Blog

  • L'enseignement spirituel

    L'enseignement scolaire actuel exclut totalement la dimension spirituelle de l'individu. La classe de philosophie de terminale n'est qu'une accumulation de savoirs aboutissant à une évaluation chiffrée comme si le but essentiel de la philosophie tenait dans un cadre aussi restrictif. C'est consternant et ça contribue au rejet quasi général de ce regard porté sur l'existence. Pour ma part, la philosophie n'est même pas une finalité. Elle n'est qu'un moyen de tendre vers une complétude de l'individu, une unification de l'ego avec l'inconscient, du moi avec le Soi qui le contient, une observation lucide des conditionnements et leur analyse. La philosophie pour elle-même n'a pas plus d'intérêt que la connaissance de la carte du monde. Il ne s'agit que de l'image d'un territoire mais son exploration rend nécessaire l'engagement du marcheur. Sortir d'une classe de terminale en  se contentant de connaître la carte sans que cela n'ait déclenché le désir absolu de se lancer sur la route intérieure est un échec cuisant pour l'éducation nationale. Il faudrait que ce mammouth cherche à connaître, sur le long terme, le nombre d'individus ayant éprouvé cet amour des horizons intérieurs. Le constat serait effrayant. 

    La philosophie est bien autre chose qu'une matière scolaire. Luc Ferry disait qu'il était inutile de chercher à initier de jeunes enfants à une démarche philosophique. Je suis d'accord avec lui s'il s'agissait de l'enseigner comme cela est fait en France. Mais pour ma part, je mets bien autre chose dans le terme que ce simple épandage de notions diverses dans des esprits en friche. Lorsque je travaille avec mes élèves sur la gestion des émotions, nous faisons de la philosophie puisque l'objectif est de vivre mieux comme l'entendait Sénèque. Pour Luc Ferry, la philosophie est un moyen d'épandre sur les autres ses connaissances. Evidemment, il trouverait humiliant que ça soit vers de jeunes enfants. Il a une trop haute estime de lui. 

    Et bien, je pense, pour le vivre depuis trente ans, qu'il est bien plus délicat d'initier de jeunes esprits que de formater des adolescents. Ceux-là, n'ayant justement jamais eu à s'observer réellement, en dehors du prisme étroit de leur vie sociale. 

    Lorsqu'une élève me dit, après  notre discussion sur le chemin éclairé par les lampadaires qu'on allume,que les zones d'ombres lui apparaissent beaucoup moins inquiétantes dès lors qu'on sait qu'il est bon et reposant de venir se ressourcer sous les lumières acquises, et bien, je sais qu'il s'agit de philosophie. Puisqu'elle vivra mieux.

    Lire la suite

  • Apprentissage existentiel. (école)

    J'utilise parfois une métaphore pour montrer aux enfants le chemin qu'ils parcourent dans les apprentissages cognitifs. Il s'agit des lampadaires. Sur le chemin de la connaissance, ils vont rencontrer un lampadaire qu'il s'agit d'allumer. C'est le travail qu'ils vont fournir qui va alimenter en énergie la colonne jusqu'à atteindre l'ampoule d'où jaillira la lumière. Cette lumière va éclairer le chemin qui se présente devant eux et ils devineront dans l'obscurité la silhouette du lampadaire suivant. Il faudra qu'ils s'aventurent sur le chemin en profitant de la lumière du lampadaire qu'ils viennent d'allumer, ils devront accepter de progresser dans une semi-obscurité, des zones d'ombres, ils devront éviter les pièges sur le chemin, des trous, des ornières, les fossés du bas-côté...

    Si l'exploration se révèle trop pénible, ils pourront toujours venir se ressourcer à la lumière du lampadaire allumé. Il n'y a aucun échec dans ce repos nécessaire, juste une accumulation des nourritures indispensables pour se projeter de nouveau sur la route. Avancer en terrain inconnu dans un état de stress, de peur, de tension, n'est nullement favorable. Les émotions génèrent des obstacles illusoires, comme des fardeaux qui viennent compliquer davantage la tâche. 

    On peut utiliser également la progression des alpinistes sur une montagne himalayenne. Ils vont se charger de tout le matériel nécessaire pour aller installer le premier camp. Ils vont monter lentement pour que leur organisme s'habitue à la pression de l'environnement. Quand ils atteindront un replat favorable à l'installation du camp 2, ils s'accorderont un repos prolongé afin que leur organisme récupère des efforts produits et accumulent les forces nécessaires pour la suite. Ils repartiront lorsque le cheminement aura été minutieusement observé aux jumelles, discuté, préparé, que chacun connaîtra sa tâche, que le matériel indispensable aura été réparti dans les sacs. Il est possible que la montée vers le camp 3 n'aboutisse pas au premier essai. Trop difficile. Ils poseront le matériel et redescendront au camp 2 reprendre des forces. Aucun échec dans cette décision mais l'acceptation des délais, la reconnaissance en eux de leurs faiblesses. Ils doivent s'accorder ce repos, peut-être même redescendre jusqu'au camp 1 pour que ce repos soit encore plus bénéfique.

    Cette validation des connaissances, ce repli vers des territoires connus, ce repos nécessaire avant une nouvelle exploration, une nouvelle avancée en terrain inconnu, les enfants le vivent continuellement. Il est indispensable de leur faire comprendre qu'il n'y a aucun échec dès lors que l'individu reste engagé dans le cheminement à venir. Avancer coûte que coûte est un risque inutile et dangereux. C'est soit une prétention exacerbée, soit une inconscience. Nullement une sagesse.

    Qu'en est-il au regard de l'apprentissage existentiel ? La différence essentielle, à mes yeux, se trouve sur l'absence de balisage. Dans l'aprentissage cognitif, chaque étape à venir est connue, répertoriée, cadrée, préparée. L'enfant avance dans un terrain qui lui est inconnu mais l'enseignant en connaît chaque étape.

    Dans l'apprentissage existentiel ou spirituel, chaque individu avance dans un territoire qui a certainement été parcouru par d'autres explorateurs mais leur expérience ne peut pas l'aider. Il n'y a pas de chemin commun.

    Dans les apprentissages cognitifs, les routes sont partagées par des millions de voyageurs. Seul, le temps nécessaire à chacun variera. Quelles que soient les routes choisies, elles ont déjà été parcourues et les balisages installés.

    Dans le domaine spirituel, je ne pense pas que les routes empruntées par les prédécesseurs puissent permettre une avancée certaine. Il ne s'agirait que d'une illusion. Le fait de connaître un peu les écrits de Krishnamurti ne me fait pas progresser sur le chemin que cet homme a emprunté. Je reste immanquablement sur un chemin personnel. Sans doute que les réflexions qui me sont proposées participeront à l'accumulation de l'énergie interne indispensable à l'éclairage de mes lampadaires mais ça ne sera jamais les lumières des autres explorateurs.

    Le marcheur spirituel est seul sur son chemin. C'est peut-être cette solitude qui rebute tant les humains. 

    L'accumulation des savoirs cognitifs favorise les rencontres mais surtout les comparaisons entre individus, la compétition et la hiérarchie, et ces phénomènes générés par l'école elle-même contribuent tous ensemble à l'image de l'ego. L'individu se construit non pas dans l'estime de soi au regard des savoirs acquis mais au regard de son positionnement par rapport aux autres. Au lieu donc de se réjouir de l'avancée, chacun est confronté à la déception de ne pas être le premier...L'apprentissage devient par conséquent une accumulation de déceptions ou de pressions sans cesse renouvelées pour préserver le niveau atteint par rapport aux autres. Le bonheur du savoir est souillé. 

    Dans l'exploration spirituelle, il n'y a aucun palier identifiable, aucun diplôme, aucune étape commune. Et par conséquent aucune comparaison possible.

    "Ah, je suis plus éveillé que toi ! "

    Absurdité totale qui confère à son propriétaire la nécessité de retourner avant même le premier lampadaire...Il n' a rien compris. D'un point de vue spirituel.

    La méditation avec les enfants contribue très favorablement à ce retour sur soi et à la bienveillance que l'enfant doit s'accorder à lui-même. L'état méditatif est un état de paix.

    Il serait absurde d'amener les enfants à comparer leurs états méditatifs. Il s'agirait d'une atteinte à la méditation elle-même. 

    La méditation est une dimension intime. Aucune injonction de commentaires envers les enfants ne serait judicieuse. Les commentaires ne seront que volontaires.  

    Il s'agit d'inviter les enfants à créer en eux un espace imperméable à toutes intrusions extérieures. Il serait contradictoire que l'école s'immisce dans ce refuge et vienne y réclamer un rendu.. L'apprentissage existentiel est un chemin vers la quiétude, la solitude intérieure. L'école peut présenter le chemin mais aucunement s'y inviter elle-même.

    C'est pour cela que la méditation à l'école, comme toute autre dimension de développement personnel, ne peut et ne doit contribuer à hiérarchiser les enfants par l'entremise d'évaluation formative.

    La méditation à l'école est une activité "extra-scolaire" et il est essentiel que les enfants en aient conscience pour que la méditation elle-même devienne possible...

     

  • Existence et essence.

    Une problématique qui me tourne dans la tête depuis un moment...

    L'essence est ce que l'individu porte avant que l'éducation ne vienne y développer une personnalité fluctuante et amovible.

    Sartre disait que l'existence précède l'essence, dans ce sens, que rien au ciel n'est écrit...Pourtant, lui comme Heidegger, bien que niant l'idée d'une dimension "à postériori", proposaient de pénétrer au coeur même du "Néant" pour découvrir la source créatrice de "l'être".

    Je me demande pour ma part si ces deux dimensions, plutôt que d'être antinomiques, ne seraient pas indissociables et qu'il est absurde de chercher à les opposer. Je vois dans cette lutte intestine bien davantage des conflits d'ego qu'une recherche salutaire... Conflits intellectuels. 

    L'existence est un chemin proposé aux êtres pour remonter à la source créatrice et par conséquent à l'essence. Il n'est pas question de savoir si l'essence permet l'existence ou si l'existence est primoridale, comme s'il s'agissait d'une course en ligne, mais juste de relier les deux entités, celle de l'esprit et celle du matériel, pour élever l'individu.

    En dehors de ce travail, il n'y a qu'une série d'évènements qui relèvent bien cette fois du néant...Ce qui est absurde, c'est de ne pas entamer cette exploration.

    Dans le chamanisme, il existe une vision ternaire de l'homme et du monde. Un monde matériel ou physique, un monde inconscient ou souterrain et un monde d'en haut, spirituel et lumineux. L'arbre en est le symbole. Rien en lui n'est séparé, il forme un tout harmonieux et il ne peut se défaire d'une partie de lui-même. Dans cette vision du monde, l'individu est placé au centre, au niveau du tronc et il doit apprendre à saisir ce qui le constitue dans son unité, l'existence tout comme l'essence. L'existence s'étendra dans une dimension matérielle et évènementielle. L'analyse lucide de cette existence génèrera une conscience active entre le monde souterrain de l'inconscient et celui de l'esprit, entre les profondeurs et les cieux.

    Sans cette existence physique, il ne peut pas y avoir d'exploration de l'essence. Sans l'essence créatrice, il n'y a pas d'existence possible mais juste une extension horizontale. Une essence à qui aucune existence ne serait attribuée ne serait qu'une entité invisible figée dans l'éternité. Aucun intérêt. Cette entité figée, c'est celle des Dieux. A mes yeux, leur place n'est pas enviable.

  • La réalité et le réel.

    On peut faire une distinction entre le monde de la réalité, c'est à dire la dimension dans laquelle nous évoluons, et le monde du réel, c'est à dire la dimension que nous pouvons explorer lorsque l'individu s'est "réalisé". Il s'agit à mes yeux de cet espace dans lequel l'individu s'est extrait des codes et des conditionnements inhérents à son statut.

    Si quelqu'un me dit : "Vous êtes instituteur", je me dois de répondre que c'est faux. Je ne "suis" pas instituteur mais j'exerce la profession d'instituteur.

    De la même façon, si quelqu'un me dit : "Vous êtes bien Thierry Ledru", je me dois de lui répondre encore que c'est faux. Je ne "suis" pas Thierry Ledru mais juste une forme prise par la Vie. Le concept associé à mon nom n'est qu'une étiquette qui permet à autrui de m'identifier. Si par exemple, je m'étais appelé Théodore Duchmol et que j'ai été élevé par les mêmes parents et que j'ai connu la même existence, je serais toujours le même. Si par contre, je m'étais bien appelé Thierry Ledru mais que j'ai été élevé par d'autres parents et que j'ai connu une autre existence, je ne serais absolument pas le même.

    L'étiquette sociale se constitue. Elle n'existe pas a priori. C'est une réalité progressive. Le réel, par contre, existe lorsque je me libère de ces étiquettes. La réalité est un monde conceptuel permettant à l'individu de créer du sens pour son existence. Le risque est que l'individu s'identifie à ce sens alors qu'il n'est qu'une apparence. On pourrait même dire que cette réalité est totalement intellectuelle. Elle s'établit à travers la pensée. Elle n'a aucune existence matérielle. Il s'agit uniquement de costumes associés à des rôles et à des évènements qui s'accumulent et à travers lesquels la pensée prend forme. Mais si on prive l'individu de ces fonctionnements mécaniques et que sa pensée se libère de cette pression, il ne disparaît pas pour autant. C'est une réalité signifiante construite sur l'intellect social institué. Elle n'est pas matérielle étant donné que ce sont les pensées qui lui donnent cette apparence. Je ne suis pas propriétaire d'une maison. C'est totalement absurde. Il ne s'agit que d'un papier administratif. Je ne suis pas propriétaire d'un bout de terre. Je ne suis pas instituteur, je ne suis pas père de trois enfants. Je suis celui par qui la Vie s'est chargée de donner forme à trois existences. Il m'incombe par contre d'accompagner ces trois existences. Mais je ne "suis" pas pour autant père. Je suis une forme prise par la Vie. Dans la réalité, je me suis identifié à des devoirs, des exigences, des rôles, des comportements, des responsabilités. Tout cela ne me constitue pas, ce sont des costumes. Cela ne signifie pas qu'ils ne sont pas importants mais je dois faire une distinction entre cette réalité sociale et le réel.

    L'énorme erreur de cette société moderne est d'avoir donné à la réalité une place prédominante et d'avoir par conséquent créé de toute pièce un assemblage disparate dans lequel l'individu perd de vue le réel. C'est une pression constante qui n'a rien à voir avec le phénomène vital. Nous en oublions par conséquent que nous sommes en Vie pour nous attacher uniquement à exister. L'existence est un phénomène social. la Vie est un phénomène originel. 

    On peut par conséquent établir une distinction entre le "réalisateur" et "l'acteur".

    Le réalisateur est l'individu qui se réalise à travers l'exploration du phénomène vital.

    L'acteur se contente de tenir des rôles auxquels il est parfaitement identifié et qui remplissent son existence. Il n'en est pas toujours heureux d'ailleurs mais il reste malgré tout attaché à ces rôles puisqu'ils lui donnent ce sentiment d'exister. C'est totalement insignifiant mais il prolonge aveuglément les comportements dont il a hérité. Le réel lui est totalement inconnu.

    Le monde de la réalité est un monde clos malgré la multitude de voies qu'il propose. Il est clos parce qu'il n'ouvre pas un espace intérieur mais uniquement la multiplication des illusions de la pensée. J'aurais pu être avocat, médecin, ouvrier, maçon, célibataire, Anglais, Belge, Indien, Chinois, pauvre, riche, malade, handicapé, blond, roux, gros, maigre, chauve, barbu etc etc etc...Tout ça n'aurait rien changé au réel en moi mais aurait changé la réalité dans laquelle j'aurais évolué. On pourrait croire que la multitude des voies générées par la réalité propose des horizons immenses mais il n'en est rien étant donné que ces horizons, d'un point de vue spirituel, n'en sont qu'un. L'individu dépense une énergie considérable à explorer des voies illusoires balisées de panneaux variés mais c'est une extension horizontale alors que la voie spirituelle constitue une voie verticale à l'intérieur de l'individu. Victor Hugo, Nietzsche, Baudelaire, tous ont parlé de ce "gouffre" en nous.

    De quoi se constitue ce réel ? Selon certain scientifiques, Fritjof Capra par exemple, notre univers physique ne se constitue pas de matière mais d'une force appelée énergie. La matière serait uniquement la forme condensée de cette énergie. Elle existe sous la forme de particules de plus en plus infimes, les unes à l'intérieur des autres pour finalement se réduire à l'état d'énergie pure. D'un point de vue physique, tout ce qui existe serait énergie et l'être humain ferait partie intégrante de cette énergie. Cette énergie émet des vibrations, à des vitesses variées et ces vibrations correspondraient à la qualité même de l'énergie. La pensée elle-même serait une énergie relativement subtile. Une des lois de l'énergie est qu'un niveau vibratoire d'énergie tend à attirer l'énergie de même qualité et de même vibration.

    On voit immmédaitement que le maintien du fonctionnement de conscience actuel correspond à une énergie commune. Les individus vibrent de façon identique et favorisent l'hégémonie d'une forme de pensée. C'est une aimantation qui s'entretient elle-même. Étant donné que cette forme d'énergie aboutit à des conditionnements planétaires, l'humanité ne parvient pas à s'extraire de cette qualité basse d'énergie. Il faut imaginer un champ énergétique incommensurable à l'intérieur duquel les individus évoluent, tous de façon identique puisqu'ils vibrent tous avec la même "qualité"...

    Il est évident que les Kogis, par exemple, ne sont pas inclus dans ce champ énergétique.

    Pour notre part, quel que soit, le type d'existence dans lequel nous évoluons, il n'y a aucune liberté spirituelle tant que nous sommes associés à cette énergie basse. Bill Gates n'est pas plus libre que le SDF du pont de l'Alma... Mais le SDF rêve évidemment de la vie de Bill Gates. On ne peut pas lui en vouloir. C'est une "réalité" si parfaite...

    Il est 4h10 du matin et je suis devant l'ordinateur. Impossible de dormir. Cette impression que ce réel est là et me tend les bras. Il y a quelque chose d'immense à comprendre.

  • Si un jour

    Si un jour, en cherchant à ouvrir ce blog, vous tombez sur une page qui vous dit que le site n'existe plus, c'est parce que je l'aurai supprimé. Je ne m' en sors plus avec la nouvelle version de l'hébergeur et j'en ai ras le bol de passer des heures à essayer de gérer tout ça. Je ne suis pas informaticien. Et ça ne m'intéresse pas.

    Lire la suite

  • La désillusion

    Avec le temps, les années à travailler avec les enfants, j'ai fini par comprendre que je n'avais aucun espoir à avoir au regard de l'énergie que je dépense avec eux. C'est totalement inutile. Ca ne m'appartient pas. Il y a beaucoup trop de paramètres qui entrent en compte et qui m'échappent totalement et même si je maîtrisais 99 % de la situation,  il y aurait une pression ingérable qui s'installerait si je désirais obtenir des résultats conséquents. Ce qui importe et qui m'appartient totalement , c'est que je m'applique à faire ce qui me semble juste. L'intention ne doit pas faire partie de ce travail au risque de tomber dans la désilusion. Mais ce n'est pas la réalité qui crée cette désillusion. C'est moi parce que la réalité ne correspondra pas à ce que j'espérais atteindre. Dès lors, je vais renforcer ma pression sur les élèves étant donné que cette désillusion me renvoie une image négative de moi-même. Le piège est redoutable. Cette pression, je vais la transmettre et les enfants la recevront et la transformeront inconsciemment en peur. Leurs résultats en seront impactés parce qu'ils seront figés par mes attentes.

    Dans ce métier, il ne faut avoir aucune attente, aucun espoir, aucune intention. Il faut juste se contenter de faire ce qui semble juste, utile, efficace, judicieux.

    Finalement, il faudrait avoir dans chaque classe une personne qui observe l'enseignant et qui travaille avec lui sur son propre vécu, qui l'aide à analyser son propre parcours, les raisons de son engagement dans ce métier, les traumatismes et ce qu'il cherche à apaiser en lui, la reconnaissance qu'il voudrait obtenir, la vision qu'il a de l'enfance au regard de l'enfant qu'il porte en lui...Mais les enseignants sont seuls et c'est donc un travail qu'il doivent mener dans leur solitude et en explorant leurs angoisses. On rejoint le travail nécessaire de l'inconscient si cher à C.G. Jung. La connaissance de soi consiste en un travail d'introspection permettant la compréhension de ce qui nous constitue. Car comment envisager de transmettre des connaissances alors que celui qui en est chargé ne sait pas ce qu'il porte ? On pourrait penser que la maîtrise des techniques suffise mais ça serait une illusion redoutable là encore. Le contenu n'a aucune importance si le contenant ne sait pas de quoi il est constitué. C'est comme une outre percée qui se viderait sous la pression exercée par la fonction de porteur d'eau. Il faut que l'outre soit étanche, qu'elle ait colmaté les fissures, qu'elle ait renforcé la structure. Là, il sera possible qu'elle transporte ce pour quoi elle est faite et même, chose surprenante, qu'elle continue à croître et à porter un volume de plus en plus important. 

    Il y a une attitude indispensable pour apprendre de quoi l'outre est constituée. C'est l'humilité. Ce qui n'a rien à voir avec le doute. Celui qui doute ne peut transmettre que ses peurs. Celui qui reste humble transmet sans chercher à savoir si cela aura un effet. Il agit. Sans se soucier de la portée de ses actes. Il est du coup disponible pour analyser la justesse de ses actes et les modifier si cela lui semble nécessaire, non pas au regard des effets mais au regard de la réception de ses propos et de ses actes. Est-ce que ce qu'il fait est reçu avec enthousiasme ou est-ce que les personnes concernées restent inertes et juste soumises à sa pression ? Le seul effet à analyser, c'est l'engagement qui est déclenché par l'enthousiasme de celui qui transmet et l'enthousiasme de celui qui reçoit. 

    Il s'agit par conséquent de rester impliqué dans l'instant présent. Sans se préoccuper des résultats. Il sera toujours temps, plus tard, d'en juger. Si ces résultats se révèlent insuffisants au regard de ce qui est réalisable, il conviendra, non pas de juger, celui qui n'a pas atteint un objectif totalement subjectif mais de juger de l'investissement de celui qui transmet.

    Il reste le problème posé par ceux ou celles qui restent imperméables à toute transmission ou qui ont besoin d'un laps de temps conséquent pour y parvenir. Les raisons, encore une fois, peuvent être innombrables. La structure scolaire, de part sa rigueur, génère dès lors une pression insurmontable. Celle de l'ensignant qui se sent impuissant, celle du temps qui file et qui va imposer une sentence, celle d'un cadre qui n'est absolument pas favorable à la prise en charge spirituelle de ces individus. Je dis bien "spirituelle" et non pas "psychologique". Là aussi, je suis persuadé aujourd'hui, après trente ans de travail, que c'est là que se situe le problème.

    La psychologie n'est qu'une version scientifique de la spiritualité. Il fallait un terme "laïque" parce que la religion s'est accaparée la spiritualité. Il n'en est rien pourtant étant donné que la spiritualité est une voie d'éveil, là ou l'adhésion religieuse est un embrigadement. Et la religion n'a encore rien à voir avec la Foi. 

    C'est de spiritualité dont les enfants ont besoin. Mais quels enseignants considèrent que pour eux-mêmes, c'est un travail indispensable ?...

    Lire la suite

  • Ski, poudreuse, free-ride.

    Il est loin le temps où on lui apprenait à prendre le tire-fesses. Il est grand le garçon et il envoie du lourd :) Bonheur total pour lui et pour nous de voir ce qu'il fait désormais.

    Lire la suite