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Nomades.
- Par Thierry LEDRU
- Le 19/10/2010
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"La vie dans un tipi est bien meilleure. Il est toujours propre, chaud en hiver, frais en été, et facile à déplacer. L'homme blanc construit une grande maison, qui coûte beaucoup d'argent, ressemble à une grande cage, ne laisse pas entrer le soleil, et ne peut être déplacée; elle est toujours malsaine. Les Indiens et les animaux savent mieux vivre que l'homme blanc. Personne ne peut être en bonne santé sans avoir en permanence de l'air frais, du soleil, de la bonne eau. Si le Grand Esprit avait voulu que les hommes restassent à un endroit, il aurait fait le monde immobile; mais il a fait qu'il change toujours, afin que les oiseaux et les animaux puissent se déplacer et trouver toujours de l'herbe verte et des baies mures.
L'homme blanc n'obéit pas au Grand Esprit. C'est pourquoi nous ne pouvons être d'accord avec lui."
Flying Hawk, chef Sioux du clan des Oglalas
"Les vastes plaines ouvertes, les belles collines et les eaux qui serpentent en méandres compliqués n'étaient pas « sauvages » à nos yeux. Seul l'homme blanc trouvait la nature sauvage, et pour lui seul la terre était « infestée » d'animaux « sauvages » et de peuplades « sauvages ». A nous, la terre paraissait douce, et nous vivions comblés des bienfaits du Grand Mystère. Elle ne nous devint hostile qu'à l'arrivée de l'homme barbu de l'Est qui nous accable d'injustices insensées et brutales."Standing Bear, chef Lakota (Sioux)
"Notre terre vaut mieux que de l'argent. Elle sera toujours là. Elle ne périra pas, même dans les flammes d'un feu. Aussi longtemps que le soleil brillera et que l'eau coulera, cette terre sera ici pour donner vie aux hommes et aux animaux. Nous ne pouvons vendre la vie des hommes et des animaux. C'est pourquoi nous ne pouvons vendre cette terre. Elle fut placée ici par le Grand Esprit et nous ne pouvons la vendre parce qu'elle ne nous appartient pas."Chef indien Blackfeet (Pieds-Noirs)
J'ai regardé avec mes élèves les deux documentaires de Jacques Malaterre : "L'odyssée de l'espèce" et "Le sacre de l"homme."
Remarquable travail.
J'ai été frappé par deux idées très opposées et très bien décrites. Le nomadisme et la sédentarisation.
Les malheurs qui frappaient parfois ces nomades, dans l'évolution du groupe humain, ont conduit les hommes à se fixer. On en connaît toutes les raisons : agriculture, élevage, troc puis commerce, confort, richesse etc...
Le parallèle entre cette fixation dans l'espace m'a frappé au regard de la fixation de l'évolution spirituelle. Une partie du documentaire se déroule 3000 ans av JC et les conflits, les jalousies, la soif de pouvoir, les manigances, les dérives, la violence, les guerres, tout est déjà en place...Qu'avons-nous réglé aujourd'hui ? C'est là qu'a jailli cette idée que la sédentarisation de l'espèce a contribué à l'arrêt dans l'évolution spirituelle. On me dira que ça va mieux tout de même...Ah, c'est sûr, on ne s'entretue plus à coups d'épées ou de haches, on ne tue pas quelques dizaines ou centaines d'hommes. On jette une bombe H et on pulvérise 200 000 personnes. Belle évolution. Et quand on n'utilise pas les armes de destruction massive, on prend des chars d'assaut ou des Uzis. Ou on manipule les masses pour créer des armées d'ennemis dont il faut se protéger en créant le "Patriotic act" par exemple. Big brother en réel. La peur fomente des guerres imaginaires dont il faut se défendre et on fabrique des boucliers anti missiles qui vont coûter des centaines de milliards et qu'on lèguera aux générations futures...
Que serait devenue cette humanité si nous étions restés nomades ?
Les Amérindiens avaient trouvé la voie. L'Occident les a exterminés. Qui exterminera l'Occident ? Lui-même peut-être. Je ne peux pas croire que tout va continuer dans cette voie. Il doit se passer un changement catégorique, total, absolu. C'est une nécessité. Pas un choix.
J'imagine une Terre peuplée de quelques groupes nomades : Inuits, Tchouktches, Sames, Aborigènes, Sioux, Bushmens, Touaregs, etc...
http://www.routard.com/mag_dossiers/id_dm/35/nomades_et_nomadisme.htm
Une autre façon de vivre sur la Terre et de lui permettre de vivre.
Une autre évolution spirituelle aussi. Pas figée celle-ci.
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Darshan
- Par Thierry LEDRU
- Le 17/10/2010
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Un élément important de la pensée indienne est la notion de Darshan, cette idée que la personne "illuminée, l'être éveillé" peut communiquer à d'autres la saveur de l'illumination. Une parole, parfois un simple contact, un enseignement le plus souvent.
Admettons que ça soit le cas.
Est-ce un cheminement favorable sur le long terme, existentiellement parlant. Il n'y a rien de construit par le récepteur. Cette Illumination sera-t-elle durable ?
On peut supposer que l'émetteur ou l'Eveillé ait choisi ce récepteur en fonction d'un cheminement déjà avancé et qu'il ne s'agit pas d'un hasard inconséquent juste destiné à le valoriser au regard des masses. On peut supposer que cet individu touché par l'Eveil le méritait de par son travail sur lui-même et que rien n'aurait été possible sans cette lucidité acquise.
Oui, mais ne s'agit-il pas pour autant d'un vol ? Le vol d'un cheminement à finir, le vol d'une liberté à construire et non à saisir au vol...
Je n'aime pas l'idée de ce Darshan, rien à faire, je n'y vois pas autre chose que cette main mise d'un individu sur un autre. Qu'une histoire de pouvoir.
"Tu me seras redevable de ton Eveil, je l'ai fait pour toi parce que je savais que tu n'y parviendrais pas. "
Et bien, je n'en veux pas. Je préfère qu'on me laisse enfermé en moi-même et me débattre avec moi-même, j'aime cet orgueil qui me nourrit au coeur de l'humilité qui me fait refuser un don que je ne mérite pas.
Sans doute aussi que je ne tiens pas à devoir quoique ce soit des hommes, d'aucun homme. Ou femme. Parce que ce devoir est un fardeau. Je l'ai assez éprouvé comme ça.
Et puis la Nature est à mes yeux, la seule source de Darshan possible. C'est là que j'ai connu les plus beaux embrasements, les plus puissants. Même celui de l'amour que j'ai pour la femme que j'aime, c'est au coeur de la Nature qu'il a eu lieu. Comme un retour aux sources. Tout ce que j'ai vécu de plus beau, c'est à la Nature que je le dois. Jusqu'à la naissance de mes enfants. On l'oublie trop facilement. On ne voit qu'un amour humain alors que derrière toute cette agitation, il y a une intention, une force, une énergie. Nous sommes les enfants de cette Nature. Et nous lui devons les Darshan qui ponctuent parfois nos existences.
Ce que j'aime dans la femme que j'aime, c'est sa façon d'aimer la vie. C'est son amour pour la vie qui nourrit mon amour pour elle, c'est cette communion d'âmes au coeur de la Nature en nous, au coeur de la vie en nous, au coeur du divin en nous.
DEUS SIVE NATURA : Dieu ou la nature
Cette célèbre expression de Spinoza saisit en trois mots l'un des points essentiels de la pensée de l'auteur : la conception
d'une divinité immanente et faisant un avec la nature. Il y a pour Spinoza unité de substance, ayant tous les attributs et non pas dualité.
C'est là qu'est le Darshan.
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Les désirs de l'ego
- Par Thierry LEDRU
- Le 17/10/2010
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L’identité investie dans les désirs
Nous avons vu que les désirs de l’ego se situent tous dans le même registre : celui de la considération ou de l’enflure personnelle. Dans la fable de La Fontaine La Grenouille qui veut se faire aussi grosse que le Bœuf, la grenouille représente symboliquement l’ego qui cherche à s’enfler démesurément… Jusqu’à en éclater. cf. Fables. L’ego qui désire cherche à se faire valoir et il investit dans l’objet du désir la valeur de l’identité qui est la sienne. De là suit que l’ego ne s’intéresse pas réellement aux choses elles-mêmes, à ce qu’elles ont d’unique, à leur beauté ou à ce qu’elles ont de vivant. Ce qui compte pour l’ego ce ne sont pas les choses, mais l’objet pour autant qu’il symbolise un pouvoir capable de renforcer l’identité. Contrairement à ce que nous pourrions croire, les désirs de l’ego sont très abstraits : l’objet n’est désirable et n’a de valeur que parce qu’il est le support d’un accroissement personnel. C’est l’étiquette d’un concept apposée à l’objet qui lui donne son prix élevé. Le monde paraît rempli de choses désirables parce que l’ego se cherche lui-même parmi les objets. « Avec une plus grosse voiture, je me sentirais plus « moi ». Avec un poste à une plus haute fonction, je serais enfin moi, je serais complet, je me sentirais gonflé d’importance, mon sens du « moi » serait flatté. Avec plus d’argent, je me sentirais « spécial » et plus important que tout le monde. Avec un plus haut diplôme, « moi » se sentirait remplit d’aise etc. » Ce n’est pas ce qui est désiré qui importe, c’est le fait que le sens du moi soit investi dans l’objet. C'est une distinction très importante.
Nous pouvons donc comprendre le sens de la multiplicité des désirs. L’ego est à tout jamais incomplet, car il manque de substance ontologique. Il voudrait se conférer une existence séparée, mais il n’y a pas d’existence séparée et toute existence prend son appui dans l’Etre. Il voudrait nous persuader qu’il est la personne, mais ce n’est qu’une fiction personnelle tissée par la pensée. Il voudrait nous faire croire qu’il est bien quelque chose, mais dès que nous cherchons à l’attraper, nous ne trouvons rien. Impossible de clouer le papillon dans une boîte et de l’exhiber : « c’est moi » ! Et pourtant, depuis l’enfance, nous avons appris à nous façonner un « moi » et tenté de le rendre substantiel par toutes sortes d’artifices. « Ceci est à moi, ce n’est pas à toi ». A la base du désir, (le mot pris au singulier), il y a la soif de devenir de l’ego, l’aspiration à croître d’avantage, à s’auto-confirmer en se posant comme « moi ». Le désir de « devenir plus » se multiplie ensuite en autant d’objets sur lesquels il est possible de rapporter un investissement sur identité. Pour celui qui met son identité dans la voiture, la voiture c’est « un peu de moi », c’est même beaucoup de moi. Il ne faudrait surtout pas y toucher, car ce qu’elle est au regard de l’ego, ce n’est pas une machine à usage de déplacement. Non, c’est une composante d’identité personnelle. Il conviendra donc de la montrer. Elle joue le rôle, dans un transfert d’identification, (texte) d’un faire-valoir de l’ego. Si jamais elle venait à être détruite - ce qui est le cas de toutes les formes dans le monde relatif – ce serait un drame personnel. Un déchirement du moi à travers un de ses attachements. Dès l’instant où le sens du moi est investi dans quelque chose, ou dans quelqu’un, il y a souffrance et la séparation impose de faire son deuil. (…) L’empire de l’ego ne s’exerce que sur l’avoir et non sur l’Etre, ce qu’il cherche en permanence à faire accroire, c’est que plus il possède, plus il gagne de l’être. Ce qui est une illusion. Cette illusion, nous l’avons déjà rencontrée dans l’amour-passion (texte) quand nous disions que celui qui en est l’objet devient le portemanteau des désirs de l’ego.
De là résulte que les désirs de l’ego ne peuvent apparaître que dans un processus de comparaison et qu’ils sont indissociables d’autrui. Le moi se sent augmenté, si « j’ai plus que ». "Avoir plus" me distingue et me fait valoir. Si je peux me prouver à moi-même que je me distingue des autres, je me sens quelqu’un de « spécial », je me confirme comme ayant une réalité séparée et si je peux exhiber que je vaux davantage qu’un autre, alors là, c’est le bouquet ! Le moi ne se sent plus, il est rempli d’aise ! La comparaison constante stimule l’ego sous la forme d’émulation personnelle. Bref, il s’agit d’en mettre plein la vue, de manière à ce que tout ce qui est « mien » devienne une démonstration de ma valeur personnelle. Il est donc logique que le moi désire en tout premier lieu ce qui a une importance aux yeux du monde. Un objet qui n’aurait pas d’importance aux yeux du monde ne servirait pas les fins de l’ego. Le sannyasi qui jette à la rivière la pépite d’or qu’un homme vient de trouver fait un geste incompréhensible aux yeux du monde. Scandale, il rejette le suprêmement désirable dans l’illusion ! Il est dans le monde, mais il n’est pas du monde. Dans une moindre mesure, de la même manière, si vous dites que vous ne regardez jamais la télévision, on vous considère comme une sorte d’extra-terrestre. Comment quelqu’un peut-il ne pas regarder la télévision ? C’est la vitrine de tous les désirs de l’ego. C’est la machine hypnotique qui permet de réassurer sans cesse les désirs de l’ego.
D’où l’importance relevée par René Girard du désir mimétique. De là vient aussi la stratégie constante sur laquelle surfe la publicité. Le désir mimétique se situe entièrement sur un plan symbolique. Vouloir aimer comme Roméo et Juliette, c’est s’identifier à un fantasme magnifique qui donne une importance au moi. « Je serai ton Roméo, tu seras ma Juliette » ! L’image mythique est un faire-valoir symbolique qui magnifie le moi. Enlevez l’image et ne considérez que des être humains, et c’en est fini des désirs de l’ego. L’image est le support de l’identification. De même, les publicitaires l’ont très bien compris, plus on suggère un investissement d’identité dans un objet et plus il devient désirable. « … parce que vous le valez bien » !! Comme c’est gentil, ces petits soins à l’égard du moi !!! Posséder le même portable que la copine, c’est valoir autant qu’elle. En avoir un qui soit du dernier cri, c’est valoir… plus qu’elle !!! »
Source : http://sergecar.perso.neuf.fr/cours/desir_ego.htm
Ce qui est effrayant, c'est qu'au regard de l'odyssée de notre espèce, ce fonctionnement remonte à des temps immensément lointains...
On peut se demander si une autre voie, d'autres schémas mentaux prendront forme un jour.
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Changer.
- Par Thierry LEDRU
- Le 14/10/2010
- 0 commentaire
Est-ce qu'il est fou de vouloir changer les choses ?
Changer quelles choses ?
Ce qui me concerne ou ce qui concerne le monde ?
S'il s'agit de moi, encore faut-il que je réussisse à établir un état des lieux complet et non juste un regard furtif qui peut n'être que la résultante de mes émotions et non la réalité. S'il s'agit du monde en général, encore convient-il d'établir clairement la finalité de ce changement ? Est-ce qu'il n'est qu'un désir personnel pour valoriser ce que je suis ou est-ce que cette finalité a une portée générale ? En quoi ce changement est-il nécessaire ? Est-ce que c'est une volonté égotique ou un besoin essentiel ? Si je parviens à éclairer dans son ensemble le problème et que la nécessité de ce changement apparaît, pour le bien de l'humanité et non pour une reconnaissance personnelle, il me reste à cerner la méthode et à me fixer des objectifs réalisables afin de ne pas me détruire dans cette tâche. Ca fait 28 ans que je travaille comme instituteur. J'ai décidé de faire ce métier quand j'étais au CM2. Je n'ai jamais changé d'avis. La priorité pour moi, c'était de donner à mes élèves le même amour que celui que nous donnait cet instuteur de CM2 que j'ai eu.
Est-ce que ce désir de donner cet amour tout en amenant des enfants à une connaissance de soi et du monde était un objectif légitime ?
Oui.
Est-ce que c'était nécessaire au regard de ce que vivent une partie des enfants?
Oui.
Est-ce que j'avais les moyens de mener à bien cette "mission" sans m'y épuiser ou courir droit à l'échec ?
Oui.
Est-ce que j'étais capable de faire ça dans le sens du don et non uniquement pour mon égo ?
Oui.
Est-ce qu'après ces 28 années, je peux considérer de façon objective que j'ai apporté à mes élèves ce que je voulais leur donner ?
Oui.
Est-ce que c'était une folie ?
Non.
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Paradigmes et schémas mentaux.
- Par Thierry LEDRU
- Le 13/10/2010
- 2 commentaires
Je suis stupéfait par la force des conditionnements chez les enfants. Effrayé aussi. Ces paradigmes, vastes champs de pensées qui deviennent des schémas mentaux et qui donnent à leurs vies des directions pré-tracées.
Ces certitudes qui leur sont imposées au fil du temps, ces façons de concevoir la vie et tous les évènements exogènes qui la constituent, tous ces enfermements que le monde adulte met en place en toute conscience et avec bonne conscience, c'est absolument effroyable. Il n'y a pas de liberté de penser, pas de liberté de grandir mais juste des tuteurs contre lesquels il est obligatoire de rester fixé. Les adultes concernés et "responsables" vont voir dans ce chemin une croissance alors qu'il ne s'agit que d'un élargissement horizontal de la conscience. Il ne s'agit pas en fait de s'élever mais de s'étendre dans des champs de pensées déjà exploités.
L'école est un champ de pensées, un paradigme extrêmement puissant et les schémas mentaux des enfants devront s'y conformer. Le monde du travail prendra la relève. Il s'agit de maintenir un système économique et de produire les éléments participants. Chacun aura la possibilité de s'étendre dans ce champ de pensées et de mettre en place une influence proportionnelle à son engagement dans le système.
Du patron à l'ouvrier, rien ne change sinon, cette influence participative. Mais personne ne remet en cause les paradigmes. Chacun suit le chemin qui a été tracé par la puissance des paradigmes archaïques et l'éducation reçue. Interviennent bien entendu les conditions d'existence. Naître dans un berceau doré est préférable pour jouir au mieux du paradigme originel : le pouvoir.
En 28 ans de carrière, j'aurais aimé savoir ce que sont devenus les enfants d'ouvriers et ceux de cadres...Ils ne doivent pas être nombreux ceux ou celles qui sont sortis de la "norme"...
Mais il ne s'agit pas là de réfléchir à l'égalité des chances, c'est un autre débat.
Je m'interroge sur la puissance des formatages et sur la perception de la réalité que nous en retirons. Etant donné que nous vivons dans un environnement familial, social, intellectuel, culturel, existentiel, il me semble difficile de parvenir à une vision autre que celle qui nous a toujours été proposée. C'est là que je parle de paradigme (méta théorie) et de schémas mentaux ( applications expérimentales).
Chez les enfants, ces méta théories ont une force gigantesque étant donné qu'elles s'installent chez des individus vierges de tout prérequis.
Regardons un arbre par exemple avec des enfants de CM2. Certains seront fiers d'en donner le nom, d'autres de le dessiner parfaitement, d'autres de manger ses fruits, d'autres voudront y faire une cabane...Mais qu'en est-il de leur perception de la vie de cet arbre. Quand je leur dis qu'il est "vivant comme nous", ils me regardent bizarrement...Si j'ajoute qu'il perçoit lui aussi son environnement, la lumière, la qualité de l'air, la pureté de la pluie, qu'il a mal quand on casse une branche, qu'il va chercher à soigner la plaie comme nous quand on tombe, qu'une plante verte dans une maison réagit favorablement aux soins attentionnés qu'on lui prodigue, que certains acacias d'Afrique communiquent entre eux en diffusant des parfums nauséabonds pour prévenir leurs congénères de l'arrivée d'herbivores etc etc...on va me taxer d'anthropomorphisme...Je ne suis plus dans le cadre, je sors du paradigme, je ne tiens plus mon rôle.
A la base de nos pensées, il y a des croyances adoptées, à travers des expériences parfois, mais bien souvent à travers une éducation modélisée. Il ne s'agit pas de tout remettre en cause mais de garder à l'esprit que nos certitudes d'aujourd'hui peuvent être les erreurs de demain. Ca n'est pas Copernic qui me contredirait...Oui, bien sûr, on n'en est plus là, la science a considérablement progressé, nos connaissances ne sont plus fondés sur des extrémismes religieux (pas chez tout le monde...) mais elles le sont sur d'autres paramètres. Et rien ne dit que ces paramètres soient totalement objectifs. Ils correspondent aux paradigmes en place. Alfred Wegener a passé sa vie a essayé de convaincre le monde scientifique que sa théorie des plaques tectoniques était bonne. Il en est mort. Rupert Sheldrake tente d'apporter les preuves que l'évolution se fait au rythme de l'intégration des champs morphogénétiques, la physique quantique reste encore de nos jours un sujet réservé à une élite...etc...etc...Il faudra de nouveau des millénaires pour que les paradigmes changent.
L'intégration sociale d'un individu si elle doit passer par son adaptation aux paradigmes en cours ne reflète pas une liberté de penser mais juste une liberté d'accomodation. Il conviendrait par conséquent d'apporter à l'individu, à l'enfant prioritairement, une démarche existentielle qui lui apporterait la lucidité nécessaire pour ne pas oeuvrer aveuglément au maintien des paradigmes...Cela comporte de sa part une vigilance constante au regard des schémas de pensées qu'il porte. L'objectif d'une vie tient-il dans un cheminement à suivre ou dans un cheminement à tracer ?
"Celui qui marche dans les pas d'autrui ne laisse pas ses propres traces." Thoreau.
Que nous soyons conscients ou non de leurs présences, ces schémas de pensées conditionnenent nos vies. Ils déterminent nos réactions, nos actes, nos objectifs, nos constructions. Ile ne sont pas nécessairement néfastes, il faut le préciser. Ce qui est néfaste à mon sens, c'est de réagir sans savoir d'où ils viennent. En prendre conscience permet également de ne pas être ballotés mais d'être ancrés dans une réalité qui parfois nous pèsent.
Nous ne sommes pas nécessairement responsables de nos actes. Mais nous sommes responsables de notre ignorance.
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La pensée jaune fluo. (école)
- Par Thierry LEDRU
- Le 13/10/2010
- 0 commentaire
Avec les enfants de ma classe (CM2), je travaille beaucoup sur l'observation de soi. Quand je leur demande de se concentrer sur une tâche, ils doivent colorier la pensée en jaune fluo dans leur tête afin de voir passer les autres pensées qui s'imposent.
Hier, une enfant a dit : "Dans ma tête, c'est un vrai arc en ciel !"
Grand éclat de rire !
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Gaïa
- Par Thierry LEDRU
- Le 11/10/2010
- 4 commentaires
Peter Russel "La Terre s'éveille. Les sauts évolutifs de Gaïa."
Publié en 1982...
"On a beaucoup écrit et parlé à propos de cette idée qui veut que la Terre elle-même, prise dans son ensemble, soit comparable à un être vivant doté de fonctions vitales et capable de s'auto-réguler et ainsi de demeurer "en vie". En cette époque où pour la première fois l'humanité risque de mettre à mort, littéralement, la planète grâce à laquelle notre évolution depuis les premiers animacules marins et, en fait, notre existence même aujourd'hui, ont été possible.
Le symbole de la déesse Gaia, du nom que les anciens grecs donnaient à la Terre, est devenu un point de ralliement pour tous ceux et celles qui croient en la possibilité d'un changement radicale dans notre manière de voir, percevoir et concevoir notre planète. Les notions d'interdépendance de toute Vie et de grande fragilité des écosystèmes dont dépendent les myriades d'espèces vivantes peuplant notre monde sont maintenant admises par la science et par toutes les couches de la société.
Mais pourquoi alors nous acharnons-nous à détruire l'environnement par notre mode de vie gaspilleur et peu soucieux des conséquences à long terme, demeure un mystère qu'il est urgent d'élucider. Alors que les experts en environnement, aussi bien du gouvernement que des groupes écologiques, nous avertissent que le temps nous est compté pour effectuer des changements majeurs dans notre comportement à l'égard de la planète, il est tentant de se poser la question: "Qu'est-ce qui fera vraiment changer l'être humain au point où il prendra vraiment à coeur la sauvegarde de l'environnement et fera les changements qui s'imposent?" Pour trouver une réponse à cette question vitale, il faudrait peut-être commencer par se demander: "Qu'est-ce qui nous relie aux plans émotionnel, aussi bien que psychologique et spirituel, avec cette matrice de toute Vie qu'est notre planète?" Peut-être est-ce par là qu'il faut commencer à chercher pour trouver l'explication de notre apparente indifférence face aux menaces qui pèsent sur l'avenir de la Vie sur Terre.
Ce n'est que récemment que l'image de la Terre vue de l'espace nous a été rapportée par les premiers astronautes à s'être rendus sur la Lune. Depuis ce temps, la perception que la Terre est notre maison commune, ou notre vaisseau spatial, ou encore un village global uni par la technologie et les communications, et enfin un être vivant capable de contrôler sa température et les différentes composantes chimiques de son environnement global, a marqué à divers degrés l'expérience et la vision que la plupart des humains ont de cette planète. Cette ouverture graduelle de notre esprit à la beauté unique et irremplaçable de la Vie sur cette boule d'eau et de pierre suspendue dans les espaces intersidéraux a permis pour une bonne part l'essor foudroyant des groupes environnementaux et de la conscience écologique qui de nos jours ont atteint le sommet de l'agenda gouvernemental, tel que démontré par la tenue du Sommet Planète Terre(1) de Rio de Janeiro. Bien sûr, les souffrances subies à la suite des catastrophes environnementales de même que les cris d'alarme lancés par les scientifiques à propos de l'avenir de la planète ont aussi grandement contribué à attirer notre attention sur le sort peu reluisant fait à notre bonne vieille Terre.
Pourtant au-delà de cette ouverture d'esprit et de ces préoccupations nées de la menace de cataclysmes écologiques, notre relation à la planète en tant qu'entité vivante et probablement pensante se limite à fort peu de choses. La révolution intérieure qui permet à un être humain de transcender les limites de ce que le scientifique britannique Peter Russell(2) appelle "l'ego encapsulé dans la peau", ne s'est pas encore faite à une échelle suffisamment globale pour affecter de manière significative la façon de penser de la majorité de la population mondiale.
La notion de planète en danger, de Terre nourricière dont toute Vie dépend, est encore bien abstraite et sans résonance émotive pour la plupart des gens, ce qui explique déjà en bonne partie l'indifférence quasi généralisée à l'égard de l'écologie planétaire. Oh, bien sûr, la plupart des gens sont en faveur du recyclage ou de la préservation de la nature par exemple; mais plus souvent qu'autrement, cette intérêt est motivé par des considérations d'ordre pratique comme les coûts élevés d'enfouissement des "ordures" ou du gaspillage de ressources ré-utilisables, et le besoin de loisirs tels la chasse et la pêche, donc la nécessité de préserver les "ressources fauniques".
De même le concept tant vanté du "développement durable" qui vise à faire en sorte que les générations futures puissent encore, comme nous le faisons aujourd'hui, profiter des ressources de la planète, ne constitue en somme qu'une forme de prise de conscience de notre responsabilité de ne pas être trop "goinfres" dans nos appétits de consommateurs insatiables afin que nos enfants ne se trouvent pas devant une table vide lorsque leur tour viendra de s'alimenter au festin planétaire. Et, à la remorque du mythe sacro-saint du développement économique continu, générateur de richesses toujours plus abondantes pour une minorité choyée, on nous encourage, ne l'oublions pas, à favoriser un développement soutenu, transformant ainsi une part de plus en plus grande de la nature en objets de consommation pour l'unique satisfaction de notre seule espèce.
Or qu'en est-il de nos chances de survivre collectivement devant la pression sans cesse accrue que ces modes de pensée "humano-centriques" infligent à un environnement sur le bord de l'effondrement écologique?... Presque nulle, à moins que... À moins que ne survienne globalement un éveil de conscience inespéré face à la fragilité de notre "nid" planétaire et surtout un épanouissement de notre conscience supérieure qui par l'Esprit nous relie à tout ce qui vit. Comme le disait si justement Malraux: "Le 21e siècle sera spirituel ou ne sera pas!"
C'est ici qu'entre en jeu cette fameuse "Hypothèse Gaia", proposée par le scientifique britannique James Lovelock qui, à la suite de recherches, menées dans le cadre des expéditions Voyager de la NASA, visant à découvrir l'existence de formes de Vie sur d'autres planètes, en vint à se demander si la Terre elle-même ne formerait pas un organisme vivant. Rappelons brièvement le fondement de cette idée révolutionnaire qui, depuis sa proposition en 1970, a fait l'objet de vives controverses aussi bien que du soutien inconditionnel d'un nombre croissant de personnes de toutes origines, touchées par la beauté et la simplicité de cette idée.
Constatant que les instruments de lecture à bord du satellite Voyager laissaient voir que notre planète, à la différence de Mars, bouillonne littéralement de Vie, et réfléchissant sur le fait incontournable que depuis son apparition sur la Terre il y a trois milliards et demie d'années la Vie avait peu à peu colonisé les mers et les continents et, ce faisant, modifié la chimie et les conditions atmosphériques de la planète de manière à satisfaire ses exigences essentielles pour assurer sa survie, Loveloch en vint à réaliser que "...l'ensemble ce tout ce qui vit sur Terre, à partir des baleines jusqu'aux virus, et des chênes aux algues, pourrait à maints égards être considéré comme une seule entité vivante, capable de manipuler l'atmosphère de la Terre en fonction de l'ensemble de ses besoins, et possédant des facultés et pouvoirs dépassant de loin ceux de ses parties constituantes". Pour permettre de mieux comprendre les phénomènes fascinants qui contribuent à maintenir cet équilibre global favorisant la perpétuation de la Vie, citons quelques-uns de mécanismes grâce auxquels la Vie contrôle la planète, tel que mis en évidence par Loveloch:
1) La proportion d'oxygène dans l'atmosphère, rigoureusement maintenue à 21%: plus, les forêts brûleraient jusqu'au dernier arbre, moins, beaucoup d'animaux suffoqueraient. Orchestré par toutes les plantes et le plancton microscopique des océans, cet équilibre, grâce à la photosynthèse qui transforme le gaz carbonique en oxygène, se maintient comme par magie depuis plus d'un milliard d'années. De plus, c'est parce que l'oxygène est ainsi apparu que la couche d'ozone a pu se former et la Vie coloniser les surfaces émergées du globe.
2) De même la température moyenne à la surface du monde évite les écarts extrêmes, malgré les épisodes glaciaires qui n'affectent pas la ceinture verte équatoriale, grâce au contrôle par les plantes et le plancton des océans de la proportion du gaz carbonique à "effet de serre" qui retient la chaleur du soleil dans l'atmosphère, un peu comme le font les vitres d'une serre. D'autres facteurs, tels le couvert végétal favorisant une pluviosité régulière grâce à l'évaporation par les feuilles, et l'ensemencement des nuages à l'aide d'un élément chimique particulier produit par de minuscules organismes marins, démontrent une fois de plus le rôle clé de la Vie pour le maintien de conditions propices à son existence continue.
3) Une autre composante essentielle à l'harmonie de la biosphère est le taux d'acidité des pluies qui est maintenu au degré optimal par la présence d'ammoniaque dans l'air, à nouveau fruit de l'activité biologique. Pas assez d'acidité et les sels minéraux indispensables à la bonne santé des plantes ne seraient pas mis en circulation par réaction acide. Des pluies trop acides par contre délavent les sols de leurs éléments minéraux et affaiblissent d'autant les plantes, sans compter l'effet dévastateur d'une eau trop acide pour la survie des lacs et rivières.
4) Le taux de salinité des océans enfin. Par un mécanisme encore incompris, les océans parviennent à maintenir à exactement 3.4% le degré de salinité de leurs eaux, ce qui est le pourcentage idéal pour toutes les formes de Vie peuplant les mers. Sans cesse l'irrigation des continents amène par les fleuves et rivières de nouveaux sels dans les océans, et ce depuis qu'il a commencé à pleuvoir sur Terre. Pourtant, jamais sauf dans la Mer Morte (justement!) le taux de salinité n'a dépassé 3.4%. Deux pourcent de plus et toute Vie disparaîtrait des océans!
Loveloch a répertorié plusieurs autres facteurs semblables qui, réunis ensemble et maintenus stables pendant des centaines de millions d'années, ont permi le foisonnement prodigieux de dizaines de millions d'espèces qui, par le laborieux processus d'évolution, ont façonné le monde et mené à l'apparition de notre propre espèce. On sait les dommages considérables causés justement par notre espèce au fragile équilibre dont dépend la survie de tout ce qui grouille et respire en ce monde. Comme l'affirme lui-même Loveloch, même si nous parvenons à "bousiller" suffisamment l'écologie de la planète pour mettre notre propre survie en péril, il y a fort à parier qu'une extinction massive d'espèces - ce serait la sixième à survenir dans l'histoire de la Terre, la première provoquée par une seule espèce - ne serait perçue par Gaia que comme une indisposition passagère dont elle se remettrait avec le temps. Quelques millions d'années ne représentent qu'une courte période à son échelle.James Lovelock.
http://fr.wikipedia.org/wiki/James_Lovelock
"Nous resterons sur Terre"
http://fr.wikipedia.org/wiki/Nous_resterons_sur_Terre
Bande annonce
http://www.youtube.com/watch?v=cCDcaP0VJ90
"Nous avons un destin commun." Edgar Morin.