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Mémoire pestilentielle
- Par Thierry LEDRU
- Le 29/04/2012
"Une mare pleine d'immondices dégage son odeur la plus agressive au moment où on la récure. L'étendue et l'épaisseur de la saleté se mesurent lorsqu'on nettoie. "
Mâ Ananda Moyî.
Il n'est pas suffisant d'oeuvrer à ce nettoyage émotionnel, existentiel, historique.
Il convient ensuite d'épurer la mémoire car sinon, le mental se complait à réactiver l'époque révolue des immondices. Il s'y retrouve et reprend vie lui, qui n'a plus d'emprise dans le malaxage permanent des immondices. Le Moi ne supporte pas l'absence. Ni tout autant le vide. La mémoire est son ultime recours.
Je réalise, année après année, à quel point j'oublie, à quel point, en dehors des textes que j'ai écrits, les ancrages sombrent les uns après les autres. Je ne jetterai pas pour autant ce que j'ai écrit. Non pas parce qu'il me plaît de ressasser les épreuves ou de contempler le chemin parcouru mais parce qu'il m'arrive dans les moments de flottement et d'errance de regarder simplement le titre d'un ouvrage pour savoir d'où je viens. C'est comme une brique posée pour les fondations. Il n'y a rien à rejeter et si je voulais faire disparaître les fondations sur quoi pourrais-je bâtir ?
Je dispose désormais d'une mémoire écrite et il est donc inutile que je m'obstine à préserver sur le plan de la mémoire "cérébrale" ce qui n'a plus lieu d'être devant moi. Cette vie passée s'efface dans le brouillard des émotions apaisées, une brume nullement inquiétante, juste des voiles diaphanes posés sur le chemin, dans mon dos.
Aucun fantôme n'en surgira. Plus aucune âme disparue n'a à souffrir de mes faiblesses. J'ai vidé la mémoire émotionnelle comme un disque dur.
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L'esprit de solitude
- Par Thierry LEDRU
- Le 27/04/2012
Oh, combien, je me retrouve là...Tout ce que j'ai essayé de traduire dans "les Eveillés. "
L'esprit de solitude de Jacqueline Kelen :http://www.psychologies.com/Moi/Moi-et-les-autres/Solitude/Livres/L-Esprit-de-solitude
La solitude est un cadeau royal que nous repoussons parce qu’en cet état nous nous découvrons infiniment libres et que la liberté est ce à quoi nous sommes le moins préparé.
L’« égo », que toute quête spirituelle authentique conduit à soumettre ou à effacer, représente un noyau de fermeture, d’unique préoccupation de soi, d’arrogance, qui rend un individu vampirique, épris de pouvoir et destructeur. C’est l’égo qui résiste le plus, qui revient l’assaut le plus souvent, qui grossit sans problème.
Le moi, qui reflète une individualité particulière, est fait d’héritage humain et de conditionnements divers. Il dépend de l’histoire, de la société, de la psychologie, de la génétique. Quoique particulier, d’apparence non semblable aux autres, il est un produit. Il recherche la conservation de soi, la sécurité et la survie. Il se rallie au plus grand nombre, il est à la fois narcissique et grégaire. C’est le « gros animal » qu’évoque Platon, qui reproduit les opinions, les modes et les préjugés de la foule, au lieu de mener une recherche personnelle. Gros animal manipulable à merci. (De nos jours, le gros animal se plait dans toutes les manifestations collectives, dans les loisirs de masse et il s’exprime par les sondages.
Le « je » affirme sa différence, il se dégage des divers conditionnements, il s’élève au-dessus de la conscience collective commune. Il exerce son jugement et son libre-arbitre. Il est auteur de ses pensées et de ses actes, il se sent responsable. Là où le « moi » revendique et réclame des droits, le « je » se reconnaît des devoirs. C’est l’individu conscient, singulier, en marche. Il se met en question, il est capable d’évoluer, de se transformer, tandis que l’« égo » demeure statique, lourd, tentaculaire, et que le « moi » reste dépendant et esclave. Seul ce « je « est capable d’éveil.
On comprend qu’une société matérialiste, coupée du sacré, uniquement préoccupée de possessions et de pouvoir, ne prenne en compte chez l’être humain que l’« égo » et le « moi » et les flatte exclusivement ; et qu’elle empêche, surveille ou limite toute émergence du « je » qui conduirait à la grande, à la seule Liberté.
Cette voie royale du « je » est une voie de solitude. Celui qui a maîtrisé ou dissous son « égo » et qui a pris des distances avec son « moi » se retrouve dès lors séparé d’un bon nombre de ses contemporains. Cette distance qui s’est instaurée entre la foule et lui est invisible mais irréversible, elle se nomme conscience et elle surgit en certains instants de manière inattendue.
Personne ne nous apprend à être seul. Au contraire, toute éducation, qu’elle soit dispensée par la famille ou à l’école, vise à ne jamais laisser l’enfant dans le silence, face à lui-même : on l’oblige à jouer avec ses camarades, à faire partie d’une équipe sportive, à embrasser les cousins éloignés et à parler avec les amis des parents, bref, à « communiquer » et à « s’intégrer », ces 2 poncifs tyranniques de la société contemporaine.
Depuis qu’il est né, on l’a détourné de sa solitude : on lui fait croire que sans les autres, il ne sert à rien. Lui qui n’a jamais appris à compter sur lui, à se connaître et à se faire confiance, le voici démuni, apeuré. Sans les autres, il n’existe pas, mais il se rend compte que « les autres » n’ont pas de visage, que la foule est une abstraction, et ce qu’on appelle avec emphase « l’humanité » terriblement dépourvue de chaleur humaine.
Les êtres qui chérissent la solitude sont souvent considérés comme des misanthropes : ils n’apprécient pas les bains de foule, les stades vociférants, les manifestations dites populaires, donc ils méprisent ou détestent leurs semblables.
Or le solitaire n’est pas celui qui n’aime pas les autres mais celui qui apprécie certains autres, celui qui en tout fait preuve d’élection et cultive les affinités. Le solitaire a le sens de l’amitié, qui célèbre une relation unique entre 2 personnes, tandis que de toute part est martelé le mot d’ordre de solidarité, qui fait référence à des populations indistinctes. Il préfère toujours la rencontre particulière à la dilution dans une collectivité. Pour lui, l’individu est d’un grand prix et c’est le mépriser profondément que de le traiter en termes généralisateurs : les jeunes, les travailleurs, les immigrés, les sans-abri…
La solitude s’avère le contraire de l’égocentrisme, du repliement sur soi et de la revendication pour sa petite personne. Le véritable solitaire se passe de témoins, de courtisans et de disciples.
Le solitaire sait qu’il a beaucoup à apprendre alors que la plupart ne cherchent qu’à enseigner, à avoir des disciples.
Il lit, écoute, réfléchit, mûrit ses pensées comme ses sentiments. En cet état, il pèse le moins possible sur autrui : il ne cherche pas, au moindre désagrément, une oreille où déverser ses plaintes, il ne rend pas l’autre responsable de ses faiblesse et de ses incompétences, il ne peut exercer sur personne un chantage collectif.
La solitude est bien une école du respect de l’autre et de maîtrise de soi.
Vivre ainsi, c’est choisir la voie buissonnière, c’est aussi prendre le maquis. Et à tout instant aimer l’imprévisible. Tant que l’on n’a pas compris que la solitude est une force et une alliée, on accepte l’assujettissement et le compromis. Il n’est pas de remède à la solitude, c’est elle qui nous sauve de la médiocrité et de l’abêtissement.
Affronter sa solitude revient à aborder sa peur, surtout la peur de mourir, et à mesurer sa propre puissance. Tant qu’un individu demeure accroché aux autres, tant qu’il craint le jugement d’autrui, il ne sait pas de quoi il est véritablement porteur.
Or, la traversée de la solitude ne débouche pas sur le néant mais sur une mise au monde.
Savoir accueillir la solitude comme une amie rend plus fort et plus libre face aux épreuves et devant la mort –ce qui ne veut pas dire moins sensible. La fermeté d’âme n’a jamais empêché les élans du cœur.
La solitude n’a rien de triste, mais elle a la gravité de l’amour, de la beauté, des choses essentielles. Elle enjoint de vivre avec courage, lucidité et attention. Envisager chaque être comme une solitude, comme un monde à part, est le plus grand respect que nous puissions accorder.
Être seul, c’est se tenir devant l’inconnu. Et prendre le risque de cet inconnu.
L’épreuve de solitude, belle comme une rencontre et difficile comme une maladie, a pour sens d’ouvrir et de défricher nos terres intérieures.
Le premier fruit de solitude que l’on recueille est d’émerveillement et d’intensité : je me découvre unique, irremplaçable et d’un grand prix.
Finalement, notre appréhension de la solitude, notre volonté de la combattre ou de la déprécier serait le signe d’une permanente lâcheté, d’une peur à frayer son propre chemin particulier.
Toute solitude renvoie toujours aux ressources secrètes et imprévisibles de l’individu. Si je me tiens seul face à une épreuve, cela signifie déjà que je suis capable de l’affronter, de la traverser.
La solitude ressemble à une armure impalpable : elle ne protège de rien, elle ne garantit aucune victoire, mais elle permet tous les possibles, la confiance comme la ruse, le courage comme l’inventivité, elle se tient dans l’inattendu de la grâce.
Faut-il rappeler cette évidence ? Le seul compagnon avec qui chacun est assuré de partager toute son existence n’est autre que soi-même. Il est donc recommandé de bien le connaître, ce compagnon de voyage, fin d’éviter une défection, une trahison, une mauvaise surprise.
La connaissance de soi s’avère recherche solitaire et elle n’est guère encouragée par les diverses institutions (famille, école, religion, gouvernement …) qui risquent de se voir mises à mal et ne peuvent plus tourner rond, tourner en rond.
L’intériorité que l’on découvre dans la solitude n’a rien à voir avec la promotion du moi, avec l’autosatisfaction : c’est le silence de soi, c’est une attention au monde.
Loin d’être une coupure, la voie solitaire brûle les limitations que nous imposent le corps, la raison, les préjugés, la peur, et elle nous dilate aux dimensions de l’univers.
On comprend que cette immensité intérieure puisse dérouter de nombreux mortels et qu’ils préfèrent se raccrocher à un territoire plus restreint mais plus tangible.
Lorsque par une patiente solitude, un être humain prend mesure de sa liberté sans limites, il rencontre en même temps sa dimension d’éternité.
Être bien tout seul, être seul et heureux, cela n’a rien à voir avec l’égocentrisme. C’est le signe clair de la liberté. La maturité commence lorsqu’un individu se sent auteur et responsable de son existence, lorsqu’il ne demande pas aux autres de le rendre heureux, lorsqu’il n’accuse pas systématiquement les autres de ses propres faiblesses et insuffisances.
Ainsi, l’idéal du Sage est de se suffire à lui-même.
L’expérience de solitude est une voie de liberté, avec des conséquences non négligeables en des temps de globalisation, d’uniformité : personne ne peut penser à ma place, personne ne peut dire ce qui est bon pour moi, ce qui doit faire mon bonheur, ma vie.
Vivre solitaire renvoie toujours à son jugement personnel, à son intuition, à son esprit critique. C’est un barrage sûr contre la manipulation mentale, la récupération sectaire, les phénomènes de mode.
Tout le mal vient du fait que les hommes, dans très grande majorité, n’ont pas de vie intérieure, et pour cette raison désirent, convoitent, veulent la vie d’autrui. Plus un organisme est évolué, plus il est autonome et solitaire.
Le véritable solitaire ne ressent pas le besoin d’une stabilité que lui fournirait un travail régulier ou une vie conjugale établie parce qu’en lui il se sent structuré et parce qu’il sait que ce qui sécurise devient tôt ou tard ce qui emprisonne.
Vivre solitaire est la meilleure façon de lutter contre l’inertie sous toutes ses formes. On conçoit que cela puisse inquiéter les gens férus d’ordre et de réglementation.
Beaucoup préfèreront répondre à des sollicitations extérieures et à des obligations plutôt que d’exercer bon plaisir et leur libre choix.
N’est véritablement chevalier que l’être humain qui seul s’aventure, qui se met en danger et aborde les surprises et les douleurs que la vie lui octroie. La dignité du chevalier tient à cet honneur de ne pas démériter des rencontres et des périls.
La vie solitaire d’un penseur, d’un artiste, d’un ermite est un engagement, jamais une solution. Résister à la facilité comme à la résignation, demeurer discret sinon secret. Il faut un courage constant, une passion tenue pour oser être soi, pour ne pas renier ses valeurs ni ses rêves.
Le véritable solitaire ne cherche ni à plaire ni à être réconforté. Sa grande force est qu’il n’est point troublé par les agissements et les opinions du monde : quand on vit seul, on ne donne pas prise, on ne se situe plus en rapport au général mais par rapport à l’absolu.
Beaucoup de personnes se montrent incapables de vivre à distance les unes des autres. Comme si de se rassembler tenait chaud et permettait de lutter contre le désespoir et la mort.
Qu’est donc ce danger que sans cesse veut conjurer la vie en collectivité si ce n’est la découverte de soi, de ses désirs, de ses rêves personnels, de sa liberté ?
Ainsi, on continue de vivre ensemble pour éviter de se retrouver seul, pour se croire aimé et protégé, alors que d’être passé par la solitude permet de respecter l’autre, de l’apprécier et de ne pas le charger d’obligations diverses.
Faire cavalier seul, c’est défendre jalousement sa liberté, c’est en toutes circonstances, sauvegarder son intégrité.
Cet état qui paraît fier s’avère surtout précaire, il est donc peu envié par des contemporains soucieux de sécurité. Le cavalier seul allie la force à la fragilité : si la fragilité vient de sa liberté, sa force vient de sa solitude.
La solitude nous rappelle notre condition éphémère qu’aucun argent ne viendra consoler. Elle nous renvoie à l’essentiel.
Libre de tout pouvoir et de toute dépendance, le solitaire sait être heureux sans attendre l’approbation d’autrui. Il a conscience que les jours passent vite, qu’il ne faut pas remettre à plus tard d’aimer, de rire, de connaître, de bâtir. Il se tient volontiers à l’écart d’un monde où règne le cynisme, où s’oublie la ferveur. Il ne se dissout pas dans le genre humain ni dans une vague génération, mais il a le sens de l’amitié –relation d’égalité par excellence- il favorise les relations désintéressées, il aime les personnes avec lesquelles il peut aussi bien se taire que converser. Il apprécie autant la présence d’un chat, d’un arbre, d’une pierre, que la compagnie des hommes, car tout a valeur à ses yeux.
Il se moque bien de plaire ou d’avoir raison. Ce qui lui importe surtout est de ne pas s’avilir, de ne pas abjurer. Ce qu’il déteste le plus a nom insignifiance.
Le vrai rebelle a toute la vie, tous les libres devant lui, il ne se restreint ni à une philosophie, ni à une stratégie. C’est du reste pour cela qu’il demeure insaisissable : il n’est jamais prisonnier de ses idées.
Celui qui n’appartient à personne acquiert une aisance souveraine, comparable à celle du sage qui se trouve bien partout, qui est toujours à la juste place parce que d’abord, il s’est établi en lui, parce qu’il s’est ancré dans la solitude.
Le solitaire ne se sent jamais arrivé, ce qui le garde jeune et créateur. Encore convient-il, pour demeurer libre et vivant, de changer de monture sans arrêt. Pour éviter la récupération autant que l’adulation ou la consécration. Pour ne pas être suivi, imité ou statufié. Ainsi le véritable cavalier seul ne peut être que passager.
A vivre en groupe continûment, un homme régresse dans sa vie émotionnelle, intellectuelle et spirituelle. C’est pourquoi dès que quelqu’un, même un enfant, veut réfléchir ou faire le point sur une situation, il se met à l’écart.
L’intelligence sera toujours seule contre tous parce qu’elle cherche une ouverture toujours plus ample et non l’assentiment des autres. Elle avance les mains vides tandis que le savoir, qui amasse des informations et des certitudes, a volontiers les mains pleines.
La solitude apprend à affermir sa propre pensée et à s’ouvrir à celle des autres. Celui qui n’a aucune idée personnelle se montre aussi incapable de jugement que de tolérance : il se rallera au plus grand nombre.
Faut-il le répéter ? La liberté de pensée ne se trouve ni à droite ni à gauche ni même dans l’anarchisme. Elle ne loge dans aucune religion, dans aucun système politique ou philosophique, pas plus dans l’athéisme que dans la laïcité. Elle est dans ce refus de tout conditionnement et de toute appartenance. Elle n’a pas de dévots, de suiveurs mais seulement des relais.
Le goût de la solitude signe la maturité et parfois le génie. Nul ne peut se dire philosophe, écrivain ou artiste s’il n’a pas exploré, épousé sa solitude.
C’est là le défi titanesque d’une solitude choisie : demeurer « hors » - hors jeu, hors champs, hors d’atteinte. Etranger et passant sur terre. Avec honneur et humilité.
Les épousailles avec soi, dans le secret d’une solitude fertile, permettent une alliance avec l’autre qui ne portera pas atteinte à l’intégrité de chacun. Mais tant que l’individu cherche à l’extérieur celui qui le complétera, qui répondra à ses manques, il ne pourra que nouer des relations intéressées ou précaires. Lorsqu’il est mis au monde, lorsqu’il se sait entier, il envisage avec les autres des liens sous le signe de la liberté et de la gratuité. On ne veut posséder l’autre que si soi-même on se sait incomplet.
Aimer quelqu’un, c’est honorer sa solitude et s’en émerveiller. L’amour ressenti pour un être ne met pas fin à sa solitude mais il l’enrichit, l’enchante et la fait rayonner.
L’élu, l’être aimé serait paradoxalement celui avec qui j’ai envie d’être seul.
Au début du XII siècle, en terre d’Oc, dames et troubadours inaugurèrent une forme d’amour inouïes qu’ils estimaient parfaite et qui n’avait rien à voir avec le mariage ni avec le libertinage. Chacun se savait unique, élu, et sans vivre avec l’autre dans la continuité des jours, étant même éloigné, il se sentait non séparable. Ces amants courtois venaient d’inventer une érotique et une mystique du désir et de la liberté.
Je crois au plaisir de la chair et à la solitude irrémédiable de l’âme.
Veiller sur sa solitude demande du courage, une fermeté d’âme certaine. Une vie solitaire a beaucoup plus de chance d’atténuer, de dissoudre l’égo que de le renforcer.
Un solitaire n’est pas un homme au cœur sec ou impassible, mais un être qui a le goût du secret et de la liberté avant toute chose et qui pratique le plus souvent le retour à soi. Il est capable d’entrer en relation avec autrui sans se perdre et il n’a pas peur de s’attacher car ce lien affectif, même intense, ne porte pas atteinte à son intégrité.
Aimer quelqu’un sans créer une dépendance est un véritable défi à la nature humaine et ce défi, les amants courtois ont eu la fierté de le relever.
Seul un homme libre est capable de vivre un attachement qui ne restreint ni ne ligote et de ressentir un désir incandescent qui n’a rien d’un manque.
Autrement dit, seul un être libre est capable d’aimer, seul il est assez fou pour aimer en toute liberté.
Tous les autres ne savent, sous couvert d’aimer, que posséder l’autre ou lui appartenir.
De même que le véritable attachement se révèle liberté inouïe, enchantement renaissant, de même le vrai détachement conduit à être humble et passant sur la terre, à ne rien posséder ou si peu, à ne rien savoir ou presque, et il devient ainsi libération, allègement joyeux.
On en arrive à ce paradoxe que le plus haut attachement mène au plus grand détachement.
Le vrai solitaire n’a rien à perdre et ne cherche à rien posséder. En rencontrant des personnes diverses, il ne craint pas le jugement d’autrui puisqu’il se connaît et s’est affermi dans cet état ; il ne risque pas de perdre une image de marque déjà évaporée et ne redoute pas la déception puisque de l’autre il n’attend nulle gratification mais avant tout le plaisir de la découverte, le goût de l’échange. Et ainsi il peut aimer l’autre d’être l’autre.
Une vie solitaire fait lâcher les illusions et les convoitises pour faire briller le noyau essentiel. Une telle expérience ouvre à une gratuité totale dans les relations humaines – d’amitié, d’amour, de fraternité- qui peut se formuler ainsi :
« Je n’ai pas besoin de toi, tu n’as pas besoin de moi, mais il est bon de vivre ce moment, ce jour, avec toi. »
Celui qui vit souvent seul apprécie d’autant plus la diversité des individus qu’il rencontre, la qualité des relations qui s’offrent à lui. Dans cet état, je fais l’expérience que tout peut être neuf à chaque instant au lieu de se prolonger, de se répéter. Tout devient possible, surtout l’incroyable.
Il n’y a plus de vie ordinaire, de vie quotidienne, puisque la solitude procure ce goût de l’unique et de l’inattendu.
La solitude apprend à aimer, elle apprend à poser un regard étonné et bienveillant sur les êtres et à respecter leur secret.
Dans la petite enfance, on est aimé et protégé bien plus qu’on aime. Le chemin de maturité conduit à aimer bien plus que d’être aimé. Un individu ne devient intéressant qu’à partir du jour où il s’enquiert d’aimer bien plus que d’être apprécié, choyé ou courtisé.
A demeurer longtemps solitaire, en silence, on oublie les repères habituels et le temps n’est plus compté. Les heures ne tombent plus comme une menace, un couperet, le temps devient une ample respiration.
Un ermite véritable n’a pas besoin de se tenir éloigné des autres, il demeure retiré malgré le brouhaha du monde.
Est infiniment libre celui qui se découvre éternel et vit désormais comme tel.
Ces solitaires mettent à rude épreuve la sécurité et la présomption où se conforte notre époque. Ils mettent en péril les certitudes, les acquisitions, la fierté même. Ils portent en eux-mêmes une immense soif d’absolu.
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Candide Thovex
- Par Thierry LEDRU
- Le 25/04/2012
Je ne connais pas de plus belles images de ski. Candide Thovex est LE free rider le plus talentueux, le plus créatif. Et dont les vidéos sont, pour moi, les plus belles.
Si quelqu'un connaît la musique de celle-ci, je serais très heureux d'en connaître le compositeur.
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Ego et involution.
- Par Thierry LEDRU
- Le 25/04/2012
"Ego : Acte par lequel la conscience de soi se pose en origine de soi, se coupant à la fois de soi et de son origine. "
Tariq Demens.
S'agit-il vraiment d'un acte ? Par "acte", j'entends une volonté et pas une réaction ?
Est-ce qu'il y a vraiment une volonté ou plus simplement un abandon ?
S'il s'agit d'un abandon, quelle en est la source ?
Pourquoi les individus s'égarent parfois dans cette dimension égotique, à partir de quand cela se produit-il, quels évènements ou situations prolongées contribuent à cet égarement ?
S'agit-il d'ailleurs d'un égarement ? Quelles en sont les conséquences ? Est-ce vraiment si problématique ?
Les individus qui restent ancrés dans l'origine du soi sans que ce soi ne se considère comme l'origine de l'individu sont-ils plus à mêmes de participer à la justesse du monde ? Comment parvenir à établir le comportement inhérent à cette justesse ? En quoi consiste-t-il ?
Si une bonne partie de l'humanité est enfermée dans un moi encapsulé, il faut bien qu'il y ait eu un point de départ, un phénomène déclencheur, un choix qui se soit fait. A moins qu'il ne s'agisse que d'une dégénérescence et que cette humanité soit engagée sur une voie négative.
Pourquoi l'évolution ayant contribué à l'avènement d'un cortex, d'une conscience, d'une intelligence serait-elle anéantie par une involution ? Il doit y avoir une explication.
Il y a des jours où j'aimerais que ça se calme en moi.
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Jarwal le lutin : la conscience de la vie
- Par Thierry LEDRU
- Le 24/04/2012
JARWAL LE LUTIN
tome 4
"Ils mangèrent en gardant les yeux tournés vers les horizons ou sur les eaux miroitantes. Ce calme étrange dans les pensées secrètes et quelques paroles dérisoires qui surgissaient parfois. Cette présence du monde qui emplissait les esprits, comme un partenaire respectueux qui se tenait, immobile, silencieux et fidèle.
Au loin, des brumes de chaleur couvraient les vallées d’un voile diaphane, des haleines tièdes qui cachaient les agitations humaines. Les villes se dissipaient sous des volutes immobiles. Les sommets rayonnaient en pleine lumière. Quelques nids de neige subsistaient encore dans les faces sombres. Les forêts de résineux dessinaient des lignes de partage avec les alpages et, plus bas, les feuillus dispensaient des palettes de verts aux variétés infinies.
Léo jeta un caillou dans l’eau du lac. Des ondes circulaires s’étendirent dans une symétrie parfaite.
« Quand je vois les cercles, comme ça, sur l’eau, expliqua Rémi, j’imagine toujours mes pensées. Comme si la première qui arrive, c’est comme un caillou qui tombe à l’eau et ensuite, la pensée s’étend, s’étend. Et puis, après le calme revient et c’est tout lisse dans ma tête, comme le lac. »
Lou regarda Rémi avec surprise, une certaine curiosité. Une émotion étrange. Elle n’avait jamais fait attention à lui au collège. Il était juste le frère de son amie, de sa seule amie. Mais elle ne l’avait jamais écouté et elle découvrait un monde intérieur qui lui plaisait beaucoup. Elle se trouva absurde en réalisant qu’elle avait ignoré le garçon uniquement parce qu’il avait un an de moins qu’elle.
« C’est une très belle image Rémi, avoua-t-elle. Je trouve difficile en tout cas de parvenir à faire en sorte que dans ma tête, ça soit comme le lac. J’ai l’impression que des cailloux tombent tout le temps à l’intérieur et que tous les cercles se superposent sans arrêt. »
Rémi ressentit un picotement délicieux. Cette certitude qu’il existait vraiment pour Lou, qu’il n’était pas juste qu’un camarade du jour. Il se surprenait en même temps d’avoir osé révéler cette image devant de nouveaux compagnons. Cette conscience soudaine que les pudeurs entretenaient l’insignifiance des échanges alors qu’il suffisait d’être vrai et honnête pour créer un réel partage, une rencontre inespérée. Cette idée que les hommes construisaient leurs propres prisons. Jarwal l’avait dit.
Ils finirent leur casse-croûte et reprirent le chemin.
Les interrogations s’éveillèrent rapidement. Lou voulait en savoir davantage sur le voyage de l’eau. Tian s’intéressait grandement aux Kogis. Il pensait aux Tibétains, colonisés à leur tour. Encore et toujours des soumissions et des douleurs, rien n’avait changé dans le fonctionnement de l’humanité.
Marine essayait d’expliquer ce que Jarwal avait découvert à travers la perte de sa mémoire.
« Il dit que si on reste attaché à notre mémoire, on perd la conscience de la vie. Mais c’est compliqué à expliquer en fait. C’est comme si le passé que notre mémoire garde en elle nous privait de la compréhension de la vie immédiate.
-Un peu comme si on traînait un fardeau. On dépense notre énergie pour ça alors qu’on devrait l’utiliser dans l’instant présent, c’est ça ? demanda Tian.
-Oui, c’est ça, acquiesça Marine, en souriant au jeune garçon. Mais en plus, Jarwal disait qu’on en finissait par ne plus exister réellement. On se souvenait d’avoir vécu et on se servait de ces souvenirs pour recevoir le présent.
-Par exemple, en ce moment, on est tellement attaché au souvenir de Jarwal qu’on en finit par ne plus voir ce qui nous entoure, ajouta Léo, alors que la petite troupe arrivait au col.
-Tu as bien raison, petit frère, renchérit Rémi. On ne se sert même pas de ce que Jarwal nous a appris. C’est nul.
-C’est bien la preuve que quand on apprend quelque chose, ça n’est pas pour autant que c’est à nous.
-Oh oui, Léo, alors tu imagines un peu avec tout ce qu’on doit avaler à l’école, reprit Marine. Et en plus, ça ne nous concerne pas directement. C’est juste du savoir. Alors que Jarwal, il nous parle de notre vie. Et pourtant, même ça, on n’arrive pas vraiment à s’en servir.
- Dites donc, vous n’imaginez pas le plaisir que j’ai à être avec vous. Je pensais qu’on allait juste faire une balade en montagne et j’étais déjà très contente mais alors, là, ça dépasse tout ce que j’espérais, lança Lou, rayonnante. C’est chouette toutes ces discussions. C’est triste d’ailleurs qu’à l’école, on ne parle jamais de tout ça et même entre nous, comme si l’endroit lui-même nous rendait bête.
-Ah, ah, éclata Tian, c’est exactement ça, c’est un endroit qui nous rend bête de savoir.
-Et qui nous éloigne de nous-mêmes, continua Rémi, en nous racontant que c’est pour nous préparer à gagner notre vie. Je déteste cette expression. »
Un regard de Lou que Rémi surprit, un choc immense, l’attention qu’elle lui portait, comme une volonté de le comprendre, de saisir tout ce qu’il portait, la tête légèrement inclinée, une interrogation curieuse, tendre, le bonheur de la rencontre, une découverte inattendue. Comme une fenêtre ouverte sur un espace inconnu.
Ils regardèrent silencieusement les horizons gagnés. La chaîne de la Lauzière et ses arêtes dentelées, les forêts comme arrêtées par une ligne infranchissable, l’altitude dessinée sur le faîte des derniers arbres, une longue ligne régulière courant sur les flancs, les alpages les dominant jusqu’aux premières zones rocheuses et cet élan vertical projetant vers les cieux immobiles des flèches minérales.
Ils percevaient, remontant du fond de la vallée, la rumeur des camions et des voitures filant sur l’autoroute, une rumeur sourde, envahissante.
« J’aurais aimé connaître cette vallée avant même que l’homme y soit installé, annonça Léo. Vous imaginez cette immensité dans le silence, tout à découvrir, aucun chemin, des animaux en pagaille, ça devait être extraordinaire.
-En Chine, il y a des régions qui sont encore très peu habitées, des étendues immenses, mon père m’a dit qu’il y avait une différence de vie incroyable entre certaines zones du Nord et les grandes villes. Dans les mégapoles, il y a des enfants qui n’ont jamais vu la nature, rien, ils ne sont jamais sortis de ces centaines de kilomètres de rues, les villes en France sont toutes petites comparées à Shangaï ou Pékin.
-Je ne pourrais pas y survivre, intervint Rémi.
-Moi non plus, Rémi, continua Tian et il y a d’ailleurs beaucoup de gens qui y meurent. La pollution atmosphérique est terrifiante. Certaines villes industrielles sont constamment recouvertes par un nuage gris. On n’y voit jamais le ciel bleu.
-C’est complètement fou.
-Oui, Léo, pire que ça, même, c’est suicidaire. Et soi-disant pour vivre mieux.
-Il me fait terriblement peur ce monde adulte », avoua Lou, en baissant les yeux.
Une infinie tristesse qui toucha immensément Rémi, comme des tenailles qui enserraient son cœur.
Le silence qui s’imposa, une peur partagée, un avenir aussi inquiétant qu’un ciel d’orage.
« Et si on descendait voir notre cabane ? proposa Léo. De toute façon, Jarwal ne viendra pas, faut pas rêver.
-Ouais, tiens, chouette idée ça petit frère, » acquiesça Rémi.
Un dernier regard sur les horizons, comme un ultime espoir projeté. Tian et Lou, désolés de cette rencontre manquée, Marine, Rémi et Léo, inconsolables de cette disparition. Il fallait occuper le reste de la journée. La mission de partage était achevée. Et c’était déjà un grand bonheur. Et puis, il y avait ces émotions impromptues, fugaces mais déjà si puissantes. Tian et Marine. Lou et Rémi.
Léo s’en amusait. Il sentait bien qu’il y avait dans l’air des parfums inhabituels, des échanges secrets, des pensées lumineuses.
Ils prirent le chemin vers la forêt."
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Le cerveau des animaux.
- Par Thierry LEDRU
- Le 24/04/2012
Et un jour, les scientifiques découvriront que le cerveau n'est pas le centre unique de décision. Mais, là, il leur faudra encore faire des milliers d'expériences, là où les Peuples Premiers le savent par observation, humilité et amour.
Les abeilles aussi savent manipuler des concepts
Publié le 24/04/2012 à 18:55
Des chercheurs français viennent de démontrer que ces insectes
étaient capables de jongler avec des idées abstraites pour trouver de
quoi se nourrir.
Une abeille entraînée à trouver un distributeur d'eau sucrée en fonction des notions "au-dessus de, en dessous de" et "différence" (image initialement verticale). © A. Avarguès-Weber / CRCA
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Manipuler des concepts n'est pas le propre de l'homme, ni de quelques rares primates ! Les travaux de l'équipe de Martin Giurfa, du Centre de recherches sur la cognition animale à l'université Toulouse III-Paul-Sabatier (CNRS), viennent de le démontrer. Les abeilles, pour qui ce chercheur se passionne depuis longtemps, sont capables d'en faire autant. Elles saisissent des idées abstraites comme "différent", "égal", " au-dessus de" ou "à côté de" et sont en mesure d'utiliser ces données pour établir une stratégie gagnante afin de débusquer de la nourriture.
Pour en arriver à cette conclusion, les scientifiques ont entraîné des abeilles à entrer dans une enceinte dans laquelle ils avaient installé un distributeur d'amère quinine entre deux images différentes, positionnées côte à côte, et un distributeur de solution sucrée entre deux autres figures différentes, installées l'une sous l'autre. Selon leurs travaux, publiés dans la revue américaine Proceedings of the National Academy of Sciences (PNAS), après une trentaine d'essais, les insectes se sont dirigés droit vers les images placées l'une sous l'autre près desquelles était délivré l'appétissant breuvage. Qu'importe si les images avaient été changées, leur position l'une par rapport à l'autre leur suffisait à se faire une idée. En revanche, lorsque les chercheurs ont placé deux images identiques l'une au-dessous de l'autre, les abeilles ont semblé désappointées, preuve qu'elles ne s'étaient pas contentées d'utiliser le concept "l'une au-dessous de l'autre" pour se repérer. Elles avaient aussi enregistré que les deux figures devaient être "différentes" et non "égales" !
Un tout petit cerveau...
"Nous savions déjà que ces petits insectes étaient capables d'apprentissage et de mémorisation pour des choses très simples, du type "telle couleur = sucre" ou "telle odeur = sucre", mais là, il s'agit de règles générales abstraites qui s'appliquent même à des objets que les abeilles ne connaissent pas", souligne le professeur Martin Giurfa, enthousiaste. "Le plus fascinant, c'est qu'elles puissent non seulement utiliser un concept, mais aussi en combiner deux pour prendre leur décision." Ces conclusions étonnantes remettent en cause plusieurs théories. D'une part, les scientifiques pensaient jusqu'ici que seuls des cerveaux de taille importante avec un cortex bien développé, comme ceux des mammifères, pouvaient permettre l'élaboration d'un savoir conceptuel. Or le cerveau des abeilles est plutôt du genre "miniature". "Celui-ci mesure à peine un millimètre cube", précise le chercheur. D'autre part, on associait systématiquement manipulation de concept et langage. Or, jusqu'à preuve du contraire, les abeilles ne parlent pas...
Forte de ces résultats, l'équipe du Centre de recherches sur la cognition animale de Toulouse espère maintenant pouvoir identifier les réseaux de neurones responsables de l'apprentissage de tels concepts. "Même si nous ne sommes pas certains d'y parvenir, cela semble chose possible sur un cerveau d'abeille qui compte approximativement 950 000 neurones, en tout cas plus que sur un encéphale humain à 100 milliards de neurones", explique Martin Giurfa. Les chercheurs travaillent donc actuellement à des outils d'imagerie permettant d'étudier, au neurone près, ce qui se passe dans la tête de ces abeilles savantes...
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Machiavel.
- Par Thierry LEDRU
- Le 21/04/2012
Nicolas Machiavel
1469 - 1527
Éléments de biographie
Machiavel est né à Florence en 1469. Il reçoit une éducation humaniste (Antiquité grecque et surtout romaine). Il fait des études de droit.
L'époque est politiquement très troublée. L'Italie est riche mais divisée en petits états très instables, la proie facile des invasions étrangères.
De 1494 à 1527, ce sont les guerres d'Italie : l'Italie ne cesse d'être envahie et pillée (par les Français, les Espagnols, les Allemands, les Suisses ...)
Machiavel rêve d'une Italie unifiée dans laquelle la paix et la stabilité seraient garanties par un état fort. C'est ce qui le déterminera à écrire Le Prince.
De 1498 à 1511, il exerce les fonctions de secrétaire de chancellerie à Florence et se voit confier des missions politiques importantes et délicates dont il s'acquitte avec efficacité et fidélité.
En 1512, la chute de la république de Florence le fait tomber en disgrâce.
C'est pendant cet exil sur ses terres qu'il écrit ses grandes oeuvres politiques.
En 1526, il reprend des fonctions officielles.
Il meurt en 1527 sans avoir vu la réalisation de ses rêves politiques pour l'Italie.Thèmes majeurs
Sans avoir jamais développé une philosophie de l'histoire, Machiavel se réfère continuellement à l'histoire comme source d'enseignement.Dissociant politique et religion, Machiavel est le premier penseur de l'État laïque. Il ne voit pas dans la religion le fondement du pouvoir, mais tout au plus un instrument du pouvoir : il peut être utile de se servir de la religion pour gouverner, mais l'État n'a pas à rendre des compte à l'Église.Selon Machiavel, le pouvoir ne vient ni de Dieu (contre les théories du Droit divin), ni d'une convention (contre les théories du contrat social) mais de la force.Il faut, dit-il "s'en tenir à la vérité de la chose". Machiavel est avant tout un réaliste. La guerre est l'essence du politique."La fin justifie les moyens". Bien que Machiavel n'ait jamais écrit cette phrase qu'on lui attribue, elle résume bien sa position sur le sujet. Pour lui, le but de la politique, pour Machiavel, n'est pas la morale mais la réussite (obtenir et conserver le pouvoir).Le prince n'a pas à être juste. Il suffit qu'il le paraisse. La politique est un art de la dissimulation au nom de l'efficacité.
Cependant, le pouvoir de l'État n'est jamais l'exercice de la force pure : la finalité de la politique est d'instaurer "de bonnes lois" pour le bien du peuple. Mais il n'y a pas de bonnes lois là où il n'y a pas de bonnes armes. Le prince n'est pas à proprement parler immoral. Il est amoral en ce sens qu'il est au-dessus de la morale ordinaire. L'efficacité est la morale du prince, car seul un pouvoir fort peut assurer la paix et donc garantir la moralité du peuple.1. La nécessité : c'est l'ordre du monde et la nature humaine qui font qu'on peut s'attendre à ce que les choses se déroulent selon certaines attentes.
2. La fortune : c'est le hasard (la chance) dû à la complexité des événements qui les rend imprévisibles. C'est le caractère incontrôlable des circonstances (en partie l'effet de la nécessité).
3. La "virtu" : c'est la force (de "vir" virilité) de celui qui est capable d'imposer sa loi envers et contre les circonstances (c'est-à-dire envers et contre la fortune). C'est donc l'exercice de la liberté qui infléchit le cours des événements.Le problème soulevé par Le Prince est : Quel est le fondement du pouvoir, c'est-à-dire comment prendre le pouvoir et le garder ?
Le titre original de l'ouvrage est en latin : De Principatibus ("Des Monarchies").
La notion de "prince" peut désigner :
1. celui qui détient seul l'autorité politique;
2. le souverain, c'est-à-dire l'autorité politique, qu'elle soit détenue par un individu ou un groupe
Pour Machiavel, c'est le premier sens qu'il faut retenir.
Dans Le Prince, Machiavel analyse les conditions de possibilité de la conquête et de la conservation du pouvoir personnel : à quelles conditions un pouvoir est-il bon, c'est-à-dire pour Machiavel, fort ? Pour Machiavel, le vice par excellence en politique, c'est la faiblesse.
On a vu dans Machiavel le théoricien du pouvoir personnel cynique, mais il est aussi le théoricien de la liberté populaire. En défendant l'idée d'une armée de citoyens et non de mercenaires, il intègre au moyen (la force) la fin bonne (le bien du peuple).
Si le prince peut être amoral (non pas immoral, mais au-dessus de la morale) quand les circonstances l'exigent, c'est pour pouvoir garantir la paix sans laquelle aucune moralité n'est possible.
Le Prince est la première grande étude de science politique portant sur l'état moderne.Principales oeuvres
- Le Prince (1513)
- Discours sur la première décade de Tite-Live (1513-1520)
- L'Art de la guerre (1521)
- Histoire de Florence (1521-1525)
