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Le manque et le désir.
- Par Thierry LEDRU
- Le 05/12/2010
Tout homme veut être heureux. Y compris celui qui va se pendre, comme l'écrivait Pascal. S'il se pend, c'est pour échapper au malheur et donc rejoindre ce qu'il entrevoit comme un bonheur par la disparition de ce qui le détruit : le malheur en lui. Une auto destruction favorable à ses yeux. Aussi effroyable soit-elle pour le reste du monde.
Heureusement, toutes les situations de malheur ne conduisent pas à de telles extrémités. Il s'agit donc de rester lucide pour ne pas finir par se pendre à cette détresse de vivre.
Socrate annonce "que le désir est un manque" et que nous avançons dans l'existence les yeux fixés sur ce manque. Sur ces manques d'ailleurs. Car ls sont nombreux et ont une facilité à se reproduire absolument stupéfiante. Nous sommes des jardiniers performants et nous plantons des graines "de manque" sans relâche.
Sartre disait que "l'être est fondamentalement désir d'être et le désir est manque."
C'est ce qui nous condamne au "Néant" (Sartre) ou à la "Caverne" (Platon).
Nous ne sommes pas heureux parce que nous manquons précisément de ce que nous désirons. On peut craindre en plus qu'une bonne partie de ces désirs et donc de ces manques soient issus de l'imagination et non de la raison, ce qui rend leur aboutissement encore plus inaccessible.
Les Platoniciens commes les Existentialistes ont décrit cette course au désir comme un épuisement de l'individu. Dès qu'un désir est satisfait, il n'y a plus de manque, donc plus de désir. L'individu ne supporte plus ce vide du désir satisfait et cherchera frénétiquement un manque capable de nourrir un nouveau désir, une soif absolument délicieuse qu'il faudra assouvir... L'homme ne vit que dans la projection de son être dans l'assouvissement du désir, fabriqué, artificiellement parfois, par un manque.
"Ce que je n'ai pas me manque, je le désire. Ce que j'ai ne me manque plus et ne contient aucun désir. Il m'en faut par conséquent un autre pour que la vie soit remplie de ce désir."
La société de consommation et les dirigeants des multinationales sont des philosophes redoutables. Ils connaissent très bien les Classiques, c'est une erreur de les sous-estimer, ils maîtrisent parfaitement les rouages de l'humain et s'en servent avec une maestria éblouissante, aveuglante même, destructrice...Nous sommes des papillons de nuit attirés immanquablement par les manques fabriqués et les désirs entretenus. Qu'un lampion s'éteigne et inévitablement un autre s'allumera un peu plus loin.
Pas question pour les marchands de laisser les consommateurs se retourner vers les lumières intérieures...Pas question de leur laisser le temps de se réjouir de l'instant présent. Il faut des désirs, encore plus de désirs, il faut des manques, toujours plus de manques. Noël sera passé qu'on pensera déjà aux oeufs de Pâques. L'hiver sera encore là qu'on trouvera déjà des maillots de bain dans les magasins. Les grandes vacances seront arrivées qu'il faudra déjà acheter le cartable de la prochaine rentrée. L'idéal est de créer même des désirs totalement absurdes afin qu'ils soient rapidement assouvis et que la frénésie du manque s'entretienne plus facilement. Créer des désirs fallacieux est plus rentable car l'individu qui parvient à l'assouvir ne risque pas de chercher à en jouir bien longtemps. La platitude de ce désir assouvi instaurera très rapidement la nécessité d'un nouveau manque et d'un nouveau désir. C'est le monde de l'insastifaction chronique. Quasiment le Monde entier marche dans cette voie.
Même en "amour", certains individus fonctionnent ainsi. C'est le manque qui les réjouit et pas la jouissance du désir assouvi. Amour kleenex qui fait pleurer celui ou celle qui est jeté.
Même les religions ont compris le système, sauf qu'elles l'ont poussé encore plus loin. Le bonheur sur Terre est impossible, ce désir ne sera jamais assouvi, ce manque sera toujours aussi redoutable jusqu'à la fin mais par contre, le Paradis offrira aux bons paroissiens l'assouvissement ultime de ce manque. Croyez en moi et je vous donnerai à votre mort le bonheur qui vous manque. La Foi peut devenir une espérance morbide.
L'espérance. Voilà le mot. Non pas l'espoir qui pousse parfois aux actes, un saisissement de l'instant plus puissant que le mirage temporel, mais l'espérance qui conduit à l'abandon, au fatalisme, à la décrépitude spirituelle. L'espérance est une fuite en avant, d'espérance en espérance, de manque en manque, de désir en désir. L'individu se complait dans l'espérance car le désir de ce qui lui manque lui donne le sentiment d'une vie remplie. L'espérance de l'argent, de l'amour, du confort, de la possession, du pouvoir...C'est une addiction redoutable qui mène certains individus à renier toutes les valeurs humaines les plus belles. Pas de partage, pas de compassion, pas d'attention, pas de tendresse, l'objectif est le moteur, le désir assouvi nourrira un désir encore plus fort, le milieu de la politique est le symbole majeur de ce fonctionnement. L'ambition devient le ferment de l'espérance. Même l'école insère les enfants dans cette perdition des âmes à travers la compétition. L'espérance d'être le "meilleur", d'obtenir le meilleur classement, la promotion désirée, le salaire mirobolant. Mais ça ne s'arrêtera jamais. Les imbrications sociales, les comparaisons, les jalousies, créeront inévitablement un manque supplémentaire. Un poste plus "élevé" même si pour cela il faut ramper. L'espérance de devenir un jour celui fait ramper les autres est une ambition incommensurable, inépuisable. Le conditionnement est si puissant que l'individu a perdu toutes retenues, toute lucidité. La réussite sociale de ces monstres de puissance, aussi destructrice soit-elle, devient la référence. Combien rêve d'être milliardaire ? Combien accepterait de prendre la place d'un Dassault, vendeur d'armes ? Une fortune dont on n'a pas idée...Un nombre de morts incalculables sous les bombes.
Bien, mais alors, que faire ?
Certains choisissent de s'étourdir pour ne plus souffrir de ce qui leur manque. Ne pas penser, ne pas réfléchir, foncer tête baissée dans la meute affolée et se réjouir immédiatement de la folie générale. Acheter, s'amuser, accumuler les divertissements, en abandonner un sitôt essayé, en trouver un autre. Espérer juste que le prochain week-end sera aussi déjanté que celui qui vient de se finir. Passer la semaine le moins douloureusement possible en multipliant les petites trouvailles dérisoires mais indispensables pour tenir six jours. Si en plus, il y a des soldes, alors là, ça va être génial...
C'est toujours de l'espérance mais seconde par seconde...Ceux-là sont faussement dans l'instant et se réjouissent d'une vie frénétique. Grand bien leur fasse.
Bon, laissons tomber, c'est mort.
Allons jouer au Loto alors et si on perd on se réjouira pendant quelques jours que le prochain tirage sera le bon.
Bon, laissons tomber, c'est mort là aussi.
Allons à l'Eglise alors et attendons la mort pour nous réjouir enfin.
Bon, là, c'est sûr, on sera vraiment mort.
Et si nous décidions de ne plus avoir d'espérance ?...Et si nous décidions que nos manques ne sont bien souvent que des inventions ? Et si nous décidions que le plaisir n'est pas à venir mais qu'il est déjà là ? Et si nous décidions que ce plaisir constant d'être là est la source réelle du bonheur ?
Bien sûr que d'espérer avoir un peu d'argent, ça aide...A moins d'aller vivre dans la forêt amazonienne ou chez les Inuits. Tout dépend aussi de ce que nous mettons derrière ce désir d'avoir un peu d'argent d'avance, une réserve permettant de ne plus être dans une survie quotidienne. Saurons-nous en avoir un usage "utile", constructif pour l'individu ? Est-ce que ça répondra à un projet destiné à entretenir une évolution de l'individu ou sa participation erratique à la société de consommation ?
Bien sûr que nous pouvons espérer trouver l'amour, le grand amour. Mais qu'en ferons-nous ? Un accompagnement fidèle et attentif de l'être aimé dans une voie personnelle ou une dépendance à l'autre, à moins que ça soit une soumission de l'autre...Les dérives sont nombreuses.
Bien sûr que nous pouvons espérer avoir un travail passionnant. Encore faut-il qu'il ne nous oblige pas à renier ce que nous sommes. Le travail, s'il n'est pas un tremplin vers un accomplissement intime de l'individu, n'est qu'un labeur. On est en droit d'espérer de l'existence autre chose qu'une vie de labeur.
Et c'est là justement qu'intervient le questionnement de la préparation de ces paramètres essentiels de l'existence. Si nous décidons de rester vivre dans le monde "occidental", nous ne pouvons échapper à la nécessité de la construction de l'existence. C'est vers l'enfant qu'il s'agit de se tourner. Le développement personnel en quelque sorte avant le développement du futur salarié...Ca n'est pas le chemin actuel de l'Education Nationale. La raison en est très simple : l'individu éveillé n'est pas un consommateur effréné : une horreur pour le PIB et les chefs d'entreprise. Pas le petit artisan du coin mais le patron des multinationales. Le gouvernement n'oeuvre pas pour les consciences mais pour le rendement, la croissance, les marges, les chiffres d'affaires. Les gouvernements sont dans l'espérance continuelle de croissance économique et les citoyens sont les outils de leur espérance. Les enfants quant à eux sont des proies si dociles.
Revenons à nos chers philosophes...Schopenhauer disait que "la vie oscille comme un pendule de droite à gauche, de la souffrance à l'ennui."
La souffrance chez lui est associée au désir de ce qui nous manque. Une frustration qui mène au malheur. Quand le manque finit tout de même par être satisfait, c'est l'ennui qui surgit. Puisqu'il n'y a plus de manque, je n'ai plus de désir et la vie devient morne, triste, effroyablement ennuyeuse.
Je n'aurais pas aimé être à la place de ce Monsieur...Il me semble qu'il délaisse un aspect essentiel de la vie.
Le plaisir. Le plaisir dans la pleine conscience de l'instant et de la vie en soi.
Je perçois chez lui une hantise chronique de la jouissance...Ce qu'il pensait des femmes en général me conforte d'ailleurs dans cette idée...
Voilà la vidéo de la sortie de ski d'hier.
Quelle jouissance fabuleuse, quel bonheur du corps et de l'esprit, quelle joie !! That's life !!!
C'est là, maintenant, sans aucune espérance, sans aucun objectif lointain, juste glisser dans la poudreuse, jouir de mon corps, de mon âme ré-jouie, de la lumière, du froid sur la peau, des cristaux qui scintillent, des rires de mon garçon, juste cette joie immense du saisissement de l'instant dans le creuset de mon être, tirer du plus profond tout ce dont je dispose, mes forces, mon endurance, ma résistance, mes réflexes, et nourrir mon corps du scintillement incandescent de mon esprit.
Quelque chose de très simple finalement.
Vivre.
"That's life."
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Philosopher...
- Par Thierry LEDRU
- Le 01/12/2010
Délicat en fait de présenter cette activité à des enfants de CM2...Quel est l'objet d'étude ? Autant ils sont capables d'identifier de la géographie ou des mathématiques, autant, même après plusieurs débats en classe et des "mini réflexions" communes en cours de journée depuis le début de l'année, il est difficile pour eux de cerner la réalité de cette "matière"...Une petite fille a même dit qu'après en avoir parlé avec ses parents, ceux-ci étaient incapables de dire ce qu'était la philosophie, ils n'en avaient jamais fait à l'école et n'avaient jamais rien lu dans ce domaine...J'ai répondu que tout le monde faisait de la philosophie tout au long de sa vie, à divers niveaux, étant donné que la philosophie a pour objectif comme le dit Sénèque " de nous procurer la vie heureuse" et que par conséquent tout le monde, un jour ou l'autre, faisait preuve de philosophie...Ce qui différenciait les individus, c'était la profondeur des réflexions, leur durabilité, leur multiplicité, l'exigence aussi quant à ne pas se voiler la vérité.
J'ai donc décidé de prolonger ce débat et de tenter de cerner clairement avec eux ce que signifie "philosopher". André Comte -Sponville en fait une présentation à laquelle j'adhère totalement dans "le bonheur désespérément." J'ai essayé d'en reprendre les grandes lignes.
"La philosophie est une pratique discursive (discours et raisonnements) qui a la vie pour objet, la raison pour moyen et le bonheur pour but. Il s'agit de penser mieux pour vivre mieux."
Le bonheur est le but de la philosophie et la sagesse en est le moyen. La sagesse se reconnaît au bonheur mais un "certain" bonheur. Il ne s'agit pas d'un bonheur nourri d'illusions mais d'une analyse approfondie de la vérité. Le philosophe s'attachera avec rigueur à une vraie tristesse plutôt qu'à une fausse joie, il ne se détournera pas de la lucidité pour se perdre dans des dérives hallucinogènes, quitte à devoir abandonner un "bonheur" fabriqué. Mieux vaut une saine vérité qu'un mensonge camouflé. Quelqu'en soit la rudesse. Les bonheurs illusoires sont les ferments des détresses à venir. On en revient à ces fameux espoirs comme autant de falots qui s'éteignent à la moindre brise. Le philosophe s'attelle à rester impliqué dans l'instant, à le décortiquer sans pour autant s'épuiser jusqu'à la déraison. Il n'évolue pas dans un espace clos mais au coeur de la vie quotidienne sans pour autant que cette vie quotidienne ne devienne un espace clos. Sa raison est au seuil, alternant les engagements réels dans une vie sociale et les retraits dans le silence de ses pensées. Il ne s'agit pas pour lui d'être coupé de la "Cité" mais de s'y fondre sans jamais s'y perdre.
Saint-Augustin parlait de " la joie qui naît de la vérité." Spinoza parlera de "béatitude" par opposition aux bonheurs factices, ponctuels, éphémères de la vie frénétique de la Cité. Les bonheurs illusoires ont besoin d'être constamment alimentés par de nouveaux subterfuges, ils s'épuisent rapidement et conduisent immanquablement à une addiction pathogène. La société de consommation entretient le stock des toxicomanes.
Philosopher revient par conséquent à tenter d'être heureux à travers la vérité. Le bonheur n'est pas sa norme dans le sens où il n'est pas un objectfif autorisant les déviances. Le philosophe acceptera les conclusions les plus redoutables. Le bonheur s'il n'est que le maintien des oeillères lui est insupportable...Cette norme du bonheur à tous prix n'est pas de son domaine. La pensée "positive" n'entre pas dans son champ d'investigations dès lors que ces pensées sont détournées de la vérité. Il ne s'agit pas de penser ce qui nous rend heureux mais de penser ce qui nous paraît vrai. Cette vérité sera la source du bonheur. Et cette vérité est bien plus difficile à saisir que des bonheurs illusoires. Si le bonheur est le but, il n'en devient pas pour autant un alibi de la dérive.
Il n'est qu'à regarder ce faux ami qu'est l'espoir, cet aimant auquel nous succombons si facilement et qui contient caché en lui-même des désillusions implacables, pour comprendre ce qu'est la vérité du philosophe. Il reste ensuite ensuite à choisir sa propre voie.
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Pour le "fun" :)
- Par Thierry LEDRU
- Le 27/11/2010
DU VTT, pour commencer.
DU SKI pour continuer.
C'est ça la magie de la montagne, on ne s'arrête jamais :))
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Une découverte qui me réjouit.
- Par Thierry LEDRU
- Le 26/11/2010
Un blog passionnant.
http://www.everyoneweb.fr/gdevecchi/
Je viens de découvrir d'ailleurs qu'il existe un projet de philosophie au lycée dès la seconde...Je vais enfin pouvoir dire quelque chose de positif...Sauf qu'il risque de se passer un sacré bout de temps, si ça se concrétise, pour que ça passe au collège puis à la primaire puis à la maternelle...Je serai sûrement déjà mort. C'est dommage.
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Un permis pour passer au collège...
- Par Thierry LEDRU
- Le 26/11/2010
Je suis désolé d'utiliser encore une fois le site du Figaro mais il semblerait qu'il n'y ait que lui qui s'intéresse aux projets du gouvernement sur l'enseignement...
Le président du groupe UMP à l'Assemblée voudrait instaurer un examen
d'entrée en sixième.
Il présente les propositions de son club Génération France sur l'école primaire. Le député avait lancé l'an dernier une réflexion sur le collège, proposant notamment des collèges dédiés aux niveaux sixième et cinquième, et d'autres aux niveaux quatrième et troisième. Ce mardi soir, Jean-François Copé décryptera, en présence de Luc Chatel et d'autres invités, les propositions de son club pour l'école primaire.
LE FIGARO. -Pourquoi vous intéresser à l'école primaire?
Jean-François COPÉ. -Génération France est une entité qui a vocation à creuser les sujets plutôt qu'à organiser un grand rendez-vous sans lendemain. Nous avions ouvert notre réflexion sur le collège, car il me semblait alors qu'il était réellement le «maillon faible» du système scolaire. Il était donc logique que nous poursuivions notre démarche en traitant ce qui se passe en amont, à l'école primaire. Et nous nous tournerons ensuite vers la question de l'enseignement professionnel et de l'apprentissage. Le plus important est d'analyser en profondeur chaque point, et d'arriver sans idée préconçue.
La réforme Darcos sur le primaire a donc besoin d'être amendée?
Cette réforme recentre les programmes de l'école primaire sur les savoirs fondamentaux. Le fait qu'ils soient en partie fondés sur des exercices répétitifs et le par cœur ne me choque pas, surtout si on y ajoute un suivi personnalisé pour les élèves en difficulté. Au-delà de la définition des programmes, il y a plusieurs axes d'amélioration possibles. Dans la suite logique de nos travaux sur le collège, nous voulons agir essentiellement sur trois leviers primordiaux : l'organisation des établissements, l'impact personnel de l'enseignant et les méthodes d'apprentissage.
Dans quel sens doit aller une refondation de l'école primaire?
Apprendre à lire, écrire, compter: c'est la mission prioritaire de l'école. L'objectif est de ne pas envoyer au collège un seul enfant qui ne maîtrise pas les fondamentaux. Or, actuellement, 40% des écoliers ont de graves lacunes à l'entrée en sixième. C'est pourquoi je propose un examen en fin de CM2 qui évaluerait les connaissances des enfants. Ni un baccalauréat ni un certificat d'études, il est absurde de comparer avec une époque où la majorité des enfants sortait du système en fin de primaire. Il s'agirait d'une «validation des savoirs fondamentaux». Le but n'est pas d'exclure qui que ce soit mais que 100% des enfants réussissent cet examen. Son existence même engendrerait une réorganisation de l'ensemble du primaire pour parvenir à cet objectif.
On va vous accuser de favoriser le «bachotage»…
Il est établi par tous les spécialistes que si les fondamentaux ne sont pas acquis à l'entrée en sixième, l'enfant est condamné à l'échec scolaire. Voilà la seule considération qui importe.
Vous êtes donc contre la proposition du récent rapport du Haut Conseil de l'éducation d'une école commune du CP à la troisième?
Oui, quand on considère les transformations que connaît un enfant dans son évolution à ces âges-là, marquer une différence vers 11 ans paraît légitime.
En quoi cet examen modifierait-il la structure de l'école primaire?
Tout doit être repensé pour parvenir à 100% de réussite. Tout d'abord, le directeur doit devenir un vrai «patron» qui recrute et évalue annuellement ses enseignants au regard du projet pédagogique défini en commun. En retour, les enseignants évaluent le chef d'établissement, qui est responsable de ses résultats. L'équipe s'organise localement, par exemple, en créant des groupes de niveau… Étant entendu qu'il appartient à l'État de définir les contenus et les diplômes.
De plus, il est indispensable de mettre à disposition des enseignants les méthodes qui ont fait leurs preuves et de faire en sorte qu'ils les utilisent. La liberté pédagogique est fondamentale, mais elle doit être encadrée par l'évaluation des résultats de l'établissement, ce qui relève des inspecteurs de l'Éducation nationale. Enfin, il faut allonger l'année scolaire. Pourquoi ne pas imaginer un système de zonage pour les grandes vacances?
Vous évoquez la structure de l'école. Les débats actuels sur les contenus et les notes vous semblent inutiles?
Pour ce qui est des notes, je pense qu'elles sont un repère bien utile pour permettre aux élèves et à leurs parents de se situer. Quant aux contenus, je suis évidemment favorable à ce que l'on enseigne des notions d'anglais et d'histoire, mais vu par le prisme des fondamentaux, lire, écrire, compter.
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Je n'ai même pas envie de commenter tellement ça me dégoûte. Ca m'embêterait de vomir sur mon clavier.
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Le numérique pour les enfants. (école)
- Par Thierry LEDRU
- Le 26/11/2010
http://www.journaldunet.com/solutions/acteurs/le-numerique-dans-les-ecoles-1110.shtml
Un patron qui est content, un chouette contrat pour lui...
Voilà donc "le progrès"...Une aubaine pour les vendeurs de type Apple ou Samsung, peut-être même le Français Archos...Mais il ne s'agit évidemment pas des enfants. Le gouvernement trouve de l'argent pour soutenir le marché du numérique mais suprime les postes d'enseignants à tour de bras, emploie des "Assistantes de vie scolaire" qui pour certaines sont davantage en détresse que les enfants dont ils ont la charge et réclament plus de gestion que les enfants eux-mêmes, élimine les uns après les autres les postes de psychologue scolaire, "maître G", "maître E", rééducateur, éducateur sportif...Donc, pour Luc Chatel la solution réside dans le tout numérique. Ceci n'est qu'une étape. L'objectif est de remplacer les enseignants eux-mêmes. Vous me direz que pour certains, ça ne serait pas plus mal...Un ordinateur n'insulte pas les enfants, ne les humilie pas, ne les juge pas, il est neutre, "déshumanisé" de la même façon que ces enseignants mais sans les travers que ça génère. De ce côté là, on peut juger effectivement qu'il s'agit d'un progrès.
On pourrait par contre engager une réflexion profonde sur le rapport humain, sur le projet existentiel lié à l'enseignement, un travail sur les valeurs humaines et non technlogiques, économiques, citoyennes (c'est à dire conditionné)...Faire entrer dans l'école des formateurs philosophiques, relationnels, pédagogues, psychologues, des gens capables d'oeuvrer au développement de l'individu et non à son formatage, des professionnels associés à des démarches existentielles comme Steiner, Montessori, Freinet, Salomé, et tous les chercheurs dont le travail est fondé sur l'individu et non le citoyen. Dès lors que l'enseignement inculque l'idée qu'il n'y a qu'une seule voie, que le cadre scolaire est obligatoire et qu'il est le seul pourvoyeur de progrès, qu'il est la seule référence, que l'obtention de diplômes est le sésame absolu qu'il faut décrocher, que le statut de salarié est la voie royale, que l'individu doit s'effacer devant ces paramètres, que la compétition est une motivation naturelle, que l'écrasement et la hiérarchie contiennent des valeurs humaines honorables, tant que tout cela sera le fondement de l'enseignement, on continuera à voir fleurir les idées ubuesques similaires à celle de Luc Chatel. Un désastre.
Demain, les enfants se retrouveront impliqués dans une "relation" informatique. Fi des échanges humains. On demandera aux enseignants d'être des techniciens du numérique. On pourra même les remplacer par des informaticiens performants alors que les enseignants sont réticnetspour certains à avancer dans cette voie. Quelques résistants dont on se débarassera.
Le métier d'enseignant, tel que je l'ai vécu, tel que je l'aime, celui pour lequel je suis entré dans ce sacerdoce, ce métier est en voie d'extinction.
Je sais bien que ces propos peuvent paraître exagérés. On ne croit jamais au pire. On se dit toujours que ça n'est pas possible. Et on oublie que les objectifs économiques ont une force incommensurable et que l'humain n'est rien, absolument rien, juste une marchandise destinée à acheter d'autres marchandises.
Je hais ce monde proportionnellement à l'amour que je porte aux enfants. C'est dire la force de la violence contenue que je porte.
Je me demande souvent ce qui fait se taire les parents devant ce massacre. Je sais bien que la peur de l'avenir les paralyse, que l'amour qu'ils ont pour leurs enfants leur fait craindre le pire, qu'ils espèrent tous une issue plus favorable que la leur, une situation moins lourde ou un parcours aussi délectable. On a toujours peur quand on aime. Les politiciens le savent et en jouent jusqu'à l'extrême. La peur étouffe toutes les révoltes, toutes les interrogations trop fortes, on se tait non pas pour soi mais pour ceux qu'on aime.
Le monde changera lorsque la peur ne contiendra plus les révoltes.
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345 visiteurs, 2700 pages lues.
- Par Thierry LEDRU
- Le 26/11/2010
A quelque chose près. Dans la journée d'hier.
Et 1 commentaire...Je m'interroge tout de même sur cet intérêt et la quasi absence de réactions de la part de tous ces visiteurs...Si quelqu'un pouvait me donner une explication...
Mais bonne lecture tout de même :))
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Développement personnel à l'école.
- Par Thierry LEDRU
- Le 24/11/2010
Une conférence pédagogique ce matin. Sujet : la rédaction au cycle 3.
Quelques techniques et jeux intéressants, c'est déjà pas mal.
Mais aucune réflexion sur le fond du travail. Pourquoi demander à des enfants d'écrire ? Quel est l'objectif et quels sont les moyens à mettre en place ?
Personnellement, je ne vois la grammaire, la conjugaison, le vocabulaire, l'orthographe aucunement comme des finalités. Ils ne sont que des outils. On peut comparer le fonctionnement d'une partie des enseignants à des techniciens du vélo qui viendraient présenter les pièces et le fonctionnement de l'engin mais sans aucune intention d'apprendre aux enfants à faire du vélo. On s'en tient donc à la technique mais pas à son usage, c'est à dire à l'expérience rendue possible par l'existence de ce vélo. Les voyages, les balades, les découvertes de paysages, le goût de l'effort, l'exploration de son potentiel physique, de sa résistance, l'effacement des pensées dans la mécanique hypnotique des jambes, le saisissement de l'énergie intime, cette force incommensurable qui vibre en chacun, le bonheur immense d'aller plus loin, encore plus loin, de viser les horizons inconnus. Le vélo n'est pas qu'un engin de transport, il est surtout la possibilité d'un voyage intérieur.
Il en est de même avec l'écriture. A mon sens, elle doit prioritairement se tourner vers le développement personnel, un engin de transport vers les horizons intérieurs, la connaissance de soi, l'exploration des pensées, des ressentis, des émotions, des sentiments, de la conscience ineffable de la vie dans ce qu'elle a de plus merveilleux. L'écriture n'est pas un exercice technique mais une activité existentielle. Bien sûr qu'on peut jouer avec les mots, bien entendu qu'on peut se réjouir de leur magie, qu'on doit montrer aux enfants l'espace illimité qu'ils proposent. Mais ça ne doit pas être une finalité. Ni encore moins être évalué de façon technique. On en reste sinon qu'aux balbutiements. La maîtrise de la langue n'est pas le but, elle n'est qu'un moyen. Et si l'objectif n'est pas clairement explicité aux enfants, on court inévitablement le risque de perdre en cours de route ceux qui n'auront pas l'abnégation gratuite de se soumettre à ces exercices techniques et à ces évaluations réductrices.
Alors que faut-il viser ? A quel objectif cette maîtrise de la langue doit-elle être assujettie ?
Le développement personnel, la connaissance de soi, des autres, du monde, de la vie, de l'esprit, une certaine flamboyance qui dépasse l'individu pour le projeter hors de son moi, hors de ses contingences ou des conditions d'existence, hors des formatages et des bassesses de l'ego qui se meut aveuglément comme une larve ayant oublié le projet de la chrysalide. Il s'agit d'amener l'enfant vers la métamorphose. Ne surtout pas le gaver de choses mortes affublées de valeurs sociales, des notes, des évaluations, des diplômes, des plans de carrière...Non, pas l'écriture, on ne peut pas la rabaisser à ça, c'est épouvantable. Elle doit rester associée au bien naître, afin d'être.
Tout enseignant digne de ce nom devrait être engagé dans cette démarche. C'est la valeur humaine qui devrait servir de critère de sélection, le reste n'est qu'un bagage technique transportant des choses mortes. Ils existent ces enseignants mais ils subissent une pression énorme: hiérarchique, sociale, économique.
"Il faut faire de nos enfants de bons citoyens" mais la citoyenneté actuelle n'a plus rien à voir avec celle des Grecs antiques. Elle n'est que le reflet de cet embrigadement planifié afin que les citoyens servent non pas la Cité mais ceux qui la dirigent et s'y enrichissent. La plèbe ne doit pas être éveillée, l'école ne doit pas servir l'émancipation des individus, elle doit être au service d'un projet qui n'est pas celui du développement personnel. L'économie et l'intégration au flot des consommateurs est une priorité nationale.
L'école est une arme de destruction massive quand elle adhère, valide et applique ces critères de sélection.
C'est un génocide spirituel qu'elle soutient.
Si l'écriture n'existe dans l'école que comme critère d'évaluation et n'est pas nourrie par un projet existentiel, elle est détournée et les enseignants qui y collaborent sont des destructeurs d'âmes. Il ne s'agit aucunement de promouvoir un rejet de la société mais juste la capacité en chacun d'observer à quelle place il se trouve, quels sont les rôles qu'il est amené à tenir sans pour autant que l'être réel ne disparaisse. S'intégrer socialement ne signifie pas être désintégré intérieurement. C'est absolument indispensable de préserver l'intégrité de l'individu. L'écriture peut concourir à promouvoir cette connaissance de soi, cette lucidité, cette vigilance.
La maîtrise de la langue devient par conséquent une arme de construction massive : celle d'une humanité.