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  • Glyphosate : qui a voté quoi ?

     GLYPHOSATE : QUI A VOTÉ QUOI ?

    Votre député a-t-il voté pour ou contre l’interdiction ?

    MOBILISEZ-VOUS POUR L’INTERDICTION DU GLYPHOSATE

     

    Glyphosate : découvrez qui a voté quoi ! (cliquez sur ce lien)

     

    Interdiction du glyphosate :
    qu’a voté votre député-e ?

    Le glyphosate est un herbicide classé potentiellement cancérigène par l’Organisation Mondiale de la Santé. Le président Emmanuel Macron s’était engagé à interdire d’ici trois ans le glyphosate.

    Pourtant une majorité des députés présents et le gouvernement ont rejeté cette interdiction, cédant à la pression du lobby agro-chimique !

     

  • Funérailles.

    L’effrayante mortalité des abeilles : des funérailles à Paris

    8 juin 2018 / Amélie Beaucour (Reporterre) 
     

     

    L'effrayante mortalité des abeilles : des funérailles à Paris

    Des dizaines d’apiculteurs se sont retrouvés à Paris et en région jeudi 7 juin, pour dénoncer la mortalité considérable des abeilles cette année. Les pertes s’élèvent à 90 % dans certains cheptels. En cause : l’utilisation des néonicotinoïdes, pesticides qui attaquent les abeilles.

    • Paris, reportage

    Il est un peu plus de 10 h ce jeudi matin lorsque le son du clairon retentit. La cérémonie commence. Face à l’hôtel des Invalides, trois cercueils sont alignés, recouverts d’un drapeau européen, français et breton. Qui pleure-t-on aujourd’hui ? Pas d’anciens soldats morts pour la patrie mais des colonies d’abeilles tombées sous le feu des néonicotinoïdes, substances neurotoxiques utilisées dans l’agriculture.

    Venus de Bretagne, des dizaines d’apiculteurs endeuillés s’étaient donné rendez-vous dans la capitale. Cette année, 20.000 colonies d’abeilles bretonnes ont passé l’arme à gauche. Une hécatombe que les apiculteurs dénoncent depuis près d’un mois. Réunis en un « cortège funèbre », ils sont partis du Morbihan, le 30 avril dernier, sous l’œil de Reporterre, pour sillonner la région et attirer l’attention des autorités.

    La scène, digne d’une pièce de théâtre, raconte toute la détresse des apiculteurs français. Voile (d’apiculteur) sur la tête et mains derrière le dos, une quinzaine d’entre eux sont venus se recueillir sur ces petites cabanes en bois, sépultures de leurs ouvrières. L’enfumoir apicole remplace l’encens, et les pots de miel les gerbes de fleurs qu’elles ne pourront de toute façon plus butiner.

    D’autres délégations en région se sont également rassemblées pour dénoncer le calvaire que vivent les artisans du miel, « condamnés, chaque printemps, tel Sisyphe et son rocher, à refaire le travail estival que l’hiver n’aurait pas dû détruire », compare tristement François le Dudal, adhérent de la Fédération française des apiculteurs professionnels (FFAP)

    Mais cette année, les pertes sont plus lourdes que d’habitude. Loïc, apiculteur breton et vice-président de l’Union nationale de l’apiculture française (Unaf), a vu mourir la moitié de ses abeilles. « Mais certains de mes collègues ont perdu jusqu’à 90 % de leur cheptel », dit-il. Du jamais vu en quarante ans. Si les pertes de cheptel sont naturelles, elles ne dépassent habituellement pas les 7 % par an.

    Marie est apicultrice bretonne, elle aussi. Cette année, elle a perdu 200 ruches sur les 260 qu’elle possède. « Et celles qui restent sont extrêmement affaiblies, ajoute-t-elle. Je vis de l’apiculture, j’ai deux enfants à nourrir et plus de cheptel pour produire. Comment je fais ? »

    Les néonicotinoïdes, tueur d’abeilles

    Marie possède également quelques ruches dans le Finistère. Ici, pas de champs de maïs traités mais uniquement de la bruyère. Sur ces ruches-ci, elle n’a enregistré qu’une perte de 10 %. Coïncidence « Le lien est évident. Sans néonicotinoïdes, les abeilles se portent très bien », conclut Marie.

    Le problème des néonicotinoïdes est connu depuis longtemps. Ces pesticides neurotoxiques attaquent le système nerveux des abeilles et les tuent à petit feu. Pourtant, leur usage vient seulement d’être réglementé. La loi Biodiversité de 2016, en France, a acté leur interdiction prochaine et le projet de loi Agriculture et Alimentation en cours de discussion devrait interdire les pesticides au mode d’action similaire. Fin avril, l’Union européenne a voté l’interdiction quasi totale de trois d’entre eux, interdiction qui n’entrera en vigueur qu’en 2019 et qui ne concernera que les cultures en plein champ.

    Mais la bataille est loin d’être gagnée, selon l’UNAF. « Cela ne suffit pas. Les traces de ces substances nocives ne disparaîtront qu’après 5 ou 6 ans… et seulement en partie. » Personne n’est actuellement en mesure de dire ce qu’il advient de ces substances une fois larguées dans la nature. « L’agrochimie a ouvert la boite de Pandore et ne sait plus comment la refermer », déplore François Le Dudal.

    Pour autant, les apiculteurs refusent de blâmer ceux qui en font usage. « Nos collègues agriculteurs font ce qu’ils peuvent. Ils sont, eux aussi, victimes du système. Ce n’est pas à eux de faire des efforts, c’est au gouvernement de prendre ses responsabilités. »

    Un gouvernement silencieux

    Jusqu’à maintenant, aucun des gouvernements successifs ne leur a manifesté de soutien. Cette fois encore, les apiculteurs accusent Stéphane Travert, le ministre de l’Agriculture, de rester les bras croisés. « Tout ce qu’il nous témoigne, c’est du mépris », grogne un apiculteur en colère. « La preuve, il n’a pas pris la peine de se déplacer », constate un autre.

    Nicolas Hulot, quant à lui, était présent, contre toute attente, ce jeudi matin. Pas de mesures concrètes à la clé mais, à la place, il s’est engagé à venir en Bretagne et a promis une « discussion avec ses collègues sur les solutions envisageables ».

    Cela ne suffit pas aux apiculteurs, qui préféreraient s’entretenir directement avec le président de la République. « On aimerait bien savoir ce qu’il en pense, M. Macron », lance un apiculteur. « Il doit bien avoir un avis là-dessus puisqu’il a lui-même trois ruches à l’Élysée », ricane un autre.

    Mais les ruches du président se portent probablement mieux que celles des apiculteurs bretons. « Les ruches en villes sont toujours en meilleur état. Qui dit ville dit moins de surfaces agricoles et donc moins d’exposition aux pesticides, explique Bruno, apiculteur amateur à Anthony, en banlieue parisienne. Moi, je m’en sors relativement bien, j’ai plus de chance que mes collègues de province. Eux ont vraiment besoin d’aide. »

    80 % du cheptel d’abeilles d’Aurélie n’ont pas passé l’hiver

    En chemin vers l’Élysée, le convoi est arrêté par un cordon des forces de l’ordre. Aurélie et son mari sont apiculteurs dans les Côtes-d’Armor. Cette année, plus de 80 % de leur cheptel a disparu. Ce constat affligeant, le couple l’a fait un beau matin de printemps. Comme chaque année depuis sept ans, ils venaient vérifier si leurs petites ouvrières avaient survécu à la saison froide. À la place, ils ont découvert leurs essaims décimés. « C’était le 6 avril 2018, cette date je ne suis pas prête de l’oublier », raconte-t-elle, émue.

    Comme les centaines d’apiculteurs mobilisés, elle demande au gouvernement d’agir rapidement. D’agir non seulement pour les apiculteurs, mais aussi et surtout pour la biodiversité.

    « On est témoin pour les abeilles, mais en réalité, cela s’applique à tous les pollinisateurs, tous les insectes, tous les oiseaux, toutes les espèces victimes de ces pesticides », dit-elle. D’après une étude scientifique publiée en fin d’année dernière, 80 % des insectes européens auraient disparu ces trente dernières années.

     


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  • KUNDALINI : couverture

    J'ai passé quelques jours à travailler sur une couverture pour le roman avec la graphiste et la fondatrice des "éditions du 38" dans une écoute attentive et professionnelle.

    Plusieurs essais, puis des modifications, puis là, ce point, cette couleur, cette lumière, ce détail dans le paysage etc etc...

    L'impression de voir se matérialiser toutes les images qui sont en moi, les sensations et les émotions que je souhaitais transmettre dans l'histoire, là, posées, sur le "papier", et c'est comme une image réelle, mouvante, sensorielle...

    Un grand bonheur.

    Sortie prévue en septembre. 

    L'image finale restera secrète encore quelques temps :) 

    Il me plaît infiniment que Nathalie ait été le modèle, une deuxième fois, de la couverture d'un de mes livres. 

    "Là-Haut" avait été le premier.

    Image 2

    "Kundalini, l'étreinte des âmes", sera le deuxième.

     

  • Tantra et âmes soeurs

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    Le Tantra est la science qui transforme les amateurs amoureux en âmes sœurs. Telle est la grandeur du Tantra. Il peut transformer la terre entière : il peut transformer chaque couple en âmes sœurs. » - Osho

    « En Orient, nous avons développé une science : si tu ne peux pas trouver ton âme sœur, tu peux en créer une. Cette science est le Tantra. Trouver une âme sœur veut dire trouver une personne avec laquelle tous tes sept centres se réalisent naturellement. C’est impossible, mais cela peut arriver une fois de temps en temps : un Krishna avec une Radha, un Shiva avec une Shakti. Et lorsque cela arrive, alors c’est d’une beauté formidable. Pourtant, ceci est comme la foudre – tu ne peux pas en dépendre. Lorsque tu lis ta bible, tu ne peux pas attendre que la foudre se présente pour pouvoir lire. La foudre est un phénomène naturel, mais elle n’est pas fiable.

    Si tu attends de rencontrer ton âme sœur naturelle, cela sera exactement comme d’attendre la foudre pour lire ta bible. Et encore, tu ne seras même pas capable de lire davantage. Elle sera là pour un instant, mais au moment où tu auras ouvert ta bible, elle sera déjà partie.

    Ainsi le Tantra a été créé. Le Tantra est une approche scientifique. Le Tantra est une alchimie ; il peut transformer tes centres, il peut transformer les centres d’autrui, il peut créer un rythme et une harmonie entre toi et ton amoureux. Cela est la beauté du Tantra. C’est comme d’amener de l’électricité chez toi. Alors, tu peux l’allumer et l’éteindre à volonté. En plus, tu peux en trouver mille et une utilisations. Tu peux avoir une pièce fraîche ou une pièce chaude. Donc, il s’agit d’un miracle. Ces sept centres en toi ne sont que des centres d’un corps d’électricité. Et quand je parle de foudre, ne pense pas seulement au symbole, mais au sens propre du terme.

    Un courant d’électricité subtil, très subtil, se trouve dans ton corps. Mais plus subtil il est, plus profond il entre. Il n’est pas tellement visible. Les scientifiques disent que l’ensemble de toute l’électricité de ton corps peut allumer une ampoule de cinq watt. Ce n’est pas beaucoup. La quantité n’est pas très grande, la quantité de l’atome n’est pas tellement grande, alors que la qualité… S’il explose, il y aura une énergie énorme.

    Ces sept centres, ces sept chakras dont le Yoga et le Tantra parlent depuis toujours ne sont que cinq nœuds dans le courant électrique de ton corps. On peut les changer, on peut les réarranger. Ils peuvent recevoir une nouvelle forme, une nouvelle structure. Deux amoureux peuvent être transformés si profondément que tous leurs sept chakras peuvent commencer à se rencontrer.

    Le Tantra est la science qui transforme les amateurs amoureux en âmes sœurs. Telle est la grandeur du Tantra. Il peut transformer la terre entière : il peut transformer chaque couple en âmes sœurs. »


     

  • Préparation de classe (2)

    Thierry Ledru

     

    Et le texte de mardi matin :

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    POURQUOI CRIE-T-ON QUAND ON EST EN COLÈRE ?

    Un sage hindou qui était en visite au Gange pour prendre un bain remarqua un groupe de personnes criant de colère, les unes sur les autres.

    Il se tourna vers ses disciples, sourit et leur demanda :
    – Savez-vous pourquoi les gens crient lorsqu’ils sont en colère ?

    Les disciples y pensèrent pendant un moment et l’un d’eux dit:
    – C’est parce que nous perdons notre calme que nous crions.
    – Mais pourquoi criez-vous quand l’autre personne est juste à côté de vous ? demanda le guide. Pourriez-vous tout aussi bien lui dire ce que vous avez à dire d’une manière plus douce?

    Comme aucune des réponses des disciples n’était suffisamment satisfaisante pour le sage, il expliqua finalement :
    « Quand deux personnes sont en colère l’une contre l’autre, leurs cœurs sont séparés par une grande distance. Pour couvrir cette distance, ils doivent crier, car sinon ils sont incapables de s’entendre l’un et l’autre. Plus ils sont en colère et plus ils auront besoin de crier fort pour s’entendre l’un et l’autre pour arriver à couvrir cette grande distance.
    Qu’est-ce qu'il se passe lorsque deux personnes tombent en amour ? Ils ne crient pas sur l’autre, mais ils se parlent doucement parce que leurs cœurs sont très proches. La distance entre eux est soit inexistante, soit très faible.

    Le sage continua…
    « Quand ils s’aiment encore plus, que se produit-il ? Ils ne se parlent pas, ils chuchotent et obtiennent encore plus de proximité et plus d’amour. Enfin vient un moment où ils n’ont même plus besoin de chuchoter, ils se regardent seulement l’un et l’autre et se comprennent.

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    Puis il regarda ses disciples et leur dit :

    « Ainsi quand vous discutez les uns avec les autres ne laissez pas vos cœurs s’éloigner. Ne dites pas les mots qui vous éloignent davantage ou bien viendra un jour où la distance sera si grande que vous ne trouverez pas le chemin du retour… »

    Sagesse hindoue

     

    GRAMMAIRE :

    Cherchez une liste de verbes conjugués au présent de l'indicatif et leurs groupes sujets respectifs.

    Cherchez l'antécédent de plusieurs pronoms relatifs.

    Cherchez des pronoms personnels complément d'objet direct. Identifiez le nom qu'il remplace respectivement.

    EXPRESSION ÉCRITE

    Racontez une situation dans laquelle vous avez crié sur quelqu'un et une autre dans laquelle vous avez parlé doucement. Décrivez l'état émotionnel dans lequel vous étiez.

     

     

  • Préparation de classe

    Thierry Ledru

     

    Le texte pour ma classe demain.


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    Il était une fois quatre individus qu'on appelait : 
    -Tout le monde -Quelqu'un -Chacun - et -Personne..

    Il y avait un important travail à faire.

    Tout le monde entendit dire qu'il fallait le faire.
    Tout le monde fut donc persuadé que Quelqu'un le ferait.
    Chacun, effectivement, était en mesure de le faire mais en réalité Personne ne le fit.
    Quelqu'un se fâcha car c'était le travail de Chacun et devant cette colère Tout le monde pensa que Quelqu'un allait enfin le faire.
    En fin de compte, Tout le monde fit des reproches à Chacun parce que Personne n'avait fait ce que Quelqu'un aurait pu faire.

    MORALITÉ

    Sans vouloir le reprocher à Tout le monde, Il serait bon que Chacun fasse ce qu'il doit, sans nourrir l'espoir que Quelqu'un le fasse à sa place car l'expérience montre que là où on attend Quelqu'un, généralement on ne trouve Personne.


     

    QUESTIONS:


    Conjugaison : A quels modes et quels temps les verbes sont-ils conjugués ? 

    Vocabulaire : Remplace tous les verbes "faire" par des synonymes.


    Orthographe : Quelles sont les quatre majuscules inhabituelles de ce texte. Explique la raison de leur usage. 


    Réflexion : Identifie une situation dans laquelle tu peux nommer les groupes concernés par les véritables protagonistes. Écris en quelques lignes cette situation et explique ce qui devrait changer pour que le problème soit réglé.

  • "Libérer le plaisir féminin."

    Alex grey vision tree

    SANTÉ ET SCIENCE

    Libérer le plaisir féminin

    Alors qu’elle a exploré la sexualité masculine de fond en comble, la science ne sait presque rien sur celle des femmes. Qu’est-ce qui attise leur désir ? Qu’est-ce qui l’éteint ? Des scientifiques canadiennes ont résolu de répondre à ces questions, et se retrouvent à l’avant-garde mondiale de ce domaine de recherche.

    Leda & St-Jacques 

    Quand votre travail implique de faire regarder des films érotiques à des femmes, vous avez intérêt à avoir l’air professionnel, dit Meredith Chivers en rigolant. « Je porte une blouse de laboratoire, j’attache mes cheveux et j’évite même le maquillage », précise la directrice du laboratoire de recherche sur la sexualité et le genre (SageLab) de l’Université Queen’s, en Ontario.

    Dans une petite pièce, une volontaire, confortablement installée dans un fauteuil inclinable, fait signe à Samantha Dawson, une doctorante, qu’elle est prête à commencer. Celle-ci place alors devant elle un moniteur vidéo et quitte la pièce. On pourrait croire que la femme se repose dans une chambre d’hôpital en regardant la télé, si ce n’était qu’elle devra répondre à des questions et évaluer ses réactions sur une échelle de zéro à neuf. Des questions plutôt intimes…

    À combien se chiffre votre niveau d’excitation ? D’ennui ? De dégoût ? Avez-vous envie de vous masturber ?

    Sous le drap se cachent deux minces fils au bout desquels se trouvent deux indicateurs photosensibles. Un capteur a été inséré dans le vagin de la femme, dont l’embout en forme d’ampoule (surnommé le « nez » par les chercheurs) restera appuyé sur son clitoris pendant qu’elle regardera la vidéo.

    L’écran s’anime. Au bord d’une piscine, une jolie blonde en bikini blanc s’abandonne à un homme agenouillé entre ses cuisses, qui lui fait l’amour oral. (Les chercheurs ont choisi cette vidéo parce qu’elle met l’accent sur le plaisir de la femme, ce qui est plutôt rare dans l’industrie de la porno.) Dans le bas de l’appareil, de petites lumières infrarouges clignotent discrètement. Elles scrutent les yeux de la femme qui, elle, a le regard fixé sur les images. Jusqu’à 60 données par seconde sont ainsi analysées par un ordinateur situé dans la pièce voisine.

    Cet ordinateur reconstitue la vidéo en version « porno pour psychologues » : on y voit les mêmes ébats sulfureux au bord de la piscine, sauf que les corps des acteurs sont parsemés de points et de traits rouges. Les points indiquent où se pose le regard, en temps réel, de la participante à l’étude. Plus elle fixe longtemps l’image, s’attardant sur une partie du corps ou sur un geste, plus gros sont les points. Les traits, eux, correspondent au balayage du regard et témoignent d’un désintérêt pour tel ou tel élément. Lorsque des points apparaissent à des endroits inhabituels, en marge de l’écran, par exemple, c’est que la participante détourne les yeux, par inattention ou par dégoût.

    Faire la lumière sur la façon dont nous percevons le sexe « réellement », voilà ce que désirent Meredith Chivers et son équipe du SageLab. Et pour y parvenir, les chercheurs ont recours au suivi oculaire, actuellement ce qui se rapproche le plus d’une incursion dans la tête de leurs sujets. Il permet de dévoiler l’expression très intime du désir, bien plus encore que ne le révèlent les tracés de l’afflux sanguin vers le clitoris.

    Dans la version « porno pour psychologues », des points rouges se multiplient sur le corps des acteurs, puis grossissent sur le visage de l’homme, celui de la femme, ses seins, son sexe… Tiens, le maillot de bain noir de l’homme se gonfle soudain comme une tente. L’image est vite recouverte par un immense point rouge !

    Les scientifiques ont longtemps étudié la sexualité à partir de mesures de l’activité des organes génitaux et de questionnaires — qui ne sont utiles que si les participantes sont conscientes de leurs désirs… et disposées à en faire part aux chercheurs. De plus en plus, les experts comme Meredith Chivers ont recours au suivi oculaire, à l’imagerie cérébrale et à d’autres technologies pour percer les secrets du plus grand organe sexuel humain : le cerveau. Ces outils modernes sont d’autant plus utiles qu’ils permettent de révéler ces désirs que l’on n’ose avouer à quiconque, pas même à soi-même parfois. Grâce à eux, Meredith Chivers apporte un nouvel éclairage sur les résultats contre-intuitifs qu’elle a obtenus jusqu’ici par rapport à un sujet brûlant : ce qui excite les femmes.

    Les travaux de la scientifique de 44 ans propulsent la ville de Kingston et le Canada à l’avant-scène de la recherche dans le domaine. Depuis la création du SageLab, en 2009 (avec une subvention de 183 000 dollars de la Fondation canadienne pour l’innovation), près de 500 femmes de toutes orientations sexuelles se sont assises dans les fameux fauteuils inclinables de la chercheuse.

    * * *

    Meredith Chivers a commencé à faire parler d’elle en 2009, lorsqu’elle a démontré que les organes génitaux féminins réagissent à la présentation d’un large éventail de stimuli, allant d’ébats entre lesbiennes à la copulation de singes bonobos. Et que la présence d’engorgement sanguin dans le vagin et de lubrification ne signifie pas automatiquement que la femme éprouve de l’excitation. L’une de ses hypothèses : les sécrétions vaginales ne sont dans certains cas qu’un réflexe de protection des muqueuses. L’idée que les organes reproducteurs des femmes puissent s’être adaptés pour parer à la violence sexuelle — idée qui fait aujourd’hui consensus dans le milieu de la recherche — a fait des vagues à l’époque.

    Quand les médias en ont parlé, de nombreuses femmes ont écrit à la chercheuse pour la remercier. Des femmes soulagées d’apprendre que si leur corps et leur esprit n’étaient pas toujours en harmonie pendant qu’elles faisaient l’amour, ce n’était pas parce que quelque chose clochait ! Ceux qui perpétuaient des mythes du genre « si tu es mouillée, c’est que tu en as envie » ou « tu dis non, mais ton corps dit oui » pouvaient aller se rhabiller.

    « Des femmes m’ont aussi confié avoir été agressées sexuellement et être hantées par l’idée que, au fond, elles avaient dû désirer ce rapport », raconte Meredith Chivers.

    Plus récemment, la chercheuse s’est intéressée à de nouveaux modèles du désir, a étudié des personnes de genre non binaire [NDLR : qui ne se définit ni comme un homme ni comme une femme], mesuré le débit sanguin dans le clitoris. Son tout dernier sujet de recherche, lui, ne se limite pas aux organes génitaux eux-mêmes : il concerne aussi leur relation avec les pensées. D’où l’utilité de l’appareil de suivi du regard (celui qui produit les points rouges), un joujou de près de 50 000 dollars. Il ne détecte pas l’excitation physique proprement dite, mais ce qui retient l’attention. L’étude qu’elle mène conjointement avec Samantha Dawson compare le mouvement des yeux d’hommes et de femmes, dont certaines souffrant de dysfonctions sexuelles, pendant qu’ils regardent des vidéos érotiques.

    Devant des images érotiques destinées indifféremment aux femmes homosexuelles et hétérosexuelles, les femmes des deux groupes présentaient des réponses génitales semblables. Pourquoi ? « Mon superviseur [de recherche] de l’époque était tout aussi perplexe que moi », raconte Meredith Chivers. Elle allait s’ingénier à résoudre l’énigme.

    Les chercheuses ont observé que certaines femmes ne s’attardent pas sur les visages ou les parties intimes, mais sur les arbres, la piscine ou les marges de l’écran. Elles veulent savoir si cette inattention est liée à des troubles sexuels, comme des niveaux de désir et d’excitation franchement bas. Serait-il possible que des associations négatives à la sexualité, découlant d’un traumatisme ou d’un tabou, pervertissent l’attention ?

    « Le corps tout entier réagit aux stimuli érotiques, pas seulement les organes génitaux », précise Jim Pfaus, professeur de psychologie à l’Université Concordia, qui s’intéresse au comportement sexuel et au système de récompense du cerveau. « C’est une distinction importante, parce que les gens pensent au sexe même dans le feu de l’action. Longtemps, on a cru que si les organes génitaux n’étaient pas sollicités, ce n’était pas du sexe. De plus en plus, on conçoit la sexualité comme un phénomène systémique impliquant le corps tout entier. »

    En 2013, un sondage mené en Grande-Bretagne a révélé que les femmes étaient plus nombreuses que les hommes (deux fois plus, d’après un indicateur) à se plaindre d’un aspect ou d’un autre de leur sexualité, allant du manque d’intérêt aux douleurs durant la pénétration. Officiellement, le diagnostic le plus courant demeure le « trouble de l’intérêt pour l’activité sexuelle ou de l’excitation sexuelle chez la femme », une sorte d’expression fourre-tout qui englobe autant la baisse de désir que l’incapacité d’éprouver de l’excitation même lorsque la stimulation est adéquate. (Notons que ce trouble n’est diagnostiqué que s’il crée une détresse chez la patiente.) Selon un article paru dans le Journal of Sexual Medicine, jusqu’à 28 % des femmes ont du mal à devenir excitées. Pour bon nombre d’entre elles, les problèmes s’additionnent. La difficulté à atteindre l’orgasme est également fréquente.

    Pour que les médecins puissent espérer traiter les dysfonctions sexuelles des femmes, encore faudrait-il qu’ils sachent à quoi correspond la sexualité « normale » d’une femme. Or, présentement, on ne le sait pas. Un fait incroyable, étant donné que le sexe fait l’objet d’études en Occident depuis au moins l’Antiquité.

    C’est que, jusqu’à récemment, la plupart des recherches ont porté sur la sexualité des hommes, longtemps considérés comme les instigateurs en matière de séduction et de copulation.

    Il y a 10 ans à peine, on dénombrait encore trois fois plus d’études sur les troubles sexuels des hommes que sur ceux des femmes. De nombreux ouvrages médicaux ne présentent toujours pas de description exhaustive de l’anatomie clitoridienne, alors qu’ils consacrent des pages entières à l’anatomie du pénis. La description de la structure interne du clitoris — qui se prolonge à l’intérieur du corps et qui contient autant de terminaisons nerveuses que son pendant masculin — est encore embryonnaire dans la littérature scientifique.

    Quand 50 % de la population ne correspond pas au modèle accepté en matière de désir sexuel, quelle conclusion faut-il tirer ? À l’heure actuelle, le Canada est l’endroit par excellence pour répondre à cette question.

    * * *

    C’est pendant ses études en psychologie, à l’Université de Guelph, que Meredith Chivers a eu la première des deux intuitions qui allaient donner le ton à ses travaux.

    Durant un cours sur la sexualité, en deuxième année de son baccalauréat, des images de pénis projetées sur un écran n’ont pas suscité de réaction dans la classe. Mais lorsqu’une vulve est apparue, un immense « beurk » s’est fait entendre. En regardant autour d’elle, Meredith Chivers a constaté qu’il venait en grande partie de ses camarades féminines. Deux constats se sont alors imposés à elle : la relation des femmes avec leur corps est compliquée, et elle-même était plus à l’aise d’aborder les questions de sexualité que la plupart des gens.

    Meredith Chivers a eu sa seconde intuition en 1997, après avoir entendu parler des travaux menés aux Pays-Bas par Ellen Laan, qui étudiait alors la réponse sexuelle des lesbiennes. Les conclusions de celle-ci étaient étonnantes : devant des images érotiques destinées indifféremment aux femmes homosexuelles et hétérosexuelles, les femmes des deux groupes présentaient des réponses génitales semblables. Pourquoi ?

    « Mon superviseur [de recherche] de l’époque était tout aussi perplexe que moi », raconte Meredith Chivers. Elle allait s’ingénier à résoudre l’énigme.

    Dans les années 1980, des études avaient commencé à observer une faible concordance chez certaines femmes : ce qu’elles disaient trouver excitant ne correspondait pas toujours aux stimuli auxquels elles répondaient physiquement. Peu de chercheurs semblaient néanmoins capables d’expliquer ces résultats. Ces femmes étaient-elles allumées par n’importe quoi ? À moins que la notion d’orientation sexuelle chez les femmes soit différente de chez les hommes ? S’agissait-il d’autre chose ?

    À la recherche de réponses, Meredith Chivers a mené de multiples études pendant son doctorat, mis sur pied son laboratoire de recherche à l’Université Queen’s, reproduit les résultats de Laan… et gagné en notoriété. Notamment en ajoutant à son parcours, en 2010, une méta-analyse de 132 articles consacrés à la réponse génitale.

    Dans cette méta-analyse, qu’elle a corédigée avec son mari (le psychologue judiciaire Michael Seto), Ellen Laan et deux autres collègues, Meredith Chivers a fait ressortir une distinction majeure entre la sexualité des hommes et celle des femmes (qui sont par ailleurs plus semblables que différentes). L’évaluation que les hommes faisaient de leur excitation était synchro avec la réaction de leur pénis — les chercheurs parlent d’un « coefficient de corrélation » de 0,66. En clair : quand les hommes ont une érection, ils éprouvent probablement aussi du désir. Les femmes, elles, présentaient un coefficient de corrélation radicalement inférieur : 0,26.

    D’autres recherches ont apporté de l’eau au moulin. Ainsi, une hausse du débit sanguin vaginal a été enregistrée chez des femmes en train de regarder des scènes osées entre deux femmes, deux hommes, entre un homme et une femme, et même, dans une proportion moindre, entre des singes bonobos. Par contre, ce qu’elles déclaraient trouver émoustillant — l’évaluation subjective de leur excitation — était plus sélectif : les couples hétérosexuels et les images de plaisir féminin. Bref, leur vulve et leurs pensées ne disaient pas la même chose ! Curieusement, dans une autre étude, les femmes lesbiennes ont présenté une concordance légèrement supérieure à celle des hétérosexuelles — quoique loin d’égaler celle des hommes.

    Ces conclusions, pour le moins surprenantes, remettaient en question la fameuse idée selon laquelle les femmes « sont davantage à l’écoute de leur corps ». Les données indiquaient totalement l’inverse ! À en croire les propos du journaliste et auteur Daniel Bergner tenus dans le New York Times en 2009, et dans son livre Que veulent les femmes ?, paru ensuite, les travaux de Meredith Chivers laissaient penser que, au fond, les femmes bouillonnent secrètement d’une concupiscence aveugle, bisexuelle, ce qu’elles taisent pudiquement, sinon inconsciemment.

    La réalité est bien sûr plus complexe. Si les organes génitaux d’une femme envoient des signaux d’excitation contradictoires, explique Meredith Chivers, cela ne veut pas dire qu’elle ment. « Je ne remets pas en doute la parole des gens », affirme la chercheuse. Pourquoi alors le sexe et la tête des femmes ne disent-ils pas la même chose ? Et comment se fait-il que les hommes, eux, soient si réceptifs aux demandes de leur pénis ? (Rosemary Basson, une autre chercheuse, raconte avoir demandé à des hommes d’évaluer la dureté de leur membre en érection, sans le regarder, sur une échelle de 0 à 10 : « Ils déclaraient : “Je suis à cinq et trois quarts.” »)

    D’abord, les organes génitaux ne sont pas les seuls agents du plaisir, précise Meredith Chivers. Le cerveau est un puissant organe sexuel, en particulier chez la femme. (L’« orgasme mental », ou la jouissance sans contact génital, serait d’ailleurs plus fréquent chez les femmes que chez les hommes.) Et il ne faut pas oublier que l’hypothèse selon laquelle l’engorgement sanguin et la lubrification du vagin seraient des mécanismes de protection automatiques, produits par l’évolution en réponse à l’activité sexuelle (désirée ou non), fait largement consensus dans le milieu universitaire.

    Par définition, le désir évoque la volonté de posséder une chose — un sexe ou l’autre, une personne, une situation. Pourtant, les signaux de notre corps et de notre esprit, et la description qu’on en fait aux autres, se brouillent souvent. Les psychologues ont maintes fois constaté que le « soi », en apparence monolithique, serait plutôt formé d’un ensemble de mécanismes qui peuvent parfois entrer en conflit. Les hémisphères gauche et droit du cerveau auraient eux aussi une activité propre, si bien que certains neuroscientifiques conçoivent le cerveau comme un assemblage de modules séparés qui interagissent entre eux. Nous ne sommes pas faits d’un seul bloc homogène — pas plus les femmes que les hommes.

    * * *

    Si une certaine dissonance est normale en nous, quand devient-elle problématique ? Comment se fait-il que des femmes (lesbiennes, par exemple) détectent plus finement les réactions de leur corps que d’autres ? Les études ont montré que celles qui se masturbent davantage présentent un taux de concordance entre la tête et le corps supérieur à celui des autres femmes. En d’autres termes, elles sont plus réceptives aux signaux de leurs organes génitaux. La masturbation joue aussi un rôle clé chez les membres du sexe opposé. Les hommes en général se masturbent plus fréquemment que les femmes, et sont également plus nombreux à le faire plusieurs fois par semaine. Ils ont aussi l’habitude, bien plus que les femmes, de toucher leur sexe en cours de journée, pour replacer leur pénis dans leur sous-vêtement, par exemple.

    Meredith Chivers a par ailleurs démontré que plus un trouble sexuel chez une femme est sérieux (désir extrêmement faible, incapacité d’atteindre l’orgasme, etc.), plus faible sera le taux de concordance entre ce que disent son corps et sa tête. Si votre corps est réceptif mais que votre tête s’emmerde, ou si vous avez envie de faire l’amour mais que votre corps ne répond pas, vous aurez beau vous engager dans une relation sexuelle, vous n’aurez pas l’impression de participer vraiment.

    La chercheuse ignore la cause exacte de ce clivage entre le corps et l’esprit des femmes. Mais sa collègue Lori Brotto, de l’Université de la Colombie-Britannique (une autre sommité en matière de recherche sur la sexualité), et elle envisagent certaines pistes. Le milieu dans lequel grandit une enfant pourrait teinter le rapport à la sexualité qu’elle aura plus tard (le sexe est dégoûtant, malsain, traumatisant) et être à l’origine du divorce psychique. Un discours négatif répété pourrait conduire les jeunes filles à se dissocier de leur corps afin d’éviter de passer par les étapes normales d’exploration et de découverte de soi, et de développement des circuits neurogénitaux. Ce cercle vicieux pourrait non seulement se solder par le refoulement de leurs pulsions sexuelles, mais aussi par leur incapacité à les comprendre.

    Peut-être certaines femmes (ainsi que certains hommes) ont-elles besoin de plus que le sexe lui-même pour se sentir excitées. Peut-être accordent-elles une plus grande importance au contexte, aux signaux affectifs ou aux mots. Peut-être ont-elles simplement besoin de plus de « bon sexe ».

    L’équipe cherche en outre à savoir pourquoi les hommes présentent une concordance si élevée. Leur anatomie y est sans doute pour quelque chose, puisque leurs parties intimes (et leurs réactions) sont apparentes. « D’abord, les organes génitaux des femmes sont cachés, explique Lori Brotto. Ensuite, quand les filles grandissent, elles reçoivent beaucoup de messages du genre “Ne touche pas”, “C’est sale” ou “Mets tes mains ailleurs”, ce qui pourrait faire qu’elles y prêtent moins attention. » Certes, il arrive aussi que les garçons se fassent sermonner à propos de la masturbation, mais avec une nuance de taille, précise Meredith Chivers. « On leur dit : “Ne te touche pas, mais on comprend que tu le fasses quand même.” [On véhicule l’idée] que les hommes ont davantage besoin de se masturber que les femmes. »

    C’est sans parler des pressions des médias, qui dictent en quelque sorte la désirabilité féminine. Leurs messages invitent les femmes non pas à songer à ce qu’elles désirent véritablement, mais plutôt à s’attarder aux détails de leur apparence. Prises dans le jeu de la séduction, elles en viennent à perdre de vue ce qu’elles trouvent sexy.

    Le facteur numéro un qui bloque le désir d’une femme pendant une relation sexuelle ? Si elle a été suffisamment stimulée et que les préliminaires n’ont pas été bâclés ? La distraction, répond la Dre Rosemary Basson, qui étudie et soigne les troubles du désir et de l’excitation à l’Université de la Colombie-Britannique. L’excitation peut être vue comme une sorte de transe, un état d’ivresse propre à celles qui parviennent à laisser le « monde réel » derrière (la vaisselle à faire, le téléphone qui vibre, le rendez-vous des enfants chez le dentiste). « Si vous faites l’amour et que vous ne pensez qu’à la peinture défraîchie du plafond, vous n’êtes pas vraiment là », ajoute Jim Pfaus, de l’Université Concordia.

    Les scientifiques savent évidemment que les relations sexuelles ne sont pas géniales à tous coups. Il y a ce sexe qui nous allume, mais ne nous enflamme pas ; celui qui nous fait du bien, mais qui nous déplaît. Dans son récent ouvrage Future Sex, consacré aux périls du plaisir moderne, Emily Witt résume bien le clivage entre les urgences du corps et la répulsion de l’esprit devant la vulgarité d’une grande part de la porno d’aujourd’hui. « Mon aversion pour la pornographie n’était pas due au fait que les images ne m’excitaient pas, mais plutôt à celui que je ne voulais pas être excitée par des pratiques que je n’avais pas envie de tester. »

    Peut-être certaines femmes (ainsi que certains hommes) ont-elles besoin de plus que le sexe lui-même pour se sentir excitées. Peut-être accordent-elles une plus grande importance au contexte, aux signaux affectifs ou aux mots. Peut-être ont-elles simplement besoin de plus de « bon sexe ». À l’Université Concordia, Jim Pfaus a démontré que le souvenir d’un rapport sexuel décevant supprimait la libido chez les rats femelles : le blocage des récepteurs opioïdes durant l’accouplement décourageait les rates de chercher à se reproduire par la suite.

    * * *

    Un partenaire à la fois habile et attentionné, ça ne s’obtient pas, hélas, par une ordonnance de son médecin. Par contre, celui-ci pourrait bientôt recommander une thérapie à première vue pas très affriolante : s’asseoir les yeux fermés.

    Les vertus de la méditation de pleine conscience ont déjà été éprouvées dans divers milieux, des écoles aux entreprises, pour accroître la concentration et apaiser les esprits tourmentés du XXIe siècle. Mais elles ont jusqu’ici pénétré très peu la sphère du plaisir.

    L’association peut étonner à première vue, surtout si on pense à la passion charnelle comme à un élan de désir irrésistible, presque animal. Selon les psychologues qui étudient la pleine conscience, la pratique favorise la formation de circuits neuronaux entre la tête et le reste du corps, entre pensées et sensations. Inspirée par son application dans le domaine de la santé mentale, Lori Brotto a eu l’idée de recourir à la pleine conscience pour traiter les troubles sexuels chez les femmes. Les études cliniques qu’elle mène actuellement portent à croire que cet exercice spirituel d’inspiration bouddhiste pourrait être l’antidote le plus efficace contre l’insatisfaction sexuelle.

    En effet, la pleine conscience permettrait aux femmes d’accéder à toutes leurs sensations sans être assaillies par des pensées anxieuses du type : Je ne sens pas grand-chose. Est-ce que je prends trop de temps ? De quoi ai-je l’air dans cette position ? Est-ce que je devrais éteindre la lumière ?

    Meredith Chivers, qui, plus jeune, avait justement appris à méditer, a tout de suite vu le potentiel de ce traitement. Dans une étude de 2016, Lori Brotto et elle concluaient que quatre séances de pleine conscience suffisent à renforcer un facteur central de la concordance nommé « intéroception », soit la capacité de percevoir des réalités internes, comme les battements du cœur, la digestion ou le plaisir. De récentes données concernant le « trouble de l’intérêt pour l’activité sexuelle ou de l’excitation sexuelle chez la femme » ont associé cette propriété de la méditation à une modification de l’insula, une région du cerveau qui joue un rôle dans la perception du corps. Plus encore, des essais cliniques menés par les chercheuses Lori Brotto et Rosemary Basson ont révélé que la thérapie est efficace pour soulager des maux bien plus graves : la vestibulodynie provoquée, cette douleur invalidante dont souffrent quelque 12 % des femmes lors de rapports sexuels — et dont on dit souvent qu’elle est incurable.

    Une nouvelle révolution sexuelle, scientifique celle-là, est en marche, pour mieux définir comment le sexe touche chaque aspect de l’être humain. « [Meredith Chivers et Lori Brotto] dictent les normes de la recherche sur la sexualité pour les 20 prochaines années, croit Jim Pfaus. Quand le financement en recherche aura repris en Europe et aux États-Unis, et que les mentalités auront évolué, leurs modèles serviront de référence. »

    Meredith Chivers, elle, espère que les études menées sur la sexualité féminine éveilleront les consciences : « Le but n’est pas de dire qu’on peut être heureux au lit ni quels sont les 500 trucs pour avoir de meilleurs orgasmes. C’est de prendre conscience que notre sexualité est importante. »

    (Traduction de Geneviève Bélanger-Leroux)

  • Députés collaborateurs.

    Dans les couloirs du pouvoir, les lobbyistes tentent d’influer sur les lois : infiltration, petits cadeaux et amendements clés en main, toutes les méthodes sont bonnes pour parvenir à leurs fins.

    Là, les choses sont claires.

    RADIO FRANCE / FRANCE INFO

    Delphine Batho, la députée à l'origine de l'amendement interdisant le glyphosate dans le projet de loi Agriculture et alimentation, a déclaré le 22 mai dernier avoir découvert que son texte avait été "siphonné" par des lobbies.

    Elle raconte avoir mis son amendement dans la base de l’Assemblée nationale depuis son domicile, puis l’avoir modifié plusieurs heures après, quelques jours avant qu’il ne soit rendu public. À ce stade, seuls les députés rédacteurs, le rapporteur du texte et les services de l’Assemblée y ont accès. Les autres députés eux-mêmes ne peuvent le consulter.

    Lobbies : une complicité au cœur de l’Assemblée ?

    Delphine Batho est alors contactée par un lanceur d’alerte : il lui transmet une preuve que la première version de son texte – non modifié – figure dans un document interne de l’UIPP, l’Union des industries pour la protection des plantes. Pour elle, c’est le signe indiscutable que son amendement a été "siphonné" par un lobby, transmis au groupe d’industriels – qui compte notamment dans ses membres BASF, Bayer ou Monsanto. "Comme si les lobbyistes", dit la députée, "avaient un système d’alerte interne ou une complicité au cœur de l’Assemblée".

     

    La députée des Deux-Sèvres Delphine Batho à l\'Assemblée nationale, le 14 novembre 2017 à Paris.
    La députée des Deux-Sèvres Delphine Batho à l'Assemblée nationale, le 14 novembre 2017 à Paris. (STEPHANE DE SAKUTIN / AFP)

     

    Le 23 octobre 2017, Nicolas Hulot s’était ému de la "pression terrible"exercée par les lobbies. Le ministre de la Transition écologique avait lâché sur le plateau de C à vous sur France 5 ces phrases sans équivoque : "Il y a un moment, il faut qu’on arrête d’être naïfs. Ces firmes - et je vais parler avec prudence parce que croyez-moi, on se sent tous menacés par ces firmes-là - ont des moyens de pression que l’on subit les uns et les autres. Il faut quand même le savoir, et faire en sorte que le lobbying de ces entreprises ne court-circuite pas la démocratie. Ces firmes ne sont puissantes que parce qu’on est faibles."

    Delphine Batho a beau s’indigner en plein hémicycle, personne ne s’en émeut vraiment. Le président de l’Assemblée, François de Rugy, lance une enquête interne, qui ne donne rien.

    François de Rugy@FdeRugy

    Représentants d’intérêts : pour sécuriser le processus de dépôt des amendements par les députés nous allons prendre de nouvelles mesures.

    François de Rugy@FdeRugy

    L’enquête interne menée suite au signalement de Delphine Batho n’a pas permis de déterminer la source de la fuite de l’amendement qu’elle avait déposé. Cet exemple est rarissime.

     · Neuilly-sur-Seine, France

    Informations sur les Publicités Twitter et confidentialité

    Du côté des lobbies soupçonnés d’avoir récupéré cet amendement, on nie. "Nous récupérons les amendements, en effet", dit Delphine Guey. La responsable communication de l’UIPP explique qu’effectivement ils se procurent des amendements, mais seulement au moment où ils sont rendus publics sur le site de l’Assemblée. "Comme toutes les parties prenantes, bien souvent on s’appuie sur des cabinets extérieurs dont le métier est justement de faire de la veille réglementaire. Le cabinet nous a informés de la mise en ligne des amendements, et à partir de là nous avons fait notre travail d’analyse, comme toutes les parties prenantes et nous n’avons jamais, à aucune occasion, pu avoir accès au fameux amendement que Delphine Batho met en avant."

    Les attachés parlementaires courtisés

    Alors circulez, il n’y rien à voir ? La fuite a pourtant bel et bien eu lieu. 

    Les députés et le personnel de l’Assemblée ont accès aux textes en cours d’élaboration, tous les ministères concernés par l’amendement aussi. En l’occurrence ils sont onze, dont des poids lourds : Agriculture, Santé et Écologie. Ça commence à faire du monde. François de Rugy omet de le dire, peut-être est-il difficile de se mettre en porte-à-faux avec ceux qui ont concouru à son accession au perchoir.

    Alors qui ? Qui peut concrètement accéder aux textes, hormis les députés, les fonctionnaires de l’Assemblée et le personnel des ministères ? Il y a encore les attachés parlementaires. Ils sont rarement dans la lumière, et pourtant au cœur de la fabrique de la loi. C’est donc une catégorie extrêmement sollicitée, courtisée même, par les lobbyistes. Même après avoir quitté leurs postes, ils sont très recherchés par les divers cabinets de conseil. L’ex-députée écologiste Isabelle Attard a été frappée de voir à quel point son attachée parlementaire a été demandée après la fin du mandat.

    Je ne sais même pas comment ils ont su qu’elle n’était plus attachée parlementaire, mais ça n’a pas traîné. Et j’étais d’autant plus étonnée qu’elle était en poste en région et non pas à Paris.

    Isabelle Attard, ex-députée écologiste

     

    Les approches sont parfois très directes. Un lobbyiste qui veut garder l’anonymat confie qu’il y a plusieurs années, il a été contacté par un de ses clients, un important fabricant de cigarettes. "Le PDG m’a demandé de lui trouver un assistant parlementaire, qu’il pourrait employer à mi-temps - à l’époque c’était juridiquement possible. Sa mission aurait été de transmettre à l’entreprise les comptes-rendus des commissions parlementaires. J’ai refusé. J’ai perdu le client."

    Dans les ministères et à l‘Assemblée, il y a aussi les "petites mains". Les assistants, les secrétaires, qui manipulent papiers et dossiers. Il peut être tentant d’essayer de se procurer des documents grâce à eux. C’est en tout cas le soupçon qu’ont eu un jour les services de Marisol Touraine, alors ministre de la Santé. C’était au moment du vote du projet de loi sur le paquet de cigarettes neutre. Une secrétaire a été trouvée en train de fouiller dans des dossiers où elle n’avait strictement rien à faire… faute de preuve, elle a été par prudence déplacée dans un autre service, moins sensible.

     

    Marisol Touraine, ex ministre de la Santé, à l\'Assemblée nationale, le 8 novembre 2016.
    Marisol Touraine, ex ministre de la Santé, à l'Assemblée nationale, le 8 novembre 2016. (JACQUES DEMARTHON / AFP)

     

     

    Thierry Coste, "un véritable mercenaire"

    Sans aller jusque-là, certains lobbyistes utilisent des méthodes parfois limites et le revendiquent, comme Thierry Coste, le patron de Stratégie et Lobbying, une entreprise qui annonce clairement la couleur.

    L’homme, qui a désormais l’oreille du président de la République sur les sujets de la chasse et de la ruralité, ne cache pas qu’il travaille aussi dans le domaine des armes (pour la "NRA française" dit-il) et encore pour certains pays pas très démocratiques d’Afrique ou du Moyen Orient. Et il assume. "Mon métier, c’est de plaider pour l’intérêt de mes clients et faire en sorte qu’ils aient raison auprès des pouvoirs politiques, auprès des médias. Je ne dis pas qu’ils ont raison, mais ils me payent pour expliquer, pour bien défendre leur cause. Donc mon métier c’est d’abord de faire beaucoup d’investigation, de renseignement : j’infiltre les groupes de pression opposés, les syndicats, tout ce qui peut nuire aux intérêts de mes clients. Ensuite je dois convaincre les ministres, les conseillers des ministres, les parlementaires."

    Thierry Coste, l’homme qui murmure à l’oreille du président de la République sur les sujets de la chasse et de la ruralité.
    Thierry Coste, l’homme qui murmure à l’oreille du président de la République sur les sujets de la chasse et de la ruralité. (ISABELLE SOUQUET / RADIO FRANCE)

     

    "Et puis utiliser les bons arguments au bon moment", affirme Thierry Coste."Une bonne discussion, une bonne polémique, un bon rapport de force, j’utilise tout. Le juridique, la communication, la négociation très cool et très sympa, peu importe. J’assume complètement le fait d’être un véritable mercenaire. J’ai un code d’honneur qui est de respecter les lois et les règlements, de ne jamais pratiquer la corruption, et de ne jamais pratiquer les polémiques sur les affaires de sexe et d’argent. Pour tout le reste, je suis sans foi ni loi."

    Seul le résultat compte pour moi : je respecte la loi, point. Pour le reste je n'ai aucun état d’âme.

    Thierry Coste, patron de Stratégie et Lobbying

     

     

    Éléments de langage pour les parlementaires

    Il y a mille manières d’agir pour les lobbies, qu’ils soient identifiés – quand ils le revendiquent comme Thierry Coste – ou qu’ils se présentent comme cabinets de conseil ou d’avocats, associations professionnelles, ou cabinets d’"affaires publiques" (nouveau nom politiquement correct des lobbyistes).

    Pour faire pression, les groupes d’intérêts utilisent toute une panoplie de moyens. Il y a d’abord les classiques "éléments de langage" fabriqués par les lobbies pour peser sur la décision publique. Au moment du vote sur les néonicotinoïdes, Dow Chemical, la grande firme américaine de chimie, fait passer à un cabinet de lobbying un mail pour défendre le sulfoxaflor – un pesticide tueur d’abeilles - avec un argumentaire clé en mains. Argumentaire signé… UIPP. Et Dow Chemical demande clairement au cabinet de sensibiliser "ses" députés. Extrait : "La définition proposée par les amendements ne correspond aucunement au consensus scientifique actuel. Les amendements proviennent de différents groupes politiques et le risque qu’ils soient adoptés est donc très important. C’est pourquoi je vous serais très reconnaissant de mobiliser vos contacts et de sensibiliser vos députés pour faire en sorte que ces amendements ne soient pas adoptés. Vous trouverez en pièce jointe l’argumentaire détaillé concernant ces amendements, préparé par l’UIPP".

    Mail de la firme Dow Chemical pour défendre le sulfoxaflor, un pesticide tueur d’abeilles.
    Mail de la firme Dow Chemical pour défendre le sulfoxaflor, un pesticide tueur d’abeilles. (RADIOFRANCE)

     

     

    Réponse de l’UIPP à travers sa porte-parole Delphine Guey : "Notre travail consiste à voir à travers les propositions et projets de loi quel seraient les impacts de telle ou telle rédaction. De là à rédiger des amendements… Ça peut arriver, c’est-à-dire que parfois on nous demande des propositions, quand on est auditionnés par exemple par le ministère de l’Agriculture, mais on ne rédige pas en tant que tel l’amendement, non."  

    Et pourtant, il y a des coïncidences plus que troublantes. Dans le projet de loi sur l’alimentation par exemple, une soixantaine de députés (LREM, UDI, LR et Modem) ont déposé strictement le même amendement en faveur de l’épandage de pesticides par des drones sur des vignobles en pente. Le même amendement… à la virgule près.

     

    Quatre amendements identiques mais déposés par différents députés.
    Quatre amendements identiques mais déposés par différents députés. (Assemblée nationale)

     

    Cadeaux et déjeuners prestigieux

    Sur un plan moins technique et plus relationnel, il y a les veilles recettes pour convaincre les élus, qui fonctionnent toujours. Les petits cadeaux par exemple. Le député LREM Richard Ramos raconte avoir reçu une bonne bouteille de la part d’un des plus gros cabinets de lobbying parisiens. Un petit cadeau tout à fait "déontologique" puisqu’il rentre dans les recommandations de l’institution : ne pas accepter de cadeau d’une valeur de plus de 150 euros. Mais le député veut renvoyer la bouteille, et demande à l’accueil de l’Assemblée de le faire. La jeune femme, effarée, lui répond que le cabinet a fait livrer en tout des centaines de bouteilles !

     

    Une bouteille de vin reçue à l\'Assemblée nationale par des centaines de députés, envoyée par un cabinet d\'affaire.
    Une bouteille de vin reçue à l'Assemblée nationale par des centaines de députés, envoyée par un cabinet d'affaire. (RADIOFRANCE)

     

    Il y a aussi les formules éprouvées : on invite à déjeuner ou à dîner dans des établissements luxueux, on convie à des évènements ou des concerts prestigieux. Là encore, les exemples sont nombreux. Les grands cigarettiers (British American Tobacco, Japan Tobacco) sont notamment friands des loges VIP au Stade de France où ils invitent politiques ou journalistes… Marisol Touraine alors ministre de la Santé - fervente mélomane - raconte ainsi un fabuleux concert à Royaumont avec affiche prestigieuse et buffet gastronomique, qu’elle a décliné, quand elle a vu que l’invitation émanait de Japan Tobacco.

    Des colloques de lobbies au sein même de l'Assemblée nationale

    Au-delà de la "stratégie du cocktail", une très bonne façon de se faire bien voir des élus, c’est… de les mettre eux-mêmes en valeur. Quoi de mieux qu’organiser un colloque clé en main sur une thématique forte ou d’actualité – de préférence au sein même de l’Assemblée - et d'en confier la présidence à l’élu, qui peut donc ensuite se poser en spécialiste de la question auprès de ses pairs. Colloques financés par les entreprises qui y participent.

    Parmi eux on relève Esprit de défense, effort de défense, organisé par l’association des villes marraines des forces armées, où sont intervenus le Groupement des industries de construction et activités navales et Safran Helicopters Engines. Autre exemple, Quelles conditions techniques et économiques pour une transition énergétique réussie ?, qui rassemble des grands noms du nucléaire, comme EDF et Framatome. Pas un seul groupe d’intérêt représentant des énergies renouvelables ! Ce concept de colloque tout prêt a été inventé il y a plus de 20 ans par Hervé Maurey et sa société de lobbying… Hervé Maurey devenu depuis sénateur.

    La force de l'entre-soi

    La grande force du lobbying "à la française", c’est l’entre-soi. Il y a déjà un entre-soi de caste : on sort souvent du même milieu, des mêmes grandes écoles. Il y a ensuite l’entre-soi des portes tournantes entre le privé et le public, entre les cabinets de lobbying et les cabinets d’élus. Le Premier ministre en est un exemple : il était directeur des "affaires publiques" chez Areva entre 2007 et 2010. Et à cet égard, le CV des collaborateurs ministériels est aussi édifiant : sur 298 collaborateurs, 43 ont travaillé à un moment de leur carrière dans le lobbying. La palme revient au ministère du Travail, où sur neuf personnes, quatre ont travaillé dans le lobbying et deux dans les "relations sociales" pour le Medef.

    Qu’en est-il de la question du contrôle, de la moralisation de la vie publique, de la transparence ? C’est l’enfant pauvre du système. La loi Sapin 2 a posé quelques bases – minimalistes, selon Eric Alt, le magistrat et vice-président de l’association anticorruption Anticor – avec la création l’an dernier d’un registre officiel où les lobbyistes doivent se déclarer. Aujourd’hui 1 500 groupes d’intérêt y sont recensés, mais les déclarations ne se font pas en temps réel et n’ont lieu que tous les six mois. Elles ne permettent pas de connaître les personnes avec lesquelles les représentants d’intérêt sont entrés en contact.

    Pour Éric Alt, "ni la loi Sapin, ni la Haute autorité pour la transparence de la vie publique - ne sont allées assez loin. Tant qu’on accepte des espaces d’opacité la démocratie n’est pas tout à fait atteinte. C’est une question d’éthique, de culture, d’esprit critique. C’est peut être trop demander aux parlementaires. C’est comme s’il y avait une confusion entre un intérêt public et privé. Alors le pénal peut traiter les situations graves : prise illégale d’intérêt, trafic d’influence, mais on ne peut réguler une société uniquement par le pénal. C’est une culture à faire évoluer ou à retrouver, car c’est l’éthique de la haute fonction publique française qui peu à peu se délite avec ces pratiques. Il faut aussi que le citoyen exerce une vigilance sur le pouvoir".