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Savoir et comprendre.
- Par Thierry LEDRU
- Le 13/03/2011
Oh, bien sûr que les Japonais ont développé des savoirs technologiques impressionnants. Et ça leur sert à quoi aujourd'hui. A se porter secours avec des brouettes et des pelles. Avant de recommencer à utiliser des machines plus puissantes et à améliorer leurs savoirs pour recommencer à oeuvrer dans la même voie.
Sans toujours rien comprendre.
Le savoir est associé à l'homme. La compréhension est du domaine de l'être humain.
L'homme développe des technologies.
L'être humain associe le savoir avec la conscience.
Pas une conscience morale quand elle ne fait que répondre à des intentions coercitives mais une conscience unitaire.
Une conscience qui prend en compte,non pas l'intérêt individuel au coeur d'un mouvement de masse, mais l'intérêt de l'univers du vivant au coeur des mouvements de masse.
La compréhension résulte de la conjonction du savoir et de l'être.
L'être unifié est celui qui maintient vivant en lui la conscience d'une appartenance à un tout et qui ne se soumet pas à des intentions individuelles servies par des mouvements de masse ou pire encore, qui est capable de créer des mouvements de masse pour répondre à des ambitions individuelles.
Ce qui revient à dire d'ailleurs que les politiciens sont des hommes et pas encore des êtres humains.
Les scientifiques, les politiciens, les industriels, les chimistes, les physiciens, les patrons du CAC 40...Des hommes possédés par leur savoir, une maîtrise particulière, un talent développé à l'extrême, une compétence inégalée, un potentiel exploité, des réussites sociales, des parcours remarquables dans le cadre d'une société vouée au savoir.
Et pourtant des hommes privés de toute forme de compréhension. Les architectes qui ont conçu ces villes japonaises qui viennent d'être englouties...Ils ont gagné combien d'argent en usant de leur savoir ? Ces physiciens qui ont mis au point ces centrales nucléaires qui menacent la planète entière, ils ont gagné combien d'argent ? Les bâtisseurs de ces monstres, ils ont gagné combien d'argent ? Un savoir immense, des constructions pharaoniques, une élévation constante dans la matérialisation de leur savoir, un gigantisme au service du profit.
Dans une totale incompréhension de l'univers du vivant. Parce que pour eux, il s'agit d'un "environnement" et qu'ils sont au-dessus de cet environnement, qu'ils n'en font pas partie, que leur savoir leur a donné l'impression d'être plus puissant que ce Tout qui les accueille.
Juste des hommes.
Pas des êtres humains. Pas encore.
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Les hommes machines.
- Par Thierry LEDRU
- Le 13/03/2011
Aujourd'hui on voit Borlo parler en tant que défenseur des valeurs environnementales alors que c'est lui qui a signé la veille de son départ du gvt entre Noel et jour de l'an, les autorisations concernant l'exploitation du gaz de schiste sur notre sol... Pas eu un seul bruit sur cela, personne n'était au courant, les maires et habitants ont été mis au courant il y a deux mois...Le gvt a fait cela sans bruit...
http://gasland.fr/documentaire.php
http://www.dailymotion.com/video/xhfvhy_gasland_news
Ces hommes vont faire la même chose que les gvt japonais avec leur population. On pousse aux profits et on fait miroiter une vie "meilleure"... Indignez-vous qu'il disait. NON !! C'est totalement insuffisant. C'est la désobéissance civile qui reste la seule solution.
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La mécanisation de l'existence. (spiritualité)
- Par Thierry LEDRU
- Le 13/03/2011
Gurdjieff l'avait évoqué. La plus dangereuse mécanisation consiste à être soi-même une machine.
Au Japon, le drame humain est inimaginable, le traumatisme effroyable, mais je ne parviens pas à comprendre comment l'humain peut en arriver là...Il me semble que cette cassure entre l'humain et la nature est absolue, qu'il existe désormais une négation complète de l'univers du vivant et je ne vois pas la nature comme responsable de quoique ce soit. C'est la mécanisation de l'existence qui porte en elle les causes de ce désastre. Une certaine forme de folie, d'aveuglement qui consiste à penser que l'homme est au-dessus de tout, qu'il possède le pouvoir, jusqu'à en oublier les lois naturelles. Construire des villes dans des fonds de vallée, en bord de mer, dans un pays sujet aux pires séismes, pour développer des industries, accroître les richesses, pousser les individus dans une voie unique de profits, sans garder à l'esprit que tout peut disparaître en quelques instants, c'est mener les hommes à la mort. Le Japon s'est construit dans cette voie. Les individus sont mécanisés, extraits de leur lien avec la nature, ignorant des réalités, envoûtés par une idée de croissance agissant comme un aimant. Tout miser sur l'énergie nucléaire dans un pays sujet aux séismes...C'est consternant. Développer des villes côtières sans aucune protection contre les tsunamis, c'est hallucinant. Non seulement, la nature est ignorée mais la vie humaine elle-même est bafouée. Rien ne compte en dehors de cette course à la croissance. On joue avec des allumettes parce qu'on a construit des camions de pompiers. On est dans l'absurde.
Les humains sont donc de véritables machines travaillant seulement sous la pression d'influences extérieures. Les gouvernants, eux-mêmes, sont des machines. Ils ne sont pas des conducteurs de machines. Ils vivent eux aussi sous les influences d'égrégores qui les dépassent.
Un égrégore est, dans l'ésotérisme, un concept désignant un esprit de groupe, une entité psychique autonome ou une force produite et influencée par les désirs et émotions de plusieurs individus unis dans un but commun. Cette force vivante fonctionnerait alors comme une entité autonome. Le terme, apparu dans la tradition hermétiste, a été repris par les surréalistes, qui l'ont chargé d'un fort potentiel subversif.
Autant cet égrégore peut avoir un effet positif lorsqu'il est associé à une élévation spirituelle, autant il peut devenir la source d'un conditionnement lorsque des intentions perverses le sous-tendent...
Les connaissances qui sont développées depuis la révolution industrielle ne sont pas attachées à une voie spirituelle mais à une mécanisation des individus. La croissance est l'intention première. La médecine, par exemple, est de la mécanique. L'aspect holistique de l'homme est ignoré. La psychologie qui ne fonctionnerait pas en systémique est de la mécanique. Et encore doit-elle prendre en considération l'environnement spirituel de l'individu.
L'environnement est d'ailleurs un mot très révélateur dans l'usage qu'on en fait actuellement. On considère à travers ce terme que la nature nous environne, ce qui revient à dire que nous n'en faisons pas partie, que nous nous en sommes extraits, que nous sommes des entités à part. On voit ce que cette "philosophie" donne avec l'exemple de la catastrophe au Japon. Et il est évident que nous allons entendre des "machines" accuser la nature d'être cruelle. C'est logique dans ce fonctionnement. Il faut un coupable. Et c'est la nature. Puisqu'elle est la seule vivante et que nous sommes des machines malmenées par sa violence. C'est consternant. Combien de fois j'ai entendu des journalistes dire : "La montagne a tué" lorsque des alpinistes ou des skieurs sont emportés. Comme si la montagne avait eu une intention...Comme si ce tsunami était responsable de ces milliers de morts...On regarde la situation à l'envers.
C'est un drame humain qui concerne des machines. C'est ça lapremière catastrophe. C'est ce que l'homme est devenu le plus dramatique.
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Les scientifiques
- Par Thierry LEDRU
- Le 13/03/2011
Consternant...
Ainsi donc, il a fallu que quelques scientifiques se penchent de façon "rationnelle" sur le sort des animaux pour découvrir ce que des peuples indigènes "sous-développés" savent depuis des millénaires.
On est dans le même fonctionnement que ce qui a produit cette catastrophe au Japon. Les scientifiques détiennent la vérité, "leur" vérité. Ils ont le pouvoir et leur savoir répond aux exigences mercantiles. L'élevage industriel est rentable. Point.
Descartes affirmait un dualisme substanciel entre l'âme (la res cogitans, la pensée) et le corps (la res extensa, l'étendue). Il radicalisa sa position en refusant d'accorder la pensée à l'animal, le concevant comme une « machine ", c'est-à-dire un corps entièrement dépourvu d'âme.
Les scientifiques ont maintenu cette vision depuis 1600...Quel formidable entêtement, quel effroyable aveuglement. Une justification de toutes les souffrances commises envers la nature. Faune et flore confondues.
Un jour, peut-être, que des scientifiques "découvriront" que la Terre fonctionne comme un être vivant et qu'elle a conscience de la vie qu'elle porte puisqu'elle en est la source. Juste en fait ce que les Kogis savent depuis des millénaires. Mais comme ce sont des s"sauvages", ça ne compte pas. il n'y a que la science rationnelle qui peut valider une idée pareille. L'osmose spiritutelle n'a pas de valeur à leurs yeux. Quand le mental est le maître, l'âme est ignorée.
Finalement, on sera dans le même registre que Christophe Colomb "découvrant" l'Amérique alors qu'elle est déjà peuplée. Toujours cette prétention de l'Occident qui s'éloigne inexorablement de la compréhension de la vie en se persuadant qu'elle en comprend les phénomènes.
Consternant...
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Japon
- Par Thierry LEDRU
- Le 12/03/2011
C'est indéniablement une catastrophe humaine. Pas question de revenir là-dessus.
Il s'agit maintenant de comprendre ce qui y conduit.
Des hommes toujours plus nombreux qui s'installent en bord de mer parce qu'ils se sont coupés de la mémoire des peuples. Les tsunamis ont toujours existé, on en trouve des traces à toutes les époques, dans divers endroits de la planète. Sumatra avait déjà montré que l'oubli condamne les vivants à revivre les cataclysmes antérieurs. Mais leur ampleur, même si elle reste similaire, a des conséquences bien plus apocalyptiques parce qu'un autre paramètre a pris une place considérable. C'est la prétention. Celle qui conduit les peuples "développés"à imaginer que les technologies modernes les mettent à l'abri des forces de la nature. Vaste illusion dont on voit les effets. Des villes immenses construites dans des plaines côtières alors que les plaques tectoniques de la région ne sont que des pièces de puzzle sous tension. Aucune protection, aucune digue, aucune consigne d'évacuation. Les japonais sont éduqués aux séismes. Et personne n'a songé aux tsunamis. Ca paraît totalement insensé. Il ne s'agit pourtant pas d'un peuple insensé. Au premier abord...
Pourquoi le tsunami de Sumatra n'a-t-il pas convaincu les gouvernants d'une urgence absolue ? Comment expliquer que l'éventualité d'une telle catastrophe ne les a pas effleurés ?
Un peuple qui s'imagine à l'abri d'appareils enregistrant des secousses sismiques, de bâtiments quasiment indestructibles, d'entraînements répétés a éludé une part essentielle. Le danger n'est pas unique. Mais lorsqu'une population est rassurée par les dispositions prises par les gouvernants sur un point précis, il se crée une auto persuasion désastreuse. "Rien ne peut nous arriver puisque tout a été prévu."
"On domine la nature en lui obéissant." Un précepte bien connu qu'il faudrait remettre à jour. On ne la domine pas à travers des consignes et des manoeuvres parfaitement rôdées mais en gardant à l'esprit que sa puissance est incommensurable et qu'il s'agit avant tout de ne pas placer les individus dans une situation périlleuse. C'est là que la prétention entraîne un aveuglement ravageur.
Si on ajoute le fait que l'usage de centrales nucléaires dans un pays comptant un nombre incroyable de séismes est une folie absolue, on peut effectivement se demander s'il s'agit bien d'un peuple sensé. Et là, on ne touche plus seulement la population locale mais la planète entière.
Un autre paramètre est venu s'ajouter à la prétention. C'est l'avidité. L'énergie nucléaire brasse des sommes considérables, pharaoniques, des marchés financiers colossaux. Le Japon a totalement occulté l'éolien ou l'énergie marémotrice, celle des courants marins, celle de l'hydroélecticité, celle du solaire. Il n'est pourtant pas question dans ce pays de manque de moyens intellectuels, technologiques, scientifiques...Mais il existe des multinationales dont l'influence est immense et les pratiques impitoyables. On connaît le même problème en France avec Areva et EDF.
Au Japon, la superficie développée par les surfaces plates des toits d'immeubles, d'usines, de hangars représentent un terrain idéal à la pose de panneaux solaires. Pas besoin de terrains au sol. Quant à la puissance de l'Océan, il ne sera pas nécessaire désormais d'essayer de les convaincre. Le seul problème vient du fait que rien n'a été fait pour développer ces énergies. Pas d'argent débloqué, pas de recherches, pas de découvertes. C'est très simple.
Oubli, préténtion, avidité. Un cocktail détonnant.
Est-ce que le peuple japonais a la capacité désormais à devenir sensé ?
Et je n'oublie pas, en écrivant ça, le désastre humain en cours...Le traumatisme gigantesque. Est-ce que ça sera un tremplin ?
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"Tisserand du soleil."
- Par Thierry LEDRU
- Le 09/03/2011
Kathy Dauthuille a écrit ce livre sur les Kogis. Je me permets de vous le présenter.
http://vivrevouivre.over-blog.com/article-36470554.html
Les Kogis vivent selon un mode semi-nomade, se déplaçant du niveau de la mer à 3500 m, selon les saisons. Sous la forme de 36 mélopées, Kathy Dauthuille raconte la naissance d’une amitié entre le narrateur et un tisserand kogi.
Cette rencontre est à l’origine d’un dialogue qui nous introduit au cœur d’une culture méconnue, avec ses rituels, ses paysages montagneux et sa religion.
En voici un extrait :
« Il tissait le fil, tissait la vie, croisait ses pensées dans le cœur oublié du monde.
C’est dans le silence et avec lenteur, qu’il exprimait ce lien intense aux choses. Et c’est par cette alchimie primordiale que le tissu deviendrait sagesse, mémoire et vérité.
Comme tant d’autres de sa tribu, il filait à son tour le temps, sa destinée. Maintes fois il passa par la porte solaire pour reprendre le fluide, le courant, l’énergie.
Chaque fois que le fil blanc (mâle ou femelle) passait entre ses doigts, il clignait des yeux et semblait voir autre chose : sa vie, ou celle des autres, en un dédoublement d’images, de sons, d’odeurs…
Ainsi refaisait-il les mêmes gestes que ceux de son père, de son grand-père, depuis le jour où leurs ancêtres étaient sortis de l’œuf cosmique.
Avec amour et attention, il reproduisait les gestes immuables sur ce métier qu’on lui avait transmis comme l’on transmet un objet sacré, une mémoire.Il était bien là, ce lien magique qui le reliait à toute la lignée depuis la première aube.
Je restai là, à l’observer, craignant de bouger de peur de le déranger, de créer des fluctuations dans les ondes qui l’entouraient et flottaient ; je craignais d’entrer dans un monde secret auquel ne n’avais peut-être pas droit.
Pourtant, il ne disait rien, ne manifestait rien de spécial dans sa gestuelle qui aurait pu marquer une insatisfaction à mon encontre. Et tout à coup, son regard fixa le mien comme au-delà de toutes les apparences, un regard sûr, avec quelque chose tout à la fois de léger, d’innocent, de serein. Il exprimait la bienveillance et j’en fus touché.
Et quelque part une voix intérieure me dit clairement : « Je sais que tu es là… j’ai compris. »
Une ITW d'Eric Julien, le fondateur de l'association "Tchendukua", qui oeuvre à la défense des Kogis.
http://www.neo-planete.com/2010/06/21/eric-julien-engage-pour-la-defense-de-la-tribu-des-kogis
Merci à Kathy.
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Les Kogis. (3)
- Par Thierry LEDRU
- Le 05/03/2011
SOURCE : www.voice-dialogue-sud.com
http://voicedialogue.sud.pagesperso-orange.fr/articles/VDS_48.pdf
"Un jour quand nous aurons maîtrisé les vents, les vagues, les marées et la pesanteur, nous explorerons l’énergie de l’amour."
Pierre Theilhard de Chardin.
Parler, à quoi bon ?
La sagesse Kogi
Parler à quoi ça sert ? Est-ce vraiment utile ? C’est la question que nombre de personnes se posent, même, parfois, après des années de thérapie ou d’analyse.
Voici une réponse puisée dans la sagesse des indiens Kogis de Colombie. Le premier extrait vient de :
“Kogis, le message des derniers hommes”,
le second de :
“Le chemin des neufs mondes”.
Deux ouvrages d’Éric Julien, parus aux éditions Albin Michel.
J’espère vous donner aussi le désir de mieux connaître ces hommes qui vivent à notre époque et ont gardé vivante une sagesse très ancienne qui pourrait, Éric Julien le met en évidence, nous être utile. C’est la teneur du troisième extrait venu lui aussi du livre “Le chemin des neufs mondes”.
Jusqu’à quand leur tradition pourra-t-elle survivre avant d’être balayée par notre monde “moderne” ? La question est d’actualité.
Extrait 1. Le lieu de parole, la loma. Le lendemain, nous partons rejoindre la loma, sorte de lieu qui peut être d’usage collectif ou plus spécifiquement réservé à un seul mamu (chaman en langage Kogi). C’est là que les Kogis pensent le monde et équilibrent ses énergies, le soignent. C’est là que les mamus essaient de mettre en harmonie les pensées, les actes et les lieux. La loma de Marco
est à quelques centaines de mètres de l’endroit où nous vivons avec sa famille, perdu dans un bosquet épais, au pied d’une falaise. Pour s’y rendre il faut suivre un raidillon discret, passer une arête de pierre et redescendre dans une petite forêt de bambous. Entre le pied de la falaise et un curieux rideau de végétation qui baigne l’endroit d’une lumière verdâtre, on distingue l’entrée d’une grotte, sorte de passage vers l’autre monde, celui des esprits et des énergies. Devant l’entrée, plusieurs pierres sont disposées en arc de cercle. On dirait un temple naturel où convergent les énergies du ciel et de la terre. À notre arrivée, Santiago dégage l’entrée de la grotte masquée par d’épaisses dalles de pierre. Chacun choisit une place d’où il ne bougera plus pendant des heures. Immobile, entre soi et soi. Sous la direction de Marco, nous commençons à penser le
monde, nos actes, le chemin qui nous a menés jusqu’ici, les intentions qui nous ont animés, ce que nous allons faire demain, la façon dont nous allons le faire. Nous commençons à penser en chargeant notre Seiwa. (Petit objet symbolique)
“Quand on apprend, il faut parler, expliquer à quoi on pense, aujourd’hui, hier, sur le chemin, dire ses intentions. L’énergie fonctionne avec les intentions. C’est pour cela que nous travaillons avec les mamus, nous faisons tout ce travail
spirituel de la pensée. Quand on va voir un mamu, on va là où on se confesse, dans un lieu spécial et on commence à parler. C’est la première chose
que l’on fait avec ceux qui viennent nous voir, dire ce qu’ils pensent, ce qu’ils ont fait avant de venir, parler”, me glisse doucement Manuel, avant de s’installer à mes côtés. Parler, bien sûr, n’est-ce pas ce que me rappelait encore Marco il y a peu ? Les séances peuvent durer de quelques heures à plusieurs jours. Il s’agit pour le mamu de travailler le Seiwa des hommes ou des femmes qui viennent le solliciter. Un Seiwa est une sorte d’assurance entre les énergies du vivant, la conscience que nous en avons, et la façon dont nous l’incarnons dans notre vie et à travers nos actes. Un Seiwa enregistre les énergies, en garde une trace qui sera à la fois portée par son propriétaire et gardée dans la loma du mamu avec lequel vous avez travaillé.
No 48
Novembre 2008
SOURCE : www.voice-dialogue-sud.com
Un Seiwa se conserve toute une vie, comme le reflet du chemin de chacun vers la conscience et l’éveil. Aller à la loma est un travail d’endurance, de patience, certains diraient de méditation. Il faut parler tout haut pour exprimer ses pensées, parfois cheminer seul dans son coeur et son esprit. Au bout de plusieurs heures, les membres s’engourdissent, le moindre détail de la loma s’inscrit dans la tête et dans le corps. Les pierres, les arbres, les odeurs, l’ambiance de l’air, chaude, brûlante, puis plus fraîche qui annonce la fin de la journée. Peu à peu, au-delà de la douleur, du temps qui passe, l’esprit s’échappe, se fond avec le lieu, en épouse les formes et l’énergie. Imperturbable, quasiment immobile, Marco guide le travail en s’appuyant sur une étrange céramique ronde, sur laquelle sont gravés plusieurs motifs. “Une sorte de carte pour guider notre travail”, me dira-t-il. “C’est le grand-père de mon père qui me l’a transmise.” Après de longues heures passées à la loma, Marco tend la main pour récupérer les petits objets symboliques qu’il a confiés à chacun à notre arrivée. Ces objets doivent être “baptisés”, pour être accueillis dans le monde des vivants. Au fur et à mesure de la journée, ils se sont chargés de l’énergie de chacune des personnes présentes. Ils représentent une sorte de condensé de leurs pensées. Chacun en a reçu deux. L’un va rester propriété de la personne qui l’a travaillé. Il reflétera son énergie et ses pensées tout au long de son existence. L’autre va rester là, confié à l’esprit de la mère, dans une chrysalide vide, délicatement déposée au fond de la grotte. Marco récupère les quelques objets et se faufile dans un boyau qui disparaît sous la terre. À la lumière du jour, le fond de la grotte dévoile une multitude de chrysalides saisissantes, ici, se trouve concentrée une partie de la pensée du peuple
Kogi.
Extrait 2 : Verbalisation, gestion du non-dit et anticipation des déséquilibres dans la culture des Kogis
Les Kogis attachent une attention particulière à la verbalisation, à la gestion des conflits et autres tensions portées par le groupe. Il y a tension, conflits, lorsque l’énergie (la parole, le souffle...) ne circule plus, lorsque les règles ne sont plus acceptées, respectées et mises en pratique, lorsque le profane envahit et domine le sacré. Tous les Kogis n’acceptent pas les règles et les contraintes des “lois de la mère”. Certains peuvent choisir de ne pas les respecter, voire de les rejeter, ce qui, pour les membres de la communauté, constitue un délit majeur. Entendons nous bien : pour les Kogis, les lois universelles de la terre mère sont des lois vécues de l’intérieur qui garantissent l’équilibre et la continuité de la vie.
La survie de la communauté, son équilibre, passe par leur respect, un respect qui s’incarne dans une attitude, une posture “juste” par rapport aux êtres et au monde. Que cette posture de partage, d’écoute et de respect ne soit plus vécue et mise en pratique et c’est l’ensemble de la communauté qui se trouve menacée. Les personnes concernées vont alors être invitées à parler, puis à parler encore, et ce, afin de pouvoir identifier l’origine de ce manque de respect, de ce déséquilibre.
“Les personnes concernées vont voir le mamu et lui demande si elles peuvent parler, échanger avec lui. Elles lui demandent alors d’être interrogée sur leurs derniers actes et les pensées qui les animaient lorsqu’elles les ont réalisés. C’est le mamu qui dirige cet échange. (...)”
C’est le respect des lois de la communauté qui évite la domination de l’individualisme, de la compétitivité, du non-dit et de la souffrance. Individus, familles, clans, communauté, à chacun de ces niveaux sont mises en place des procédures de verbalisation et de gestion des déséquilibres qui permettent
d’éviter les ruptures et d’accompagner les membres du groupe dans les changements auxquels ils se trouvent confrontés.
S’il y a un point qui différencie nos sociétés occidentales de celle des Kogis, c’est bien celui de la verbalisation, de cette préoccupation permanente d’éviter les noeuds, les blocages, les non-dits qui déséquilibrent les hommes et les
organisations. Cette volonté de faire circuler les mots, les énergies, les
émotions, comme la terre qui se doit d’assurer la circulation de l’air, de l’eau, des
courants et de l’énergie.
La non verbalisation entraîne la cristallisation de la colère, de la peur, de la souffrance, une cristallisation qui s’auto alimente jusqu’à la rupture.
Là où les Kogis essaient d’anticiper ces ruptures, nos sociétés les subissent.
Dans nos sociétés occidentales (entreprises, familles, organisations entendues au sens large du terme), il est très difficile pour les acteurs concernés de dire et de verbaliser leurs sentiments, peurs, limites, enjeux.
Manque d’humilité, lâcheté, ignorance, colère, jalousie, parfois même indifférence, parce que non identifiés et non gérés, la diversité des sentiments humains nourrit et déforme les relations jusqu’à provoquer des déséquilibres majeurs qui peuvent s’incarner soit dans des conflits larvés ou violents, soit
dans la création d’espaces de “non-dits” rapidement nourris par les interprétations, projections qui amplifient les phénomènes et les rumeurs.
Apprendre à identifier ces situations personnelles ou collectives, reconnaître les sensations, émotions, enjeux, sentiments qui les font vivre, leur origine profonde, le contexte dans lequel elles s’inscrivent, les verbaliser, les exprimer, les
partager, les gérer et gérer les réactions que cela peut susciter représente sans doute l’un des enjeux majeurs de nos sociétés occidentales. (...)
Encore et toujours dire, partager, faire circuler pour préserver l’équilibre du tout, du groupe et de l’individu.
Extrait 3 : Si l’on pouvait résumer quelques uns des axes de réflexion, quelques unes des passerelles qu’il doit être possible d’établir entre la culture Kogis et nos sociétés, j’en retiendrais six.
1. Chaque individu doit être reconnu comme faisant partie d’un tout.
Chez les Kogis, à travers sa fonction, son rôle par rapport à la communauté, chacun a sa place. À ce titre, chacun a droit à la parole. Dans une telle société, il ne peut pas y avoir d’exclus ; pour fonctionner de manière équilibrée, le système a besoin de l’ensemble de ses composantes, même celles qui ne seraient pas forcément dans la norme, puisqu’elles renseignent le système sur la norme.
Cette reconnaissance et le respect associé sont fondateurs de l’identité de chaque membre de la communauté. Chaque partie du système me reconnaît comme étant une partie nécessaire pour le fonctionnement du tout.
2. La notion de faute, présente dans les sociétés occidentales, est totalement inexistante.
Il s’agit plus de déséquilibres physiques, psychologiques, sociaux, qui, une fois rétablis ne sont pas portés comme des sentences tout au long d’une vie.
3. Le monde est compris comme un tout vivant et fragile dont les composantes sont en permanente interaction, ce qui oblige chacun à se sentir responsable de l’ensemble. Ce sont les liens de l’expérience sacralisée qui réunissent l’ensemble et lui donnent sens. Ce monde ne sépare pas, il réunit. La nature
entière y est incluse : animaux, maïs, fleurs, nuages, pierres... Quand les Kogis se présentent en disant “Nous sommes des Kagabas...”, c’est à cet ensemble, ce tout, qu’ils font référence.
4. Les problèmes, les difficultés doivent être formulés pour éviter les non-dits qui nuisent à l’harmonie des êtres et des lieux.
Ce travail de “confession”, de verbalisation du corps au coeur, puis à l’esprit et à la parole, se doit d’être réalisé tant sur le plan des mots que sur celui du coeur et de l’énergie.
5. L’interrelation, l’interdépendance lient les connaissances conceptuelles et expérimentales, coeur, conscience et esprits, hommes, nature et objet. Tout est équilibre entre un ensemble de composantes vivantes qui ont chacune un rôle et une fonction. L’ensemble ne fonctionne que parce que chacune des parties est reliée aux autres et remplit au mieux son rôle.
6. Leur système de compréhension du monde est un système fragile qui se doit d’être préservé et entretenu.
C‘est pourquoi ce même système permet de gérer en permanence les problèmes de pouvoir et de dogmatisme liés à tout groupe social structuré autour d’un projet collectif. De fait, leur système est en permanente évolution, et ce, afin de maintenir un équilibre subtil entre les forces internes et externes qui interagissent sur leur société où le changement, la confrontation des contraires et des subjectivités sont vécus comme des composantes essentielles de la vie.
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Bon, ça c'est fait...
- Par Thierry LEDRU
- Le 05/03/2011
J'ai fini ce matin le tome 2 de Jarwal. 1 mois d'écriture non-stop...Ca fait sept bouquins. Et le huitième est déjà bien en place dans ma tête.
Il reste à faire une première relecture en m'attachant UNIQUEMENT à l'histoire, chercher les erreurs dans le déroulement, des incompréhensions etc...
Une deuxième relecture en travaillant UNIQUEMENT sur la maîtrise de la langue, syntaxe, lexique, orthographe, concordance des temps ...
Une troisième relecture pour travailler UNIQUEMENT sur le fond, les thèmes, les notions philosophiques etc...
Une quatrième relecture pour voir si je n'ai rien oublié :)))
En une semaine ça doit être bouclé. Il faut rester la tête dedans, c'est essentiel.