaine, qui se réjouissait de ce "magnifique beau temps". Et la commerçante, dans la même tranche d'âge, de répondre que c'était vraiment dommage que les touristes soient déjà partis.

    C'étaient juste deux personnes mais je suis persuadé que beaucoup d'autres tiennent le même discours. On ne peut pas parler de "réflexions" car encore faudrait-il qu'il y ait eu un raisonnement. Ce comportement me sidère. Des personnes de mon âge et pourtant dans l'ignorance ou l'indifférence, juste concentrées sur leur bien-être personnel. Il est impossible qu'elles n'aient pas entendu parler du "réchauffement" et des conséquences. Elles vivent apparemment dans la région, elles ont sans doute suivies avec inquiétude les incendies de l'été dernier.

    Je ne comprends pas.

    Bien évidemment qu'on a "profité" de ces températures douces, voire chaudes, de la température de l'océan dans lequel on rentrait sans aucune difficulté et dans lequel on pouvait nager pendant aussi longtemps que l'envie nous prenait. On a pédalé sur les pistes cyclabes, juste habillés de notre cuissard et d'un tee-shirt et plus d'une fois, on a transpiré. Vélo le matin, plage l'après-midi jusqu'au coucher du soleil. Mais on a traversé des forêts calcinées...

    Du sommet de la dune du Pyla, l'horizon qui s'ouvrait était juste effrayant. Des arbres calcinés comme des allumettes brulées, plantées côte à côte, à perte de vue. Et pourtant, le "camping des flots bleus, célèbre lieu cinématographique, était ouvert. On voyait des camping-cars stationnés dans un décor ravagé. Le tourisme avait déjà repris.

    Et pour avoir lu quelques articles sur la région, les propriétaires forestiers sont pour la plupart décidés à replanter les mêmes essences résineuses, car ce sont les plus rentables, arguant que de toute façon, rien d'autre ne pousse. Ce qui est absolument faux. Chênes verts, chênes tauzin, chênes liège et eucalyptus, par exemple, poussent dans les zones laissées sauvages. Alors, évidemment, après des décennies de plantations de résineux, le sol n'est plus favorable et d'ailleurs, rien ne pousse ou presque sous les plantations en ligne des pins maritimes. Contrairement aux résineux, la litière des feuillus est non toxique, ce qui attire une extraordinaire biodiversité. L'activité biologique du sol, donc la remontée et le maintien des substances nutritives dans la couche arable du sol, s'intensifie au point de la fertiliser au fil des années. Est-ce qu'il est judicieux de continuer ? Il y aura d'autres incendies, c'est inévitable.

    Aujourd'hui, 1 er octobre 2023, à 600 mètres d'altitude, dans la Creuse, il a fait 29 degrés. Notre puits est quasiment sec et les onze citernes de mille litres réparties sur le terrain arrivent au bout de leurs réserves.

    On sait qu'il faudra garder les graines des légumes qui auront le mieux supporté cet été interminable ou cette absence d'automne...En prévision des années à venir.

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  • "Ce que les Kogis ont à nous dire"

    Peuple de la Sierra Nevada de Santa Marta en Colombie, les Kogis ou Kagba sont les descendants des Tayronas, une des plus grandes sociétés précolombiennes du continent sud-américain et surtout une des plus anciennes : leur histoire pourrait remonter à plus de 12000 ans.

    Ces 25 000 hommes et femmes mènent aujourd’hui une existence simple et spirituelle, respectueuse de la Terre qui leur a donné naissance. Accueillant très peu d’étrangers, ils se sont pourtant donné la mission de transmettre leurs savoirs ancestraux aux hommes «civilisés» afin qu’ils puissent renouer avec l’harmonie du monde.

    Pour les kogis, le territoire est considéré comme un «corps» territorial, reflet du fonctionnement des constellations autant que celui du corps humain. Où vivent-ils ? Quelle est leur «vision» du territoire ? Que nous apprennent les sagesses et cultures amérindiennes ?

    Depuis 1997, l’association Tchendukua, ici et ailleurs travaille à restituer des terres ancestrales aux peuples de la Sierra Nevada de Santa Marta dans le nord de la Colombie (particulièrement les Kogis et les Wiwas) à appuyer la régénération de la biodiversité et à engager un dialogue créatif avec eux.

     

  • "Le grand récit des montagnes"

    Le Grand récit des montagnes — Une randonnée scientifique à la découverte des lois du monde, de Blandine Pluchet, aux éditions Flammarion, mai 2022, 272 p., 20 euros.

     

    https://reporterre.net/Les-montagnes-ces-temples-de-la-science

    Culture et idées

    Les montagnes, ces temples de la science

     

    Les montagnes, ces temples de la science

    Formation des roches, réchauffement climatique... Les montagnes abritent de nombreux savoirs. Dans une randonnée scientifique, l’autrice Blandine Pluchet propose d’aller à leur découverte.

    Ah qu’ils sont beaux, les paysages de montagne ! De vrais « musées à ciel ouvert », clament les agences de tourisme, des vues « à couper le souffle », renchérissent les réseaux sociaux… Mais la montagne n’est pas une image, elle est vivante, et on éprouvera des émotions bien plus fortes en découvrant son histoire depuis des milliards d’années qu’en arpentant ses sites fragilisés.

    Physicienne de formation, l’écrivaine Blandine Pluchet propose cet élargissement du regard dans Le Grand récit des montagnes (éd. Flammarion), en révélant leur vie entre ciel, terre et cosmos.

    On la suit d’autant plus volontiers que sa verve est claire et chaleureuse, et que son livre, conçu comme une randonnée scientifique, mêle subtilement science et poésie du monde. Chemin faisant, au gré de rencontres variées (glaciologues, astronomes, conteuse…) et de visites de centres européens de la recherche sur le climat, la haute montagne révèle une facette d’elle-même peu connue : celle d’une sœur fantasque et spirituelle, devenue vigie du réchauffement climatique.

    Les étapes de la randonnée scientifique proposée par Blandine Pluchet dans son livre. © Flammarion

    De la voûte céleste des anciens à l’exploration de la matière noire

    Ce n’est pas un « paysage » que Blandine Pluchet décrit dans Le Grand récit des montagnes, c’est tout un « monde » auquel nous sommes profondément liés. Un monde qui est à la fois un riche écosystème naturel et culturel, avec son réservoir de mythes et légendes, et un terrain d’observation exceptionnel sur l’Univers. De l’époque des téméraires savants-alpinistes, au XVIIᵉ siècle, aux recherches actuelles sur les implications du réchauffement climatique, la science en montagne a toujours été riche de perspectives.

    Le ciel, par exemple, qu’observent plusieurs centres scientifiques européens en altitude ou en sous-sol, pour éviter tout rayonnement cosmique, c’est à la fois cette voûte céleste dans laquelle des peuples de l’Antiquité lisaient l’avenir ; ce joyau nocturne à l’abri duquel un tiers des vertébrés trouve refuge ; ce cosmos sillonné de milliards d’étoiles dont les rayons nous modèlent — ils sont en particulier responsables, par leurs interférences avec l’ADN, de mutations au sein du vivant qui contribuent à l’évolution permanente de tous les êtres sur Terre ; cette matière noire, source d’énergie de la Terre, à l’origine des plaques tectoniques et donc de nos paysages, qu’étudie le Laboratoire souterrain de Modane, etc.

    La Schneefernerhaus, en Bavière (à 2 600 mètres d’altitude), sert aux scientifiques à explorer les nuages, les rayons cosmiques, la vapeur d’eau, etc. Wikimedia Commons/CC BY-SA 3.0/Marcus Hebel

    C’est aussi cette troposphère (jusqu’à 10 kilomètres d’altitude), où se fabriquent le climat et ses dérèglements. Et quel meilleur endroit pour saisir son processus que la terrasse de la Schneefernerhaus (ou Maison du glacier des neiges), un institut de recherche planté à 2 600 mètres d’altitude sur les pentes de la Zugspitze, en Bavière ?

    De cette terrasse-atelier donnant sur un ciel miroitant de vifs contrastes de lumière, qui devient théâtre fantasque les jours de mauvais temps (feux de Saint-Elme, halos divers…), on visualise bien mieux les loopings des masses d’air sur les sommets, jusqu’à la formation des nuages, pourvoyeurs de pluie ou de neige. C’est la touche Blandine Pluchet, qui, en bonne pédagogue (elle est aussi guide et autrice de livres pour enfants), sait que l’on comprend mieux ce que l’on parvient à se représenter.

    À 2 600 mètres d’altitude pour visualiser le changement climatique

    Après une brève initiation à la circulation globale de l’atmosphère à l’échelle de la planète, le processus du changement climatique vous paraîtra aussi bien plus clair (Hannes Vogelmann, le physicien au laser vert qui a « la montagne dans le sang », y contribuera). Surtout vous comprendrez que ce n’est pas un phénomène « mécanique », mais une rupture des équilibres naturels qui se sont construits des millions d’années durant, et qui, dans un effet domino, va s’accentuant.

    Si l’excès de vapeur d’eau dans l’atmosphère, induit par les activités humaines, frappe déjà avec ses canicules, orages violents et fortes pluies, il pourrait entraîner d’autres bouleversements météorologiques en cas, par exemple, de modification des grandes circulations d’air comme le jet-stream. De même, la fonte des glaciers pourrait amoindrir les réserves d’eau européennes, puisque ceux-ci alimentent indirectement nos grands fleuves (Rhône, Rhin, Danube, etc.).

    Sans même parler du pergélisol, cette glace qui sert de socle aux montagnes et couvre un quart de la surface mondiale, dont la fonte pourrait libérer des virus inconnus et provoquer un affaissement des reliefs…

    Depuis la terrasse de la Schneefernerhaus, à 2 600 mètres d’altitude, le physicien Hannes Vogelmann lance son lidar pour étudier les particules en suspension dans l’atmosphère. © Blandine Pluchet

    Le récit de ces évolutions presse le cœur, d’autant que Blandine Pluchet rappelle avec une foultitude de détails combien l’écosystème montagnard est créatif, surprenant : formation et variété des nuages, des flocons de neige, des quartz, des lumières invisibles (infrarouge, ultraviolette, etc.), des cristaux et pierres fines, de la glace, etc. Saviez-vous, par exemple, qu’il existe non pas une, mais une bonne dizaine de variétés de glace, selon les conditions de température et de pression, et que l’épaisseur d’un manteau neigeux se lit comme les cernes d’un arbre ?

    Disparues, les montagnes continuent d’exister

    Les reliefs ont également une relation très forte avec la terre : en descendant des hauteurs, leurs rivières, par exemple, charrient les fruits de l’érosion qui fertilisent les plaines. Et question « développement durable », ces interrelations entre haut et bas sont parfois époustouflantes.

    Pour l’illustrer, Blandine Pluchet nous entraîne dans un émouvant voyage temporel jusqu’à la formation de la Terre, il y a 4,6 milliards d’années. Le périple débute en Poitou, avec une petite fleur, la gagée de Bohême. Elle va révéler à notre curieuse baroudeuse, après une enquête géologique avec le naturaliste Mathieu Boullant, que cette coquette aux allures de crocus se nourrit de sédiments laissés par une montagne disparue, l’ex-Massif armoricain, et par l’ancienne mer du Bassin parisien. Preuve que les montagnes continuent d’exister, et d’agir bénéfiquement, bien longtemps après avoir disparu de nos paysages.

    La vie de la gagée de Bohême, petite fleur du bocage poitevin, démontre que les montagnes continuent d’exister bien longtemps après avoir disparu. Wikimedia Commons/CC BY-SA 3.0/Stefan.lefnaer

    « La vie est un miracle. Finalement la Terre, c’est une oasis dans un univers infini, stérile. On ne sait pas s’il y a la vie ailleurs… C’est quelque chose d’exceptionnel d’exister, d’avoir des formes de vie complexes », explique l’autrice à Reporterre. Et plutôt que rêver à une colonisation de Mars, « l’idée, maintenant, ce serait de parvenir à se penser dans une globalité, et de porter un regard différent sur les êtres qui nous entourent ».

    Un épisode de l’histoire des sciences rapporté dans Le Grand récit des montagnes témoigne de nos résistances à adhérer à cette vision. Il concerne la théorie de la tectonique des plaques, formalisée par l’astrologue Alfred Wegener dès 1915 (reconnaissant le mouvement permanent du monde et expliquant en partie le modelé de nos paysages), mais qui dut attendre les années 1950-1960 et une océanographe plus fine que le sexisme, Marie Tharp, pour se faire admettre.

    Certainement, résume Blandine Pluchet, parce que la notion d’impermanence, chère aux philosophies orientales, était encore difficile à accepter par la science occidentale. Comme si notre rapport au temps et à la « nature » restait surdéterminé par la volonté de maîtrise.

    Cristal de glace (sculpture de vapeur d’eau) photographié dans un tunnel à 50 mètres sous la Schneefernerhaus, en Bavière. © Blandine Pluchet

    Salutaire ouverture, la réflexion qu’offre Le Grand récit des montagnes sur les sciences de l’environnement permet de comprendre qu’il devient possible, et urgent, de repenser cette posture de domination, pour aller vers davantage de solidarité avec les écosystèmes. Puissantes et gracieuses, les montagnes nous y encouragent en exprimant le passage du temps à la fois comme pérennité et renouveau. N’est-il pas émouvant de voir disparaître ces vieux rocs en quelques secondes sous un brouillard épais, et réapparaître aussi vite, comme si la brume n’avait été qu’un rêve ? Quel plus bel éloge du renouvellement permanent du regard ?

     

  • Les géants du pétrole

    Réchauffement climatique : la Californie poursuit des géants du pétrole pour dommages et tromperie

     

    La plainte au civil a été déposée vendredi auprès de la Cour supérieure de San Francisco contre les géants pétroliers.

    Article rédigé parfranceinfo avec AFP

    France Télévisions

    Publié le 16/09/2023 15:08Mis à jour le 16/09/2023 15:44

    Temps de lecture : 1 min

    La compagnie pétrolière Exxon Mobil, photographiée à Miami (Floride), le 31 janvier 2023. (JOE RAEDLE / GETTY IMAGES NORTH AMERICA / AFP)

    La compagnie pétrolière Exxon Mobil, photographiée à Miami (Floride), le 31 janvier 2023. (JOE RAEDLE / GETTY IMAGES NORTH AMERICA / AFP)

    La Californie vient d'engager des poursuites contre cinq des plus grosses compagnies pétrolières du monde. Le motif ? Elles auraient causé des milliards de dollars de dégâts tout en trompant l'opinion en minimisant les risques pour le climat liés aux énergies fossiles.

    Cette action en justice, révélée par le New York Times et confirmée par le gouverneur de l'État, fait suite à de nombreuses autres lancées par des villes, comtés et États américains contre des intérêts liés aux énergies fossiles en raison de leur impact environnemental, sur fond d'accusations de décennies de campagnes de désinformation.

    "Pour que les gros pollueurs rendent des comptes"

    La plainte au civil a été déposée vendredi auprès de la Cour supérieure de San Francisco contre les géants pétroliers Exxon Mobil, Shell, BP, ConocoPhillips et Chevron, qui a son siège en Californie. L'American Petroleum Institute est également visé, précise le New York Times.

    "Pendant plus de cinquante ans, Big Oil [surnom désignant les géants du secteur pétrolier] nous a menti, cachant le fait qu'ils savaient depuis longtemps combien les énergies fossiles qu'ils produisaient étaient dangereuses pour notre planète", a déclaré le gouverneur de l'État, Gavin Newsom, dans un communiqué publié vendredi. "La Californie agit pour que les gros pollueurs rendent des comptes", a-t-il ajouté.

     

    L'hypocrisie dans toute sa splendeur.

    Des cabinets d'avocats qui ont senti le bon coup.

    Les géants du pétrole sont moins responsables que les politiciens et les consommateurs.

    Exxon et tous les autres répondent à la demande mondiale et surfent sur les autorisations délivrées par les états. Bien sûr qu'ils savaient et depuis longtemps mais les politiciens tout autant et les consommateurs qui ont décidé pour leur part de ne plus se voiler la face.

    Les politicens n'ont rien fait parce que les consommateurs-électeurs ne le voulaient pas. Et même aujourd'hui, la masse refuse d'envisager une rupture dans les modes de vie occidentale.

    Alors engager des poursuites contre les géants du pétrole, c'est juste un business imaginé par des avocats. Rien ne changera tant que les consommateurs-électeurs ne le voudront pas. C'est la masse qui doit influencer le pouvoir.

     

    Le rapport Meadows date de 1972. 

     

    ÉCONOMIE

    IL Y A 50 ANS, LE RAPPORT MEADOWS ALERTAIT SUR LES LIMITES PLANÉTAIRES

     

    En 1972, des scientifiques du MIT publient "Les limites à la croissance", plus connu sous le nom de "rapport Meadows". L’ouvrage a eu a eu l’effet d’une bombe : pour la première fois, des chercheurs alertaient sur les risques d’une croissance économique infinie dans un monde aux ressources limitées. Il devient rapidement un best-seller avant de tomber aux oubliettes. Un demi-siècle après, le livre est devenu une référence, il est réédité dans une version augmentée.

    Denis Meadows Ok

    En 1972 le rapport Meadows a eu l'effet d'une bombe
    COO

    Le rapport Meadows fête ses 50 ans ! Sorti en mars 1972, le livre est publié en France sous le titre "Les limites de la croissance (dans un monde fini)" coécrit avec Donella Meadows, son mari Dennis Meadows et Jorgen Randers. A l’origine, le rapport a été commandé par le Club de Rome aux trois scientifiques de la prestigieuse université américaine MIT. Le but était de s’interroger sur les limites de la croissance économique.

    La réponse est implacable : une société qui consomme et produit toujours plus, pollue aussi toujours plus et sera confrontée à la raréfaction des ressources. Ainsi, les scientifiques estiment que quels que soient les scénarios envisagés, la croissance infinie se heurtera nécessairement à des pénuries de matières premières. En 1972, ils estiment que le monde dispose de 50 ou 100 ans avant d’être confronté à un manque de ressources non renouvelables, à commencer par le pétrole, le gaz, les minerais ou même l’eau. Les auteurs de l’ouvrage conseillent donc aux dirigeants de réguler la croissance s’ils ne veulent pas assister à une multiplication des crises, des famines et même des guerres.

    En pleine 30 glorieuses, l'éphémère succès du rapport Meadows

    Lors de sa sortie, le livre fait un tabac mais le succès est éphémère. En pleine Trente glorieuses, les usines tournent à plein régime pour satisfaire les aspirations de la société de consommation. Dans ce contexte, une remise en question du modèle basé sur une croissance infinie du PIB est peu audible. "Quand j’ai fait cette étude, confie Dennis Meadows à France Culture, je n’avais que 29 ans, j’étais jeune et naïf, et je pensais que si je publiais mes recherches, on en tiendrait compte, on agirait en conséquence, comme quand on voit un iceberg en bateau et qu’on le contourne, c’était mon espoir. Mais voilà, 50 ans après, les dégâts s’empilent les uns sur les autres et nous entrons dans une ère de bascule".

    Les choses ont-elles évolué ? "On compense la pénurie de ressources par de la dette, et on n'a pas fait ce deuil. Réinventer le business à l'aune des limites planétaires est inévitable", répond ainsi Fabrice Bonnifet, président du Collège des directeurs de développement durable (C3D). Certaines entreprises l'ont bien compris et "renoncent à faire du chiffre d’affaires pour ne pas polluer, elles sont entrées dans un monde de "post-croissance", souligne Geneviève Férone Creuzet, co-fondatrice de l’agence Prophil. "Il faut les encourager et faire évoluer les modèles".

    Même si l’idée d’un monde en "post croissance", plus sobre en ressources, fait son chemin, "les travaux de recherches sur ces thèmes sont plus nombreux mais ils restent encore minoritaires", indique Dominique Méda, directrice de l’Institut de Recherche Interdisciplinaire en Sciences Sociales (Iris). Les politiques sont également peu nombreux à s’emparer du sujet. La guerre en Ukraine pourrait faire bouger les lignes. Ce drame rappelle en effet la nécessité de réduire notre dépendance aux énergies fossiles et aux ressources naturelles. Les appels à plus de sobriété se multiplient, ils émanent de l’Etat ou encore des industriels eux-mêmes qui demandent à être rationnés. Il y a 50 ans, le rapport Meadows avait prédit ce scénario et conseillait aux dirigeants de ne pas courir après la croissance, reste à espérer que ces recommandations soient entendues.

    Mathilde Golla @Mathgolla

     

     

  • Comprendre les limites planétaires

     

     

    Sciences

    https://reporterre.net/Qu-est-ce-que-les-limites-planetaires?

    Tout comprendre aux limites planétaires

     

    Tout comprendre aux limites planétaires

    Que sont les limites planétaires ? Quelles sont celles déjà atteintes ? Reporterre explique en cinq points ce concept scientifique : il permet d’évaluer l’impact des activités humaines sur les équilibres de la Terre.

    Le concept scientifique de limites planétaires a pris une importance croissante depuis sa première formulation en 2009. Cinq points pour comprendre.

    Cliquez pour aller directement à l’un des thèmes :

    1. Qu’est-ce que les limites planétaires ?
    2. 
    Un cadre qui se précise depuis 2009
    3. 
    Les limites planétaires atteintes
    4. 
    Les limites planétaires en vue
    5. 
    Une limite planétaire maintenue à distance

    1. Qu’est-ce que les limites planétaires ?

    Les activités humaines menacent les équilibres naturels tels qu’ils existent depuis le début de l’Holocène. Conduits par le chercheur suédois Johan Rockström, du Stockholm Resilience Center, des chercheurs internationaux quantifient ces risques que les perturbations anthropiques font peser sur la planète.

    Pour neuf grands processus impliqués dans le fonctionnement du « système Terre » (le climat, la biodiversité, les forêts, l’eau douce, l’acidification des océans, les cycles de l’azote et du phosphate, pollutions chimiques, les aérosols émis dans l’atmosphère, la couche d’ozone), les scientifiques définissent neuf limites. Franchir chaque limite augmente le risque de déstabiliser l’environnement planétaire de manière irréversible, avec des impacts majeurs pour les êtres vivants. Aujourd’hui, six limites planétaires sont dépassées.

    Les limites planétaires sont différentes des points de bascule du climat. Ici, l’idée n’est pas de trouver le seuil au-delà duquel un système basculerait d’un état à un autre. Mais de mettre en évidence les risques de s’approcher de ce point de non-retour. La limite est une zone d’augmentation forte des risques qui tient compte de l’incertitude, du principe de précaution, mais aussi de l’inertie du système. La limite est ainsi fixée en amont d’un éventuel point de bascule. L’exemple du climat illustre bien cette différence : avant d’atteindre un point de bascule, le changement climatique peut avoir atteint un point de non-retour, car les changements initiés par le réchauffement vont continuer à s’amplifier même si les émissions de gaz à effet de serre sont stoppées.

    Les segments en orange sont ceux pour lesquels la limite est atteinte ou franchie. La limite est une zone d’augmentation forte des risques. © Stéphane Jungers/Reporterre

    2. Un cadre qui se précise depuis 2009

    Le cadre des limites planétaires a été posé pour la première fois dans la revue Nature en 2009. Lors de cette première évaluation, trois limites étaient déjà atteintes : le changement climatique, la disparition trop rapide des espèces et les rejets d’azote menaçant les écosystèmes marins. Et deux limites restaient à quantifier : les pollutions chimiques (dit aussi « nouvelles entités ») et les rejets d’aérosols dans l’atmosphère.

    Six ans plus tard dans Science, les risques ont été réévalués. Les chercheurs constataient qu’une nouvelle limite avait été franchie, celle des rejets de phosphates dans l’environnement. Par ailleurs, la limite sur la biodiversité s’est complexifiée. Les chercheurs estiment en effet que la disparition des espèces ne suffit pas à mesurer la menace, puisque toutes les espèces ne se valent pas et que certaines contribuent plus à l’équilibre des écosystèmes que d’autres. Les effets observables du changement climatique ont par ailleurs poussé les experts à rabaisser cette limite.

    En 2022, deux nouvelles publications ont encore précisé les risques. En janvier dans Environmental Science & Technology, la limite des nouvelles entités a été évaluée pour la première fois. Puis, en avril dans Nature, la définition de la limite sur la ressource en eau douce a été affinée, avec la prise en compte de l’humidité des sols.

    3. Les limites atteintes

    • Le changement climatique :

    La limite du changement climatique est mesurée en fonction de la concentration atmosphérique de dioxyde de carbone (CO2). Celle-ci ne doit pas dépasser une valeur située quelque part entre 350 parties par million (ppm) et 450 ppm. La teneur moyenne actuelle est d’environ 420 ppm par rapport à l’ère préindustrielle. Le dépassement de cette limite nous fait entrer dans l’Anthropocène.

    • L’intégrité de la biosphère :

    D’abord intitulée « érosion de la biodiversité », cette limite évalue les risques liés à la perte de la diversité du vivant. En dessous de 10 espèces perdues par an pour 1 million, l’érosion de la biodiversité est jugée sans effet majeur sur la biosphère. Cette limite est largement dépassée puisque le taux de disparition des espèces évalué aujourd’hui est de 10 à 100 fois supérieur. Un autre indicateur a été ajouté pour mieux prendre en compte le rôle des espèces dans le fonctionnement des écosystèmes : la diversité fonctionnelle des espèces. Cette deuxième limite reste néanmoins à évaluer.

    • Le changement d’usage des sols :

    L’indicateur de risques retenu est la perte des forêts. En particulier parce que ces biomes ont des effets rétroactifs importants sur le climat et qu’ils abritent une grande biodiversité. Une valeur supérieure est accordée aux forêts tropicales et boréales, par rapport aux forêts tempérées. En moyenne, rester sous cette limite impose de conserver 75 % du couvert forestier. Au niveau mondial, le taux moyen actuel est estimé à 62 %.

    Fin avril, une étude a montré qu’une sixième limite planétaire, celle de l’humidité des sols, a été franchie. Unsplash/CC/Maud Correa

    • La perturbation des cycles biochimiques de l’azote et du phosphore :

    Les rejets de phosphore et d’azote dans les océans représentent aujourd’hui un risque pour l’intégrité des écosystèmes marins, à cause des phénomènes d’eutrophisation des milieux. L’agriculture industrielle dans quelques régions du monde est à elle seule responsable du dépassement de cette limite planétaire.

    • Les nouvelles entités introduites dans l’environnement :

    Cette limite concerne le risque que font peser les substances créées par l’humain sur l’environnement (les molécules de synthèse, les nanoparticules, etc.). Évaluée seulement en 2022, cette limite est dépassée tant les volumes produits et leur dissémination sur l’ensemble du globe sont jugés hors de contrôle. Dans leur publication, les chercheurs rappellent que le volume des produits chimiques a été multiplié par 50 depuis 1950. Et qu’une infime partie des 350 000 substances mises sur le marché ont été évaluées sur leurs dangers pour la santé et l’environnement.

    • L’utilisation d’eau douce :

    Si en 2015, la limite de la ressource en eau douce était loin d’être franchie, c’est que l’indicateur n’était pas le bon, ont rectifié les chercheurs en 2022. Seuls les risques qui pèsent sur l’eau dite « bleue », autrement dit les lacs, les rivières et les nappes souterraines, étaient pris en compte. Fixée à un prélèvement annuel de 4 000 km3/an contre 2 600 km3/an actuellement, la limite eau bleue n’est pas atteinte. Mais un autre risque, le changement du niveau d’humidité des sols (appelé « eau verte »), vient s’ajouter. Et là, la limite est franchie, selon les chercheurs, face à l’ampleur des changements observés, avec des sols très asséchés ou au contraire détrempés.

    4. Les limites en vue

    • L’acidification des océans :

    Cette limite est directement liée à la concentration de dioxyde de carbone dans l’atmosphère, puisque la dissolution de ce gaz dans l’océan entraîne une acidification de l’eau de mer. La limite correspond au niveau d’acidité qui entraînerait une dissolution du carbonate de calcium formé par de nombreux organismes marins, comme les coquilles des mollusques ou le corail. Une limite qui sera dépassée si les émissions se poursuivent.

    • La charge en aérosols atmosphériques :

    En plus d’avoir des effets sur la santé humaine, les particules émises dans l’atmosphère par la combustion des énergies fossiles modifient régionalement le système climatique. Elles menacent en particulier la mousson indienne qui pourrait disparaître au profit d’un régime sec. Avec des conséquences inquiétantes pour la région. Pour l’instant, cette limite, établie pour l’Asie du Sud, n’a pas été extrapolée à l’échelle globale.

    5. Une limite maintenue à distance

    • La diminution de la couche d’ozone :

    Cette limite, qui fixe un minimum de concentration d’ozone dans l’atmosphère, est la seule qui s’éloigne. Stable depuis quinze ans, la concentration d’ozone devrait grimper à nouveau grâce à l’interdiction des fréons (CFC) responsables de la destruction de ce gaz.

  • Dépassement des limites

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    Quelles sont les limites planétaires et à quoi sert ce concept en écologie ?

     

    https://www.geo.fr/animaux/quelles-sont-les-limites-planetaires-et-a-quoi-sert-ce-concept-en-ecologie-journee-mondiale-environnement-boehly

     Pollution

    Les neuf limites planétaires telles que présentées dans une étude de Will Steffen et ses collègues en 2015. © GEO / Owenmgaffney, source : Steffen et al. 2015 (Science), design : Globaïa

    A l'occasion de la journée mondiale de l'environnement le 5 juin, GEO s'intéresse aux limites planétaires. Audrey Boehly, autrice du livre Dernières limites (éd. Rue de l'échiquier), a interrogé plusieurs experts des domaines concernés afin d'apporter un éclairage différent sur ce concept.

    NASTASIA MICHAELS 

    Publié le 05/06/2023 à 12h19 - Mis à jour le 22/08/2023

    L'humain consomme-t-il davantage de ressources que la planète Terre ne peut lui en offrir ? La question se pose avec un regard plus aiguisé depuis la publication du rapport "Les limites à la croissance" en 1972 – aussi appelé "rapport Meadows" en référence à son auteur principal, le professeur Dennis Meadows du Massachusetts Institute of Technology (MIT) et son épouse Donella Meadows.

    Ces travaux de modélisation, qui prenaient en compte la population humaine, la production agricole, la production industrielle, les services (tels que la santé et l'éducation) – mais aussi les ressources non renouvelables comme les métaux ou le pétrole – et enfin la pollution, ont abouti à une dizaine de scénarios sur l'avenir du système Terre.

    Or, d'après des études réalisées par la suite (Turner, G. 2014 et Herrington, G. 2020), notre trajectoire actuelle se rapprocherait des deux premiers scénarios issus du rapport Meadows… ceux qui, malheureusement, conduisent à un effondrement.

     

    Quelles sont les neuf limites planétaires ?

    Les chercheurs Johan Rockström de l'université de Stockholm en Suède, Will Steffen de l'université nationale d'Australie et leurs collègues ont développé en 2009 le concept de "limites planétaires", c'est-à-dire de ressources ou de fonctionnements de notre planète dont le dépassement conduirait à un basculement des équilibres planétaires (Rockström, J., W. Steffen, K. Noone et al. 2009).

    Les neuf limites planétaires initialement définies par ces scientifiques sont les suivantes :

    le changement climatique ;

    la biodiversité ;

    les cycles de l'azote et du phosphore ;

    l'eau douce ;

    la couche d'ozone ;

    l'acidification des océans ;

    les changements d'usage des sols (comme la déforestation) ;

    la pollution atmosphérique ;

    la pollution chimique.

    Mais à quoi sert-il, finalement, de parler de limites planétaires ? Avant tout, à changer de regard. "Bien qu'étant journaliste scientifique et ayant travaillé sur de nombreux sujets d'environnement, je me suis moi-même rendu compte que je n'avais pas pris conscience de la magnitude du problème", confie à GEO la journaliste, conférencière et enseignante Audrey Boehly.

    "J'étais très focalisée sur la problématique du climat [...] que j'appréhendais uniquement comme un problème technique : l'urgence, c'était de décarboner notre énergie, mais sans forcément remettre en cause notre mode de vie."

    Or, cette ingénieure de formation a vu sa perspective bouleversée par une lecture, celle du rapport Meadows. Et par son message clé : la poursuite infinie d'une croissance économique dans un monde fini conduit inévitablement l'humanité à la catastrophe.

    "J'ai pris conscience que nous n'étions pas juste en face d'un problème climatique, mais que nous étions en train de dépasser, une à une, toutes les limites planétaires. Plus qu'une affaire technologique, cela relevait finalement de l'organisation de nos sociétés", explique-t-elle.

     

    "Dernières limites" : les limites planétaires vues par des experts français

    Dans son livre Dernières limites (éditions Rue de l'échiquier), Audrey Boehly a interrogé une dizaine d'experts des domaines concernés, tels que la co-présidente du GIEC Valérie Masson-Delmotte (CEA), le président du conseil scientifique de l'Institut océanographique de Monaco Philippe Cury (IRD), l'experte de l'IPBES (équivalent du GIEC pour la biodiversité) Sandra Lavorel (CNRS), ou encore la membre du comité national de l'eau Florence Habets (ENS), entre autres.

    Tous ces scientifiques dressent certes un constat plus qu'inquiétant, mais ils proposent aussi des pistes d'actions concrètes. Lesquelles ont la particularité de ne pas se borner à leur propre domaine d'expertise. "Pour mettre en œuvre des solutions pertinentes, il faut avoir en tête cette vision systémique, c’est-à-dire une vision globale des enjeux écologiques. La biodiversité, l'énergie, l'agriculture… Tout cela est lié, à l'image d'un jeu de dominos", illustre la journaliste.

    L'approche des limites planétaires permettrait ainsi d'écarter les "fausses solutions" consistant à agir sur une limite planétaire en négligeant les autres. C'est le cas, par exemple, des agrocarburants (ou biocarburants). Ces carburants à base de produits agricoles remplacent certes l'essence issue du pétrole pour les transports, luttant ainsi contre le changement climatique. Mais leur généralisation reviendrait à dépasser plusieurs autres limites planétaires, comme celle des changements d'usages des sols, puisqu'il faudrait cultiver davantage de terres pour en produire en quantité suffisante.

    Au contraire, les "solutions basées sur la nature", qui consistent à régénérer des écosystèmes naturels (forêt, mangrove, etc.), "nous permettent de lutter à la fois contre le réchauffement climatique, mais aussi de réparer plusieurs autres limites planétaires (qualité de l'eau, biodiversité…)", souligne Audrey Boehly. L'agroécologie, mais aussi la mise en place d'aires protégées avec un niveau de protection exigeant : "ces solutions sont placées, dans le rapport du GIEC, parmi les mesures phares – juste derrière les énergies renouvelables", souligne Audrey Boehly.

     

    Quelles sont les 8 limites planétaires redéfinies en 2023 ?

    Le concept de limites planétaires n'est pas immuable : depuis les travaux initiaux de Rockström et Steffen, des scientifiques ont tenté de l'enrichir. Notamment en intégrant à cette notion les besoins humains. "C'est ce qu'avait fait l'économiste Kate Raworth (Raworth, K. 2017) à l'origine de la "théorie du donut" [ou doughnut]. Celle-ci prend à la fois en compte un "plafond" des activités humaines, qui correspond aux limites planétaires, mais aussi un "plancher" qui représente les besoins humains. Entre les deux, se trouve une zone juste et durable pour l'humanité", précise Audrey Boehly.

    C'est également l'approche adoptée par les auteurs d'une étude publiée le 31 mai dans la revue Nature (Rockström, J., Gupta, J., Qin, D. et al. 2023). Non seulement les limites planétaires sont redéfinies et il n'y en a plus que huit (la couche d'ozone, l'acidification des océans et la pollution chimique ne sont plus comptées séparément, tandis que d'autres limites se distinguent), mais elles prennent aussi en compte les besoins humains.

    Voici les huit limites planétaires redéfinies en 2023 :

    le climat ;

    l'intégrité fonctionnelle des écosystèmes (ex "biodiversité") ;

    le cycle de l'azote ;

    le cycle du phosphore ;

    l'eau douce souterraine ;

    l'eau douce de surface ;

    la surface occupée par les écosystèmes naturels (ex "changements d'usage des sols") ;

    les aérosols (ex "pollution atmosphérique").

    D'après cette étude, sept des huit limites planétaires sont dépassées en termes de zone juste et durable pour l'humanité (le climat, l'intégrité fonctionnelle des écosystèmes, le cycle de l'azote, le cycle du phosphore, l'eau douce souterraine, l'eau douce de surface et la surface occupée par les écosystèmes naturels), dont six dépassent même le "plafond" (seul le climat n'excède pas celui-ci).

     

    Comment faire pour ne pas dépasser les limites planétaires ?

    Si l'on écoute les experts Français au sujet des limites planétaires, il est intéressant de noter que la plupart des solutions qu'ils proposent se rejoignent. "Il s'agit bien sûr de sortir des énergies fossiles, mais c'est aussi un enjeu de sobriété, résume Audrey Boehly. Il nous faut réduire notre empreinte écologique : nous produisons davantage de pollution que la nature ne peut en absorber, et nous consommons trop. À la fois en termes de ressources renouvelables issues de la biosphère, et de ressources non renouvelables que nous sommes en train d'épuiser – les énergies fossiles, les métaux, le sable [qui représente la 2e ressource naturelle la plus exploitée au monde après l'eau], etc."

    Les limites planétaires nous invitent par ailleurs à relativiser le succès des innovations technologiques susceptibles d'entraîner un "effet rebond", c’est-à-dire une surconsommation et donc, de la pollution. "Prenons le cas de la voiture : les moteurs thermiques sont désormais bien plus efficaces [une distance prolongée avec moins de carburant] qu'ils ne l'étaient il y a 15 ou 20 ans. Mais du fait que l'on parcourt davantage de kilomètres, et ce, avec des voitures plus lourdes, au final, nous consommons aujourd'hui plus d'essence qu'avant", explique Audrey Boehly.

     

    Pour la journaliste, la réduction de notre empreinte écologique démarre certes à l'échelle individuelle, mais le niveau collectif demeure incontournable. "Par exemple, si l'on veut utiliser moins sa voiture et prendre davantage le vélo de manière à consommer moins d'énergie, il s'agit certes d'une initiative individuelle. Mais cela se heurte très vite aux infrastructures – les pistes cyclables – décidées au niveau collectif", illustre-t-elle. D'où l'urgence "que les citoyens se mobilisent pour faire pression afin d'obtenir des politiques publiques qui soient à la hauteur des enjeux."

    Reste maintenant à entendre le message. Force est de constater que plus de 50 ans après la publication du rapport Meadows, la croissance économique a continué à grimper de manière exponentielle.

    "Si nous continuons à avoir une vision dispersée et parcellaire des enjeux écologiques – avec uniquement des COP, des débats ou des sommets consacrés séparément au climat, à l'océan, à la biodiversité, au plastique, etc. –, nous ne ferons qu'éponger l'eau au lieu de réparer la fuite, prévient l'autrice de Dernières Limites. Car nous continuerons à passer sous silence le fait que tous ces problèmes ont une même origine : la poursuite de la croissance au-delà des limites planétaires. On ne peut pas s'en sortir sans s'attaquer à la racine du problème ni changer notre modèle de société.

    Avant de conclure :

    "Notre objectif doit devenir le bien-être humain et celui des écosystèmes, qui sont intrinsèquement liés, et non une croissance économique qui, pour nos sociétés occidentales, n'est plus synonyme ni de progrès ni de bonheur."

  • Le petrichor

     

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    SCIENCES NATURELLES

    D'où vient le petrichor, cette bonne odeur de la terre après la pluie ?

    Par 

    Publié le dimanche 18 juin 2023 à 21h06

    3 min

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    Les gouttes de pluie, en s'écrasant au sol, libèrent des composants provenant de la végétation et du sol.Les gouttes de pluie, en s'écrasant au sol, libèrent des composants provenant de la végétation et du sol. 

    © Getty - kakub1n

    En été, après une averse, on se prend souvent à emplir ses poumons de l’odeur qui se dégage du sol. Cette odeur, c’est le petrichor, une fragrance caractéristique dont les composants proviennent à la fois de la végétation et du sol.

    Après des jours de sécheresse, les premières gouttes de pluie tombent sur un sol écrasé de chaleur. Lorsque l’averse cesse, vous vous surprenez à vous emplir les poumons, nez tendu, narines dilatées, pour vous imprégner de cette odeur qui émane soudain du sol.

    Cette odeur caractéristique, typique de l’été et des températures élevées, est nommée “petrichor”, un néologisme créé à partir du grec ancien et qui signifie “sang de pierre”. On doit ce nom à deux scientifiques australiens, la chimiste Isabel Joy Bear, et le minéralogiste Roderick G. Thomas, qui, en 1964, tentent de comprendre pour la première fois pourquoi la pluie, qui n’a pas d’odeur, peut soudain dégager un parfum si enivrant. Ils ne sont pas les premiers scientifiques à se poser la question : en avril 1891 déjà, la revue The Chemical News publiait un article signé Thomas Lambe Phipson, dans lequel ce dernier décrivait “l’odeur émise par les sols après une forte pluie” , qu’il avait observé pour la première fois “dans le sol crayeux de Picardie”. Selon lui, cette odeur était due “à la présence de substances organiques étroitement liées aux huiles essentielles des plantes”, les sols poreux absorbant “la fragrance émise par des milliers de fleurs”.

    À réécouter : Les bonheurs du nez : odeurs naturelles et parfums artificiels

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    Une huile végétale pour protéger les plantes

    L’intuition de Thomas Lambe Phipson sera confirmée par l’étude des deux scientifiques australiens. Publiée dans la revue Nature, elle explique les mécanismes chimiques à l'œuvre et le lien entre chaleur, pluie, et plantes. Le petrichor est dû à plusieurs facteurs, parmi lesquels on retrouve une huile végétale, sécrétée par les plantes pour se protéger et pour signaler le ralentissement de la croissance des racines et de la germination des graines lorsque le temps est trop chaud. Cette huile végétale s’accumule rapidement, sur les feuilles d’abord, mais aussi dans les roches poreuses, voire le bitume qui recouvre les routes.

    Lorsque la pluie se met enfin à tomber, c’est cette huile végétale, longtemps accumulée, qui se trouve libérée. Les premières gouttes de pluie, en venant s’écraser sur le sol, se vaporisent sous forme d’aérosol, emportant avec elle une partie de la sève végétale et la libérant dans l’air.

    Une odeur créée par des bactéries

    L’odeur du petrichor n’est pas uniquement due à cette huile végétale, mais également à un autre composé, nommé géosmine. C’est à cette molécule que l’on doit la fragrance terreuse et musquée qui s’élève d’un sol encore chaud après la pluie. Elle est produite par de très nombreux micro-organismes présents dans le sol, essentiellement les actinobactéries et les cyanobactéries telluriques : c’est notamment ce composé organique volatile, qui donne à la terre labourée ou mouillée son odeur particulière.

    Pour l’être humain, l’odeur est d’autant plus saisissante qu’il y est particulièrement sensible : notre nez est capable de détecter la géosmine en suspension dans l'air à des concentrations extrêmement faibles de moins de cinq parties par milliard (ppb). Cette même molécule, très appréciée lorsqu'on la détecte dans l’atmosphère, nous paraît paradoxalement intolérable une fois décelée dans l’eau : c’est la géosmine qui confère parfois à celle-ci son goût terreux, voire boueux, unanimement abhorré.

    L’odeur du petrichor, évidemment, ne se ressent pas avec la même intensité selon que l’on soit en ville, à la campagne ou encore en forêt : s’il y a beaucoup moins de bactéries, et donc de géosmines, dans les zones urbanisées, il y a en revanche beaucoup plus d’ozone présent dans l’air. C’est notamment le cas par temps orageux, où l’ozone créé par les décharges électriques des éclairs dans le ciel est porté par les vents : ce gaz, qui donne une odeur distinctive à l’air et qui peut parfois évoquer l'eau de Javel, crée un contraste encore plus saisissant et rend l’odeur du petrichor plus distincte encore.

    Entre villes et campagnes, l'intensité de l'odeur du petrichor diffère.Entre villes et campagnes, l'intensité de l'odeur du petrichor diffère. 

    © Getty - Sarayut Thaneerat

    Une odeur devenue parfum

    Reste à savoir pourquoi l’odeur de l’huile végétale et de la géosmine combinées nous plaît tant une fois qu’elle a été libérée par la pluie. Les raisons précises pour lesquelles cette fragrance nous est si agréable restent floues. L’hypothèse la plus communément admise part simplement du fait que le petrichor, avec son odeur terreuse et végétale, est associé à une odeur positive pour l’environnement, et par extension pour l’être humain.

    Sans surprise, le petrichor est désormais un élément couramment utilisé en parfumerie. Bien avant que la science n’établisse son origine, il était déjà extrait de la terre, à Kannauj, en Inde, pour créer un parfum nommé “mitti attar”, ou “parfum de la Terre”. Depuis, il est devenu un composé commun des maisons de parfumerie, et se décline dans de célèbres parfums, tel “Après l’ondée” de Guerlain. Même si rien ne vaudra jamais, évidemment, l’odeur de la pluie après l’orage...