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  • Se taire pour écrire

    "L'homme n'est qu'un roseau, le plus faible de la nature, mais c'est un roseau pensant...Quand l'univers l'écraserait, l'homme serait encore plus noble que ce qui le tue parce qu'il sait qu'il meurt et l'avantage que l'univers a sur lui, l'univers n'en sait rien. Toute notre dignité consiste donc en la pensée." Blaise Pascal.

     

    Il vaut toujours mieux être un roseau pensant qu’un bouleau obtus. Pascal n’irait pas contredire La Fontaine.

    La pensée est à la source de tous nos actes même ceux qui sont inconscients. Il ne s’agit que d’une pensée inconsciente…Quand à l’instinct, il a bien fallu que les actes qui en découlent soient un jour pensés par un de nos nombreux ancêtres afin que ces actes deviennent une expérience, une connaissance, un enseignement à transmettre…

    On dit parfois qu’on doit avoir un comportement digne. Mais ce comportement n’est que la résultante de nos pensées. Dès lors que nous entrons dans le phénomène de la pensée, nous sortons simultanément du calice. Nous considérons que la vision macroscopique, ce regard intelligent et intelligible, cette transmission de notre analyse ou le monologue intérieur sont des saisies indéniables de la vie.

     

    Nulle critique envers ce travail. Il est indispensable. Sans cette pensée, nous ne serions que des outres vides. Des enveloppes ayant délaissé le contenant possible.

    C’est inconcevable. D’autant plus que non seulement nous ne cessons de penser mais bien souvent nous pensons à « l’insu de notre plein gré »…

    Et c’est là que surgit le problème.

     

    Peut-on parler comme Pascal de « dignité » lorsque nous constatons à maintes reprises, avec un minimum de vigilance, que ce phénomène de la pensée nous échappe et s’établit parfois sans que nous parvenions à le maîtriser ?

    Combien de fois n’avons-nous pas souffert de ce sommeil insaisissable sous le feu ardent des pensées volages ?

     

    Nous devrions être dignes de ne pas être maîtres de nous-mêmes ?

     

    Bien entendu que Pascal parlait de la portée inestimable de ses pensées, de la force et la profondeur de ses raisonnements. Mais nous ne sommes pas des Blaise Pascal…

    Nous ne sommes pas ces maîtres spirituels qui usent avec une justesse inégalable de leur capacité à penser ou bien à s’extraire dans la méditation du maelström inépuisable des neurones tourbillonnants.

    Nous, à notre humble niveau, nous ne pouvons pas honnêtement être dignes de cette faiblesse chronique qui nous ronge et nous perturbe.

     

     

    Qu’en est-il du silence ?

    Le silence porte en lui la conscience de la vie. Pas son commentaire intellectuel, philosophique  ou spirituel mais sa réception totale, immédiate, épurée. Les pensées peuvent commenter la vie mais dès lors elles l’observent avec une certaine prétention, avec cette satisfaction du chercheur…Mais celui-là n’est pas au cœur de la vie. Il n’est plus qu’un chirurgien qui autopsie. Un chirurgien n’a qu’une vision restreinte, il s’attelle à une partie précise, à une tâche limitée, il ne peut pas se permettre d’élargir sa vision. Il n’a que faire de l’ensemble. Le penseur agit de même dès lors qu’il n’observe plus sa pensée mais se croit puissant parce qu'il pense.

    Nous devons apprendre le silence, nous devons apprendre à nous taire. Intérieurement.

    On n’entend rien dans ce tohu-bohu quotidien. Nous vivons comme dans un poste radio où les ondes s’interfèrent. Chaque émission veut prendre la place, chaque musique s’impose, chaque parole se répète, chaque évènement est commenté, chaque commentaire est commenté, chaque parole est reprise, chaque silence est considéré comme un non-dit qui doit être avoué, le "taiseux" comme on dit par ici est un être associal, un ours, certainement un psychopate, il faut s'en méfier, d'autant plus qu'il aime être seul, c'est anormal tout ça...

    Ce monde moderne vit dans une cacophonie indescriptible. Il faut que ça cesse. C’est à partir du silence que nous pourrons apprendre à parler. Comme s’il restait à chaque fois que nous lançons en nous un cheminement intellectuel, une grotte, un antre ou un calice, un refuge à rejoindre comme un ressourcement possible. Il faut s’aventurer avec parcimonie, ne pas aller trop loin, ne pas se lancer sur plusieurs routes, éviter les croisements pour viser sans détour l’horizon. Et revenir à chaque fois dans le cocon originel du silence.  

    C’est un retour à la Nature qui se propose. Nos vies modernes sont saturées de bruits et d’attirances. Nos rencontres, nos proches, nos voisins, la rumeur de la ville, la télé, la radio, les MP3, nos téléphones, les avions, les voitures, le chien qui braille, le coq qui chante, cet environnement carcéral qui ceint nos oreilles et déverse en nous une boue tonitruante de bruits incessants.

    Qui donc peut se targuer de vivre dans le silence ?

    Où peut-on le retrouver ?

    N’y a t- il pas en nous une habitude perverse de cette houle d’océan comme une dépendance, une angoisse même si l’étendue venait à se taire ? N’entretenons-nous pas inconsciemment ce ressac indocile, ces vagues grondantes comme des poisons renouvelés ? Plonger volontairement dans la masse pour avoir le sentiment d'exister.

    J’en ai vu bien souvent des randonneurs qui avançaient dans des paysages paisibles comme en terrain hostile et lançaient à vaux l’eau des verbiages futiles, comme pour combler ce silence assommant.

    Je n’y ai perçu aucune dignité…

    Ça pensait à tue-tête et c’est ma tête qu’ils tuaient.

     

    Nous apprendrons à penser quand nous aurons appris le silence.

     

    Je pense (et, oui, là, pour l’instant, je n’ai pas le choix…) à ce petit enfant, ce petit d’homme à qui tous les adultes qui l’entourent et l’accompagnent s’efforcent de le remplir de connaissances, de le plonger dans les expériences de la vie. Rien à redire. C’est l’adulte qui se construit. Mais il y manque trop souvent l’amour du silence. Le silence en soi, quand la paix retombe, avant même que le sommeil l’enveloppe, cet abandon délicieux dans le calice, là où se tient tapie la conscience muette de l’amour de la vie.     

    Bienheureux l’enfant qui un jour s’assoit seul au sommet d’une colline et dans le silence intérieur perçoit la rotation de la Terre.

    Celui-là peut être digne.

    Il n'est pas devenu qu'un adulte.

    Oui, je suis saturé de bruits, saturé d'agressions en tous genres, je n'y trouve plus aucun intérêt, je n'ai plus rien à en apprendre. C'est comme si j'avais atteint la limite, comme si le potentiel de réception était comblé et que tout ce qui continue à tomber m'obligeait à déformer le réceptacle, comme une grenouille qui gonflerait. On connaît la fin de la fable.

    J'ai appris tant de choses, tout ce qu'il a fallu que j'assimile et qui ne m'a servi à rien, tout ce que j'ai appris et que j'ai déjà perdu mais qui génère toujours ce tohu bohu insoumis, comme une mélasse où tout a perdu sa forme initiale, dont plus rien ne peut sortir, tout cela, je voudrais le vomir.

    Je sais que l'écriture est un refuge. Une ligne que je trace, qui m'appartient, un chemin que je balise, rien de nuisible n'y a accès, aucune intrusion n'y est possible, je connais la patience, je sais que je ne dois rien aux histoires, elles ne me réclament rien, il s'agit entre elles et moi d'une osmose bienfaitrice, d'un partage de données, l'écriture m'a appris le silence, l'abandon des pensées disparates pour extraire le mot qui convient, je sais aujourd'hui me taire pour écrire. Je connais l'antre du silence où les mots se reposent et attendent sereinement d'être choisis.

    Je me suis réveillé à cinq heures, j'ai ouvert les yeux et une phrase a surgi, comme si elle attendait l'ouverture des volets pour sauter dehors. J'ai souri et j'ai remercié. Je me suis levé.

    J'écris.

    J'écris quand je n'ai plus rien à dire, plus rien à penser, plus aucune interférence. C'est dans cet état que je parviens à trouver le mot dont j'ai besoin, je sais que je n'aurai pas à fouiller pendant des heures, je suis devenu l'histoire, je suis mes personnages, je suis mes idées, je suis chaque mot offert, et le silence intérieur m'enveloppe comme un placenta purificateur. Le monde est dehors et je m'en suis extrait. Et au dedans de moi, le monde est sorti, au dedans de moi, il y a le silence et le peuple immobile des mots. Je les vois comme des visages impassibles, ils n'attendent rien et sont disponibles, ils n'ont pas besoin de moi pour vivre, que personne ne les saisisse pendant des siècles ne changera rien pour eux, ils resteront là, comme des pierres où l'érosion s'épuise.

    Ils n'attendent rien, ils n'espèrent pas, ils sont là. Ils m'ont appris la paix.

  • Les syndicats enseignants

    Je ne suis pas syndiqué et je ne le serai jamais mais sans savoir pourquoi je reçois la lettre mensuelle d'un syndicat. Dans le dernier numéro, ils nous parlent du tableau des 108 h que nous devons remplir pour justifier des heures que nous devons à l'administration dans le cadre des aides individualisées aux enfants, les diverses réunions d'équipe, conseils de maîtres, conseils de cycle, conférences pédagogiques etc...Dans la réalité, nous faisons bien plus que 108 h, tout le monde le sait et le syndicat nous demande donc de ne pas remplir ce tableau...

    Je trouve cette demande totalement absurde.

    Le gouvernement sait très bien que nous dépassons allégrement ces 108 h et il continue à vouloir l'ignorer, à ne pas le reconnaître. Il est donc lui-même dans l'illégalité en nous imposant ce tableau qui ne représente pas la réalité du terrain.

    Si j'adhèrais à la demande du syndicat, je me mettrais moi-même dans l'illégalité pour soi-disant contrer une demande illégale. Et je serai sanctionné. Pas le syndicat par contre. Qu'est-ce que j'en retirerai ? Un blâme, une retenue de salaire ou un blocage dans mon avancement de carrière. Avec 2000 euros par mois, pour trente ans d'enseignement, je serais totalement idiot et inconscient d'aller faire supporter à ma famille cette contestation. 

    Je vais donc, comme tous les ans, remplir ce tableau en inscrivant toutes les heures que je fais afin que mon inspecteur ne puisse rien me reprocher. Mais je comptabiliserai TOUTES les heures et cela ira donc bien au-delà de ces 108 h.

    C'est par ce moyen que je montre au gouvernement que son calcul est faux et que j'abats bien plus de travail que ce qu'il pense.

    Quant aux syndicats qui sont incapables d'opter pour des stratégies intelligentes et qui s'obstinent à nous faire passer pour des planqués, qu'ils sachent que leur lettre mensuelle m'est très utile pour allumer le feu de cheminée.

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  • Hugo Chavez

    « Informer n'est pas une liberté pour la presse mais un devoir »
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    Pourquoi les Etats-Unis diabolisent la démocratie Vénézuélienne (The Guardian)

    Le Venezuela s’apprête à tenir des élections parfaitement libres et régulières, et pourtant les Etats-Unis le traitent de dictature

    Le 30 mai, Dan Rather, un des journalistes les plus célèbres des Etats-Unis, annonça que le président vénézuélien, Hugo Chavez, allait mourir « d’ici deux mois, au plus tard ». Quatre mois plus tard, Chavez est non seulement en vie et mène campagne, mais est largement considéré comme le futur vainqueur de l’élection dimanche prochain.

    La distorsion sur le Venezuela est telle – c’est probablement le pays qui subit le plus de désinformation au monde – qu’un journaliste peut raconter pratiquement n’importe quoi sur Chavez ou son gouvernement sans être contredit, pourvu que ce soit quelque chose de négatif. Pire encore, Rather a qualifié Chavez de « dictateur » - un terme que peu d’analystes politiques, pour ne pas dire aucun, qui connaissent le pays emploieraient.

    Voici ce que Jimmy Carter a déclaré sur la « dictature » vénézuélienne il y a quelques semaines : « en fait, sur les 92 élections que j’ai observées, je dirais que le processus électoral au Venezuela est le meilleur au monde. »

    Carter a eu le Prix Nobel de la Paix pour son travail d’observation des élections via le Centre Carter, qui a observé et validé les précédentes élections vénézuéliennes. Mais parce que Washington cherche depuis plus de dix ans à délégitimer le gouvernement vénézuélien, son opinion est rarement répercutée. Ses derniers commentaires ont été ignorés par la quasi totalité des médias US.

    Au Venezuela, les électeurs effleurent un écran d’ordinateur pour voter et reçoivent un reçu sur papier qu’ils vérifient et déposent dans l’urne. La plupart des bulletins papier sont comparés au résultats électroniques. Ce système rend le trucage pratiquement impossible : pour voler une élection il faut pirater les ordinateurs et ensuite bourrer les urnes pour faire coïncider les résultats.

    Contrairement aux Etats-Unis, où lors d’une élection serrée nous n’avons aucune idée du véritable vainqueur (voir Bush vs Gore), les Vénézuéliens sont certains que leur vote sera compté. Et contrairement aux Etats-Unis, où près de 90 millions d’électeurs potentiels ne voteront pas en Novembre, le gouvernement vénézuélien a tout fait pour augmenter le nombre d’inscrits sur les listes électorales (qui atteint un niveau record de 97%) et la participation.

    Et pourtant tout l’appareil de la politique étrangère des Etats-Unis (qui comprend la plupart des médias américains et occidentaux) n’affiche que mépris envers le processus démocratique vénézuélien. Dans un rapport publié à point-nommé, le soi-disant Comité pour la Protection des Journalistes a déclaré que le gouvernement contrôle « un empire médiatique », en omettant d’informer ses lecteurs que la télévision d’état vénézuélienne n’a qu’environ 5 à 8 % d’audience dans le pays. Bien sûr, Chavez peut interrompre les programmes avec ses discours (grâce à une loi qui date d’avant son accession au pouvoir), et il le fait régulièrement. Mais l’opposition contrôle encore la majorité des médias, y compris la radio et la presse écrite – sans parler de la majorité des richesses et des revenus du pays.

    L’opposition va probablement perdre cette élection non pas à cause des avantages du pouvoir du gouvernement – dont on abuse partout en occident – y compris aux Etats-Unis, mais parce que les conditions de vie de la majorité des Vénézuéliens se sont nettement améliorées sous Chavez. Depuis 2004, lorsque le gouvernement a pris le contrôle de l’industrie pétrolière et que l’économie s’est redressée après les tentatives dévastatrices et illégales de le renverser (dont la tentative de coup d’état militaire de 2002 soutenue par les Etats-Unis et la gréve du secteur pétrolier de 2002-2003), la pauvreté a été réduite de moitié et l’extrême pauvreté de 70%. Et ceci en ne prenant en compte que les revenus. Des millions de personnes ont pour la première fois accès à la santé et le nombre d’étudiants à l’université a doublé, dont beaucoup bénéficient de la gratuité de leurs études. Les inégalités ont été considérablement réduites. Par contraste, les deux décennies qui ont précédé Chavez ont été marquées par l’un des pires échecs économiques de l’Amérique latine, lorsque le niveau de revenu par habitant a chuté de 14% entre 1980 et 1998.

    A Washington, la définition de la démocratie est simple : c’est lorsqu’un gouvernement obéit au Département d’Etat. Et bien-sûr, ici, l’idée que les politiciens puissent tenir leurs promesses électorales est un concept qui nous est étranger. Alors ce n’est pas uniquement le Venezuela qui se retrouve régulièrement dans la ligne de mire de la classe dirigeante à Washington : tous les gouvernements progressistes et récemment indépendants de l’Amérique du sud, dont l’Argentine, l’Équateur et la Bolivie, sont dans cette ligne de mire (le Brésil est considéré comme trop gros pour recevoir le même traitement, sauf par la droite). Le Département d’Etat tente de garder un œil sur le prix convoité : le Venezuela possède des réserves de pétrole qui s’élèvent à 500 milliards de barils, et ne se plie pas à la politique étrangère des Etats-Unis. C’est pour cela qu’il est devenu l’ennemi public numéro un, et le principale cible des médias.

    Mais le Venezuela fait partie du « printemps latino américain » qui a produit le groupe de gouvernements le plus démocratique, progressiste et indépendant que la région n’a jamais connu. Ils coopèrent, et le Venezuela est fermement soutenu par ses voisins. Voici ce qu’a déclaré l’ancien président du Brésil, Lula da Silva, le mois dernier : « La victoire de Chavez ne sera pas seulement celle du peuple vénézuélien mais aussi la victoire de tous les peuples d’Amérique latine... cette victoire portera un coup supplémentaire à l’impérialisme. »

    Le soutien de l’Amérique du sud est la meilleure garantie du Venezuela contre les tentatives incessantes de Washington, qui dépense toujours des millions de dollars dans le pays – sans compter les fonds clandestins – pour saper, délégitimer et déstabiliser la démocratie au Venezuela.

    Mark Weisbrot

    http://www.guardian.co.uk/commentisfree/2012/oct/03/why-us-d...

    Traduction "entre une démocratie sans capitalisme et un capitalisme sans démocratie, les élites occidentales choisissent toujours le dernier" par VD pour le Grand Soir avec probablement les fautes et coquilles habituelles.

    URL de cet article 17891

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  • Courage.

    En fait, quand il me prend l'idée absurde de m'intéresser au monde qui nous est présenté et qui est très loin de représenter sa totalité, au lieu de dire, "Courage, le pire est derrière nous", je préfère "Courage, le meilleur est déjà passé. " J'en arrive même parfois, à de brefs instants, à comprendre quelque peu, ces individus qui vivent dans l'illusion des plaisirs rapportés, toutes les choses éphémères. Non, non, je ne les envie pas, je n'en suis quand même pas là...Et puis, je ne souhaite pas affûter moi-même la lame de la guillotine. Un jour, je vivrai avec la femme que j'aime dans un lieu silencieux, inhabité, isolé. Je ne m'intéresserai plus à rien. Ça me permettra de progresser.

  • Projet pour l'école ?


    Personnellement, je trouve les commentaires plus intéressants que l'article lui-même...Cet article est vide et c'est assez désolant de la part d'une "pointure" de l'enseignement. Si les cadors restent aussi évasifs, on n'avancera pas étant donné que le point de vue des enseignants eux-mêmes est toujours aussi ignoré dans son ensemble. Sauf quand il s'agit de casser les élèves. Alors, là, on les écoute. "Ils ne savent rien, ils n'ont aucune culture, ils sont démotivés, immatures, bêtes et méchants. "Personne ne se dit qu'ils sont, pour certains, à l'image des adultes qui sont face à eux. D'autres résistent et s'élèvent plus haut que leurs "maîtres". Bien plus haut.





    Le Point.fr - Publié le 05/10/2012 à 18:28 - Modifié le 05/10/2012 à 18:39

    Peut-on croire à la refondation de l'école voulue par Vincent Peillon ? Philippe Meirieu, qui a participé aux débats, n'est pas convaincu.

    Philippe Meirieu estime que, malgré la refondation de l'école annoncée, le gouvernement n'a pas de projet pour l'école.

    Philippe Meirieu estime que, malgré la refondation de l'école annoncée, le gouvernement n'a pas de projet pour l'école. © Vincent Isore / IP3/Maxppp


    • Commentaires (4)

    Finie la concertation, place à la loi de programmation et d'orientation. Le rapport remis ce jour à Vincent Peillon, ministre de l'Éducation nationale, clôture officiellement trois mois de débats au sein de la "concertation", ce gigantesque remue-méninges destiné à "refonder l'école de la République". Philippe Meirieu, spécialiste reconnu de la pédagogie et professeur des universités en sciences de l'éducation, a participé à ces échanges. Pourtant, il s'inquiète.

    Le Point.fr : une bonne idée, cette "concertation" ?

    Philippe Meirieu : La méthode est intelligente, quoique pas tout à fait inédite. J'aurais aimé qu'on entende plus les acteurs de terrain, ceux qui chaque jour font l'école. On a, comme d'habitude, invité les 5 000 permanents de l'Éducation nationale, tous des gens très qualifiés, mais assez éloignés des élèves. Tout cela ne saurait exonérer le gouvernement d'une perspective. Or, pour l'instant, je ne vois pas de projet fort pour l'école.

    Pourtant, Vincent Peillon promet de tout "refonder", ce n'est pas rien.

    On a jusqu'à aujourd'hui empilé beaucoup de réformes, on a réparé, ajusté, réagi, et la maison Éducation est une construction de bric et de broc, avec des pans baroques, des murs classiques, des rafistolages en tôle ondulée. La dépression que connaît notre système éducatif est due à cette absence de structures et de principes.

    Vous êtes un expert en pédagogie. Que faudrait-il faire, selon vous ?

    Qui a réfléchi sur les contenus, les savoirs ? La question des contenus, donc, de ce qu'on enseigne aux enfants, est primordiale. Aujourd'hui, les programmes sont devenus trop compliqués. Il nous faut des contenus clairs, attractifs et valorisés. On ne peut pas se contenter d'une garderie améliorée. On demande aujourd'hui aux enseignants de faire de l'éducation dans une société anti-éducative, où les enfants sont excités à consommer, pas à réfléchir. Qui en parle ?

    Alors que devrait savoir, dans une école idéale, un bachelier en juin 2012 ?

    Il doit savoir ce qu'il n'est pas permis d'ignorer. Il doit être capable de lire les quotidiens nationaux de référence en comprenant tout de la première à la dernière ligne. Il serait également temps de cesser de dire que nul n'est censé ignorer la loi et de ne pas l'enseigner. Une société, non théocratique, mais démocratique comme la nôtre, a des règles que tout citoyen doit connaître. Aujourd'hui un bachelier serait incapable d'expliquer la différence entre le civil et le pénal et celle entre le Conseil d'État et la Cour des comptes.

    Il faudrait alors réformer le bac ?

    Je suis stupéfait qu'on accepte sans broncher qu'un 13 en physique y rattrape un 8 en français. C'est absurde. Tous les fondamentaux doivent être acquis. Le culte de la moyenne doit être interrogé. Et cela, je ne l'ai jamais entendu dans la "concertation".

    4 Commentaires

    métis le 05/10/2012 à 19:52

    L'usine des artifices

    Celui qui nous gratifie depuis très longtemps de leçons de pédagogie est lui aussi bien loin des élèves, bien loin du quotidien de la vie scolaire d'un établissement. La publicité de notre système est aussi son talon d'Achille, il cultive les faux-semblants qui interdisent aux acteurs de faire progresser la machine. Dans les discours des chefs d'établissement, la première chose qu'on nous demande de respecter est l'image, une image lisse de service public à vendre aux parents d'élèves. Il y a bien longtemps que l'Education Nationale ne fait plus rêver personne d'autre que les parents pauvres, ceux qui savent dans leur vie quotidienne quelles sont les conséquences de l'échec scolaire. Derrière la sacro-sainte image et les artifices de la compétence, la réalité est bien différente, chaque absence d'un professeur coûte à toute la communauté éducative, chaque échec d'un élève est l'échec de tous, impossible dans une machine aussi complexe de mettre l'adulte face à ses propres responsabilités. Pour autant, faut il ne voir dans ce système que ce qui ne va pas, surtout dans une société consumériste où la plus grande partie du temps dédié par un enfant à son apprentissage consiste à répondre au besoin de la fuite en avant technologique numérique. Je suis souvent choqué par la décision d'élèves aux portes du Bac de décider, sur un coup de tête, d'en finir avec la scolarité, incapables de mesurer le bénéfice d'intégrer, en cas de succès, les voies de l'Enseignement Supérieur. C'est pour moi la preuve que nous ne sommes plus crédible, en tant qu'institution, parce que nous ne sommes plus à même de représenter une perspective d'avenir pour nos élèves. Pourtant, tous les ans, et n'en déplaise à M. Meirieu, je signe pour un an de plus en espérant qu'au moins un élève sera sensible à l'intérêt que nous porterons à sa réussite et sa capacité à faire ses propres choix les yeux ouverts.

    alpen le 05/10/2012 à 19:34

    Vive la clarté !

    Rien de bon ne se conçoit ou se développe dans la confusion. Assez d’idéologie et intéressons l'enfant au monde et à la société dans laquelle il vit. Qu'il s'appelle Pierre, Mohamed ou David l'enfant est curieux de savoir et de comprendre. Écoutons le !

    LA FENICE le 05/10/2012 à 19:33

    M. Mérieu...

    A contribué par ses théories, à une certaine époque, aux résultats qu'il déplore maintenant... Ancien enseignant je me souviens du temps où il inspirait les responsables du l'EN... Aurait-il évolué ?

    Paol le 05/10/2012 à 19:08

    Enfin !

    J'ai été pendant longtemps assez dubitatif face aux propos de Meyrieu. Je viens de relire son entretien avec Gauchet. Je crois qu'enfin le bon sens l'emporte dans ce que je viens de lire. Il faut donner du sens à notre système éducatif, former des citoyens humanistes, aptes à porter un regard critique sur la société, capables d'avoir une opinion argumentée. On en est fort loin. Agrégé de géographie, j'ai été muté dans un collège où j'enseigne à des classes composées de non-lecteurs et d'élèves extrêmement faibles et démotivés, complètement acculturés dont l'horizon s'arrête à l'écran de l'omniprésent portable. Les propos de Gauchet et de Meyrieu me rassurent mais mon quotidien d'enseignant me désespère.


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  • Le bateau ivre

    Léo ferré était le seul à pouvoir faire danser ce bateau sur une musique, une voix, des rires.

    Le rire de Léo. Je l'ai en moi tellement je l'ai écouté.

    "Comme je descendais des fleuves impassibles..."


    Le bateau ivre

    Comme je descendais des Fleuves impassibles,
    Je ne me sentis plus guidé par les haleurs :
    Des Peaux-Rouges criards les avaient pris pour cibles,
    Les ayant cloués nus aux poteaux de couleurs.

    J'étais insoucieux de tous les équipages,
    Porteur de blés flamands ou de cotons anglais.
    Quand avec mes haleurs ont fini ces tapages,
    Les Fleuves m'ont laissé descendre où je voulais.

    Dans les clapotements furieux des marées,
    Moi, l'autre hiver, plus sourd que les cerveaux d'enfants,
    Je courus ! Et les Péninsules démarrées
    N'ont pas subi tohu-bohus plus triomphants.

    La tempête a béni mes éveils maritimes.
    Plus léger qu'un bouchon j'ai dansé sur les flots
    Qu'on appelle rouleurs éternels de victimes,
    Dix nuits, sans regretter l'oeil niais des falots !

    Plus douce qu'aux enfants la chair des pommes sûres,
    L'eau verte pénétra ma coque de sapin
    Et des taches de vins bleus et des vomissures
    Me lava, dispersant gouvernail et grappin.

    Et dès lors, je me suis baigné dans le Poème
    De la Mer, infusé d'astres, et lactescent,
    Dévorant les azurs verts ; où, flottaison blême
    Et ravie, un noyé pensif parfois descend ;

    Où, teignant tout à coup les bleuités, délires
    Et rhythmes lents sous les rutilements du jour,
    Plus fortes que l'alcool, plus vastes que nos lyres,
    Fermentent les rousseurs amères de l'amour !

    Je sais les cieux crevant en éclairs, et les trombes
    Et les ressacs et les courants : je sais le soir,
    L'Aube exaltée ainsi qu'un peuple de colombes,
    Et j'ai vu quelquefois ce que l'homme a cru voir !

    J'ai vu le soleil bas, taché d'horreurs mystiques,
    Illuminant de longs figements violets,
    Pareils à des acteurs de drames très antiques
    Les flots roulant au loin leurs frissons de volets !

    J'ai rêvé la nuit verte aux neiges éblouies,
    Baiser montant aux yeux des mers avec lenteurs,
    La circulation des sèves inouïes,
    Et l'éveil jaune et bleu des phosphores chanteurs !

    J'ai suivi, des mois pleins, pareille aux vacheries
    Hystériques, la houle à l'assaut des récifs,
    Sans songer que les pieds lumineux des Maries
    Pussent forcer le mufle aux Océans poussifs !

    J'ai heurté, savez-vous, d'incroyables Florides
    Mêlant aux fleurs des yeux de panthères à peaux
    D'hommes ! Des arcs-en-ciel tendus comme des brides
    Sous l'horizon des mers, à de glauques troupeaux !

    J'ai vu fermenter les marais énormes, nasses
    Où pourrit dans les joncs tout un Léviathan !
    Des écroulements d'eaux au milieu des bonaces,
    Et les lointains vers les gouffres cataractant !

    Glaciers, soleils d'argent, flots nacreux, cieux de braises !
    Échouages hideux au fond des golfes bruns
    Où les serpents géants dévorés des punaises
    Choient, des arbres tordus, avec de noirs parfums !

    J'aurais voulu montrer aux enfants ces dorades
    Du flot bleu, ces poissons d'or, ces poissons chantants.
    - Des écumes de fleurs ont bercé mes dérades
    Et d'ineffables vents m'ont ailé par instants.

    Parfois, martyr lassé des pôles et des zones,
    La mer dont le sanglot faisait mon roulis doux
    Montait vers moi ses fleurs d'ombre aux ventouses jaunes
    Et je restais, ainsi qu'une femme à genoux...

    Presque île, ballottant sur mes bords les querelles
    Et les fientes d'oiseaux clabaudeurs aux yeux blonds.
    Et je voguais, lorsqu'à travers mes liens frêles
    Des noyés descendaient dormir, à reculons !

    Or moi, bateau perdu sous les cheveux des anses,
    Jeté par l'ouragan dans l'éther sans oiseau,
    Moi dont les Monitors et les voiliers des Hanses
    N'auraient pas repêché la carcasse ivre d'eau ;

    Libre, fumant, monté de brumes violettes,
    Moi qui trouais le ciel rougeoyant comme un mur
    Qui porte, confiture exquise aux bons poètes,
    Des lichens de soleil et des morves d'azur ;

    Qui courais, taché de lunules électriques,
    Planche folle, escorté des hippocampes noirs,
    Quand les juillets faisaient crouler à coups de triques
    Les cieux ultramarins aux ardents entonnoirs ;

    Moi qui tremblais, sentant geindre à cinquante lieues
    Le rut des Béhémots et les Maelstroms épais,
    Fileur éternel des immobilités bleues,
    Je regrette l'Europe aux anciens parapets !

    J'ai vu des archipels sidéraux ! et des îles
    Dont les cieux délirants sont ouverts au vogueur :
    - Est-ce en ces nuits sans fonds que tu dors et t'exiles,
    Million d'oiseaux d'or, ô future Vigueur ?

    Mais, vrai, j'ai trop pleuré ! Les Aubes sont navrantes. 
    Toute lune est atroce et tout soleil amer :
    L'âcre amour m'a gonflé de torpeurs enivrantes.
    Ô que ma quille éclate ! Ô que j'aille à la mer !

    Si je désire une eau d'Europe, c'est la flache
    Noire et froide où vers le crépuscule embaumé
    Un enfant accroupi plein de tristesse, lâche
    Un bateau frêle comme un papillon de mai.

    Je ne puis plus, baigné de vos langueurs, ô lames,
    Enlever leur sillage aux porteurs de cotons,
    Ni traverser l'orgueil des drapeaux et des flammes,
    Ni nager sous les yeux horribles des pontons.

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  • Le biais de conformité

    C'est extrêmement révélateur de nos fonctionnements. 

    Vous pouvez rechercher cette vidéo sur dailymotion, impossible de la mettre en ligne ici, je ne sais pas pourquoi...

    http://www.dailymotion.com/video/xtrtht_l-animal-social-et-son-presque-nouveau-telephone_news?start=1

    Les journalistes ont fait croire à des passants qu'ils pouvaient donner leur avis sur le nouvel iphone alors qu'il s'agissait de l'ancien modèle. Tous ont trouvé qu'il était beaucoup mieux, plus léger, plus rapide. Un seul l'a trouvé plus lourd. L'un d'eux avait même les deux mêmes anciens modèles dans la main et il trouvait le soi-disant nouveau modèle plus léger...

    Consternant.

    Phénomène de groupe. L'individu préfère se joindre à l'opinion dominante que de maintenir son propre point de vue.

    Une autre expérience mettait en présence six acteurs complices et un cobaye réel. Les participants devaient juger de la longueur de trois lignes comparativement à un modèle donné. Les acteurs donnaient une réponse fausse et très visiblement fausse et le cobaye réel finissait par se rallier à l'opinion dominante malgré ce qu'il voyait.


    Un exemple de la gravité des conséquences.

    http://www.facteurs-humains.fr/le-facteur-humain-premiere-cause-d%E2%80%99erreur-de-diagnostic/

    Pour diminuer le nombre de complications médicales, il faut bien évidemment que les praticiens apprennent à combattre leurs états de fatigue et de stress, toutes ces émotions ressenties quotidiennement qui génèrent l’erreur. Mais il faut également prendre conscience que notre cerveau ne fonctionne pas de manière parfaitement rationnelle et que des biais d’analyse intrinsèques à notre mode de penser peuvent sérieusement compromettre la prise en charge des patients. A travers l’histoire suivante, nous allons tenter de comprendre comment 7 professionnels de santé ont pu s’accorder sur un mauvais diagnostic.

     

    Une patiente âgée de 39 ans, enceinte de 3 mois, se plaint de douleurs gingivales généralisées en absence de tout autre symptôme. Elle n’a pas d’antécédents médicaux et est déjà la mère d’un garçon de 4 ans. Elle consulte son gynécologue qui diagnostique une gingivite gravidique. La gingivite gravidique est une inflammation du parodonte (tissus de soutien de la dent) qui survient assez souvent au cours de la grossesse. Elle est déclenchée par la prolifération de certaines bactéries pathogènes en raison des modifications hormonales.  Il est recommandé d’assainir la cavité buccale par une élimination du tartre et de la plaque dentaire. En complément d’un détartrage et d’un surfaçage des racines dentaires, il est parfois recommandé l’adjonction de produits antibactériens (bains de bouche antiseptiques). Dans certains cas, les gencives sont tellement gonflées qu’elles peuvent recouvrir les dents.

     

    Le diagnostic est confirmé par son médecin généraliste qui lui prescrit un bain de bouche et lui conseille de consulter son chirurgien-dentiste pour faire un détartrage. Fort de ces informations, le dentiste pratique un détartrage. Toutefois, les douleurs persistent et la patiente décide de se rendre à l’hôpital au service d’urgence. Une nouvelle fois, le diagnostic est confirmé et de nouveaux bains de bouche sont prescrits. Mais les douleurs ne s’estompent pas et commencent même à atteindre une intensité telle que la vie de la patiente devient de plus en plus difficile. La patiente se représente donc au service d’urgence de l’hôpital. L’infirmière de trie appelle l’interne d’astreinte qui prescrit encore une fois des bains de bouche et renvoie la patiente chez elle.

     

    Elle est déposée dès le lendemain matin par son mari, car les douleurs sont devenues très violentes. Elle est auscultée par un senior du service d’urgence qui la place sous morphine et l’adresse au service d’odontostomatologie (médecine de la bouche). L’interne qui la voit est nouveau dans le service en raison de la rotation des internes et ne la connaît donc pas. Comme la situation se dégrade, il décide de garder la patiente à l’hôpital mais faute de lit en odontostomatologie, elle est transférée dans le service de neurochirurgie. L’interne de neurochirurgie examine la patiente et détecte une mydriase (augmentation du diamètre de la pupille), ce qui l’étonne. Il demande donc un scanner qui révèle un hématome intracrânien très important. Elle est opérée en urgence.

     

    La patiente décède en fin de journée d’une thromboencéphalite cérébrale avec saignement secondaire. La patiente avait en fait une leucémie, dont un des signes peut être une gingivite sévère. Aucune des nombreuses personnes qui l’ont auscultée n’a pensé à demander une simple numération sanguine qui aurait dévoilé la maladie.

     

    ***

     

    Notre analyse

     

    Attention : le but de l’analyse qui suit n’est pas de porter un jugement de valeur sur les protagonistes de l’histoire dramatique racontée ci-dessus, mais d’essayer d’apporter des éléments de réflexion sur la sécurisation de la pratique médicale.

     

    L’erreur de diagnostic est souvent présentée comme étant la première cause de décès à l’hôpital. Dans le cas présent, un grand nombre de professionnels de santé aux profils variés se sont succédés et ont tous confirmé le diagnostic de la gingivite gravidique. La gingivite est en effet la solution la plus probable et la plus facile à envisager : elle est fréquente chez la femme enceinte et le jour de la première consultation, l’inflammation gingivale est le seul signe clinique. Une fois ce diagnostic établi, aucun des acteurs médicaux ne va remettre en question ce choix.

     

    Pour tirer un enseignement de cette histoire tragique, il faut s’interroger sur l’acceptation par tous du diagnostic. Pourquoi a-t-il fallu attendre la 8e personne soignante pour découvrir la réelle cause des douleurs ressenties par la patiente ? Pourquoi des professionnels expérimentés ont réagi de la même manière que des internes ? Pour le comprendre, nous devons déchiffrer le fonctionnement de notre cerveau.

     

    Prendre conscience des biais d’analyse universels

     

    Dans un article précédemment publié dans ce blog sur la surconfiance comme premier facteur d’échec, les auteurs présentent un phénomène connu appelé la « fermeture prématurée ». Les chercheurs en neurobiologie ont en effet observé que notre cerveau ne prenait pas de décisions de manière rationnelle : quelque soit le champ d’activité considéré, une fois un choix établi, tout va être fait pour le confirmer. Le cerveau se ferme aux hypothèses concurrentes qui pourraient invalider ce choix initial. On parle alors de biais d’analyse. Ces derniers peuvent prendre plusieurs formes*:

     

    • Biais d’évaluation de la fréquence des événements graves

    Le risque que des événements graves surviennent est presque toujours sur- ou sous-évalués (on se base sur son expérience personnelle pour déterminer la fréquence des événements)

     

    • Biais de sélection des données

    Les préférences orientent fortement la sélection des faits.

     

    • Biais d’habitude

    Les décisions sont souvent orientées vers des solutions familières même si elles ne sont pas optimales.

     

    • Biais de confirmation

    On recherche les résultats qui confirment plutôt que ceux qui infirment.

     

    • Biais de conformité au groupe

    On recherche plutôt une décision conforme à celle donnée par le groupe. On retrouve très souvent ce type de biais quand il s’agit d’apprécier des vins ou des œuvres artistiques.

     

    Dans le cas présent, il semble que le biais d’évaluation de la fréquence des événements graves ait joué un rôle important chez l’ensemble des professionnels médicaux. La patiente étant enceinte, il semblait logique qu’elle souffre de gingivite gravidique. L’occurrence d’une leucémie présentant ces symptômes est rare et n’a donc pas été retenue par les différents acteurs.

     

    On peut penser que le biais de conformité au groupe a également mené les professionnels médicaux à accepter comme tel le diagnostic de gingivite gravidique. Chaque acteur s’est basé sur le diagnostic initialement fait, lequel s’imposait de plus en plus comme une vérité au fur et à mesure que le nombre de praticiens à l’accepter augmentaient. Il devenait donc de plus en plus difficile de remettre en cause un diagnostic partagé par tant de confrères.

     

    Pour éviter que cette histoire tragique ne se répète, il n’y a pas de solution miracle. Prendre conscience des biais d’analyse qui peuvent compromettre des diagnostics est une première étape. Il est également important de continuer à rapporter ce type d’expériences car le partage des erreurs est fondamental si l’on veut améliorer la sécurisation des pratiques. C’est l’unique but de ce blog.

     

    Franck Renouard– Jean-Gabriel Charrier


    L'ultra communication a un effet exponentiel. Tout ce à quoi les autres s'intéressent est su par tous ceux qui ne le savaient pas encore. La haute technologie fait office de juge critique. L'iphone et l'internet sont les réseaux par lesquels transitent la conformité. La littérature qui oeuvrait à lutter contre la sclérose spirituelle est battue à plate couture. Les éditeurs y participent d'ailleurs eux-mêmes en renforçant la conformité jusque dans les ouvrages publiés. La rentabilité a pris le pas sur l'esprit subversif, l'éveilleur de consciences. 

    "Qui donc inventera le désespoir? chantait Léo Ferré.

    "Tout est prêt, la publicité, la clientèle..."

    Combien il me manque Léo Ferré...


    "A l'école de la poésie"

    La poésie contemporaine ne chante plus elle rampe.
    Elle a cependant le privilège de la distinction
    Elle ne fréquente pas les mots mal famés elle les ignore.
    On ne prend les mots qu'avec des gants : à « menstruel » on préfère périodique »,
    Et l'on va répétant qu'il est des termes médicaux
    qu'il ne faut pas sortir du laboratoire et du codex.
    Le snobisme scolaire qui consiste, en poésie, à n'employer que certains mots déterminés,
    à la priver de certains autres, qu'ils soient techniques, médicaux, populaires ou argotiques,
    me fait penser au prestige du rince-doigts et du baisemain.
    Ce n'est pas le rince-doigts qui fait les mains propres ni le baisemain qui fait la tendresse.
    Ce n'est pas le mot qui fait la poésie mais la poésie qui illustre le mot.
    Les écrivains qui ont recours à leurs doigts pour savoir sils ont leur compte de pieds,
    ne sont pas des poètes, ce sont des dactylographes.
    Le poète d'aujourdhui doit être d'une caste, d'un parti ou du « Tout Paris ».
    Le poète qui ne se soumet pas est un homme mutilé.
    La poésie est une clameur. Elle doit être entendue comme la musique.
    Toute poésie destinée à n'être que lue et enfermée dans sa typographie n'est pas finie.
    Elle ne prend son sexe qu'avec la corde vocale
    tout comme le violon prend le sien avec l'archet qui le touche.
    L'embrigadement est un signe des temps. De notre temps.
    Les hommes qui pensent en rond ont les idées courbes.
    Les sociétés littéraires c'est encore la Société.
    La pensée mise en commun est une pensée commune.
    Mozart est mort seul, accompagné à la fosse commune par un chien et des fantômes.
    Renoir avait les doigts crochus de rhumatismes.
    Ravel avait dans la tête une tumeur qui lui suça d'un coup toute sa musique.
    Beethoven était sourd. Il fallut quêter pour enterrer Bela Bartok.
    Rutebeuf avait faim. Villon volait pour manger. Tout le monde sen fout.
    L'Art n'est pas un bureau d'anthropométrie.
    La Lumière ne se fait que sur les tombes.
    Nous vivons une époque épique et nous n'avons plus rien dépique.
    La musique se vend comme le savon à barbe.
    Pour que le désespoir même se vende il ne nous reste qu'à en trouver la formule.
    Tout est prêt : les capitaux, la publicité, la clientèle.
    Qui donc inventera le désespoir ?
    Avec nos avions qui dament le pion au soleil.
    Avec nos magnétophones qui se souviennent de ces « voix qui se sont tues »,
    avec nos âmes en rade au milieu des rues,
    nous sommes bord du vide, ficelés dans nos paquets de viande
    à regarder passer les révolutions.
    N'oubliez jamais que ce qu'il y a d'encombrant dans la Morale,
    c'est que c'est toujours la Morale des Autres.
    Les plus beaux chants sont des chants de revendication.
    Le vers doit faire l'amour dans la tête des populations.
    A l'école de la poésie, on n'apprend pas. ON SE BAT !

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