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"Comment l'humanité se viande"
- Par Thierry LEDRU
- Le 20/07/2024
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Je ne l'ai pas encore lu mais c'est assûrément mon prochain achat. A moins que je puisse convaincre la médiathèque de l'acheter, ce qui sera utile à d'autres.
C'est un sujet pour lequel je n'ai pas besoin d'être sensibilisé... Mais c'est toujours utile et nécessaire de renforcer ses propres connaissances.
EAN : 9782374254272
192 pages
Rue de l'échiquier (01/03/2024)4.62/5 4 notes
Résumé :
Alors que les protéines animales ne sont plus nécessaires à la nutrition d’une majorité d’humains, des centaines de millions d’animaux sont tués chaque jour pour être mangés. Cette exploitation de masse, érigée en système global, ne soulève pas seulement une question éthique fondamentale. Elle constitue un risque écologique crucial qui met en péril l’habitabilité de la planète.
L’élevage accapare 77 % des surfaces agricoles mondiales quand la pêche se déploie dans plus de la moitié des océans. L’un et l’autre sont sans conteste les principaux fossoyeurs de la biodiversité sauvage. Mais ils sont aussi en passe de devenir les tout premiers contributeurs du changement climatique : le secteur de la viande représente déjà près de 15 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre, et la demande en produits d’élevage pourrait encore croître de 144 % d’ici le milieu du siècle.
Face à ce désastre, l’heure n’est plus à distinguer ou à opposer les pratiques industrielles et artisanales. En réalité, les deux se combinent sous l’effet d’un appétit insatiable de protéines animales qui dévore la planète.
Cette situation critique place chacun face à ses responsabilités. Alors qu’émergent des alternatives attractives à la consommation carnée, citoyens, agriculteurs, collectivités, entreprises et gouvernements ont désormais le pouvoir d’encourager une transition alimentaire respectueuse du vivant et déterminante pour la survie de l’humanité.4.10★ (205)
Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
18 avril 2024
‘Le principal fléau de l'humanité n'est pas l'ignorance, mais le refus de savoir' disait Simone de Beauvoir. En nous interpellant avec embrasement et urgence dans son dernier essai « COMMENT L'HUMANITÉ SE VIANDE », Jean-Marc Gancille dévoile un pan caché du véritable impact de notre alimentation carnée. Véritable plaidoyer sans concession, précis, rigoureux, documenté et argumenté qui dénonce une situation alarmante si rien n'évolue dans nos habitudes alimentaires.
Près de 80% des terres arables sont accaparées par le bétail et leur alimentation : l'équivalent en superficie du continent Américain. L'heure est pourtant au déni et la filière viande profite de l'angle mort pour s'engraisser : abolir ce carnage est un enjeu existentiel pour l'humanité, notre appétit de protéines animales étant suicidaire avec ou sans modération, la production de viande générant à elle seule 3 fois plus d'émissions de GES que l'ensemble du trafic aérien mondial.
L'impact de notre consommation carnée est vertigineux. Plus de 80 milliards d'animaux terrestres sont abattus chaque année : au-delà du chiffre qui donne la nausée et qui traduit notre faillite morale, il induit un risque majeur et une menace planqués derrière un écran de fumée pourtant dénoncés par les scientifiques, les organismes internationaux et les agences alimentaires et sanitaires. En France notre rapport à la viande reste un puissant marqueur identitaire et nous regardons ailleurs alors que les protéines animales détruisent le monde : elles ne sont pourtant plus nécessaires à la nutrition d'une majorité d'humains.
Jean-Marc Gancille dénonce l'aberration dans un implacable constat. Pour nourrir les animaux de rente, près de 85% des cultures mondiales de soja sont exploitées, première cause de déforestation au Brésil : une vraie bombe atomique en devenir. La FAO publie en 2006 le rapport ‘L'OMBRE PORTÉE DE L'ÉLEVAGE qui fera enfin vaciller l'agro-industrie. Une étape majeure dans la prise de conscience mondiale. L'élevage serait responsable de 14,5% de la production de GES. Cet accaparement de la surface terrestre par l'élevage nuit terriblement à la vie animale sauvage qui voit son territoire morcelé, dispersé et pollué. Les conflits permanents entre éleveurs et protecteurs du loup et de l'ours en France traduisent notre incapacité à partager nos territoires au profit d'une expansion du bétail qui elle, n'a rien de naturel.
En 2023 l'ONU alertait sur le risque imminent d'une crise mondiale de l'eau douce et appelait à modifier nos régimes alimentaires en les orientant vers des produits moins consommateurs d'or bleu.
Marcher sur nos somptueuses plages Bretonnes infestées d'algues vertes n'a plus le charme d'antan : chiens, chevaux, humains y ont déjà laissé la vie. La faute aux élevages intensifs de porcs dont le lisier empoisonne les cours d'eau. Dans le Doubs, c'est la rivière la Loue qui est saturée d'azote et de phosphore en raison de la production faramineuse de comté. La filière a recours à un trop grand nombre de vaches par rapport à la surface du territoire.
L'auteur dessine les contours d'un panorama affligeant et consternant : l'élevage souille l'eau que nous buvons, l'air que nous respirons et les sols que nous foulons. Une dégradation continue est en marche : le surpâturage est devenu problème mondial quant au pastoralisme qui a des consonances pittoresques, il est lui aussi problématique : la flore est dévastée, les sols érodés.
En pointant du doigt les méfaits pernicieux de notre appétit pour la viande, Jean-Marc Gancille nous met en garde sur la mise en danger de notre santé ainsi que celle des animaux. Nos 8 milliards de corps d'humains représentent des hôtes attractifs pour de nombreux pathogènes tels que parasites, virus, bactéries. Au total, 60% des maladies infectieuses et 75% des maladies émergentes ont une origine animale
Dans cet essai ‘coup de poing' l'auteur s'attaque aux idées reçues et déconstruit méthodiquement les discours dominants, leur ambivalence, les éléments de langage véhiculant tant d'illusions vertes sur le sujet.
• Non, les prairies pâturées n'ont pas capacité à fixer le carbone atmosphérique. Il n'est pas nécessaire de répandre du fumier pour cultiver. La seule solution durable pour réduire l'usage des engrais aujourd'hui consiste à étendre les surfaces de prairies riches en légumineuses qui elles, ont la capacité de fixer l'azote de l'air dans le sol.
• Manger local ou locavorisme n'a un impact significatif que si le transport est responsable d'une part importante de l'empreinte carbone finale des aliments or il n'est responsable que de 6% des émissions de GES alors que la production de viande et produits laitiers représentent 83%.
• La Chine ne connait pas la honte à construire ces immeubles porcheries géants cauchemardesques de 26 étages emprisonnant 650 000 cochons. L'état de l'Idaho et ses feed-lots ou parcs d'engraissement regroupent eux pas moins de 150 000 bovins sur une seule ferme. le lobby agricole Français s'appuie sur ces exemples de démesure pour crier haut et fort que l'élevage intensif n'existerait pas dans notre pays vantant l'image d'Epinal d'élevages à taille humaine. L'auteur nous met en garde sur cette distorsion flagrante : la demande en France de protéines animales est massive : on tue par an 1,2 milliard d'animaux. 95% des porcs connaissent l'enfer concentrationnaire, 99% des lapins engraissent jour et nuit en batterie ne connaissant aucun répit. Plus de 8 animaux sur 10 en France sont issus d'élevages intensifs.
• Un autre cliché à déconstruire : la viande serait indispensable à la sécurité alimentaire. Il n'en est rien ! le bétail mange 41% de la production céréalière mondiale et 76% de celle du soja pour ne fournir que 18% des apports en calorie et 37% des protéines de l'humanité. Se tourner vers des régimes végétaliens contribuerait à répondre aux enjeux d'insécurité alimentaire.
• Autre fausse idée : le petit élevage paysan aurait une influence positive sur le dérèglement climatique. Un ruminant nourri à l'herbe voit son espérance de vie s'agrandir, le moment d'abattage est plus tardif, la production de viande est moindre et le méthane continue d'être émis. L'empreinte carbone se révèle alors la plus élevée dans le système d'alimentation à l'herbe !
Nous sommes seuls responsables et décideurs du contenu de nos assiette et les chiffres alarmant interrogent sur notre déni. Les viandes cachées se trouvent dans les nuggets, pizzas et sandwichs. Les français mangent 2 fois plus de viande que la moyenne mondiale, nul doute qu'à ce rythme aucun des objectifs de consommation durable de viande n'aura de chance d'être atteint. Les lobbies surfent sur l'hypocrisie générale.
Alors que la transition vers d'autres modes d'alimentation devrait être la priorité, jamais les animaux n'ont été autant exploités et massacrés qu'aujourd'hui.
La prise de conscience collective reste dramatiquement faible, l'enjeu ne suscitant que très peu de discussions sur les questions éthiques et sanitaires : il est plus que temps de mener un vrai plan d'action pour nous offrir une chance d'éviter le pire.
Des solutions existent pour opérer un changement radical et salvateur et sortir de ce système carniste. Végétaliser l'alimentation est un premier levier primordial, l'élevage extensif souvent réputé vertueux n'est pas une réponse satisfaisante à la crise majeure que nous vivons. L'abandon de la viande et des produits laitiers devrait être une priorité absolue des plans climatiques. Il y aura d'incommensurables coûts financiers et humanitaires induits par un dérèglement climatique global dans un monde à +4 °, bien plus que si nous pratiquons une transition de l'élevage vers des productions végétales. Notre imaginaire de chasseur cueilleur d'un autre temps est resté figé comme une sorte de résistance au changement. Nous sommes encore persuadés d'être au sommet de la pyramide des prédateurs, nimbés d'une croyance de notre toute puissance.
L'auteur débusque nombre de procédés rhétoriques utilisés par les communicants : vanter le côté naturel, donc sain par essence d'un mode de consommation, est un subterfuge. Sélection génétique, insémination artificielle, antibiotiques, hormones, compléments alimentaires, robots de traite, supervision par ordinateurs, chaines d'abattage mécanisée n'ont rien de naturel ! Cette manipulation des géants de l'agro-alimentaire diabolise les substituts et invisibilise une réalité industrielle pernicieuse et une souffrance silencieuse.
Réduire le cheptel de 30% depuis 2021 comme l'ont fait les Pays-Bas, taxer la viande dont le prix est largement sous- évalué aujourd'hui sont autant de leviers d'action pour enrayer la chute. Tout comme encourager une agriculture végane rejetant élevage ET fertilisants d'origine animale.
En laissant les écosystèmes évoluer d'eux-mêmes, ces derniers enclenchent un processus de reconstruction salutaire. Les loups réintroduits à Yellowstone ont freiné l'expansion des wapitis , les arbres ont pris de la hauteur offrant une ombre bienvenue à de nouvelles espèces d'amphibiens, d'oiseaux. le réensauvagement pourrait atténuer le réchauffement climatique.
Nous ne pouvons parler des protéines animales sans dénoncer le massacre continu des habitants des mers. Plus de la moitié de la superficie des océans est exploitée par la pêche si peu médiatisée. le fond des océans est moins accessible, les profondeurs abyssales sombres et peu propices à l'éclairage. Jouant un rôle majeur dans le cycle du carbone ces océans absorbent entre 15% et 40% du Co2 émis par les activités humaines. Plancton, coraux et poissons nous sauvent la mise et pourtant le chalutage de fonds continue détruire les sédiments, vrais réservoirs de carbone.
Autre mythe atomisé par l'auteur : celui de la petite pêche soi-disant durable : la Méditerranée est la mer la plus surexploitée au monde alors que 92% des bateaux qui y évoluent font moins de 12 mètres. En vidant les mers de leurs habitants, nous raccourcissons notre durée de vie de façon dramatique. A l'heure actuelle moins de 3% de l'océan bénéficie d'un haut niveau de protection, ce qui au vu de la catastrophe en devenir, n'est vraiment qu'une goutte d'eau.
Au coeur même de cet enjeu crucial qu'est l'habitabilité future de notre planète, il y a la sentience animale, un concept crucial attribuant un statut moral aux animaux. L'anthropocentrisme est encore bien trop présent: jamais le sort des animaux n'est vu comme une injustice en soi qu'il s'agit de combattre. Cesser de manger de la viande est un choix simple, éthique, écologique à portée de chacun. Y renoncer de manière définitive aurait un effet colossal.
« Seul un projet d'écologie sentientiste permettrait de relever ce défi, marqueur d'une rupture dans notre évolution face à la spirale de destruction qui menace de tout emporter sur son passage, ce serait comme un nouveau départ, un pacte refondé entre nous et le vivant, la condition même d'une dignité retrouvée et finalement notre seule planche de salut' conclue l'auteur.
Une efficace méthode Danoise prônant des cours d'empathie a vu le jour dans 1000 écoles françaises afin de lutter contre le harcèlement scolaire. Espérons que l'ouverture des chakras saura inclure d'autres espèces que la nôtre. Les enseignants des écoles pilotes ont utilisé une mascotte - l'ami ours - pour incarner les valeurs du respect, de la bienveillance, de la tolérance et du courage. Les enfants peuvent aller le voir en cas de chagrin, pour lui raconter ce qu'il se passe ou le donner à un camarade pour le consoler.
Gageons qu'en suggérant à ces enseignants lire cet ouvrage indispensable de toute urgence et de troquer la mascotte de l'ours contre celle d'un lapin, d'un cochon, d'un veau ou d'un agneau, notre regard changera sur ces grands sacrifiés. En cessant d'exploiter une fois pour toute ce vivant comme une ressource soumise à notre bon vouloir, nous comprendrons enfin tout l'enjeu de ce changement capital de paradigme. Un élan neuf pour une société plus juste.
16 avril 2024
Dans ce petit essai de 152 pages, Jean-Marc Gancille reprend son plaidoyer commencé avec Carnage, pour les animaux, pour une écologie sentientiste, et au final pour une agriculture végane sans élevage et sans amendements animaux.
La première partie de l'ouvrage rappelle les chiffres affolants d'animaux tués (80 milliards chaque année) juste pour nourrir les 8 milliards d'habitants qui peuplent la planète, dont 4 milliards environ de classes moyennes aux besoins insatiables. Sans oublier que le carnage est également sur les mers et les océans du globe. le pire, si c'est possible, a lieu en mer. L'emprise humaine de la pêche artisanale et industrielle est en effet bien plus importante que sur terre, les océans occupant plus de place sur le globe que les terres émergées. Avec les inconvénients que l'on sait maintenant, sauf à vivre dans un caisson hyperbare insonorisé depuis 20 ans. Accaparement de terres cultivables pour nourrir des bêtes, destruction des habitats des animaux, de la biodiversité terrestre animale et végétale, de la faune marine, réchauffement climatique dû à la déforestation et aux émissions de méthane, pollution de l'air à l'ammoniac, des eaux par eutrophisation avec les rejets d'effluents tels le lisier de porc. Antibiorésistance, pollution médicamenteuse, et dégâts pour la santé publique par consommation excessives de protéines et de graisses animales ; risques accrus de mutation de virus provenant de zoonoses frappant des animaux aux organismes affaiblis, tous génétiquement identiques et vivant confinés, et donc d'épidémies ravageuses pour les humains. Les maladies épidémiques de grippe, variole, malaria, tuberculose, typhus, diphtérie, rougeole, fièvre jaune, peste, choléra sont apparues il y a 10 000 ans avec l'élevage, du fait de la proximité entre humains et animaux.
L'auteur s'applique dans un chapitre à démystifier nos croyances et sentimentalismes culturels pittoresques à propos de la chasse, de l'élevage et de la consommation de viande. Tels les prairies stockant le carbone, les amendements organiques "nécessaires" pour les cultures, fumier, purin ou leur compromis moderne, le lisier, l'entretien des paysages par les paysans, le bocage (talus entourant les champs, surtout garants des limites des propriétés et contenant les animaux, les empêchant de fuir), le mythe du "petit élevage" comme de la "petite pêche artisanale", tous aussi destructeurs sinon plus que l'intensif, car à plus forte intensité foncière donc d'occupation d'espace, le pastoralisme (subventionné) ravageant les flancs de montagne et en guerre contre les prédateurs (loups, lynx, ours) et tous les animaux sauvages accusés de disséminer la tuberculose bovine et toutes sortes de pestes ; le locavorisme pas forcément plus vertueux s'il est obtenu sous serre chauffée, et last but not least, la 'transition écologique' (en prouvant que l'humanité n'a jamais au cours de son histoire transitionné vers d'autres formes d'organisation sociale que celle dont nous subissons aujourd'hui les conséquences), toutes des croyances que nous avons dû nous inventer et entretenir pour justifier le massacre.
Jean-Marc Gancille plaide en conclusion pour la sortie planétaire de l'élevage et du système carniste avant que nous ayons tout détruit pour satisfaire nos estomacs : le désert avance, le futur sera végétal ou ne sera pas. La phrase de Gunther Anders "nous ne vivons plus dans une époque mais dans un délai" est en exergue de l'ouvrage. Quelques lueurs d'espoir tout de même : l'élevage bovin (le plus destructeur) est en perte de vitesse, sans aides, hélas, pour une transition professionnelle en douceur ; certains pays, la tête sous les excréments, tels la Hollande, pourtant dirigée par une coalition de centre-droit veut imposer une diminution de 30 % de son cheptel, mesure très impopulaire, c'est dire si la situation est devenue intenable ; la FAO, l'ONU et l'OMS lancent des avertissements sur les désastres à venir, et des coalitions internationales tentent de démontrer le vrai coût des protéines animales en incluant dans leur prix les nombreuses externalités négatives afin de faire pression sur les institutions européennes, dont il convient de rappeler que le budget de la PAC (Politique Agricole Commune : 37 % du budget de l'UE) contribue largement au ravage et à ses conséquences désastreuses à venir. Passer à une alimentation végétale est facile et peu coûteux à faire. Cela dépend de chacun de nous de s'y engager et d'en constater les avantages. Il suffit juste de faire une révolution culturelle dans nos mentalités, nos assiettes suivront. Très documenté de statistiques émanant d'organismes scientifiques tout à fait sérieux et reconnus, cet ouvrage de bonne vulgarisation est à mettre entre toutes les mains.08 juillet 2024
A l'occasion d'une opération Masse Critique chez Babelio, j'ai choisi de lire cet ouvrage étant vivement intéressée au sujet de la cause animale et étant moi-même végétarienne depuis des années.
Dans un premier temps, l'auteur énonce des chiffres vertigineux pour démontrer l'impact néfaste de l'alimentation carnée pour l'environnement (et aussi notre santé). Cet ouvrage est richement documenté et vous pourrez retrouver toutes les sources. Cette partie pourra certainement convaincre l'ensemble des sceptiques ayant besoin de preuves. de mon côté, j'étais déjà sensibilisée donc j'ai trouvé ça difficile de lire une succession de données chiffrées.
En revanche, j'ai pris beaucoup de plaisir à lire la seconde partie du livre qui aborde les solutions que l'on pourrait apporter pour végétaliser notre alimentation, remodeler l'agriculture (et la pêche) telle qu'on la connait aujourd'hui.
J'ai fortement apprécié cet ouvrage pour sa capacité à démonter un à un les arguments et idées reçues en faveur de l'élevage et contre le régime végétalien. J'ai apprécié aussi que l'on rappelle le caractère sentient des animaux, apportant une touche d'humanité à cet ouvrage parmi l'ensemble des chiffresCitations et extraits (4) Ajouter une citation
14 juillet 2024
La production de viande génère à elle seule trois fois plus d’émissions de gaz à effet de serre que l’ensemble du trafic aérien mondiale. D’ici à la moitié du siècle, la demande en produits d’élevage pourrait encore croître de 144%. Un perspective cauchemardesque, a fortiori sur une planète qui vient de connaître les huit années les plus chaudes jamais enregistrées depuis le début des relevés (1850). Mais qui a conscience que les cinq plus gros producteurs de viande et de produits laitiers dans le monde sont responsables de davantage d’émissions annuelles de gaz à effet de serre qu’ExxonMobil, Shell ou BP ? Pas grand monde. Quand les pétroliers restent la cible prioritaire des activistes, que la consommation d’énergie fossile demeure l’alpha et l’oméga du débat public, que la transition énergétique est le point focal de l’attention médiatique, que Greta Thunberg incarne la génération climat plutôt que la génération végane, la filière viande profite de l’angle mort et s’en sort plutôt bien. L’”éléphant dans la pièce”, comme disent les Anglais.
p. 1906 juillet 2024
Alors que 85% des Français se disent opposés à l'élevage intensif, une part équivalente de la viande et des poissons consommés est produite de cette façon.
Cette dissonance cognitive ne s'exprime pas seulement en termes éthiques mais également écologiques.
La croyance la plus répandue consiste en effet à considérer le petit élevage paysan comme vertueux : respectueux des animaux, bon pour le climat et même régénérateur de biodiversité. Les amateurs de viande sont nombreux à s'en autopersuader pour mieux digérer leur "Meat Paradox".
Mais les faits sont têtus : l'élevage sur pâturages a une empreinte plus élevée que l'intensif sur la plupart des critères environnementaux, au point que Georges Monbiot considère le bœuf et l'agneau élevés en bio sur pâturages comme les produits agricoles les plus nocifs au monde (publications scientifiques et méta-analyses à l'appui).
Le même mécanisme de défense cognitive se manifeste à l'égard de la pêche : la diabolisation de sa forme industrielle a pour corollaire l'idéalisation d'une petite pêche artisanale durable.
Selon une étude de la FAO, on estime pourtant que 40% des prises mondiales sont le fait de la pêche artisanale. Quoique "petite" et souvent informelle, celle-ci accomplit donc largement sa part du carnage.
Dans une société qui demeure culturellement speciste, que le récit dominant concède juste qu'il faille consommer "moins mais mieux" n'a rien de surprenant. Le flexitarisme est d'autant plus pratique qu'il est purement déclaratif et invérifiable. Mais surtout, en supposant l'existence de pratiques d'élevage, de pêche et d'abattages respectueuses et responsables, il permet de maintenir l'écran de fumée derrière lequel l'ensemble de la filière perpétue impunément un massacre qui dévore la planète.06 juillet 2024
Les animaux des élevages intensifs ( volailles, porcs, bovins ) sont principalement nourris aux fèves et tourteaux de soja.
Près de 85% des cultures mondiales de soja leur sont en effet réservés. Cette production en provenance d'Amérique Latine s'effectue aux dépens des écosystèmes naturels.
Selon Greenpeace, la viande bovine serait à elle seule responsable de 63% de la destruction de la forêt Amazonienne, à la fois directement car des pans entiers de celle-ci sont coupés pour installer des élevages destinés à l'exportation, mais aussi indirectement parce que de très vastes étendues sont rasées pour produire du soja OGM cultivé à grand renfort de pesticides.
Cette pression insoutenable est la première cause de déforestation au Brésil. Et les chiffres officiels sont probablement bien au-dessous de la réalité : de nouvelles méthodes d'analyse d'images satellites ont révélé que plus de 3 millions d'hectares d'Amazonie Colombienne ont été déboisés illégalement pour le pâturage entre 1985 et 2019.
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Un autre regard
- Par Thierry LEDRU
- Le 20/07/2024
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Je continue mes photos avec un effet miroir.
Je marche aux aguets pour trouver le lieu propice, un arbre, une roche, une plante, un horizon, le ciel, une lumière...
"Que l'importance soit dans ton regard, non dans la chose regardée" André Gide.
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Deux cartes
- Par Thierry LEDRU
- Le 17/07/2024
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"La température de l'eau au large de la Croatie est montée jusqu'à 29.7°C. Oui, 29.7°C dans l'eau en Méditerranée. Et ce n'est pas isolé : toute la Méditerranée centrale monte jusqu'à 29°C jusqu'à 31°C en Israël en lien avec une canicule interminable.
Au planétaire, pour un mi-juillet 2023 et 2024 sont à égalité, TRES largement en tête depuis 1850.
Je rappelle que les espèces marines sont très sensibles aux anomalies de températures. Leur gamme de température optimale est largement plus restreinte que les espèces terrestres. Les impacts de ces canicules marines seront énormes."@climatebookgr
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Restaurer la nature
- Par Thierry LEDRU
- Le 06/07/2024
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On a dépassé la centaine d'arbres plantés en trois ans sur notre terrain. On mange ce que produit le jardin. On se déplace très peu. On n'achète rien qui ne soit nécessaire. J'ai les mêmes vêtements depuis bien, bien longtemps. Le soir, on utilise des lampes solaires portatives. Nathalie fabrique elle-même les produits d'entretien et de toilette. On recycle, rénove, récupère, répare. On ne prend évidemment jamais l'avion.
On ne peut rien faire de plus à part mourir pour limiter totalement notre empreinte.
La restauration de la nature est notre seule solution pour le climat
Richard Heinberg, Résilience
1er juillet 2024 (traduction DeepL)
Le changement climatique est un problème énorme et compliqué. C'est pourquoi de nombreuses personnes ont une tendance compréhensible à le simplifier mentalement en se concentrant sur une seule cause (les émissions de carbone) et une seule solution (les énergies alternatives). Jan Konietzko, spécialiste du développement durable, a appelé cela la "vision tunnel du carbone". Cette simplification excessive du problème conduit à des solutions techniques qui, en réalité, ne règlent rien. Malgré les milliers de milliards de dollars déjà dépensés dans les technologies à faible teneur en carbone, les émissions de carbone continuent d'augmenter et le climat est déstabilisé plus rapidement que jamais.
Pour comprendre le changement climatique, il faut embrasser la complexité : non seulement les gaz à effet de serre piègent la chaleur, mais nous mettons également à mal les systèmes naturels qui refroidissent la surface de la planète et séquestrent le carbone atmosphérique - les systèmes de glace, de sol, de forêts et d'océans. La compréhension de cette complexité permet d'envisager de nouvelles façons de penser le changement climatique et d'y apporter des réponses viables.
Presque tout ce que nous faisons pour provoquer le changement climatique fait appel à la technologie - des voitures aux fours à ciment en passant par les tronçonneuses. Nous, les humains, aimons la technologie : elle est source de profits, d'emplois, de confort et de commodité (pour certains, en tout cas ; elle tend également à aggraver l'inégalité économique générale). Comme on pouvait s'y attendre, nous nous tournons vers des technologies alternatives pour résoudre ce qui est sans doute le plus grand dilemme que l'humanité ait jamais créé pour elle-même. Mais que se passe-t-il si ce n'est pas la bonne approche ? Et si le développement des technologies ne faisait qu'aggraver le problème à long terme ?
Dans cet article, nous verrons pourquoi il n'existe pas de solution technique viable au changement climatique et pourquoi les arbres, les sols et la biodiversité sont nos véritables bouées de sauvetage.
Les machines ne nous sauveront pas
Avant d'aborder les solutions naturelles, il convient de se demander si la technologie a un rôle à jouer. Quelles sont les machines présentées comme les principales solutions au problème du climat, et quels sont leurs points forts et leurs inconvénients ? Il existe quatre grandes catégories.
La première catégorie de technologies climatiques comprend les machines de production d'énergie à faible teneur en carbone, notamment les panneaux solaires, les éoliennes et les centrales nucléaires. Ces sources d'énergie produisent de l'électricité avec un minimum d'émissions de carbone. Cependant, elles ne sont pas exemptes de problèmes ou de risques. L'énergie éolienne et l'énergie solaire sont intermittentes, ce qui nécessite un stockage de l'énergie (par exemple, des batteries) et une refonte majeure du réseau. La construction de ces sources d'énergie à une échelle suffisante pour remplacer notre consommation actuelle de combustibles fossiles nécessiterait d'énormes quantités de matériaux, dont certains sont rares, et l'extraction de ces matériaux détruit l'habitat et pollue l'environnement. Le recyclage pourrait éventuellement minimiser les besoins en matériaux, mais il a ses limites. L'énergie nucléaire souffre également du dilemme de l'échelle (pour faire une différence significative, nous devrions construire un nombre énorme de centrales nucléaires, et rapidement), mais elle ajoute des problèmes liés à la rareté du combustible, au confinement et à l'élimination des déchets, ainsi qu'aux risques d'accidents et de prolifération des armes nucléaires.
La deuxième catégorie de technologies comprend les technologies consommant de l'énergie pour faire fonctionner le monde industriel moderne - les machines pour la fabrication, le chauffage, l'exploitation minière, l'agriculture, l'expédition et le transport. Dans de nombreux cas, les versions à faibles émissions de ces machines ne sont pas encore commercialisées, et beaucoup d'entre elles peuvent ne pas fonctionner à un coût aussi bas que les technologies actuelles (la fabrication de ciment et l'aviation sont deux industries qu'il sera difficile de décarboniser). Une fois encore, il y a le dilemme de l'échelle et la nécessité de disposer de plus de matériaux. Nous avons construit notre infrastructure industrielle actuelle sur une période de plusieurs décennies ; le remplacement rapide d'une grande partie de cette infrastructure afin de minimiser le changement climatique nécessitera une explosion sans précédent de l'extraction des ressources et de l'utilisation de l'énergie.
Une troisième catégorie de technologies de lutte contre le changement climatique consiste en des machines permettant de capturer le carbone de l'atmosphère afin de le stocker en toute sécurité pendant de longues périodes. Des technologies de "capture directe de l'air" (ou DAC) ont été mises au point et commencent à être installées. Toutefois, une méta-étude récente a conclu que ces machines souffrent de problèmes d'échelle, de coût, d'exigences en matière de matériaux et d'une consommation d'énergie élevée. Les auteurs de l'étude affirment que la priorité accordée par les décideurs politiques à la capture mécanique du carbone a jusqu'à présent abouti à un "bilan d'échec".
Si aucune de nos autres méthodes mécaniques de lutte contre le changement climatique ne fonctionne, il reste un dernier recours : les technologies de refroidissement de la planète par la gestion du rayonnement solaire. Cette solution de "géo-ingénierie solaire" consisterait à disperser de grandes quantités de minuscules particules réfléchissantes dans l'atmosphère terrestre (c'est ce que l'on appelle l'injection d'aérosols stratosphériques) ou à construire un parasol spatial pour ombrager la planète. Les critiques soulignent que ces technologies pourraient avoir des conséquences inattendues aussi graves, voire pires, que le problème qu'elles tentent de résoudre.
Il est difficile de s'opposer à la mise en œuvre d'au moins certaines de ces technologies à une échelle modeste. L'humanité est devenue systématiquement dépendante de l'énergie provenant du charbon, du pétrole et du gaz pour répondre à ses besoins fondamentaux, notamment en matière de logement, d'alimentation et de soins de santé. L'élimination rapide et complète des combustibles fossiles, sans avoir déployé d'autres sources d'énergie, entraînerait l'appauvrissement de millions ou de milliards de personnes. Un argument similaire pourrait être avancé en ce qui concerne les machines de fabrication, d'agriculture et de transport à faible émission de carbone : nous avons besoin d'autres moyens pour fabriquer des objets, produire de la nourriture et nous déplacer. Mais notre besoin de ces machines n'efface pas leurs coûts environnementaux inhérents, notamment l'épuisement des ressources, la pollution et la perte d'habitat.
L'examen des solutions techniques disponibles conduit à deux conclusions inévitables. Premièrement, le problème ne réside pas seulement dans les émissions de carbone en tant que telles, mais aussi dans la manière dont nous habitons notre planète (nous sommes trop nombreux à utiliser trop de choses, trop vite). Deuxièmement, nous avons besoin de moyens non technologiques pour faire face à la crise climatique.
Refroidir à la manière de la nature
Au cours de centaines de millions d'années, la nature a développé des cycles de refroidissement qui maintiennent la température de surface de la planète dans certaines limites (bien que le climat de la Terre oscille de manière significative). Le cycle de l'eau, qui fonctionne à grande et à petite échelle, est le plus important de ces cycles. À grande échelle, les courants océaniques déplacent d'énormes quantités d'eau autour de la planète, transférant plus d'eau sur la terre via les précipitations qu'il ne s'en évapore. À petite échelle, l'eau tombe sous forme de pluie ou d'autres formes de précipitations, est absorbée par le sol, est absorbée par les plantes et transpire ou s'évapore à nouveau dans l'atmosphère. Ce double cycle de l'eau a un effet net de refroidissement.
L'homme industriel a déstabilisé le cycle de l'eau à l'échelle planétaire. L'agriculture industrielle dégrade les sols, qui retiennent moins d'eau. Les villes en expansion couvrent le sol et canalisent les eaux de pluie vers la mer par l'intermédiaire des collecteurs d'eaux pluviales, au lieu de conserver l'eau sur la terre. Les trottoirs et les bâtiments créent l'effet bien connu d'"îlot de chaleur" urbain, qui peut faire grimper les températures de plusieurs degrés par rapport aux paysages naturels. L'agriculture industrielle, l'urbanisation et les pratiques forestières destructrices réduisent la végétation et, par conséquent, l'évapotranspiration. Résultat : même si nous ne chargions pas l'atmosphère d'un excès de dioxyde de carbone, nous continuerions à réchauffer la planète. Combinez un cycle de l'eau réduit avec le réchauffement des terres dû à l'étalement urbain, à quelques centaines de milliards de mètres carrés de trottoirs et à des sols dégradés, puis ajoutez ces ingrédients au plat de résistance que constituent les émissions surabondantes, et vous obtiendrez la recette de l'enfer sur Terre.
La solution évidente : rétablir les cycles de refroidissement de la nature. Reverdir la planète, afin d'augmenter l'évapotranspiration. Restaurer les sols pour qu'ils retiennent davantage d'eau. Et se débarrasser des trottoirs partout où c'est possible.
Il y a des défenseurs de l'asphaltage dans presque toutes les communautés. Malheureusement, leur voix est étouffée par les puissants intérêts des constructeurs de routes et des entreprises de construction, ainsi que par les automobilistes qui veulent rouler confortablement partout et en tout lieu. Il existe des revêtements perméables, mais la plupart des municipalités, confrontées aux plaintes des automobilistes concernant l'effritement des routes, choisissent simplement de recouvrir les vieilles rues d'une nouvelle couche d'asphalte noir (fabriqué à partir de pétrole) qui réchauffe l'environnement, empêche l'eau d'atteindre le sol sous-jacent et émet des fumées toxiques. Si l'humanité veut vraiment enrayer le changement climatique, elle devrait confier cette tâche aux dépavistes.
La revégétalisation de la planète est un projet gigantesque qui ne peut être entrepris que par petits bouts à l'échelle locale. Les plus grands contributeurs au petit cycle de l'eau sont les forêts intactes ; par conséquent, notre première tâche devrait être de protéger les forêts anciennes existantes (vous pouvez planter un arbre en quelques minutes, mais une forêt ancienne a besoin de plusieurs siècles pour arriver à maturité). Parallèlement, nous pouvons planter des millions d'arbres supplémentaires, mais il doit s'agir des bons types d'arbres aux bons endroits. Nous devons anticiper le changement climatique et aider les forêts à migrer vers des zones climatiques adaptées.
Le sol peut être restauré en le recouvrant de feuilles mortes, de paillis et de végétation, en y maintenant des racines vivantes le plus longtemps possible (principalement en plantant plus de cultures pérennes et moins de cultures annuelles), et en ajoutant du compost et du biochar pour aérer le sol et stimuler l'activité biologique. Toutefois, nous devons d'abord cesser de faire tout ce que nous faisons actuellement et qui nuit aux sols, notamment le travail annuel du sol et l'application d'herbicides et de pesticides. Les adeptes de la permaculture et les agriculteurs biologiques mènent ce combat depuis des décennies et ont mis au point de nombreuses techniques efficaces pour maximiser la production alimentaire tout en construisant des sols sains.
Le changement climatique réduit la biodiversité en rendant les environnements inhospitaliers pour certaines des espèces qui y vivent. De plus, tout ce que nous faisons pour provoquer le changement climatique (agriculture industrielle, urbanisation, élevage de bétail et construction de routes) contribue aussi directement à la perte de biodiversité. Mais la restauration de la biodiversité peut atténuer le changement climatique. Par exemple, pour restaurer les sols, il faut les rendre plus diversifiés sur le plan biologique (en termes de champignons, de bactéries, de nématodes et de vers). Les sols restaurés abritent d'autres organismes (plus de végétation et donc plus d'animaux sauvages, jusqu'aux buffles et aux éléphants) qui contribuent également à maintenir les cycles de refroidissement de la nature. En fait, pratiquement tous les efforts de conservation de la nature sont également des efforts d'atténuation du changement climatique.
Énergie et matériaux issus de la nature
Si les générateurs d'électricité solaire, éolienne et nucléaire ne résolvent pas le problème du climat et que les combustibles fossiles doivent être rapidement abandonnés, où trouverons-nous notre énergie ? C'est une question difficile, et pour y répondre, il faut avant tout parler de la demande.
L'ampleur de la consommation d'énergie dans les pays industrialisés aujourd'hui est tout simplement insoutenable. Quelles que soient les sources d'énergie que nous choisissons (y compris les sources fantaisistes telles que l'énergie de fusion), l'utilisation d'une telle quantité d'énergie a des effets néfastes sur l'environnement, tels que l'épuisement des ressources et la pollution toxique. Si nous voulons que notre espèce survive à long terme, nous devons réduire la demande d'énergie. Les meilleurs moyens d'y parvenir sont d'encourager la réduction de la population et de mettre en place des économies qui visent à accroître le bonheur humain plutôt que la croissance de l'extraction des ressources, de la fabrication et du transport.
À mesure que la demande d'énergie diminuera, l'humanité disposera de meilleures options d'approvisionnement. Avant que nous ne commencions à utiliser des combustibles fossiles en quantités énormes, nous obtenions une grande partie de notre énergie en brûlant du bois. Nous ne pouvons plus le faire aujourd'hui, alors que nous consommons beaucoup plus d'énergie et qu'il est nécessaire d'augmenter la couverture forestière de la planète. Au lieu de cela, nous pouvons utiliser l'énergie du soleil, du vent et de l'eau courante, non seulement de manière high-tech (photovoltaïque, éoliennes et barrages hydroélectriques), mais aussi de manière low-tech, en utilisant moins de matériaux miniers. Low-Tech Magazine explore ces options, notamment les compresseurs d'air à énergie humaine, les voiliers, les générateurs de vélo domestiques pratiques et les panneaux solaires de faible technicité, parmi beaucoup d'autres.
Si nous devons économiser l'énergie, il en va de même pour les matériaux (dont l'extraction, la fonte et la fabrication nécessitent de l'énergie). Actuellement, de nombreux matériaux que nous utilisons sont des plastiques toxiques fabriqués à partir de combustibles fossiles.
Pouvons-nous tirer de la nature tous les matériaux dont nous avons besoin, sans l'épuiser ni la polluer ? Dans l'absolu, la réponse est probablement non, à moins que nous ne revenions un jour à la chasse et à la cueillette comme mode de vie. Mais nous pouvons réduire considérablement l'épuisement et la toxicité, tout d'abord en appliquant le mantra écologiste bien connu "réduire, réutiliser et recycler", puis en remplaçant les plastiques et les métaux par des matériaux d'origine végétale chaque fois que c'est possible.
En brûlant partiellement les déchets végétaux, il est possible de produire des matériaux polyvalents pour les bâtiments, les routes et les produits manufacturés. Des milliers de petites usines de pyrolyse régionales, utilisant toute une série de matières premières, dont la plupart sont aujourd'hui considérées comme des déchets, pourraient produire à la fois du biochar (pour accroître la fertilité des sols) et des "parolysats" (matériaux à base de carbone qui pourraient être incorporés dans des produits). Dans de nombreux cas, l'ajout de carbone améliorerait les performances des matériaux, ce qui rendrait cette évolution des méthodes de fabrication rentable.
Aider la nature à capturer le carbone
Supposons que nous fassions tout cela. Pourtant, nous avons déjà émis un énorme surplus de carbone dans l'atmosphère, soit environ 1 000 milliards de tonnes. Par conséquent, même si les cycles de refroidissement naturels sont rétablis, un dangereux effet de réchauffement persistera. Pour minimiser cet effet, nous devrons éliminer et séquestrer une grande quantité de carbone atmosphérique, et ce rapidement. Comme nous l'avons vu, les machines DAC ne fonctionnent pas. Qu'est-ce qui fonctionnera ?
La nature élimine et séquestre déjà environ la moitié du carbone émis par la combustion des combustibles fossiles par l'homme. Les graphiques de la concentration annuelle de gaz à effet de serre dans l'atmosphère illustrent cet effet : pendant les mois d'été dans l'hémisphère nord, lorsque les plantes fleurissent sur les plus grandes masses terrestres de la planète, la concentration de CO2 dans l'atmosphère diminue de manière significative. Puis, en hiver, elle rebondit et augmente encore en raison de l'accroissement continu des émissions. Les océans absorbent beaucoup plus de CO2 que les terres. Nous devons aider la nature à en absorber beaucoup plus qu'elle ne le fait déjà (tout en réduisant les émissions de manière spectaculaire et rapide, au lieu de continuer à les augmenter).
À l'échelle mondiale, les sols contiennent environ 1 500 milliards de tonnes métriques de carbone ; ils constituent la deuxième réserve active de carbone après les océans (40 000 milliards de tonnes). Actuellement, l'humanité force les sols à céder leur carbone à l'atmosphère par le travail annuel du sol, l'érosion et la salinisation. Cependant, en adoptant différentes pratiques, nous pourrions restaurer les sols et ainsi augmenter de manière significative leur teneur en carbone. Les pratiques les plus utiles sont l'agriculture régénératrice et l'agriculture du carbone. Il est difficile d'estimer la quantité de carbone que les sols pourraient capturer si nous adoptions ces pratiques à grande échelle, mais certains experts estiment que cette quantité pourrait dépasser les 20 milliards de tonnes d'ici 2050 (bien entendu, cela suppose des efforts considérables et coordonnés, soutenus par les gouvernements et les agriculteurs).
L'utilisation généralisée du biochar et des matériaux parolysés pourrait également permettre de capturer d'importantes quantités de carbone. Dans leur livre Burn : Igniting a New Carbon Drawdown Economy to End the Climate Crisis, les auteurs Albert Bates et Kathleen Draper suggèrent que la quantité de carbone qui pourrait théoriquement être séquestrée dans les bâtiments, les routes et les produits de consommation est de l'ordre de centaines de milliards de tonnes.
Les arbres et autres types de végétation stockent déjà une grande quantité de carbone, mais les pratiques agricoles et forestières actuelles réduisent cette quantité chaque année. Selon certaines estimations, les forêts pourraient à elles seules capturer et stocker plus de 200 milliards de tonnes de carbone atmosphérique si nous commencions à ajouter des arbres d'une manière écologiquement sensible, plutôt que d'en soustraire sur une base nette.
L'échelle même de l'océan et sa teneur en carbone existante signifient que le potentiel théorique de capture du carbone à partir de l'océan dépasse celui des autres options. Toutefois, l'exploitation de ce potentiel à grande échelle (par exemple, par la culture de microalgues ou l'amélioration de l'alcalinité des océans) nécessiterait des interventions technologiques massives. Certains chercheurs estiment qu'en encourageant la croissance des laminaires, une intervention simple, on pourrait capturer et stocker jusqu'à 200 millions de tonnes de carbone par an. Les zones humides telles que les marais et les marécages ne couvrent que 3 % des terres de la planète, mais contiennent deux fois plus de carbone que toutes les forêts ; si elles étaient restaurées, elles pourraient capturer et stocker une quantité importante de carbone (bien que les estimations varient considérablement). La surpêche, le transport maritime, le ruissellement des engrais, la destruction des zones humides côtières et la pollution par les plastiques dévastent actuellement les écosystèmes océaniques, leur faisant perdre une grande partie de leur capacité de capture du carbone. L'extraction de minéraux du fond des océans pour construire des systèmes d'énergie renouvelable à grande échelle ne ferait qu'aggraver une situation déjà sombre. Il semble que, dans le cas des océans, la chose la plus importante que nous puissions faire soit tout simplement d'arrêter les dégâts en cours.
Si nous prenions ces mesures, pourrions-nous éliminer tout l'excès de carbone dans l'atmosphère et ainsi arrêter le changement climatique ? Il n'est probablement pas possible d'arrêter complètement le réchauffement de la planète, car le réchauffement est déjà en cours en raison de la dynamique des rétroactions qui ont déjà été déclenchées, notamment la fonte des glaciers et de la glace de mer. En outre, la mise en œuvre rapide de toutes ces mesures (au cours des deux ou trois prochaines décennies, par exemple) nécessiterait un niveau sans précédent de coordination et d'efforts au niveau international. Néanmoins, les chiffres s'additionnent : il est possible de réduire l'excès de carbone atmosphérique à une échelle proportionnelle au problème en utilisant des méthodes de restauration de la nature plutôt que des machines. C'est une bonne chose, car les machines ne fonctionnent tout simplement pas.
Tout changer
Contrairement à la technologie, la nature se répare constamment. Elle tend à dépolluer plutôt qu'à répandre des toxines. Elle crée des ressources au lieu de les épuiser. Mais pour répondre à tous les besoins humains et résoudre les problèmes à la manière de la nature, nous devrons penser tout à fait différemment. Il ne s'agit pas seulement de mettre progressivement de côté les technologies nocives et trop complexes, mais aussi de modifier les incitations et désincitations sociétales subtiles qui nous poussent à nous tourner d'abord vers les machines, même lorsque les conséquences involontaires sont faciles à repérer.
Une société plus proche de la nature se caractérisera par un nombre réduit de personnes vivant plus près de la terre, avec un débit d'énergie et de matériaux bien inférieur à celui des nations industrialisées d'aujourd'hui. Nous serons moins urbanisés et plus ruraux. Nous dépendrons moins de l'argent et davantage de la coopération communautaire.
C'est ainsi que les peuples autochtones ont vécu pendant des millénaires, et il n'est donc pas surprenant que certains des efforts les plus fructueux d'atténuation du changement climatique basés sur la nature soient menés par des communautés autochtones.
Heureusement, il est possible pour les individus et les ménages de faire la différence en favorisant la biodiversité dans leurs maisons, leurs jardins et leurs communautés, et de réduire leur consommation d'énergie et de matériaux en choisissant au quotidien ce qu'ils achètent (ou n'achètent pas), ce qu'ils mangent, et comment (et combien) ils se déplacent.
Malheureusement, les circonstances nous obligent à opérer un changement décisif dans notre façon de penser et de vivre à un moment où nous sommes également confrontés à une énorme menace. Puisque le réchauffement est désormais inévitable, il est presque certain que le reste de ce siècle sera marqué par des migrations massives et une instabilité politique. En raison de ces défis sociaux, il sera plus difficile pour les nations et les communautés de déployer des efforts cohérents et à grande échelle pour restaurer les écosystèmes.
Néanmoins, tout ce que nous ferons pour tenter de ralentir ou d'arrêter le changement climatique sera plus efficace s'il vise à aider la nature à faire davantage ce qu'elle fait déjà. Restaurer la nature n'est pas seulement notre meilleure solution climatique, c'est notre seule solution.
Merci à Bio4Climate et à Christopher Haines pour leur inspiration et leur aide dans la rédaction de cet article.
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Les JO de Paris en 1924
- Par Thierry LEDRU
- Le 04/07/2024
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Les JO de Paris en 1924.
Vraiment un beau documentaire sur cette époque, pas juste un regard sur le sport mais sur la société de l'époque.
Les tenues des sportifs, les infrastructures, les différentes épreuves, certaines ayant disparues depuis, le cross country notamment. D'ailleurs il a fait 46 degrés ce jour-là à Paris... Les climato-sceptiques vont encore se gausser. ^^
Plus intéressante que cette anecdote, on voit la situation des femmes dans le sport en 1924 et dans la société elle-même....
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Les animaux ont-ils une conscience ?
- Par Thierry LEDRU
- Le 29/06/2024
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J'aurais tendance à penser que certains humains usent de leur conscience dans un état d'inconscience sidérant. Au regard des animaux et de la planète toute entière.
Les animaux ont-ils une conscience? : de nouvelles preuves marquent un "changement radical" dans ce que nous savons du comportement animal
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Article information
Author, Pallab Ghosh
Role, Correspondant scientifique, BBC News
27 juin 2024
Charles Darwin occupe une place presque sacrée parmi les scientifiques pour sa théorie de l'évolution. Cependant, son idée selon laquelle les animaux sont conscients au même titre que les humains a longtemps été rejetée. Jusqu'à aujourd'hui.
"Il n'y a pas de différence fondamentale entre l'homme et les animaux dans leur capacité à ressentir le plaisir et la douleur, le bonheur et la misère", a écrit Darwin.
Mais sa suggestion que les animaux pensent et ressentent a été considérée comme une hérésie scientifique par de nombreux, voire la plupart, des experts du comportement animal.
Attribuer une conscience aux animaux sur la base de leurs réponses était considéré comme un péché capital. L'argument était que projeter des traits, des sentiments et des comportements humains sur les animaux n'avait aucune base scientifique et qu'il n'y avait aucun moyen de tester ce qui se passe dans l'esprit des animaux.
Mais si de nouvelles preuves de la capacité des animaux à percevoir et à traiter ce qui se passe autour d'eux apparaissent, cela pourrait-il signifier qu'ils sont conscients ?
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Légende image, Charles Darwin a affirmé que les animaux avaient la capacité de ressentir le plaisir et la douleur, le bonheur et la misère.
L'exemple des abeilles
Nous savons aujourd'hui que les abeilles savent compter, reconnaître des visages humains et apprendre à utiliser des outils.
Le professeur Lars Chittka, de l'université Queen Mary de Londres, a participé à de nombreuses études importantes sur l'intelligence des abeilles.
"Si les abeilles sont si intelligentes, elles peuvent peut-être penser et ressentir quelque chose qui est à la base de la conscience", explique-t-il.
Les expériences du professeur Chittka ont montré que les abeilles modifiaient leur comportement après un incident traumatisant et semblaient capables de jouer, en faisant rouler de petites boules de bois, une activité qu'elles semblaient apprécier.
Ces résultats ont persuadé l'un des scientifiques les plus influents et les plus respectés dans le domaine de la recherche animale de faire cette déclaration forte, brutale et controversée :
"Compte tenu de toutes les preuves disponibles, il est très probable que les abeilles aient une conscience", a-t-il déclaré.
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Légende image, Des études indiquent que les abeilles changent de comportement après un incident traumatisant.
"Changement radical"
Il ne s'agit pas seulement des abeilles. Nombreux sont ceux qui s'accordent à dire que le moment est venu de réévaluer notre conception de la conscience animale, sur la base de nouvelles données qui marquent un "changement radical".
Le professeur Jonathan Birch, de la London School of Economics, fait partie de ce groupe de scientifiques.
"Nous avons des chercheurs de différents domaines qui commencent à oser poser des questions sur la conscience animale et à réfléchir explicitement à la manière dont leurs recherches pourraient être pertinentes pour ces questions", déclare M. Birch.
Cependant, ceux qui s'attendent à un moment d'euphorie seront déçus.
Au contraire, les preuves de plus en plus nombreuses de la nécessité de repenser ce paradigme ont suscité des commentaires parmi les chercheurs concernés. Nombre d'entre eux appellent désormais à un changement de la pensée scientifique dans ce domaine.
Ce qui a été découvert n'est peut-être pas une preuve concluante de la conscience animale, mais dans l'ensemble, cela suffit à suggérer qu'il existe "une possibilité réaliste" que les animaux soient capables de conscience, déclare M. Birch.
Cela vaut non seulement pour les animaux dits supérieurs, comme les singes et les dauphins, qui ont atteint un stade de développement plus avancé que les autres animaux, mais aussi pour les créatures plus simples, qui ont atteint un stade de développement plus avancé que les autres animaux. Cela s'applique également à des créatures plus simples, telles que les serpents, les pieuvres, les crabes, les abeilles et peut-être même les drosophiles.
Ce groupe de scientifiques cherche à obtenir un financement pour poursuivre les recherches afin de déterminer si et dans quelle mesure les animaux sont conscients.
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Légende image, Les scientifiques considèrent les singes comme des animaux supérieurs parce qu'ils sont à un stade de développement plus élevé que les autres espèces.
Comment définir la conscience
Si vous vous demandez ce que l'on entend par "conscience", vous n'êtes pas le seul. Les scientifiques ne parviennent même pas à se mettre d'accord sur cette question.
L'une des premières tentatives remonte au XVIIe siècle, avec le philosophe français René Descartes, qui a déclaré : "Je pense, donc je suis".
"Le langage est le seul signe certain de la pensée cachée dans un corps", ajoutait-il.
Mais ce raisonnement a trop longtemps brouillé les pistes, estime le professeur Anil Seth, de l'université du Sussex, qui a débattu de la définition de la conscience pendant une grande partie de sa carrière professionnelle.
"Cette trinité impie du langage, de l'intelligence et de la conscience remonte à Descartes", a-t-il déclaré à la BBC, inquiet de l'absence de remise en question de cette approche jusqu'à récemment.
La "trinité impie" est au cœur d'un mouvement appelé béhaviorisme, qui a vu le jour au début du XXe siècle. Selon ce mouvement, les pensées et les sentiments ne peuvent être mesurés par des méthodes scientifiques et doivent donc être ignorés lors de l'analyse du comportement.
Bien que de nombreux comportementalistes animaliers aient été formés à cette école, une approche moins centrée sur l'homme commence à s'ouvrir, selon Seth.
"Parce que nous voyons les choses à travers une lentille humaine, nous avons tendance à associer la conscience au langage et à l'intelligence", explique-t-il. "Le fait qu'ils soient ensemble chez nous ne signifie pas qu'ils vont ensemble en général.
Crédit photo, Avec l'aimable autorisation de l'Institut canadien de recherches avancées
Légende image, Le chercheur Anil Seth s'interroge sur la définition de la conscience.
La sensibilité plutôt que la conscience
Certains sont très critiques à l'égard de certaines utilisations du mot "conscience".
"Le domaine est plein de mots ambigus et malheureusement l'un d'entre eux est la conscience", avertit le professeur Stevan Harnad de l'Université du Québec.
"C'est un mot que beaucoup de gens utilisent avec confiance, mais qui a une signification différente selon les personnes, et dont le sens n'est donc pas clair du tout.
M. Harnad estime qu'un mot plus approprié et moins ambigu pourrait être "sensibilité", qui se définit plus étroitement comme la capacité de ressentir.
"On ressent tout, un pincement, la couleur rouge, la fatigue et la faim, ce sont toutes des choses que l'on ressent", explique-t-il.
D'autres personnes qui étaient instinctivement sceptiques quant à l'idée que les animaux puissent être conscients affirment que la nouvelle interprétation, plus large, de ce que signifie être conscient fait une différence.
C'est le cas du Dr Monique Udell, de l'université d'État de l'Oregon, qui a une formation de comportementaliste.
"Si nous examinons différents comportements, par exemple quelles espèces peuvent se reconnaître dans un miroir, combien d'entre elles peuvent planifier ou se souvenir de choses qui se sont produites dans le passé, nous pouvons tester ces questions par l'expérimentation et l'observation et tirer des conclusions plus précises sur la base de données", explique-t-il.
"Et si nous définissons la conscience comme une somme de comportements mesurables, alors les animaux qui ont réussi ces tâches particulières peuvent être considérés comme ayant quelque chose que nous choisissons d'appeler conscience.
Cette définition de la conscience est beaucoup plus étroite que celle proposée par le nouveau groupe, mais selon le Dr Udell, la science est une affaire de confrontation respectueuse des idées.
"Il est important d'avoir des gens qui prennent les idées avec prudence et qui ont un œil critique, car si nous n'abordons pas ces questions de différentes manières, il sera plus difficile de progresser.
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Légende image, Les scientifiques s'accordent à dire qu'il est important de développer la recherche scientifique sur les animaux.
Une déclaration de conscience animale
Mais qu'en sera-t-il ensuite ? Certains affirment qu'il faut étudier beaucoup plus d'espèces pour déterminer s'il est possible que les animaux aient une conscience.
"À l'heure actuelle, la plupart des travaux scientifiques sont menés sur des êtres humains et des singes, et nous faisons un travail beaucoup plus difficile que nécessaire parce que nous n'apprenons rien sur la conscience dans sa forme la plus élémentaire", déclare Kristin Andrews, professeur de philosophie spécialisée dans l'esprit des animaux à l'université York de Toronto.
Kristin Andrews et beaucoup d'autres pensent que la recherche sur les humains et les singes est l'étude d'un niveau de conscience plus élevé (qui se manifeste par la capacité à communiquer et à ressentir des émotions complexes), alors qu'une pieuvre ou un serpent peuvent également avoir un niveau de conscience plus élémentaire que nous ignorons en ne l'étudiant pas.
Le chercheur a été l'un des principaux instigateurs de la déclaration de New York sur la conscience animale, qui a été signée au début de l'année par 286 chercheurs.
Cette brève déclaration de quatre paragraphes affirme qu'il est "irresponsable" d'ignorer la possibilité d'une conscience animale.
"Nous devons prendre en compte les risques pour le bien-être et utiliser des données probantes pour éclairer nos réponses à ces risques", déclare-t-il.
Crédit photo, Avec l'aimable autorisation de l'Université de York
Légende image, Kristin Andrews a fait la promotion de la déclaration de New York sur la conscience animale.
Chris Magee est membre de Understanding Animal Research, un organisme britannique soutenu par des organismes de recherche et des entreprises qui pratiquent l'expérimentation animale.
Il affirme que les animaux sont supposés avoir une conscience lorsque des expériences sont menées sur eux et prévient que la réglementation britannique exige que les expériences ne soient menées que si les avantages pour la recherche médicale l'emportent sur les souffrances causées.
"Il y a suffisamment de preuves pour que nous adoptions une approche de précaution", déclare-t-il.
"Mais il y a aussi beaucoup de choses que nous ignorons, notamment sur les crustacés décapodes tels que les crabes, les homards, les tourteaux et les crevettes.
"Nous ne savons pas grand-chose de leur expérience de vie, même des choses élémentaires comme le moment où ils meurent. C'est important, car nous devons établir des règles pour les protéger, que ce soit en laboratoire ou dans la nature."
Une étude dirigée par M. Birch en 2021 a évalué 300 études scientifiques sur la sensibilité des décapodes et des céphalopodes, qui comprennent les pieuvres, les calmars et les seiches.
L'équipe du professeur Birch a constaté qu'il existait des preuves solides que ces créatures étaient sensibles, car elles pouvaient éprouver des sensations de douleur, de plaisir, de soif, de faim, de chaleur, de joie, de confort et d'excitation.
Les conclusions de cette étude ont conduit le gouvernement britannique à inclure ces créatures dans sa loi sur le bien-être des animaux en 2022.
"Les questions relatives au bien-être des pieuvres et des crabes ont été négligées", déclare M. Birch. "La science émergente devrait encourager la société à prendre ces questions un peu plus au sérieux."
Crédit photo, Getty Images
Légende image, Les animaux tels que les pieuvres peuvent avoir un niveau de conscience qui n'est pas connu parce qu'il n'est pas étudié.
Hérétiques
Il existe des millions d'espèces animales différentes et très peu de recherches ont été menées sur la manière dont elles perçoivent le monde.
Nous en savons un peu plus sur les abeilles et d'autres chercheurs ont montré des signes de comportement conscient chez les cafards et même les mouches à fruits, mais il y a beaucoup d'autres expériences à faire sur beaucoup d'autres animaux.
C'est un domaine d'étude que les hérétiques signataires de la Déclaration de New York affirment avoir négligé, voire ridiculisé. Leur démarche, dire l'indicible et risquer la sanction, n'est pas nouvelle.
À l'époque où René Descartes disait "Je pense, donc je suis", l'Église catholique soupçonnait avec véhémence l'astronome italien Galileo Galilei d'hérésie pour avoir suggéré que la Terre n'était pas le centre de l'Univers.
Ce changement de mentalité nous a ouvert les yeux sur une image plus vraie et plus riche de l'Univers et de notre place dans celui-ci.
Le fait de nous déplacer une seconde fois du centre de l'Univers pourrait avoir le même effet sur notre compréhension de nous-mêmes et des autres êtres vivants avec lesquels nous partageons la planète.
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L'insignifiante réalité
- Par Thierry LEDRU
- Le 28/06/2024
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"La connaissance ouvre la conscience. Vaut-il mieux être malheureux en conscience ou heureux par inconscience ?"
Sylvie Raffin-Callot
J'ai vécu une partie de ma vie dans une totale insouciance au regard de l'état de la nature. J'ai goûté au bonheur de la haute montagne, des randonnées en forêts, des baignades dans des lacs d'altitude, des raids à vélo, des sorties de ski de randonnée, des milliers d'heures à courir, à marcher, à pédaler, à skier, à nager, à contempler les beautés de la Terre.
Puis, avec l'âge et de multiples lectures sur la biodiversité, l'impact de l'humain sur la faune, la flore, le climat, les cours d'eau, les océans, l'atmosphère, la souffrance animale, j'ai basculé de l'insouciance à une forme de désespérance, un assommoir qui ne cesse de me frapper, une connaissance pesante et qui reste, malgré ses effets, absolument nécessaire parce qu'elle me permet d'agir en conscience.
Alors oui, cette conscience est douloureuse mais cette douleur est compensée par les effets de mon engagement, un effet dérisoire au regard du désastre planétaire mais un effet qui me permet de me supporter, en tant qu'humain.
J'ai même longtemps écrit des textes qui explorait la dimension spirituelle et quelque peu philosophique, à mon humble niveau. Puis j'ai arrêté ce travail intérieur parce que cette conscience de la vie et de mon impact sur elle me montrait à quel point ma quête spirituelle était artificielle, déconnectée du monde réel, ce que j'ai fini par appeler "mon insignifiante réalité".
Je vivais dans une sphère "intellectuelle" qui conférait à un état de "hors sol" bien que je passais la majeure partie de ma vie dehors, au plus près de la nature. Une nature dont je ne connaissais finalement pas grand-chose. Elle n'était qu'un terrain de jeu, une scène plaisante qui répondait à mes besoins physiques.
Il n'aurait servi à rien que je regrette cet état d'insouciance, que je me flagelle pour toutes les erreurs passées. Puisque j'avais enfin accédé à un état de conscience.
Libéré de "l'ego encapsulé" (Alan watts), il fallait que j'en fasse quelque chose.
Comme le dit très justement Sylvie Raffin-Callot (que je remercie pour la concision parfaite de sa réflexion), j'alterne entre la douleur générée par cette conscience et la satisfaction d'agir désormais selon ma conscience. Je gagne à travers la douleur une sérénité réelle et non un bien-être égotique. La question se pose d'ailleurs de savoir si toutes les thérapies qui proposent d'aller mieux dans un monde qui va mal ne participent pas finalement elles-mêmes à ce monde. Si l'objectif est de supporter ce monde et de parvenir à s'y insérer sans souffrance mais sans rien y changer, c'est juste un travail sur soi mais cela n'a aucune incidence sur le monde lui-même.
Ce monde va-t-il mal parce que trop de gens le supportent encore ? Faudra-t-il donc attendre que la douleur de l'état de conscience se généralise pour commencer à entrevoir la possibilité d'une évolution planétaire ?
Alors qu'advienne la douleur de la conscience, pour tous, qu'elle soit si forte que les nuits en deviennent blanches. Je ne parle pas des nuits blanches parce que la situation affective, amoureuse, familiale, sociale, professionnelle serait difficile.
Je parle des nuits blanches au regard de la douleur envers la planète créée par l'humain, ce fameux phénomène anthropique dont parle les scientifiques, ces tout autant fameux scientifiques tant décriés, tant moqués, ignorés, conspués.
Notre plus jeune garçon, qui a désormais trente ans, a obtenu un doctorat en sciences de l'écologie et son rêve était de travailler dans la recherche.
BAC + 8.
Il arrête tout aujourd'hui car le travail d'un chercheur, depuis quelque temps déjà, c'est surtout de chercher des financements pour ses recherches et de remplir des tonnes de papier, de documents, de demandes administratives et la plupart du temps pour n'avoir qu'un refus. La science qui n’œuvre pas dans un domaine rentable, qui travaille sur des projections écologiques, sur des alertes, sur des états des lieux et des visions de l'avenir, ça n'est pas exploitable, ça ne rapporte rien, c'est mal vu...
Nous sommes entrés dans une période sombre et peu de gens ont idée des noirceurs à venir. Pire même, ils ne veulent surtout pas en entendre parler.
C'est ce que j'appelle « l'insignifiante réalité » de l'individu.
Et c'est elle qui dirige..
Des politiciens qui nous gouvernent à ceux qui les élisent.
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TERRE SANS HOMMES (5)
- Par Thierry LEDRU
- Le 27/06/2024
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CHAPITRE 9
Figueras avait deviné les appels. Il s’y était préparé. Il avait prévenu le clan qu’il devait s’isoler. Il avait investi une hutte, amassé du bois pour le feu, des herbes précises, celles qui nourrissent l’énergie visuelle, celles qui créent le lien, qui effacent les distances, qui emportent dans les flots de particules. Deux jarres pleines d’eau. Aucun aliment sinon les feuilles de coca. Le jeûne serait la voie.
Rauni Magga lui apparut la première nuit, une nuit de pleine lune, un air transi par l’effacement des nuages. Figueras était sorti pour saluer l’astre. L’immobilité de l’atmosphère, la nudité du ciel figé au-dessus des montagnes, l’air suspendu murmurait des désirs de neige. Figueras avait dansé dans l’espace, il avait tourné lentement, tourné encore, rotation de planètes autour de leur soleil, les noirceurs bues comme des filtres magiques, des condensés d’éblouissements, il devenait le réceptacle de tout ce que l’atmosphère percevait de l’agitation terrestre, un flux phénoménal d’informations, toute l’histoire révélée, tous les événements condensés, les liens immatériels des esprits, ceux qui parlent en silence dans leur cœur, ceux qui connaissent les passerelles.
Rauni dansait dans le froid polaire, des peaux de bêtes le couvrant totalement, des auras blanches de chaleur enveloppaient le troupeau de rennes, les cristaux de neige scintillaient sous la lune comme des yeux fascinés par le chant des étoiles, Rauni dansait et propageait dans la nuit métallique toutes les images qu’il avait accumulées, un bateau venant d’une île glacée, des survivants, tous malades, leur hospitalisation, la contamination, la diffusion, l’épidémie, des villes en quarantaine, l’armée sommée de contenir les fuyards, les soldats atteints eux-mêmes par cette toux fatale, aucune frontière ne pouvait arrêter le mal. Seuls les Samis, isolés dans les montagnes, aux confins de la Scandinavie, dans les terres désertées par les blancs, eux seuls étaient épargnés. Ils avaient dû abattre quelques citadins malades en quête d’un refuge. Les villages les plus proches des zones habitées par les blancs avaient été abandonnés. Tous les Samis retrouvaient la vie des ancêtres et ceux qui avaient déjà perdu le savoir des anciens étaient condamnés.
Llojha avait rejoint le fil des esprits, le peuple des Tchouktches parle encore à la terre et en reçoit les visions. La Sibérie avait perdu sa population russophone. Il ne restait que les peuplades autochtones. Aucune ne viendrait en aide aux Russes. Nul esprit de vengeance. Juste que ça ne les regardait pas. Le temps des retrouvailles était venu, les retrouvailles avec les esprits, loin de la folie des hommes. La toux qui rongeait les voix courait dans les villes et les morts jonchaient les rues.
Puis Figueras reçut les visions d’autres vrais hommes, ceux de ce continent noir où éclataient tant de couleurs, des savanes aux forêts tropicales, puis ceux des pays de mousson, puis ceux des pays de sable, puis ceux des îles comme des points minuscules sur le corps bleu, puis ceux des très hautes montagnes, celles où le ciel se reposait, puis celles des jungles les plus denses.
Partout où les tribus les plus isolées avaient traversé les âges sans jamais disparaître totalement sous le joug des hommes avides, les porteurs du savoir ancestral diffusaient les images d’un monde effondré.
Lorsque Figueras, après plusieurs nuits de rencontres, rejoignit le clan, il raconta à son peuple qu’il ne restait plus sur la Terre que des villes désertées et que la végétation avait commencé son envahissement. Et tous s’en réjouirent.
Figueras quittait les rêves de contact avec un sentiment étrange. Il lui suffisait de penser aux enfants du clan et de se projeter vers tous les enfants du monde. Aucun d’entre eux n’était responsable, de quoi que ce soit et ils mouraient pourtant comme autant de jeunes graines trop fragiles. Mais aussitôt venait l’image d’un corps immense dépérissant, une humanité cannibale, les enfants n’étant que des fractions de cette entité, nullement des éléments différenciés. Ils auraient tous pris un jour le chemin de leurs pères et de leurs mères, ils auraient tous suivi la voie unique qui leur était imposée, celle de la matière, celle du pillage, de la dévastation. L’épuration devait s’étendre à tous les niveaux. Rien d’autre n’était possible. Dans ce monde moderne, la connaissance était au service du progrès, le progrès amenait le confort, le confort favorisait l’asservissement et l’asservissement était le fondement du pouvoir. Les enfants n’y pouvaient rien, ils étaient condamnés. Ils appartenaient aux maîtres du pouvoir.
Ils resteraient des survivants, les plus solides, les plus endurants, les plus vivants, ceux qui parviendraient à oublier les cités et à retourner à la terre. Quelques-uns, pas beaucoup. Très peu.