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  • Une totale contradiction

    Une cellule de peau a  une durée de vie de 3 à 4 semaines avant d'être renouvelée. En fonction de son endommagement (blessure, coup de soleil...), ces cellules peuvent être recyclées toutes les 2 semaines.

     

    Un globule rouge vit lui quelque 120 jours soit 4 mois.

     

    Une cellule de la rétine ne dépasse pas 10 jours.

     

    Les cellules tapissant la surface de l'intestin ne «tiennent» que 5 jours, elles comptent parmi celles dont la durée de vie est la plus courte de tout l'organisme. À l'exception de celles-ci, l'âge moyen des cellules de l'intestin est de 15,9 ans.

     

    Quant au foie, chargé de détoxiquer l'organisme humain, la durée de vie de ses cellules est assez courte - une cellule du foie d'un humain adulte se renouvelle tous les 300 à 500 jours.

     

    De même pour le pancréas, la rate et les poumons dont les cellules ont une durée de vie de 300 à 500 jours.

     

    Les cellules du squelette vivent un peu plus de 10 ans.

     

    Celles des muscles des côtes durent en moyenne 15,1 ans.

     

    Nous sommes par conséquent mentalement figés dans un organisme incessamment transformé. Une totale contradiction. L'illusion de transformation psychologique est entretenue par cette Histoire qui montre l'évolution matérialiste de l'Humanité. Une évolution qui lorsqu'on l'observe correspond davantage à une involution au vu de l'absence actuelle de toute maîtrise.

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  • Histoire

    La "grande "Histoire...

    Je tourne cette idée depuis quelques jours et je cherche une époque correspondant à l'instauration du moi dérivé dans le fonctionnement humain, cette rupture qui a conduit à l'enchaînement des périodes historiques jusqu'à nos jours.

    La sédentarisation.

    On remonte loin dans le temps.

    L'installation des hommes a marqué à mon sens le détachement envers le flux vital. De "chasseurs-cueilleurs", l'humanité est devenue exploitante. Et le sentiment de puissance s'est nourrie de l'idée que l'humain était "différent". Les religions se sont engouffrées dans la brèche. A moins qu'elles soient même responsables du phénomène. 

    Les enfants de la Terre se sont vus plus puissants que leur Mère.

    J'ai le vertige quand j'essaie de mesurer et d'analyser ce que ce changement a généré.

    Au regard de l'Histoire, je ne parviens pas à trouver une seule époque ayant contribué à restaurer cette osmose. Des mouvements de pensées ont jailli, des confrontations inévitablement bâties sur le concept du moi encapsulé. J'imagine l'aménagement d'une pièce, le déplacement des meubles, l'agencement euphorique, comme si la disposition et l'emploi des ressources matérielles, technologiques, cognitives pouvaient engendrer un résultat favorable par rapport à l'agencement précédent. Non, il n'en est rien pour la bonne raison que les hommes restaient immanquablement enfermés dans le même concept. le Moi. C'est la pièce qu'il fallait abattre mais ils n'en sont jamais revenus à un travail d'architecte. Juste de l'aménagement intérieur. On ne peut nier le fait que cet agencement a atteint une certaine qualité pour une partie de la planète tandis qu'une autre n'est pas parvenue à suivre le mouvement, dépassée par  la force technologique des premiers, dépassée par cette volonté inébranlable d'étendre leur puissance, jusqu'à piller les ressources des voisins. La guerre est devenue le nerf du moi dérivé, la source de son extension.

    La sédentarisation contenait en elle la nécessité de multiplier les territoires à exploiter étant donné que les besoins inhérents au moi dérivé ne cessaient de gonfler. Pour renforcer sa puissance, il faut étendre son champ d'action. Pas question de se contenter des cycles naturels et d'attendre que la terre reconstitue son potentiel. L'usage des énergies fossiles comme le pétrole a accéléré le processus.

    Rien dans l'Histoire ne permet la moindre ouverture des consciences. La pièce était close, sans fenêtre, des murs immenses. Une prison intérieure que les générations, les unes après les autres, se sont efforcées de décorer. Jusqu'à piller les éléments rapportés par des populations voisines. L'accumulation est devenue le seul mot d'ordre.

    Lorsque je vois les milliers de livres historiques cherchant à analyser les causes des conflits, je me dis qu'il y a un regard extrêmement limité sur les évènements. Les historiens identifient non pas les causes mais des conséquences d'un phénomène intérieur. Il faut remonter dans la psyché humaine. Remonter très, très loin. Avant que les murs de la geôle ne soient mis en place par les hommes eux-mêmes. Sinon, rien ne sera jamais réglé. On continuera à observer et à analyser les évènements qui se produisent dans cet espace clos sans jamais chercher une faille dans le mur, sans jamais porter notre regard par-delà les murs.

    L'analyse du passé n'apportera aucune solution. Les changements qui surviendront ne seront toujours qu'un angencement de la cellule.

    L'extermination des ethnies contribue bien entendu au maintien du paradigme. Les puissants ne peuvent laisser exister un autre regard. Le risque que cela déclenche une crise de conscience est insupportable. Il suffira de faire passer ces peuples pour des "sauvages". Les tenants du modernisme s'exclameront que si on suit cet exemple, on doit revenir à l'époque de la pierre taillée.

    Ils devraient essayer de comprendre que d'un point de vue spirituel, nos sociétés modernes en sont à la Préhistoire.

    Et que les ethnies des Peuples Premiers sont infiniment plus évolués.

     

    Je sais bien que cette vidéo est issue d'une chaîne commerciale. Je sais bien que se pose le problème des conséquences de ce genre de rencontre. Mais je trouve exaltant de voir que des "Blancs" viennent demander leur avis à des "sauvages".

    Et le passage avec la Calas est tellement beau...

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  • Toujours l'Islande

    Après son refus de payer sa dette, l’Islande fera le triple de la

    croissance de l’UE en 2012

    23 janvier 2012 Posté par benji sous Argent et politique 12 commentaires

     

    http://blogs.mediapart.fr/blog/la-garnie/240112/apres-son-refus-de-payer-sa-dette-l-islande-fera-le-triple-de-la-croissan

    Je ne cesserai jamais de répéter que l’Islande est LE pays à prendre en exemple,même s’il est complètement ignoré des médias, s’il est loin ou quelle qu’en soit la raison pour ne pas en parler, c’est le pays à suivre! Payer pour les banques? Même pas en rêve, là bas ils ont été emprisonnés! Sauver les banques? Elles ont été nationalisées. Quand à la croissance actuelle, elle se porte au mieux.

    Islande a terminé l’année 2011 avec une croissance économique de 2,1% et selon les prévisions de la Commission européenne, elle va faire le triple du taux de croissance attendu pour l’UE en 2012 (La croissance de l’UE est prévue à 0,5% en 2012 contre 1,5% en Islande). Pour 2013 la croissance devrait atteindre 2,7%, principalement à cause de la création d’emplois. L’Islande est le pays qui a nationalisé les banques privées et qui a emprisonné les banquiers responsables de la crise.L’Islande a été le seul pays européen qui a rejeté par un référendum citoyen le sauvetage des banques privées, laissant s’effondrer certaines d’entre elles et jugeant de nombreux banquiers pour leurs crimes financiers.

    Pendant ce temps dans un pays comme l’Espagne, le ministre l’économie qui fut un grand responsable chez Lehman Brothers, a maquillé les soldes bancaires et a gonflé les résultats pour faire croire à une solvabilité du système financier résultant de la déréglementation des marchés mais ce dernier a fini par s’effondrer. 

    Glitnir, Landsbankinn et Kaupthing furent les banques nationalisées en 2008 pour éviter leur faillite et qui furent placées sous contrôle démocratique, plutôt que de profiter d’injections inconditionnelles de capitaux publics, comme en Espagne ou dans les autres pays européens. En juin dernier, l’une d’elle Landsbankinn, a annoncé son intention de rembourser les intérêts aux détenteurs d’hypothèques pour compenser les citoyens de payer leurs pertes.

    La révolte pacifique a débuté en 2008, sans que celle-ci soit décrite dans les pages des grands médias européens, qui ont mentionné dans des notes en bas de page que ce pays était un dangereux exemple à suivre. À la fin de 2008, l’ensemble des dette de l’Islande égalait à 9 fois son PIB. La monnaie s’est effondrée et la Bourse a suspendu ses activités après une baisse de 76%.

    Le pays a fait faillite et a ensuite reçu un prêt de 2 100 millions de dollars du FMI et 2 500 millions de dollars provenant des pays nordiques et de la Russie. Le FMI, comme d’habitude, a exigé, en échange des mesures « d’ajustement » soit des coupures dans les dépenses sociales qui ont provoqué la colère de la population, la chute du gouvernement et la convocation d’élections anticipées au début de 2009 dans lesquelles la gauche a remporté la majorité absolue et provoquant l’effondrement du Parti de l’Indépendance, un parti conservateur, qui était traditionnellement la force dominante dans le pays, qui n’a conservé que 23,7% des voix.

    Le Mouvement Gauche-Vert a gagné 21,7%, Alliance sociale-démocrate 29,8%, le Parti progressiste 14,8% et Mouvement des citoyens 7,2%.

    Johanna Siguroardottir a été choisi pour diriger le gouvernement réunissant des sociaux-démocrates, et les écologistes de gauche. En 2010, on a mis sur pied une assemblée constituante de 25 membres, des « citoyens ordinaires » pour réformer la Constitution. Cette même année, le gouvernement a soumis à un référendum sur le paiement ou non de la dette contractée par les banques privées en faillite au Royaume-Uni et dans les Pays-Bas, mais 90% des gens ont refusé de payer.

    Ses citoyens ont voté non à cause de l’effondrement de la Banque Icesave et les gouvernements de ces pays couvrent les dépôts à capitaux publics. Le FMI a gelé les prêts en espérant que l’Islande finirait par payer ses dettes illégitimes.

    En septembre 2010, l’ancien Premier ministre Geir Haarde a été mis en procès pour négligence dans la gestion de la crise. Interpol a également émis un mandat d’arrêt international contre l’ancien président de Sigurdur Einarsson. En avril 2011, les citoyens ont de nouveau dit non à un nouveau référendum sur le paiement de la dette.

    Après cela, au mois de décembre la banque Landsbanki a décidé de retourner une partie de la dette. Le montant total des sommes versées par Landsbanki, selon Icenews à 350 milliards de couronnes, soit environ 33% de la dette totale. Pourtant, « les comptes Icesave ne représentent seulement 4% des obligations des institutions financières du pays, soit environ 4000 millions d’euros. 96% restant ne pouvait pas être renvoyé aux créanciers, car il était complètement impossible de le faire parce que le paiements d’intérêts chaque année aurait dépassé les revenus du pays.

    Dans les mots de l’économiste Jon Danielsson : « Les (banques) ont accumulé une dette égale à plusieurs fois le PIB annuel. Il n’y a aucune possibilité que les citoyens puissent payer cette dette. »

    Il y a quelques jours, les responsable de la Fiscalité en Islande ont inculpé deux officiers supérieurs des banques qui ont commis des fraudes au moyen de prêts non autorisés pendant les opérations qui ont conduit à son système financier à s’effondrer en 2008 : l’ancien PDG responsable de la faillite de Glitnir, Larus Welding et le responsables des finances de l’entreprise, Gudmundur Hjaltason. Ils auraient abusé de leur position pour fournir environ 102 millions d’euros sans la permission, sans garanties de la part des bénéficiaires et sans avoir consulté le département de gestion des risques.

    Les agences de notation Moody, Standard & Poor et Fitch font pression pour punir l’endettement sans grand succès et toujours en essayant d’ignorer la reprise économique dans ce pays. Par ailleurs, en 2008, quelques mois avant l’effondrement de ses banques, le pays jouissait encore de la cote triple A donnée par ces mêmes organismes.

    * Journaliste.  Www.contralatortura.cl Dispatch

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  • Mouvements de pensées. (spiritualité)

    Des lecteurs ou lectrices, ici ou sur des forums, me disent parfois que mes propos ressemblent au Bouddhisme ou à la Théosophie, à l'Hindouisme, au Taoisme ou d'autres entités religieuses, philosophiques ou spirituelles.

    Non, je ne suis adepte de rien.

    Je n'aime pas les mouvements de pensées qui sont des pensées de masse.

    Je n'aime pas les Maîtres à penser.

    Je n'aime pas les leaders, ni ceux qui les "leadérisent".  

    Je n'aime pas ceux qui aimeraient que je pense comme eux ou qui aimeraient en tout cas qu'en pensant comme eux, cette pensée, qui est leur, soit renforcée par mon adhésion.

    Je n'aime pas l'identification de l'individu à une pensée figée.

    Lorsque je parle d'éthique mondiale, il ne s'agit pas d'un mouvement de masse conduit par des individus érigés en Gourous, Maîtres à penser, Guides spirituels, Leaders charismatiques, Grand Eveilleur et autres dérives sectaires ou tout du moins adhésion à une soumission vénérée...Je parle d'individus ayant érigé en eux une conscience INDIVIDUELLE prenant forme dans les actes quotidiens et portant un regard aimant sur le phénomène vital, qu'il soit de la dimension de la sauterelle à celle de l'atmosphère en passant par l'être humain.

    Je pense que les consciences individuelles agissantes auront un impact plus sain que celui de masses constituées d'individus ayant trouvées dans l'adhésion inconditionnelle à des paroles de maîtres une forme et un rôle à tenir. J'ai davantage de reconnaissance et d'estime envers l'agriculteur du fin fond des Cévennes qui oeuvre à l'exploitation respectueuse de la terre qu'envers la masse suiveuse qui porte des banderoles derrière quelques personnalités "charismatiques"... L'un agit concrètement, les autres parlent.

    La question se pose de "l'utilité" de personnalités comme Krishnamurti, Swami Prajnanpad, Douglas Harding, Eckhart Tolle et autres "penseurs". Sont-ils ou étaient-ils engagés dans une voie active ou se contentaient-ils d'émettre des réflexions ? La parole peut-elle être considéré comme un acte utile ?

    Pour ma part, la réponse est claire. Ces gens sont des acteurs majeurs, des "agisseurs".

    D'une part, parce que la profondeur de leurs réflexions réclame une intensité similaire à celle d'une exploration, qu'ils y ont consacré leur vie entière et d'autre part, parce qu'ils ont contribué à une mise en actes chez leurs lecteurs ou auditeurs de ces réflexions, au regard justement, de l'extrême précision à laquelle ils sont parvenus. Il ne s'agissait pas de fumeuses discussions de bistrots ou de salons littéraires ou intellectuels mais d'un cheminement d'explorateur de conscience.

    A mon humble niveau, lorsque je passe parfois deux heures à écrire quelque chose d'à peu près sensé, j'éprouve une fatigue réelle, comme si j'avais effectivement marché intérieurement. Je serais totalement incapable d'imaginer ce qu'ont pu vivre Krishnamurti, C G jung, Aurobindo...

    De plus, ces "Penseurs Agissant" se sont bien souvent engagés dans des voies sociales afin de tenter d'apporter leur contribution à la communauté. Ils ne sont pas restés reclus dans leur solitude à explorer leur propre abîme. Ces gens étaient essentiellement tournés vers autrui sans pour autant chercher en aucune mesure à devenir gourou ou leader. Krishnamurti a rompu avec la société théosophique pour cette raison.Lui, comme beaucoup d'autres contribuaient à provoquer chez tous, non pas une adhésion à une pensée mais l'exploration de leurs propres pensées. C'est totalement différent.

    Tant que les humains chercheront à adhérer à un quelconque mouvement de masse, on sera toujours confronté à une société d'individus égarés en proie à l'angoisse des horizons. Il n'y a aucun panneau indicateur dans la voie spirituelle. En dehors des panneaux qu'on se fabrique soi-même et qu'il faut brûler derrière soi au risque de se retrouver englué dans une voie rassurante.

    Je n'appartiens à aucun mouvement, je ne cherche aucun panneau indicateur, je récuse toutes les pensées collectives. 

  • L'exemple de l'Islande

    "Si vous ne changez pas en vous-même, ne demandez pas que le monde change"

    http://www.wikistrike.com/article-revolution-loin-des-medias-l-islande-reecrit-entierement-sa-constitution-99142021.html

     

    Aussi incroyable que cela puisse paraître, une véritable révolution démocratique et anticapitaliste a lieu en Islande en ce moment même, et personne n’en parle, aucun média ne relaie l’information, vous n’en trouverez presque pas trace sur « Google » : bref, le black-out total. Pourtant, la nature des évènements en cours en Islande est sidérante : Un Peuple qui chasse la droite au pouvoir en assiégeant pacifiquement le palais présidentiel, une « gauche » libérale de remplacement elle aussi évincée des « responsabilités »  parce qu’elle entendait mener la même politique que la droite, un référendum imposé par le Peuple pour déterminer s’il fallait rembourser ou pas les banques capitalistes qui ont plongé par leur irresponsabilité le pays dans la crise, une victoire à 93% imposant le non-remboursement des banques, une nationalisation des banques, et, point d’orgue de ce processus par bien des aspects « révolutionnaire » : l’élection d’une assemblée constituante le 27 novembre 2010, chargée d’écrire les nouvelles lois fondamentales qui traduiront dorénavant la colère populaire contre le capitalisme, et les aspirations du Peuple à une autre société.


    Alors que gronde dans l’Europe entière la colère des Peuples pris à la gorge par le rouleau-compresseur capitaliste, l’actualité nous dévoile un autre possible, une histoire en marche susceptible de briser bien des certitudes, et surtout de donner aux luttes qui enflamment l’Europe une perspective : la reconquête démocratique et populaire du pouvoir, au service de la population.

     

    Musique: L'Islande nous souhaite "Bon courage"

     

    http://player.vimeo.com/video/12236680?title=0&byline=0&portrait=0

     

    Quand l’Islande réinvente la démocratie

    Le 16 décembre 2010 par Jean Tosti

    Depuis le samedi 27 novembre, l’Islande dispose d’une Assemblée constituante composée de 25 simples citoyens élus par leurs pairs. Son but : réécrire entièrement la constitution de 1944 en tirant notamment les leçons de la crise financière qui, en 2008, a frappé le pays de plein fouet.

    Depuis cette crise dont elle est loin d’être remise, l’Islande a connu un certain nombre de changements assez spectaculaires, à commencer par la nationalisation des trois principales banques, suivie de la démission du gouvernement de droite sous la pression populaire. Les élections législatives de 2009 ont amené au pouvoir une coalition de gauche formée de l’Alliance (groupement de partis composé des sociaux-démocrates, de féministes et d’ex-communistes) et du Mouvement des Verts de gauche. C’était une première pour l’Islande, tout comme la nomination d’une femme, Johanna Sigurdardottir, au poste de Premier ministre.

    Très vite, le nouveau gouvernement se trouve face à un problème épineux : le règlement aux Pays-Bas et au Royaume-Uni d’une dette de 3,5 milliards d’euros suite à la faillite d’Icesave, banque en ligne dont les opérations étaient tournées principalement vers ces deux pays. Sous la pression de l’Union européenne, à laquelle les sociaux-démocrates souhaiteraient adhérer, le gouvernement fait voter en janvier 2010 une loi autorisant ce remboursement, ce qui reviendrait, pour chaque Islandais, à débourser pendant huit ans une somme d’environ 100 euros par mois. Mais le président de la République refuse de ratifier la loi, dont le texte est alors soumis à un référendum. À plus de 93%, les Islandais votent contre le remboursement de la dette (6 mars), et depuis le problème reste en suspens.

    C’est dans ce contexte que l’Islande décide de modifier sa constitution, qui en fait n’a jamais été vraiment rédigée : lorsqu’en 1944 la république avait été proclamée, on s’était contenté de recopier dans les grandes lignes la constitution du Danemark, pays dont l’Islande dépendait depuis plusieurs décennies, en remplaçant simplement le terme de “roi” par celui de “président de la République”. C’est donc une nouvelle constitution qu’il s’agit d’écrire entièrement, et pour cela on a décidé de faire confiance au peuple souverain. Il y a eu d’abord un appel à candidatures (tout le monde pouvait se présenter à l’exception des élus nationaux, à condition d’avoir dix-huit ans révolus et d’être soutenu par au moins trente personnes) auquel ont répondu 522 citoyennes et citoyens. C’est parmi eux qu’ont été élus les 25 constituants.

    Ces derniers commenceront à se réunir à la mi-février et rendront leur copie avant l’été. Parmi les propositions qui reviennent le plus souvent, on peut noter la séparation de l’Église et de l’État, la nationalisation de l’ensemble des ressources naturelles et une séparation claire des pouvoirs exécutif et législatif.

    Certes, l’Islande n’est qu’un petit pays d’environ 320 000 habitants. Elle donne cependant là une belle leçon de démocratie aux grands États dont la France : songeons que, dans notre pays, la réforme constitutionnelle de 2008 a été entièrement rédigée à l’Élysée, et que les parlementaires ne l’ont adoptée qu’à deux voix près après avoir été soumis pendant des semaines à des pressions intolérables de la part du chef de l’État.

    (source: cadtm.org)


    Quand l’Islande réinvente la démocratie

     

    l’Assemblée constituante a été élue en novembre

    Un jour, il y a quelques mois, un anglais passant par Paris, rencontré à la librairie Lady Long Solo, nous alertait sur la révolution en Islande. Quelle révolution ? On n’en entend parler nulle part. Une rapide recherche google ne donne rien du tout, aujourd’hui, ni en associant le mot « révolution », ni même « crise », où l’on ne trouve que des détails sur la crise financière, effectivement à l’origine de cette révolution, qui a eu lieu en 2008, dans ce pays d’à peine plus de 300 000 habitants, classé au deuxième rang mondial sur l’indice du développement humain, l’IDH, derrière la Norvège, à la veille de cette crise, en 2006.

    Confronté alors à la faillite brutale du système bancaire, le peuple était descendu dans la rue. Du jamais vu au pays des jeysers d’eau chaude. La droite avait aussitôt dû céder la place à la gauche. Et, pour commencer, les banques avaient été nationalisées. Notre informateur anglais en avait entendu parler pour les projets législatifs de liberté totale pour internet, tels que des sites anglais pensaient à s’héberger là. Plus encore, il insistait pour parler d’une véritable révolution, sans pouvoir la décrire plus, mais s’étonnant qu’on n’en ait jamais entendu parler.

    Cherchant alors avec obstination, on a fini par voir des images du palais présidentiel assiégé par une foule qu’on qualifierait ici sans hésiter d’anarcho-autonome. En plus des drapeaux noirs, on pouvait deviner dans la foule une forte composante de citoyenneté de type écologiste. Et on comprenait que le pauvre malheureux flic, tout seul devant le palais présidentiel, ait rapidement dû se rendre sous la pression de la foule. Celle-ci, néanmoins pacifique, n’usait que de casseroles et autres objets bruyants, selon la méthode argentine du cacerolazo, qui a su s’avérer très payante aussi là-bas.

    Le président avait plié bagage. Un nouveau gouvernement s’était institué. Mais, quelques temps plus tard, celui-ci avait la mauvaise idée de proposer le remboursement de la dette des banques vis-à-vis du Danemark ou de la Grande Bretagne. Le peuple est de nouveau descendu dans la rue. Un référendum sur la question était imposé par volonté populaire, et une petite majorité de 93% rejetait l’accord prévu par les gentils gouvernants.
    Parmi les informations glanées, cette image saisissante de l’agora dans les bains publics chauds, où le peuple s’assemble tous les matins pour débattre de comment refaire le monde.

    Consécration de cette révolution, l’élection d’une Assemblée constituante, le 27 novembre 2010, événement peut-être plus considérable que la nuit du 4 août 1789 où était votée l’abolition des privilèges, dont on ne se serait pas aperçu sans la vigilance de Truks en vrac, de notre ami B.Bec, du Gers, relayant le CADTM, ou de Jean-Luc Mélenchon, qui trouve là une similitude avec ses propres thèses constitutionnalistes, mais ne semble pas voir plus loin que le bout de son nez anti-capitaliste.

    Merveille de la désinformation. Un événement aussi considérable qu’une véritable révolution démocratique, telle qu’on n’en a jamais vue en Europe, peut se produire sans que la presse, ni google, ne permettent d’en savoir quoi que ce soit. C’est sûr qu’à l’heure de la consolidation anti-démocratique que vivent la plupart des pays européens, l’exemple islandais ne fait pas vraiment l’affaire de nos régimes policiers, qui montrent là encore leur aptitude à verrouiller rigoureusement la conscience collective.

    On aimerait assurément en savoir plus sur cette révolution islandaise. Voilà des mois que Paris s’éveille rêve de téléporter sa rédaction pour un reportage approfondi au pays des chasseurs de baleines et d’utopie. S’immerger dans les bains chauds de la révolution démocratique fait certes envie, surtout vu du cœur de notre hiver sécuritaire.

    Il faut s’imaginer les 25 « simples citoyens » qui vont plancher sur la constitution idéale. Le souffle de l’humanité devrait se retenir. Où l’on verra probablement qu’il n’est pas difficile de faire mieux que toutes les figures de pseudo-démocraties qui se sont déclinées jusqu’ici sur les cinq continents.

    Cet article se voudrait un appel à qui aurait plus d’informations sur cette extraordinaire histoire islandaise. On peut m’écrire à: michelsitbon@gmail.com, et je relayerai avec plaisir. Un dossier sur la révolution islandaise tente de rassembler les articles qu’on peut trouver sur le sujet.

    (source: parisseveille.info) et les moutons enragés

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  • Point de rupture

    Pour qu'un changement de paradigme s'opère, les déséquilibres doivent s'étendre jusqu'à l'extrême. C'est la particularité la plus sombre de l'humanité. Rien ne se fera de façon volontaire. Je pense parfois à ce "nombre déclencheur" dont parle Rupert Sheldrake et qui compose sa théorie des champs morphiques.


    http://sechangersoi.be/4Articles/Sheldrake01.htm

    Articles A découvrir Nouveautés 

    DU CENTIEME SINGE AUX CHAMPS MORPHIQUES
    DE LA LEGENDE A L'HYPOTHESE SCIENTIFIQUE

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    Peut-être connaissez-vous déjà le phénomène du 100ème singe, cette observation par des scientifiques en Asie, dans les années '50, concernant la transmission de l'apprentissage d'une communauté de singes à d'autres communautés sans qu'il n'existe de moyen connu de communication entre les singes concernés. Si vous ne la connaissez pas, en voici une version glanée sur le net :
    http://www.naute.com/anecdotes/singe.phtml

    Ce phénomène étant controversé, en voici davantage sur le sujet afin d'étayer le phénomène en lui retirant son côté miraculeux et légendaire.

    Rupert Sheldrake, biologiste britannique, introduit le concept de champs morphiques dans son livre "La mémoire de l'univers", publié en français en 1989 aux Editions du Rocher.

    Sur son site, Rupert Sheldrake donne sa version du phénomène du centième singe (en anglais). Bien qu'il ne démente pas, il admet que le texte a été répété, modifié et interprété, et surtout beaucoup exagéré :
    http://www.sheldrake.org/Resources/faq/answers.html#monkeyl . Il donne en partie sa version à lui.

    La théorie de Sheldrake sur les champs morphiques corrobore en partie le phénomène du centième singe, en y apportant une hypothèse d'explication. Les conséquences possibles de cette théorie sur l'effet que nous pouvons avoir autour de nous par les propres changements que nous introduisons dans notre vie à un niveau individuel, peuvent porter à croire que notre responsabilité, au niveau de notre comportement individuel, donc l'importance de ce que nous faisons, pourraît être fondamentale pour parvenir à changer les mentalités et les comportements à plus grande échelle dans le monde, ou du moins, dans la communauté ou société dans laquelle nous vivons.

    Alors que nous avons coutume de penser que notre mémoire est localisée dans notre cerveau, que nos gênes sont responsables des caractères héréditaires et que nos pensées sont la conséquence uniquement de phénomènes chimiques et électriques siégeant dans le cerveau, Sheldrake postule qu'il en est autrement. Il ne présente pas son hypothèse comme "la" vérité, mais il en fait paraître le bon sens et propose diverses manières d'étudier le phénomène afin d'étayer ce qu'il exprime.

    Selon lui les lois de la nature ne sont pas "universelles" et "immuables". Elles évoluent depuis toujours, même les lois qui concernent les phénomènes physiques et chimiques les plus élémentaires.

    Au delà du contexte scientifico-historique qui occupe une grande part de l'ouvrage, Rupert Sheldrake fait comprendre ce phénomène d'évolution suivant le principe de la chréode.

    Imaginez-vous un plan de sable légèrement incliné. Posez-y une bille dans la partie supérieure, elle va se mettre à rouler en traçant un sillon dans le sable lors de sa descente. Posez-y une seconde bille. Si sa trajectoire rencontre le sillon tracé par la première bille, il est très probable qu'elle va également l'emprunter, et l'élargir. Posez-y une troisième bille, la probabilité de la répétition du phénomène sera encore plus importante. Après la centième bille, il deviendra carrément improbable qu'elle ne prenne pas le sillon creusé par toutes les billes qui l'auront précédée. Cela étant, il n'est pas impossible non plus qu'un nouveau sillon soit tracé par une bille n'ayant pas emprunté le sillon déjà largement creusé, et qu'avec le temps d'autres billes empruntent ce second sillon, en l'élargissant, l'approfondissant, quitte à rendre le second sillon plus facilement praticable que le premier, voire à finir par empêcher l'accès au premier sillon.
    Selon Sheldrake, tous les phénomènes de la nature fonctionnent selon le principe de la chréode. C'est à dire qu'une fois un phénomène apparu : plus il se produit, plus il est probable qu'il se reproduise. Et sur une échelle de temps et de répétitions en milliards d'années et en milliards d'opportunités, certaines lois de la nature apparaissent comme immuables.
    De la sorte on peut parler d'une forme de mémoire de tout ce qui se passe dans la nature. Les phénomènes se reproduisent tels qu'ils se sont déjà produits, parce qu'ils se sont déjà produits. Et le fait qu'ils se reproduisent augmente encore la probabilité qu'ils se reproduiront de la même manière. Et cela concerne tant les atomes et molécules, que les cellules, les animaux, les humains, les planètes, étoiles et galaxies.

    Cependant, la chréode telle qu'expliquée ci-dessus, n'est qu'une image, ou métaphore de la réalité, mais qui peut en faciliter la compréhension.
    Selon Sheldrake, cette mémoire, représentée par la chréode, est contenue dans les champs morphiques.
    Le champ morphique n'est pas matériel. A l'heure actuelle il n'est pas mesurable. Et il fonctionne un peu à l'instar des champs magnétiques ou gravitationnels. Il contient donc de l'énergie, mais n'est pas constitué de matière (atome, électrons, etc.).
    Ce serait donc ce champ qui contient la mémoire (représentée par la chréode), et permettrait à toute entité (des particules atomiques aux galaxies, en passant par les êtres vivants) de se développer à l'image de celles qui lui ont précédé.

    Rupert Sheldrake donne à ce phénomène de répétition qui constitue une mémoire, le nom de résonance morphique.
    "Sheldrake montre au fil des pages que l’héritage du code génétique est insuffisant pour comprendre la structure et le comportement du vivant : «Alors que la théorie mécaniste impute la plupart des phénomènes héréditaires à l'héritage génétique rassemblé dans l'ADN, l'hypothèse de la causalité formative présume que les organismes héritent également des champs morphogénétiques d'organismes antérieurs appartenant à la même espèce. Ce second type d'héritage intervient via la résonance morphique et non via les gênes. L'hérédité inclut donc tant l'héritage génétique que la résonance morphique des formes antérieures semblables ». "extrait du site "philosophie et spiritualité" :

    http://sergecar.club.fr/cours/theorie8.htm

    "Ainsi, une semence de hêtre prendra-t-elle, au cours de son développement, la forme, les structures génétiques empreintes des habitudes caractéristiques d’un hêtre. Elle est apte à se comporter de la sorte parce qu’elle hérite sa nature des hêtres précédents ; mais cet héritage n’est pas une simple question de gênes chimiques, il dépend aussi de la transmission des habitudes de croissance et de développement d’innombrables hêtres ayant existé par le passé." extrait du site : forum de philosophie et d'ethnologie de la culture :
    http://www.avs-philo-ethno.org/texte.php?id=107 dont cette page n'est plus accessible actuellement.

    Dans le cadre de l'évolution d'un individu (par exemple) il parle aussi d'auto-résonance morphique. Nous aurons tendance à répéter nos comportements, en fonction de ceux que nous avons déjà eus.
    Et dans ce cadre par exemple, "nous pouvons aussi comprendre la somatisation des processus conscients et inconscients dans le corps. Une souffrance intérieure profonde longtemps portée finit par marquer son empreinte dans la structure organique. Nous portons le visage de nos passions et la trace de notre passé."
    "extrait du site "philosophie et spiritualité" :

    http://sergecar.club.fr/cours/theorie8.htm

    Rupert Sheldrake illustre de plusieurs manières le concept des champs morphiques. Représentons-nous comme une télévision : l'appareil correspond à notre corps, et le contenu des émissions télévisées n'est que l'effet sur l'appareil des ondes électro-magnétiques que capte l'appareil. En modifiant l'appareil, il se peut que l'on perde la possibilité de capter une émission, ou que l'on capte une autre chaîne, mais cela ne veut pas dire que les ondes électromagnétiques ont disparu de l'espace.
    De la même manière, notre cerveau a accès à la mémoire que représente les champs morphiques qui nous correspondent. S'il y a une altération du cerveau, il n'y a pas forcément altération de la qualité de la mémoire. Et si celle-ci devait être affectée, bien souvent cela n'est que passager. Il n'a jamais été possible de localiser physiquement la mémoire dans le cerveau.

    Dans le même registre de métaphore, Rupert Sheldrake se réfère plusieurs fois à la comparaison entre
    - l'être humain : son cerveau, son esprit, son corps et sa mémoire,
    - et l'ordinateur : matériel et logiciel.
    Si l'on considère le matériel (hardware) en parallèle au corps de l'homme et à son cerveau, on pourraît comparer le logiciel ou programme (software) aux champs morphiques. Dans ce cadre, nos gênes ne contiennent pas l'information ayant trait à notre mémoire, mais ce sont eux qui rendent l'utilisation du champ morphique possible afin de choisir les comportements adaptés. Et lorsque la partie hardware disparaît, elle n'entraîne pas la disparition de la partie software. Qu'une molécule soit décomposée, qu'une cellule soit détruite, ou qu'un personne décède, les champs morphiques qui leur correspondent ne disparaissent pas.

    Pour mieux concevoir la réalité possible des champs morphiques, Rupert Sheldrake relate aussi plusieurs témoignages et expériences. Le témoignage le plus parlant dont il fait écho dans son livre est celui des mésanges perceuses de bouteilles de lait (livrées chez les particuliers devant leur porte). En voici la description, tirée du site "philosophie et spiritualité" : http://sergecar.club.fr/cours/theorie8.htm (et en partie extraite du livre de Sheldrake).

    "Le cas des mésanges bleues est très documenté et il met en évidence la propagation cette fois-ci spontanée d'une habitude, celle de l’ouverture des bouteilles de lait par les oiseaux. Le phénomène a été enregistré pour la première fois en 1921 à Southampton (UK) et on a suivi sa propagation de 1930 à 1947. Or on sait que les mésanges ne s’aventurent pas à plus de quelques kilomètres de leur nid. La propagation de ce comportement s’est pourtant nettement étendue et accélérée dans le temps. De plus, en Suède, au Danemark et en Hollande, les bouteilles de lait avaient disparu pendant la guerre. Elles ne revinrent qu’en 1947, 1948. Il est tout à fait improbable que des mésanges ayant appris cette habitude aient survécu à la durée de la guerre. ....Tout ce que l’on peut dire, c’est que les habitudes acquises par certains animaux viennent faciliter l’acquisition des mêmes habitudes par d’autres animaux de la même espèce et cela même en l’absence de tout moyen de connexion physique connu. "

    Une autre anecdote racontée par Sheldrake dans son livre est celle des nouvelles cristallisations. Pour obtenir un nouveau produit chimique en laboratoire, il faut souvent énormément de temps pour y arriver. Les chimistes y travaillent des mois, voire des années. Ils obtiennent alors un nouveau produit, une nouvelle cristallisation. Selon l'hypothèse de Sheldrake, celle-ci n'ayant jamais existé au préalable ne peut pas fonctionner par résonance morphique pour être formée. Or il s'avère que plus on parvient à réussir et reproduire cette cristallisation, plus celle-ci est obtenue facilement ensuite, ce qui correspond à l'idée de la chréode. Plus la fréquence de cristallisation augmente, plus l'influence du champ morphique est grande pour faciliter les cristallisations suivantes. Les chimistes ont pourtant tout un folklore à ce sujet : ils voyagent avec le fruit de leurs efforts entre les laboratoires à travers le monde, pour faciliter la réaction chimique grâce aux fragments de cristaux qu'ils utilisent comme semence pour de nouvelles cristallisations. D'autres pensent que "des semences voyagent dans l'atmosphère sous forme de particules de poussières microscopiques. Si la résonance morphique joue un rôle dans ce phénomène, plus les nouveaux composés seront cristallisés, plus leur cristallisation deviendra aisée dans le monde entier, même en l'absence de chimistes migrateurs et de toute particule de poussière dans l'atmosphère."
    extrait du livre de Rupert Sheldrake, éditions du Rocher, p. 140

    De la même manière, Rupert Sheldrake cite les bancs de poissons. La rapidité de réaction (lors de la présence d'un prédateur par exemple) pour changer de direction, ou pour dissoudre le banc, est bien trop grande pour qu'il puisse y avoir communication entre les poissons. L'existence d'un champ morphique unique utilisé par chacun des poissons du banc, rend ce phénomène explicable. Les poissons réagissent "comme un seul homme". Idem pour les bandes d'oiseaux.

    Rupert Sheldrake fait également le lien avec l'inconscient collectif si cher à Jung. Comme pour les bancs de poisson, l'être humain a accès non seulement aux champs morphiques qui lui sont personnels, mais il a accès aux champs de groupes, de société, et de son espèce. Les champs fonctionnent en hiérarchie gigogne, s'emboîtant les uns dans les autres. Nous héritons chacun ainsi d'une mémoire collective renfermant les caractéristiques de nos ascendants, de notre groupe social, ainsi que de notre espèce. Cela va influencer notre évolution et nos comportements. "Tous les humains puisent dans une mémoire collective, qu’à leur tour, ils contribuent à façonner."
    extrait du site : forum de philosophie et d'ethnologie de la culture

    http://www.avs-philo-ethno.org/texte.php?id=107 dont cette page n'est plus accessible actuellement.

    "D’un côté « nous avons nos souvenirs propres parce que nous sommes plus similaires à nous-même dans le passé qu’à quiconque ; nous sommes soumis à une autorésonance hautement spécifique de nos états antérieurs ». Mais parce qu’ici la théorie abandonne délibérément le concept de séparation, il y a aussi une mémoire collective. « Nous sommes aussi similaires aux membres de notre famille, aux membres des groupes sociaux auxquels nous appartenons, aux individus qui ont le même langage et la même culture que nous, et dans une certaine mesure, à tous les êtres humains, passés et présents ». Nous sommes influencés par les schèmes mentaux d’autrui, lesquels forment une matrice de pensée collective qui est activée via la résonance morphique."
    "extrait du site "philosophie et spiritualité" :

    http://sergecar.club.fr/cours/theorie8.htm

    Nous évoluons également en fonction des champs morphiques des générations qui nous ont précédés. L'hérédité n'est à ce titre pas uniquement "génétique", mais nous portons avec nous les habituations de nos parents, grands-parents, etc.

    Sheldrake, depuis la parution du livre, a continué ses recherches, et propose aussi via son site
    Site de Rupert Sheldrake :

    http://www.sheldrake.org/homepage.html (voir : experiments online)
    de participer à des expériences de manière à apporter de l'eau au moulin de sa théorie. Suite à l'écriture de ses livres, il a aussi reçu des témoignages par milliers qui permettent d'étayer son propos et d'avancer dans sa recherche.
    L'accueil de sa théorie dans le monde scientifique s'est heurtée bien sûr aux plus orthodoxes, qui semblent être moins majoritaires que par le passé. Il faudra sans doute encore un peu de temps pour qu'elle soit plus ouvertement approuvée, alors que le public, lui, n'a pas fait la fine bouche et le soutient de toutes parts.

    ***************************************

    Les mentalités sont en train de changer autour de nous, et cela devient particulièrement visible en ce moment.
    Et si nous avons la conscience de la responsabilité individuelle que nous avons dans ces changements, il est probable que nos changements, au-delà des conséquences de nos comportements, sont aussi potentiellement porteurs de changements autour de nous, sans que nous ayons rien à faire de plus que changer, évoluer, ouvrir nos consciences.
    Car une fois qu'un apprentissage est appris par un nombre suffisant d'individus, il se généralise rapidement dans toute la population.
    Cela peut motiver à apprendre et tenter d'évoluer toujours davantage, pour soi-même bien entendu, pour assumer notre responsabilité de ne plus participer au désastre, mais sans doute aussi et surtout, pour être un facteur de changement plus rapide à plus grande échelle.

    Texte rédigé par Claire De Brabander

    ******************

    Il est possible d'en lire davantage sur la théorie des champs morphiques ou d'autres compléments d'hypothèses, témoignages et expériences effectués ou relatés par Sheldrake sur les sites suivants : 

    le site de Rupert Sheldrake :
    http://www.sheldrake.org

    la page du site de Rupert Sheldrake qui parle des champs morphiques :
    http://www.sheldrake.org/Articles&Papers/papers/morphic/morphic_intro.html

    un interview de Rupert Sheldrake réalisé par Patrice Van Eersel pour le magazine "Nouvelles Clés" :
    http://www.nouvellescles.com/article.php3?id_article=806

    ainsi que deux sites desquels sont tirés quelques extraits dans le présent texte :
    Le site du "forum de philosophie et d'ethnologie de la culture"

    http://www.avs-philo-ethno.org/texte.php?id=107 dont cette page n'est plus accessible actuellement.

    Le site "philosophie et spiritualité"
    http://sergecar.club.fr/cours/theorie8.htm


    On peut ajouter à cette réflexion celle de Teilhard de Chardin concernant la "NOOSPHERE"

    http://fr.wikipedia.org/wiki/Noosph%C3%A8re

    Ce mot, développé par Pierre Teilhard de Chardin dans Le Phénomène humain6 a été inventé par Vladimir Vernadski7. C'est la représentation d'une couche de faible épaisseur entourant la Terre (qu'on comparerait presque aujourd'hui à un biofilm) qui matérialiserait à la fois toutes les consciences de l'humanité et toute la capacité de cette dernière à penser.

    Vernadsky a formé ce néologisme sur le modèle du mot « biosphère » (couche du vivant, bios, entourant la terre), en y substituant la racine noos (intelligence, esprit, pensée). Ce néologisme est en lui-même une proposition cosmologique, exprimant cette idée qu’une couche de pensée et de conscience, une « nappe pensante », envelopperait la surface de la terre de la même façon que la biosphère.

    « [C]’est vraiment une nappe nouvelle, la « nappe pensante », qui, après avoir germé au Tertiaire finissant, s’étale depuis lors par-dessus le monde des Plantes et des Animaux : hors et au-dessus de la Biosphère, une Noosphère8. »

    Teilhard de Chardin a développé sa vision d’une humanité en voie de « planétisation9 » (ce qui est ni plus ni moins qu'un terme équivalent au plus actuel terme « mondialisation »). C'est la vision d'une humanité dont l’imaginaire, les pensées, les idées, les découvertes, en d'autres termes le psychisme ou la conscience tissent progressivement une « noosphère » de plus en plus serrée et dense, génératrice de toujours plus de conscience, et d’une conscience de plus en plus solidaire, de plus en plus planétaire. Par « noosphère », Teilhard désigne le milieu, ou la dimension, de pensée et de conscience qui, depuis le début de la vie sur terre a progressivement évolué pour finir par envelopper et imprégner toute la biosphère, à la manière d’une autre atmosphère, faite cette fois non pas d’oxygène, mais de psychisme. Parce que l’humanité se multiplie et se répand sans cesse à la surface d’une terre limitée géographiquement, Teilhard voit les humains se resserrer les uns sur les autres, et cette densification de l’humanité équivaut pour lui à une densification de la noosphère, donc une intensification de la conscience. Cette densification progressive amène à un retournement sur elle-même de la conscience, phénomène que Teilhard appelle « le Réfléchi10 ». Il voyait l’humanité prendre progressivement conscience d’elle-même et de ses possibilités sur une terre rendue de plus en plus petite sous l’effet de la croissance d’une population humaine toujours plus serrée sur elle-même, donc plus « échauffée » psychiquement, donc plus consciente d’elle-même : vision prophétique de la mondialisation, qu’il appelle « planétisation ».

    La noosphère se juxtapose à la lithosphère (la masse inerte), à la biosphère (la masse vivante) et à la sociosphère (ensemble des relations humaines et/ou écologiques) et elle englobe l'ensemble de l'activité intellectuelle de la Terre : il s'agit d'une sorte de « conscience collective de l'humanité » qui regroupe toutes les activités cérébrales et mécaniques de mémorisation et de traitement de l'information11 .

    À partir du milieu du XXe siècle, les géographes commencent à considérer les éléments culturels et immatériels en plus des réalités matérielles. Pierre Deffontaines écrit ainsi que « le plus grand événement dans l’histoire géographique de la Terre, ce n’est pas tel plissement de montagne, tel déplacement de mer, telle modification de climat, c’est l’apparition avec l’homme d’une sorte de sphère spéciale, plus extraordinaire que la pyrosphère, l’hydrosphère, l’atmosphère ou même la biosphère; ce qu’on pourrait appeler la sphère pensante, que le R. P. Teilhard de Chardin a appelé la « noosphère », enveloppe immatérielle sans doute, qui cependant s’inscrit matériellement dans le paysage12 »

    Les vulgarisateurs scientifiques Jack Cohen et Ian Stewart s'approchent de ce concept avec un nom plus médiatique d’extelligence. Le cerveau des hommes fait partie de l'extelligence, mais aussi toutes les infrastructures créées par lui qui participent au traitement comme au stockage de l'information : villes, bibliothèques, infrastructure politique, culture, réseaux de communication.

    En revanche, la noosphère est née grâce à la montée de conscience des individus au fur et à mesure de leur maturation, depuis l'apparition du vivant jusqu'à nos jours. Sa manifestation la plus probante est la naissance d'organisations « humanisantes » telles que les lois, les notions d'éthique, la politique, la culture, les organisations humanitaires, et aussi comme le dit Werber, la multiplication dans l'histoire, d'inventions faites aux mêmes moments mais à différents endroits.


    J'ai du mal à croire que ce type d'évolution soit graduelle et surtout volontaire. Je crains que le paradigme soit trop profondément creusé pour qu'une masse suffisante d'individus puisse s'en extraire et parvienne à creuser un nouveau sillon, jusqu'à ce ce nombre déclencheur qui verrait un nouveau paradigme s'installer.

    Il faudra un évènement. Un point de rupture.

    Je m'interroge malgré tout sur la possiblité d'un effet indiscernable venant de la multitude d'individus isolés et agissant dans cette autre conscience. Hors du moi dérivé. Est-il envisageable que les effets conjugués de leur engagement spirituel finisse par créer un champ de conscience unifiée, sans qu'ils n'aient cherché à le faire, comme une énergie aimantée qui finirait par créer une masse suffisante pour quitter le sillon archaïque. Rien ne se ferait de façon volontaire. Il s'agirait d'une évolution déclenchée par l'assemblage spirituel...Un champ morphique...

    Gurdjieff disait qu'il suffirait de cent hommes Eveillés pour faire basculer l'Humanité dans l'Eveil...


    Monsieur Gurdjieff

    par Julius Evola (publié une première fois dans: Roma, 16 avril 1972; première publication de cette traduction française par Gérard Boulanger: L'age d'or, printemps 1987)

    Il est rare qu'apparaissent à notre époque - où ils courent le risque d'être confondus avec certains mystificateurs - des personnages qui nous fassent toucher du doigt de façon inquiétante ce à quoi s'est réduit, métaphysiquement parlant, l'existence de la grande majorité des gens.

    A cette catégorie appartient, sans l'ombre d'un doute, le "mystérieux Monsieur Gurdjieff", à savoir Gerogej Ivanovitch Gurdjieff. Le souvenir de sa présence et de l'influence qu'il exerça est encore vif, bien qu'il soit mort depuis de nombreuses années, comme en témoignent les ouvrages qui lui ont été consacrés et même les romans où il figure sous un autre nom. Louis Pauwels, l'auteur du Matin des magiciens, a pu écrire un volume de plus de cinq cents pages, qui a fait l'objet de deux éditions successives, où il a recueilli un grand nombre de documents - articles, lettres, souvenirs, témoignages - le concernant. De fait, l'influence de Gurdjieff s'étendit aux milieux les plus divers: le philosophe Ouspensky (qui, á partir de sa doctrine, écrivit un ouvrage intitulé Fragments d'un enseignement inconnu, ainsi qu'un autre, L'évolution possible de l'homme, dont une traduction italienne est annoncée), les romanciers A. Huxley et A. Koestler, l'architecte "fonctionnaliste" Frank Lloyd Wright, J.-B. Bennet, disciple d'Einstein, le docteur Wakey, l'un des plus grands chirurgiens new-yorkais, Georgette Leblanc, J. Sharp, fondateur de la revue The New Statesman: tous eurent avec Gurdjieff des contacts qui laissèrent des traces.

    Notre personnage apparut pour la première fois à Saint-Pétersbourg, peu avant la Révolution d'Octobre. On ne sait pas grand chose de ce qu'il fit avant: lui-même se bornait à dire qu'il avait voyagé en Orient à la recherche des communautés qui gardaient en dépôt les restes d'un savoir transcendant. Mais il semblerait qu'il ait été également le principal agent tsariste au Tibet, qu'il avait quitté pour se retirer dans le Caucase où il fut, étant enfant, le condisciple de Staline. En France, et ensuite à Berlin, en Angleterre et aux États-Unis, il s'était consacré à l'organisation de cercles qui suivaient ses enseignements, cercles intitulés "groupes de travail". Un éditeur français qui se retirait des affaires lui offrit en 1922 la possibilité de faire du château d'Avon, près de Fontainebleau, sa "centrale" où, dans un premier temps, il créa quelque chose qui tenait de l'ésole et de l'ermitage. Parmi les bruits qui circulent à son propos, certains concernent le domaine politique. Gurdjieff aurait eu des contacts avec Karl Haushofer, le fondateur bien connu de la "géopolitique", qui occupa une place de premier plan dans le IIIe Reich, et l'on prétend même que ces relations auraient présidé au choix de la croix gammée comme emblème du national-socialisme, dont la rotation s'effectue non pas vers la droite, symbole de la sagesse, mais vers la gauche, symbole de la puissance (comme ce fut effectivement le cas).

    Quel message annonçait Gurdjieff? Un message pour le moins déconcertant. Peu d'hommes "existent", peu ont une âme "immortelle". Certains d'entre eux possèdent le germe, lequel peut être développé. En règle générale, on ne possède pas un "Moi" de naissance: il faut l'acquérir. Ceux qui n'y parviennent pas se dissolvent à leur mort. "Une infime partie d'entre eux sont parvenus à avoir une âme."
    L'homme de la rue n'est qu'une simple machine. Il vit à l'état de sommeil, comme hypnotisé. Il croit agir, penser, alors qu'il est "agi". Ce sont des impulsions, des réflexes, des influences de tous ordres qui agissent en lui. Il n'a pas d'"etre". Les manières de Gurdjieff n'avaient rien de délicat: "Vous pas comprendre, vous idiot complet, vous merdité", disait-il souvent dans son mauvais français à ceux qui l'approchaient. De Katherine Mansfield, morte lors d'un séjour dans son ermitage d'Avon en quête de la "voie", Gurdjieff déclara: "Moi pas connaître", voulant signifier par là que la morte n'était rien, qu'elle n'"existe" pas.

    La vie ordinaire est celle d'un individu continuellement aspiré, ou "sucé", enseignait Gurdjieff. "Je suis aspiré par mes pensées, par mes souvenirs, mes désirs, mes sensations. Par le beefsteak que je mange, la cigarette que je fume, l'amour que je fais, le beau temps, la pluie, cet arbre, cette voiture qui passe, ce livre." Il s'agit de reágir. De s'"éveiller". Alors naîtra un "Moi" qui, jusque-là, n'existait pas. Alors il apprendra à être, à être dans tout ce qu'il fait et ce qu'il ressent, au lieu de ne représenter que l'ombre de lui-même. Gurdjieff appelait "pensée réelle", "sensations réelle", etc., ce qui se manifeste selon cette dimension existentielle absolument nouvelle que la majorité des gens ne peuvent même pas imaginer. Et il distinguait également chez chacun l'"essence" de la "personne". L'essence constitue sa qualité authentique, tandis que la personne n'est que l'individu social, construit de toutes pièces, et extérieur. ces deux éléments ne coïncident pas: on rencontre des gens dont la "personne" est développée alors que leur "essence" est nulle ou atrophiée - et vice versa. Dans notre monde, le premier cas prévaudrait: celui d'hommes et de femmes dont la "personne" est exacerbée jusqu'à la démesure mais dont l'"essence" est à l'état infantile - quand elle n'est pas totalement absente.

    Ce n'est pas le lieu ici d'évoquer les procédés indiqués par Gurdjieff pour s'"éveiller" pour s'ancrer en l'"essence", pour se créer un "être". Quoi qu'il en soit, le point de départ serait la reconnaissance pratique, expérimentale, de sa propre "inexistence", cet état quasiment somnambulique, le fait d'être "sucé" par les choses, par nos pensées et nos émotions. C'est également à cela que servait la "méthode du désordre": mettre sans dessus dessous la "machine" que l'on est pour prendre conscience du vide qu'elle cache. Il ne faut pas s'étonner si certains de ceux qui ont suivi Gurdjieff dans cette voie sont allés au devant de crises extrêmement graves, bouleversant leur équilibre mental au point de prendre la fuite ou de se rappeler avec terreur de pareilles expériences oú ils avaient eu quasiment l'impression de vivre la mort. Quant à ceux qui ont résisté à l'épreuve et persisté dans le "travail sur soi" auprès de Gurdjieff, ils parlent d'un incomparable sentiment de sécurité et d'un nouveau sens donné à leur existence.
    Il semblerait que Gurdjieff exerçait sur quiconque l'approchait, de façon presque automatique et sans qu'il le veuille, une influence qui pouvait avoir des effects positifs ou délétères selon les cas. Il est hors de doute qu'il possédait quelques facultés supranormales. Ouspensky raconte qu'en recourant à une science apprise en Orient, et dont en Occident on ne connaît "qu'une partie insignifiante sous le nom d'hypnotisme", Gurdjieff pouvait, grâce à certaines expériences, séparer l'"essence" de la "personne" chez un individu donné - faisant éventuellement apparaître l'enfant ou l'idiot qui se cachait derrière quelqu'un d'évolué et de cultivé ou, inversement, une "essence" très différenciée en dépit de l'inexistence de manifestations extérieures.

    Parmi les témoignages recueillis par Pauwels, il en est un particulièrement piquant relatif au pouvoir, attribué également en Orient à certains yogis (et évoqué par un auteur aussi digne de foi que Sir John Woodroffe), de "rappeler la femme à la femme". Celui qui rapporte l'anecdote se trouvait á New York, dans un restaurant, en compagnie d'une jeune femme écrivain très sûre d'elle-même à laquelle il montra le "fameux" Gurdjieff, assis á une table voisine. La jeune femme le dévisagea avec un air de supériorité affiché mais, quelque temps après, elle se mit à pâlir et sembla sur le point de défaillir. Ceci ne manque pas d'étonner son compagnon, qui n'était pas sans connaître sa grande maîtrise d'elle-même. Plus tard, elle lui avoua ceci: "C'est ignoble! J'ai regardé cet homme et il a surpris mon regard. Il m'a alors dévisager froidement et, à ce moment-là, je me suis sentie fouaillée intimement avec une telle précision que j'ai éprouvé l'orgasme!"

    Gurdjieff se contentait de quelques heures de sommeil: on l'appelait "celui qui ne dort pas". Il alternait un mode de vie quasiment spartiate avec des banquets d'une opulence russo-orientale disparue depuis longtemps. En 1934, il fut victime d'un accident d'automobile très grave: il resta trois jours dans le coma mais reprit connaissance aussitôt et parut avoir rajeuni, comme si le choc physique, au lieu de léser son organisme, l'avait galvanisé. De nombreuses choses de ce genre se racontent sur son compte: nous en avons nous-même entendues directement, par la voix de quelqu'un qui fut un de ses proches et dirigea au Mexique un des "groupes de travail" évoqués plus haut. Bien entendu, un processus de "mythification" est inévitable dans des cas de ce genre, et il n'est pas aisé de démêler la réalité de l'imaginaire. Gurdjieff n'a quasiment rien laissé comme écrits et ce qu'il a publié est d'une qualité assez médiocre, mais il est extrêmement fréquent que celui qui est "quelqu'un" n'ait ni les qualités ni la préparation pour être écrivain: il donne un enseignement direct et exerce une influence. Comme nous l'avons dit, à part le recueil de témoignages publié par Pauwels sous le titre Monsieur Gurdjieff, il revint à Ouspensky d'écrire sur ses enseignements.

    Gurdjieff mourut à l'âge de soixante douze ans, en pleine possession de tous ses moyens et en disant ironiquement à ceux de ses disciples qui l'assistaient: "Je vous laisse dans de beaux draps!" Aujourd'hui encore, il ne cesse pas d'être cité et, comme on l'a dit, ici et là en Angleterre, en France et en Afrique du Sud, les restes des groupes qui s'étaient constitués sous son influence subsistent.

    www.geocities.com/capitolhill/1404/gurdjieff.html

    www.gurdjieff.org pour en savoir plus sur G. Gurdjieff

  • L'huni-manité

    Le paradigme du moi dérivé a conduit l'humanité à explorer son inhumanité. Il reste donc pour les millénaires à venir à découvrir "l'huni-manité" avant qu'il ne soit trop tard.

     

    Aucune philosophie n'a permis d'établir durablement et à l'échelle planétaire une conscience du flux vital et de la nécessité absolue d'oeuvrer à la préservation de la Vie. Les philosophies se sont contentées d'explorer le champ humain, cette conscience égocentrée. Tout le mal est là. Ce raisonnement, qu'il soit cartésien, existentialiste, nihiliste, matérialiste, déterministe, marxiste ou autre n'aura été qu'une succession de conflits intellectuels étant donné que rien de tout ça n'aura été capable de contrer cette vision du moi encapsulé.


    http://www.cles.com/entretiens/article/de-l-inhumanite-353

     

    Michel-Antoine Burnier

    De l’inhumanité

    Pour Michel-Antoine Burnier, politologue, journaliste, écrivain, ami de longue date et conseiller personnel de Bernard Kouchner - jusqu’à la nomination de ce dernier au poste de gouverneur du Kosovo -, l’inhumanité se définit par rapport à l’idée que l’on se fait de l’humain. « Or, notre idée de l’homme, dit Burnier, est très récente. Soumis à nos critères actuels d’indignation morale, la quasi-totalité des grands hommes de l’histoire - y compris les savants et les philosophes - seraient aujourd’hui en prison pour barbarie. »

    Paradoxe suprême : c’est l’épouvantable succession de génocides du XXe siècle qui nous aurait fait le plus progresser en humanité.

    Privilège redoutable de la condition humaine : elle n’est jamais acquise. On n’est jamais tout à fait humain. Pourquoi, sinon, prendrait-on la peine de préciser, parlant d’une personne particulièrement subtile et bonne : « C’est quelqu’un de vraiment très humain » ? Et pourquoi déplorerait-on, hélas trop souvent, l’inhumanité de tel ou telle de nos congénères ?

    Être humain, c’est un processus, ce n’est pas un état. Cela se gagne jour après jour.

    Cela se découvre, se révèle, se conquiert. Et c’est, oui, une singularité inouïe, un privilège d’espèce. Si nous avons, hélas de plus en plus souvent, à déplorer l’inanimalité de telle poule ou de tel porc - grandis en batterie, exécutés en série et finalement jaugés dans nos assiettes -, c’est parce que ces malheureuses bêtes ont été happées par notre industrieuse inhumanité. Pour parler de ce sujet aux contours parfois dangereusement nébuleux, nous avons pris un homme concret. Formé à la philosophie et aux sciences politiques, auteur de nombreux essais, romans et parodies, Michel-Antoine Burnier, qui fut successivement rédacteur en chef de l’Evénement d’Emmanuel d’Astier, d’Actuel et conseiller de l’Express, s’est aussi beaucoup intéressé à l’histoire. Nous avions d’autant plus envie de l’interroger sur la notion d’inhumanité qu’il est, depuis plus de trente ans, l’ami et le conseiller d’un homme qui n’a cessé de se jeter à corps perdu, sur le terrain, contre les pires irruptions d’inhumanité de l’histoire présente : Bernard Kouchner, fondateur de Médecins sans frontières et de Médecins du monde. Aussi est-ce un peu la philosophie du fameux « devoir d’ingérence contre l’inhumanité » qu’en interviewant Michel-Antoine Burnier, nous sommes allés interroger.

    Nouvelles Clés : « Les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droit »... On peut dire que le programme central de la Révolution .française, désormais censé s’appliquer à six milliards d’individus, demeure dramatiquement inachevé. Nous le savons bien, à la fin du siècle de la décolonisation et de la Croix-Rouge internationale, mais aussi de la Shoah et du Goulag. On ne naît pas humain, dit-on, on naît comme un « projet humain » et on ne devient éventuellement humain que dans des circonstances très particulières. Lesquelles ?

    Michel-Antoine Burnier : J’ai tendance à penser que Michel Foucault n’a pas complètement tort : l’homme, au sens où nous l’entendons, est une invention récente, puisqu’il suppose un individualisme réel, une notion de la liberté, la capacité de reconnaître son semblable comme humain et un minimum d’organisation sociale, à la fois structurée et relâchée, pour que tout cela fonctionne. Bref, il faut les fondements de notre civilisation. Les autres grandes civilisations, de l’Indus à l’Égypte des Ptolémée, de Rome à Cordoue, de la Chine à Byzance, sont parvenues au même degré de développement que la nôtre à l’époque de la Renaissance. Mais elles n’ont pas donné lieu à ce que nous appelons l ’homme aujourd’hui, c’est-à-dire à l’humanisme. Elles en sont restées à des conceptions autoritaires et collectives du comportement, qui ne servent ni l’invention ni le développement, puis sont entrées en décadence. La civilisation occidentale, démarrant d’un socle commun à toutes ces grandes civilisations, a développé une forme particulière qui lui a permis d’accéder à un stade ultérieur. Toutes les autres se sont arrêtées à un moment donné ; la seule qui, parvenue au même point, a rebondi sur autre chose, c’est l’Europe de la Renaissance. Ce n’est pas un phénomène national. Il est né en Italie, mais a grandi aussi en Europe du Nord, en France, à Prague, à Londres, etc. Ce que nous appelons aujourd’hui inhumanité est un comportement qui va contre ce courant de base qui fonde notre civilisation à partir du XIV" ou du XV" siècle. Si l’on prend toutes les civilisations antérieures à la nôtre, les comportement inhumains sont absolus et ne paraissent pas particulièrement scandaleux. La cruauté romaine, pourtant terrible, ne révulse pas grand monde, en tout cas ni les moralistes ni les philosophes romains. Cicéron ne se demande pas : « Comment penser après le massacre épouvantable des esclaves insurgés dirigés par Spartacus ? » Alors que les Occidentaux se demanderont après 1945 : « Comment penser après Auschwitz ? » Si la grandeur de la civilisation romaine est incontestable - nous en sommes issus et pour une part nous l’aimons, forcément -, elle se fonde aussi sur des massacres atroces et sur la disparition de peuples entiers. En Gaule, vous avez entre un quart et une moitié de la population massacrée en dix années de conquête - les chiffres sont abrupts : sur cinq millions de Gaulois qui vivaient à l’époque, un million de morts au minimum et un million déportés comme esclaves. Rome a fait disparaître des peuples entiers, par exemple les Lygiens. Des génocides au sens universel...

    N. C. : Quand a-t-on commencé à s’en indigner ?

    M.-A. B. : Grosso modo à partir de Montaigne. L’humanisme naît autour de 1500. L’un des premiers à s’indigner est sans doute Las Casas, quand il revient des Amériques et qu’il raconte de quelle façon on massacre les Indiens. Il est incontestable que mille ou mille cinq cents ans plus tôt, il n ’y avait eu aucun Plutarque, aucun Sénèque pour dire : « C’est mal d’avoir fait disparaître le peuple lygien », alors que, dès la Renaissance, il se trouve des gens pour dire : « Dites-donc, ce que vous faites avec les Indiens d’Amérique, ce n’est pas bien. » À mon avis, c’est donc à partir de là que l’on commence à définir l’inhumanité : le massacre atroce et systématique des autres hommes, et leur asservissement massif. Bien sûr, et malheureusement, tout cela ne cesse pas pour autant. En un sens, le processus s’accélère même jusqu’au XXe siècle, où se produisent deux phénomènes énormes : 1°) les techniques permettent des massacres de masse à des échelles soudain industrielles - c’est la Première Guerre mondiale ; 2°) le nazisme surgit, c’est-à-dire l’inhumanité absolue.

    Mais le nazisme ne nous apparaît comme atroce que parce que nous avons des siècles d’humanisme derrière nous. Car on peut, sinon, trouver énormément d’entreprises du même genre dans le passé, sans que les contemporains y aient vu quoi que ce soit à redire. Bien sûr, Gengis Khan ou Tamerlan n’étaient pas spécialement bien vus des populations... Mais Alexandre le Grand, et même César, gardent une réputation très flatteuse. Dans l’optique humaniste moderne, parce que nous savons à peu près ce que nous entendons par humanité, le nazisme nous permet de définir a contrario l’inhumanité totale et absolue. Sa monstruosité a secoué nos morales à tel point que nous sommes en train, très lentement, très difficilement, soixante-dix ans plus tard, de revoir notre définition de l’humain : il est apparu en effet que la morale humaniste classique, néo-chrétienne ou néo-kantienne, n’a pas pu empêcher Auschwitz, ni les Khmers rouges, ni le Rwanda, ni le Kosovo...

    N. C. : Justement : à quoi ressemblerait un nouvel humanisme qui serait, lui, efficace ?

    À quelque-chose qui intégrerait le fameux « devoir d’ingérence » cher à Bernard Kouchner ?

    M.-A. B. : Je crois, oui. Nous connaissons actuellement une mutation très importante. Si Hitler surgissait en 2033 et non en 1933, le « devoir d’ingérence » pousserait les démocraties à attaquer l’Allemagne dès le début : empêcher Auschwitz. Mais cette politique - comme Léon Blum le regrettera plus tard, trop tard - ne pouvait s’imposer à l’époque, ni pendant les années qui ont suivi la Libération, parce qu’il fallait que tout cela mûrisse. Nous commençons tout juste à concevoir un droit d’ingérence préventif. La référence au nazisme est maintenant constante : nous avons connu le mal absolu. Le stalinisme aurait d’ailleurs très bien pu jouer ce rôle symbolique ; il se trouve que c’est le nazisme, coup de chance pour les communistes d’hier et d’aujourd’hui.

    N. C. : Lors du débat provoqué par la publication du Livre noir du communisme, on a entendu, de nouveau, des gens s’insurger contre lefait que l’on ose comparer le nazisme - un système qui cria haut et fort son inhumanité - et le communisme - un système qui aurait malheureusement dérivé, mais dont le projet de départ était beau...

    M.-A. B. : Concrètement, au XXe siècle, l’inhumanité a pris ces deux visages-là, qui sont en réalité très proches.

    Le nazisme a été une caricature construite pour lutter contre le communisme. S’il n ’y avait pas eu le bolchévisme, Hitler n’aurait pas eu les matériaux ni l’organisation pour construire le nazisme - c’est quand même très ressemblant. Et jusque dans les idéologies. Le marxisme n’a jamais été un humanisme ! Quand on lit les textes de Marx et que l’on observe son comportement, on trouve les prémisses des appels systématiques au massacre que lancera Lénine. Bien avant la révolution d’Octobre, Jean Jaurès explique que si on applique à un pays les thèses du Manifeste publié par Marx en 1847, les dirigeants révolutionnaires ne représenteront bientôt plus qu’une bande campée sur le territoire et que ce sera la dictature la plus effroyable jamais vue.

    Pourquoi, alors, continue-t-on à craindre de rapprocher nazisme et bolchévisme ? Cela tient simplement à la pression des anciens communistes, qui refusent d’aller jusqu’au bout de leur honte. Le communisme aurait eu une visée plus universaliste ? Mais qui a bien lu les textes fondateurs du nazisme ? Il faudrait remonter le temps et aller interviewer le jeune homme ou la jeune fille qui adhèrent au parti nazi à l’âge de seize ans, en 1937... À quoi pensaient-ils ?

    À la fraternité humaine, à la joie d’être jeunes et ensemble, à la fin de la corruption bourgeoise et des vieilles morales... bref à tout ce à quoi pensaient, au même moment, les jeunes communistes - et à quoi nous avons continué à penser bien des années après...

    N. C. : Qui sont les principaux penseurs antitotalitaires, selon vous ? Hanna Arendt ?

    M.-A. B. : Hanna Arendt a décrit un type d’individu : c’est Eichmann, d’une inhumanité propre à ce siècle, la jonction entre le barbare et le bureaucrate, qui dit : « J’obéissais aux ordres ! » Mais Hanna Arendt n’est pas la première ; on a ce regard chez Souvarine, chez Gide, chez Koestler, chez Aron, chez Merleau-Ponty, dont l’évolution - de Humanisme et Terreur aux Aventures de la dialectique, c’est-à-dire d’un volontarisme marxiste à une nouvelle forme d’humanisme - est frappante...

    N. C. : Quelle découverte font ces penseurs ?

    M.-A. B. : Je crois qu’en général les humains vivent les phénomènes avec une relative lucidité ; ensuite, l’historiographie (qui se fait passer pour de l’histoire) obscurcit tout. Prenez l’exemple de la Révolution française : on a vécu comme une découverte troublante, récemment, le fait qu’il y ait eu deux révolutions, 1789 et 1793 - la seconde anéantissant les acteurs de la première. Or, la dualité de la Révolution (d’abord les Droits de l’homme, ensuite la Terreur) a été tout naturellement perçue par les contemporains, et pendant une grande partie du XIXe, tout le monde le savait ; Dumas l’explique très bien, Tocqueville aussi, etc. Et puis l’historiographie de la IIIe République, à partir de 1880, fondée sur un gauchisme antérieur, a expliqué qu’il n’y avait eu qu’une seule Révolution. La phrase de Clemenceau « la Révolution est un bloc », vient de son réquisitoire, à la Chambre des députés, contre une pièce de théâtre, Thermidor, écrite par Victorien Sardou en 1891, où l’on voyait Robespierre comme un méchant sanguinaire : figurez-vous que cette pièce a été interdite par la République radicale, au nom de la phrase de Saint-Just : quiconque l’attaque en détail [la Révolution] est un traître.

    N. C. : Lorsque les générations d’après guerre (c’est-à-dire beaucoup d’entre nous) comprendront, dans les années 70, la nature foncièrement totalitaire de leur bel idéal, une évidence s’imposera : la genèse de toute cette inhumanité remonte justement, pour une bonne part, à la Révolution .française, plus précisément à 1793. Nous avons été, nous Français, le laboratoire d’où est sortie cette forme nouvelle d’inhumanité : la terreur idéologique moderne.

    M.-A. B. : C’est évident en effet. C’est l’historien François Furet qui a le mieux défini les deux révolutions françaises : 1989, révolution voltairienne des droits de l’homme - celle des philosophes -, et 1993, révolution rousseauiste et terroriste - qui conduit les philosophes à la mort.

    N. C. : Pour vous, Jean-Jacques Rousseau est un penseur inhumain ?!

    M.-A. B. : La Terreur de 1793 est la stricte application du Contrat social ! Il n ’y a qu’à le relire : Rousseau y prévoit l’exclusion de l’individu qui ne se soumettrait pas à la Volonté générale, comme plus tard Staline élimine qui ne se soumet pas au parti, c’est clair et net. Robespierre est d’un rousseauisme exacerbé et plus la Terreur avance, plus on cite Rousseau, plus on le tutoie, plus on s’adresse à lui comme au maître sublime, etc.

    La pensée de Rousseau est aussi coupable que celle de Marx. Mais pour en revenir à la différence supposée entre les régimes autoritaires de droite - nazisme et fascisme - et les régimes autoritaires de gauche - de Robespierre aux bolchéviks -, eh bien la querelle est désormais tranchée : le parti communiste yougoslave est devenu le parti nationaliste serbe fascistoïde conquérant, qu’on a vu à l’oeuvre - avec matraquage des opposants, propagande, invasion des voisins, racisme, « sous-races », épuration ethnique, etc. —, dans une continuité absolue, avec les mêmes gens, quasiment les mêmes slogans, les mêmes troupes spéciales, la même organisation, etc. Bref, la démonstration n’est plus à faire. Il y a une continuité directe entre les deux. Le fameux discours du Champ des Merles n’a jamais fait que marquer le passage de l’un à l’autre.

    N. C. : Vous voulez dire qu’on a eu la chance que cela se passe dans un petit pays comme la Serbie et pas en Russie ?

    M.-A. B. : Cela peut malheureusement encore se produire en Russie. Sauf que le communisme russe est très délabré, alors que le yougoslave tenait encore la route...

    N. C. : Fondamentalement, l’idée judéo-chrétienne de « défendre un faible » révulsait les idéologues nazis, qui y voyaient le signe d’une maladie quasiment... écologique : comment peut-on aimer un faible, se demandaient-ils, c’est-à-dire aimer une pathologie ?

    M.-A. B. : Les marxistes pensaient pareil ! Ils avaient le même culte physique de la jeunesse, les mêmes démonstrations avec pelle sur l’épaule, les mêmes torses nus, les mêmes crânes rasés, les mêmes cheveux blonds.

    N. C. : Finalement notre humanisme n ’est-il pas d’essence judéo-chrétienne. C’est la Bible qui rend l’humain radicalement différent de l’animal !

    M.-A. B. : Oui, d’une certaine façon... Ce n’est cependant qu’une des interprétations que l’on peut tirer de la Bible, ce livre très composite, dont l’avantage est la richesse et la durée...

    Mais les interprétations médiévale ou inquisitoriale de la Bible, par exemples, n’ont rien à voir avec celle que nous avons de nos jours. Les pires horreurs espagnoles de la Renaissance ont été directement justifiées par des passages bibliques. Qui saurait dire si le christianisme a sauvé plus de gens qu’il n’en a fait tuer ? Quant à moi, je crois fondamentalement que la source de notre humanisme est gréco-latine. La Bible y a apporté des éléments, c’est évident...

    N. C. : Seulement des éléments ? Nous sommes issus d’un croisement des deux, non ?

    M.-A. B. : Oui sans doute, mais vous savez, la Bible sans la Grèce et Rome, ça n’est vraisemblablement qu’une petite religion intolérante et intolérable. Le judaïsme du temps du Christ nous serait très difficile à avaler ! - ce qui n’empêche pas qu’il y ait une qualité émotionnelle et littéraire très grande chez un certain nombre de prophètes bibliques : pour moi, c’est du Victor Hugo. Un christianisme tiré de la Bible a dominé le Moyen Âge, l’obscurantisme et la cruauté.

    Tout ne commence que lorsque la Renaissance revivifie l’Antiquité.

    Mais il me semble que le vrai terrain qui a permis l’émergence de l’humanisme, c’est le bourg de la Renaissance, c’est le bourgeois, c’est l’auto-administration (même si elle reste longtemps assez autoritaire) des gens des villes à l’écart du pouvoir spirituel, et avec un retrait relatif du pouvoir temporel. Tout d’un coup, l’espérance n’est plus le Ciel, c’est la société urbaine rationnelle - et il est remarquable que la plupart des penseurs de cette époque sont des architectes, des urbanistes rêvant de cités idéales.

    Ce phénomène-là - la naissance de la bourgeoisie -, vous ne le trouvez ni en Égypte, ni en Mésopotamie, ni dans les États de l’Indus, ni à Rome (qui est gouvernée de manière administrative centralisée), absolument pas en Chine... Bref, on ne le trouve qu’en Europe, au début essentiellement en Italie et dans les pays du Nord... La seule démocratie connue de nous, c’est l’humanisme bourgeois. Le problème, c’est d’empêcher la bourgeoisie de s’accaparer cette belle découverte !

    N. C. : Et la fameuse thèse de Max Weber sur le décollage protestant du capitalisme ?

    Selon lui, sans les protestants, le modèle occidental ne serait jamais devenu mondial...

    M.-A. B. : Je n’en suis pas complètement sûr. Parce que le catholicisme, au moins, vous laisse de temps en temps tranquille, alors que le protestantisme, jamais. Quant aux comportements autoritaires induits par le protestantisme, ils n’aident pas toujours à l’émancipation des êtres. Le calvinisme présente des aspects proches d’un pré-totalitarisme moderne, et les attaques de Luther contre les révoltes paysannes (avec en outre des phrases antisémites qui se terminent par : « Il faut les brûler ! ») nous font frémir - on peut trouver dans Luther toute la prophétie « Terre Materne » de Hitler !

    N. C. : Ce qui nous ramène à l’inhumanité. À partir de quand regarde-t-on l’homme comme un être très dangereux ? Arrivant en poste au Kosovo, votre ami Kouchner disait qu’il n’avait plus du tout confiance dans l’être humain et que sa seule façon de tenir était de constamment prévoir le pire, de façon à avoir parfois une minuscule surprise positive.

    M.-A. B. : La découverte que l’homme est sans cesse capable du pire ? Mais elle est vieille comme le monde ! Toutes les religions vous expliquent que le mal existe, notamment les religions juive et chrétienne, qui situent le mal et le péché à l’origine même de l’humanité.

    Empiriquement, I’humanité ne fait, de toute façon, que passer sans cesse d’une guerre à l’autre. Nous nous en sommes déshabitués, en Europe, depuis 1945, mais le sort ordinaire de l’humanité, c’est le village qui brûle, les enfants éventrés, les femmes violées, les hommes tués ou emportés en esclavage. Nous autres, Européens de la seconde moitié du XXe siècle, nous vivons dans une bulle que la guerre yougoslave, d’une certaine façon, est d’ailleurs venue crever. D’où un certain sentiment d’urgence...

    Après le nazisme, notre humanisme s’est doté d’exigences telles que si l’on jugeait à l’aune de nos indi- gnations morales d’aujourd ’hui les grands hommes de I ’histoire, on les flanquerait quasiment tous au trou ! La façon dont Diderot se comportait avec sa bonne, Voltaire avec ses affaires, Montaigne lui-même avec ses paysans... nous révulserait : ce n’est qu’abus de la personne et du bien social, coups de bâton, enfermement, esclavagisme, abandon, séparation des familles. Tycho Brahé, le fameux astronome dont nous parlons avec aménité dans nos livres d’astrophysique, a dû se faire rappeler à l’ordre de nombreuses fois par le roi du Danemark avant d’arrêter de mutiler sauvagement les paysans de ses terres ! Et pour prendre un exemple beaucoup plus proche et terre-à-terre, si l’on avait appliqué aux patrons français des années cinquante les critères de l’abus de bien social que nous appliquons aujourd’hui dans nos lois, 90 % du patronnat français aurait fini en prison.

    Dans le crime, c’est pareil. Prenons le dictateur Milocevic. Qu’a-t-il fait d’autre que les Français en Algérie de 1954 à 1962 ? À l’époque, la France a en effet prétendu que des territoires qui manifestement n’étaient pas peuplés de Français d’origine lui appartenaient, que cela relevait de sa souveraineté, que personne n’avait à s’en occuper, etc. Elle a ainsi déplacé deux millions de personnes, fait probablement 350 000 morts (moins que ce que le FLN a prétendu, mais c’est tout de même considérable) , pratiqué la torture partout, installé des tribunaux d’exception... Bref, il y a moins d’un demi-siècle, la France a fait plutôt pire en Algérie que Milocevic au Kosovo.

    N. C. : L ’OTAN aurait dû intervenir ?

    M.-A. B. : La question d’une intervention extérieure s’est posée. Souvenons-nous que la guerre d’Algérie a fait l’objet de violents débats lors de chaque assemblée générale de l’ONU, avec des motions condamnant la France et une permanente volonté d’intervenir dans les affaires françaises de la part des Américains - ne parlons pas des Soviétiques. On espérait d’ailleurs que Kennedy, une fois élu, interviendrait et pèserait pour écarter l’armée française de l’Algérie.

    Conclusion ? Eh bien, je crois que nous avons beaucoup évolué. Il y a des choses que l’on ne tolère plus, et c’est bien. Cela ne veut certainement pas dire que nous soyons devenus purs et innocents ! Mais il est certain que la succession des génocides du siècle nous a obligés à avancer. Autrement dit, c’est le mal qui fait progresser les hommes !

    Je crois que l’un des grands progrès de la conscience humaine est réellement dû à la Seconde Guerre mondiale. Nous avons complètement identifié, non seulement le mal absolu et total, mais, de plus en plus, ses prémisses. L’humanisme, aujourd’hui, c’est d’abord d’empêcher le retour d’Auschwitz par tous les moyens, c’est-à-dire de protéger les minorités.

    C’est vrai aussi pour les moeurs. La pédophilie nous apparaît comme d’une inhumanité absolue - mais je peux vous garantir que si l’on avait arrêté tous ceux qui tripotaient des petits garçons et des petites filles au XIXe siècle, aussi bien dans la bourgeoisie que dans la classe ouvrière ou la paysannerie, et dans les collèges et internats religieux, une bonne part des adultes se serait retrouvée en prison. Notre notion de l’humanité est en train de se resserrer. Il faut s’en réjouir. À une condition : qu’elle n’essaie pas de se dépasser elle-même. Le nazisme a été une tentative de dépasser les injustices et les insuffisances de la société libérale bourgeoise, on voit où ça a versé. Le stalinisme a représenté une tentative parallèle. Il ne faut surtout pas fabriquer une troisième idéologie qui, prétendant dépasser notre civilisation, nous ramènerait en arrière. Moyennant quoi, je suis frappé que nous ayons à ce point évolué.

    Les choses bougent paradoxalement d’autant plus - et en mieux - qu’il n ’y a pas de définition de l’homme éternel. L’homme le plus humain d’il y a quelques siècles nous semblerait fichtrement inhumain aujourd’hui. Il n’y a pas de raison que cela s’arrête. Il faut se résoudre à une pensée relativiste. On en est arrivé au point que si l’OTAN avait mené une guerre brutalement inhumaine en Yougoslavie, elle aurait été tant désapprouvée par ses opinions publiques qu’elle aurait été obligée de mettre fin à la guerre, c’est-à-dire d’accepter une défaite. C’était les rois qui décidaient de la guerre autrefois, maintenant les peuples occidentaux ont presque le pouvoir de décider de la paix. Renversement de perspective vertigineux.

    Propos recueillis par Patrice van Eersel

     


    Le plus effroyable à mes yeux est de constater à travers les centaines de livres que j'ai pu lire que rien n'équivaut à la philosophie des ethnies comme celle des Kogis et que j'aurais mis 50 ans à le découvrir.

     

    Je ressens parfois un profond dégoût envers l'Occident. Et en même temps, c'est bien parce qu'il existe ici des livres que j'ai pu décovrir ce peuple. Est-ce que ça atténue la douleur de ces massacres perpétrés depuis l'époque des Conquistadors ? Certainement pas. Et même si d'autres livres me montrent que ces massacres continuent. Je préfèrerais être ignorant. Qu'il n'y ait aucun livre, que je ne connaisse rien de ces Peuples Premiers mais qu'ils puissent vivre dans la paix.

     

    "L'huni-manité" prendra forme lorsqu'il n'y aura plus rien à raconter sur les hommes parce qu'ils vivront tous en osmose avec la Terre et les formes de Vie qui la peuplent.

    Oui, je sais ce que vous pensez...

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