Blog
-
La vie dans la mare
- Par Thierry LEDRU
- Le 27/06/2024
- 0 commentaire
Il s'en passe des choses dans une mare. Un foisonnement de vie qu'on n'imagine pas. A la fin de la journée de travail sur le terrain, j'aime bien aller m'asseoir sur la terrasse qui surplombe notre mare. Libellules, papillons dans les fleurs, dytiques, notonectes, girins, tritons, grenouilles, ça foisonne.
J'ai déjà fait des dizaines de photos mais malheureusement le site, ici, ne les prend pas, elles sont trop volumineuses... :(
-
TERRE SANS HOMMES ( 4)
- Par Thierry LEDRU
- Le 24/06/2024
- 0 commentaire
C'est long la fin du monde et je repensais au confinement que nous avons tous vécu.
Imaginons maintenant que s'y ajoutent le dysfonctionnement complet de la distribution électrique, l'arrêt du réseau internet, l'isolement dans l'incertitude.
Il faudra être capable de vivre autrement.
Est-ce que, dans le cas d'un chaos planétaire, dans l'absence totale de projection vers un retour "à la normale", les individus sauront s'organiser ?
Certains me diront que ce sont des questions inutiles étant donné que ça ne se produira pas.
Et je répondrai que certains événements passés qui n'auraient jamais dû se produire sont aujourd'hui étudiés dans les livres d'Histoire.
TERRE SANS HOMMES
CHAPITRE 6
Francis aurait aimé descendre en ville, longer la côte, voir ce qui restait du monde. L’isolement commençait à lui peser fortement et il s’imaginait mal continuer à vivre reclus avec Tim. Fendre du bois, travailler au potager, penser à filtrer l’eau des citernes pour leur consommation quotidienne, changer le poteau d’une barrière, désherber les allées entre les rangs de pommes de terre et les oignons, écraser les doryphores et les chenilles qui dévoraient les feuilles des légumes. L’été était sec et chaud, trop sec et trop chaud d’après Tim. On atteignait même la zone critique et les incendies de forêts risquaient de faire des ravages. Les anciens, disaient Tim, n’avaient jamais connu de méga feux et n’auraient jamais cru ça possible. Pas en Nouvelle-Zélande.
« En Australie, tu n’imagines pas l’étendue des incendies. C’est une catastrophe, des centaines de milliers d’animaux brûlés vifs, des millions d’arbres. Tous les scientifiques qui bossent sur le dérèglement climatique avaient prévenu les gouvernements et pas un seul n’a été foutu de revoir la copie. Croissance, croissance, on continue et on verra bien le moment venu. Tous des connards. Le moment venu, c’est trop tard. Le changement climatique, c’est pas un truc à la petite semaine mais tous ces politiciens n’ont qu’un seul repère temporel, celui de leur mandat. L’humanité est en vrac et même si aujourd'hui toutes les sources de pollution sont anéanties, il faudra cent ans avant qu’on ne voit une amélioration sur le climat de la planète. Et quand je dis cent ans, c’est un grand minimum. Les phénomènes extrêmes ne vont pas s’arrêter du jour au lendemain. Six limites planétaires sur huit sont dépassées.
- Explique.
- Putain, tu vivais vraiment dans une bulle, toi !
- Oui, je sais. Une bulle de merde.
- T’es pas tout seul, tu faisais même partie du groupe humain le plus vaste, des milliards de connards.
- Bon, tu m’expliques ? Pour le reste, t’inquiète, j’ai plus besoin de toi pour savoir que j’étais un de ces connards. Et même un fou. »
Une voix cassante.
Tim sentit la honte, un regard fuyant, la douleur d’être soi était la pire.
« Pardon, Francis, je ne voulais pas te faire de mal.
- Pas grave, Tim. C’est juste que c’est long à admettre. Ce que j’étais et ce que j’ai fait. Vas-y, raconte.
- Ouais, alors, les limites planétaires.Ce sont des seuils à ne pas dépasser pour que les écosystèmes restent viables. On a le climat, la biodiversité, le cycle de l’azote, le cycle du phosphore, l’eau douce souterraine, l’eau douce de surface, la préservation des sols, la pollution atmosphérique. Et bien évidemment, chaque entité est considérablement impactée par l’exploitation humaine.
- Donc, ça va aller mieux maintenant que tout est en vrac.
- Oui, mais ça prendra du temps. Beaucoup de temps. En fait, il faudrait que je connaisse le nombre d’humains encore en vie et l’état des pays industrialisés puisque ce sont eux les principaux responsables. C’est à partir de ça que je pourrai calculer approximativement le rétablissement des équilibres. Mais pour ça, il me faudrait aussi mon ordinateur et une connexion internet. Et des mois de travail. Donc, on oublie. »
Tim pouvait parler pendant une heure sans s’interrompre mais tout autant ne pas prononcer un mot pendant une journée entière et Francis n’essayait plus d’engager une discussion. Il attendait que Tim prenne la parole. Quand on obtient qu’un borborygme, une fois, dix fois, cent fois, il arrive un moment où l’envie de parler s’évanouit. Francis avait donc adopté le rythme de Tim. Mais les sujets de discussion ne sortaient guère du cadre étroit de la situation générale. Francis aurait aimé parler des All Blacks, des survivalistes, des villes du pays, des sites touristiques, des stations de ski, de bagnoles, de filles aussi. Les filles… Oui, clairement, elles lui manquaient. Une compagnie féminine, une soirée à une terrasse, une nuit d’amour. Et les parties de cartes. Il avait demandé à Tim s’il avait un jeu.
« Et qu’est ce que j’aurais foutu tout seul avec un jeu de cartes ?
- Un château ? T’as jamais fait un château de cartes quand t’étais gamin ?
- T’as fait ça, toi ? Ben, putain, tu devais bien te faire chier. Moi, quand j’étais gamin, soit j’étais dehors, soit je lisais un bouquin.
- J’ai jamais trop aimé les bouquins.
- Ben, tu vas pouvoir t’y mettre. C’est long la fin du monde.
- Oui, c’est bon, ça, j’ai bien compris. C’est long.
- Toi, tu t’emmerdes, c’est ça ?
- Je vais pas dire que je m’emmerde mais je vais pas dire non plus que c’est très varié la vie de fin du monde. »
Tim n’avait rien répondu. Francis avait vu son visage se fermer.
Tim pensait, donc il ne parlait plus.
Et il pensa beaucoup, durant plusieurs jours.
C’est le 15 décembre que Tim dévoila ses pensées. Et ce fut un choc pour Francis.
« Bon, on se casse. On remplit la bagnole avec toute la bouffe, les flingues et deux, trois trucs que j’ai préparés. Et prends ton pognon.
- On va où ?
- On prend la mer.
- La mer ? Me dis pas que tu veux rentrer en France !
- C’est ça. Mais si tu préfères rester là, je te laisse la baraque. »
Tim expliqua et Francis, ébahi, le laissa parler.
Le navire d’exploration polaire de l’université de Christchurch, un très bon voilier, Tim savait le manœuvrer, un seul homme pouvait y parvenir avec quelques connaissances, un amarrage dans la baie de Port Levy, des panneaux solaires pour la production électrique et la dessalinisation de l’eau, des réserves de nourriture lyophilisée, il avait étudié le parcours, le Pacifique, passage du Cap Horn, un arrêt éventuel, si besoin, aux îles Malouines et remontée de l’Atlantique, deux mois de navigation, trois maximum, le record du Vendée Globe est de soixante-quatorze jours alors qu’ils n’auront qu’une petite partie du parcours à effectuer.
« Une petite partie ? Non, mais tu rigoles ou quoi, le Cap Horn, je n’y connais rien mais j’en ai entendu parler, c’est un vrai cimetière de bateaux ce coin ! objecta Francis.
- Calme-toi ! Il suffit de mettre à la cape si tu prends un gros coup de vent, tu laisses filer et t’attends que ça passe. À deux, c’est bon, suffit de se relayer à la barre si ça dure longtemps.
- Ah, parce que je dois tenir la barre ? Mais tu es dingue, Tim ! Faut pas compter sur moi, je vais juste dégueuler jusqu’à mourir, je ne serai bon à rien.
- Tu fumeras un pétard et ça passera. Moi aussi, j’ai déjà eu le mal de mer mais ça ne dure pas, faut juste laisser le temps, ça passe, je te dis.
- Mais pourquoi tu veux rentrer ? C’est pour Laure ? Ou autre chose.
- Pour Laure, en premier, pour mes parents ensuite et parce que je m’emmerde en fait.
- Ah, toi aussi ! Ben, t’aurais pu m’en parler, on se serait fait moins chier.
- J’aime pas parler pour rien, tu le sais bien pourtant.
- Et si ton putain de bateau a déjà été volé ou saccagé ?
- Je n'y crois pas. Fais moi confiance. »
Francis n'en revenait pas.
Il regardait les arbres défiler sur le ruban noir de la nuit. Tim conduisait, routes de montagne puis la descente vers la côte. Cinq heures de trajet si tout se passait sans encombres. Tim avait expliqué qu’il ne voulait pas emprunter la route directe, le passage dans les banlieues de Christchurch, il préférait le détour par des routes désertes, une piste forestière sur une dizaine de kilomètres pour finir, il avait pris la tronçonneuse et deux bidons de carburant, deux haches, un câble pour dégager des troncs de la route.
Tim avait laissé la maison ouverte. Francis n’aurait jamais imaginé une décision aussi inattendue.
« Si des gens veulent s’y installer, qu’ils le fassent. Je ne reviendrai jamais ici. Je préfère que cette maison soit entretenue plutôt que laissée à l’abandon. »
Francis avait regardé Tim écrire sur une feuille blanche, assis à la table du salon.
« Tout ce que je leur demande, c’est de laisser en place la photo d’Aurore, elle veillera sur eux. »
Il avait expliqué succinctement sur le papier le fonctionnement des panneaux solaires, celui de la pompe à eau puis il était allé dans la chambre et il avait embrassé le visage d’Aurore, sur les lèvres. Il avait caressé les joues et les cheveux.
« Je sais que tu seras toujours avec moi, comme tu l’as toujours été. On va faire une belle virée en bateau. Je suis sûr que tu seras heureuse de revoir Laure. Je t’aime. »
Routes désertes. Nuit noire. Ils traversèrent sans ralentir deux villages éteints. Francis distingua rapidement la vitrine brisée d’un magasin, quelques voitures abandonnées, portières ouvertes ou partiellement désossées. Un monde sans humains. Comme évaporés, dilués dans le silence, dans l’immobilité du monde et juste cette voiture qui traçait son sillage. Le sillage. Il pensa au bateau dans l’océan Pacifique. Une folie. Et pourtant, il en acceptait l’épreuve. Comme s’il n’était pas possible de rester inerte. L’indiscutable nécessité d’agir. Il avait senti durant les jours passés au chalet, dans l’absence totale d’imprévu, dans la répétition des actes, dans l’étirement insupportable du temps, qu’il ne tiendrait pas. Comme s’il ne possédait pas le potentiel de paix en lui, le goût de la sérénité, la force de ne rien faire ou de faire bien le peu qui restait. Il avait besoin d’agir, un besoin viscéral, pour ne pas se sentir mort. Comme ce monde sombre qu’ils traversaient. Il imagina que la vieillesse lui apporterait peut-être cette capacité à s’asseoir et à écouter l’herbe qui pousse. L’image le fit sourire.
Une question le taraudait.
« Bon, Tim, dans l’éventualité où on parvient à rentrer en France avec ton bateau. Comment on fait pour rejoindre les Alpes ? »
Tim ne répondit pas. Francis le regarda du coin de l’œil. Éminemment concentré. Il abandonna l’idée d’une réponse.
« J’en sais rien et je m’en fous, lança-t-il, soudainement. Pour l’instant, on est là.
- Je croyais que les survivalistes avaient pour règle d’or de tout anticiper ?
- Anticiper ce sur quoi ils peuvent agir, oui. Mais pour le reste, ils ont pour règle d’or de ne pas y penser quand l’étendue des inconnues est beaucoup trop vaste.
- Mais tu y as bien réfléchi un peu quand même ?
- Non, je viens juste de le faire.
- Et ça donne quoi ?
- Que c’est de l’énergie perdue.
- Mais bordel, ça peut quand même nous servir quand on arrivera là-bas !
- Tiens, tu as l’air bien décidé à le faire ce voyage, finalement !
- Le voyage, je n’y pense pas. C’est en France que ça m’intéresse.
- Je te le dis, c’est complètement con. Parce que premièrement, il n’y a encore aucune certitude qu’on parte d’ici, deuxièmement il n’y a aucune certitude qu’on arrive à bon port. Donc, ces deux inconnues là suffisent à me convaincre que je perds mon temps. Je vais là où j’en suis. C’est une phrase qui a priori n’a pas de sens mais pour moi, elle est essentielle.
- Je croyais que c’était sans problème, que tu savais naviguer et tout ça ! Et maintenant, tu balances qu’on n’est pas sûr d’arriver vivants ?
- J’ai dit que je pouvais le faire, j’ai pas dit que j’allais y arriver.
- Putain, parfois, t’es chiant quand même quand tu parles ! Tu m’embrouilles.
- C’est pour ça que je me tais souvent. Au moins, ça te repose. »
-
Chronologie du changement climatique d'origine humaine
- Par Thierry LEDRU
- Le 23/06/2024
- 0 commentaire
On ne peut pas accuser ce site de subjectivité ou de tentative de manipulation. C'est vraiment sérieux. Les liens renvoient à des articles, les sources sont citées. C'est clair, factuel. Aucune prise de position partisane. C'est juste de l'information qui ne déforme pas...
Recherche
Image principale 1
© Nicolas Economou - NurPhoto/AFP
Partager la page
Partager sur Facebook (nouvelle fenêtre)
Partager sur X (anciennement Twitter - nouvelle fenêtre)
Partager sur Linkedin (nouvelle fenêtre)
Chronologie du changement climatique d'origine humaine
Publié le 26 septembre 2023
Temps de lecture > 30 minutes
Par : La Rédaction
La responsabilité humaine dans le réchauffement climatique est une donnée intégrée par les experts et les scientifiques depuis plusieurs décennies. Si la Terre vit une accélération exponentielle des dérèglements en tous genres depuis le milieu du siècle dernier, l'influence effective de l'homme sur son environnement n'est pas un phénomène nouveau.
Sommaire
Fin XVIIIe siècle - 1967 | Le réchauffement climatique est un fait | La constatation
1968-1988 | Le réchauffement climatique est d'origine humaine | La prise de conscience
1989-2006 | Le réchauffement climatique doit être contenu | Les velléités
2007-2018 | Le réchauffement climatique n'est pas assez contenu | Les inquiétudes
2019-2023 | "L'effondrement climatique a commencé" | Les faits
Changement climatique anthropique : Évolution du climat venant s’ajouter à ses variations naturelles, qui est attribuée aux émissions de gaz à effet de serre engendrées par les activités humaines, et altérant la composition de l’atmosphère de la planète.
L'homme dégrade son environnement de plusieurs manières :
par prélèvement (pêche, exploitation minière, etc.) ;
par transformation (agriculture, pollution, etc.).
Parmi les actions de l'homme susceptibles d'avoir un effet notoire ou majeur sur l'environnement, il faut distinguer :
celles dont la récurrence à petite, moyenne ou grande échelle crée sur le long terme un déséquilibre majeur (disparition des espèces ou des ressources par surexploitation) ;
celles dont l'importance singulière est telle qu'elles bouleversent des environnements ou des écosystèmes plus ou moins vastes (assèchement de la mer d'Aral, déforestation en Amazonie, catastrophes nucléaires de Tchernobyl ou Fukushima).
En termes de causalité, l'homme peut être à l'origine de transformations majeures ou par son intervention, voulue ou pas, dans un processus indépendant (climatique, géologique, etc.) créer les conditions d'un dérèglement ou d'une catastrophe.
Devant la complexité des causalités, une chronologie de la transformation climatique d'origine humaine (ou anthropique) doit intégrer les actions de l'homme sur l'environnement afin de saisir dans son ensemble l'étendue de la dégradation de la planète.
Fin XVIIIe siècle - 1967 | Le réchauffement climatique est un fait | La constatation
Plusieurs événements (pré)historiques pourraient figurer dans une chronologie sur le réchauffement climatique d'origine humaine et l'action de l'homme sur l'environnement : l'invention de l'agriculture il y a près de 10 000 ans, les premières installations humaines sédentaires, mais aussi la grande peste, qui décime au moins un tiers de la population européenne entre 1346 et 1353 en suivant la route de la soie et en arrivant par les ports européens, au gré des guerres et du commerce. Le véritable point de rupture, dans l'histoire, quand l'action de l'homme sur son environnement devient perceptible, sinon évidente, est la Révolution industrielle et le début de l'émission massive de gaz à effet de serre.
Fin du XVIIIe siècle
Première Révolution industrielle : l'économie mondiale est bouleversée. Passage d’une économie essentiellement agraire à une production de biens manufacturés à grande échelle, d'abord en Angleterre, puis en France au début du XIXe siècle. Outre les bouleversements sociaux, c'est aussi le début de la pollution à grande échelle. Depuis cette époque, la concentration de gaz à effet de serre (GES) a augmenté de façon constante.Fin du XIXe siècle - début du XXe siècle
Deuxième Révolution industrielle. Utilisation de nouvelles sources d'énergie : électricité, gaz, pétrole. La chimie se développe (engrais azotés, explosifs).1914-1918
Première Guerre mondiale, premier usage des armes chimiques, aux effets dévastateurs. Les guerres modernes atteignent durablement l'environnement et dévastent des écosystèmes. Les effets des guerres modernes sur les écosystèmes, en termes de pollution, sont encore peu étudiés.1939-1945
Seconde Guerre mondiale, industrialisation des moyens de donner la mort. Avec la destruction de Nagasaki et Hiroshima par la bombe atomique, l'homme met au point une arme capable de rayer des villes de la carte.17 août-6 septembre 1949
Conférence scientifique des Nations unies pour la conservation et l’utilisation des ressources naturelles. Pour la première fois, un organisme des Nations unies alerte sur l'épuisement et l'usage des ressources naturelles (terre, eau, forêts, faune, carburants [Proceedings of the United Nations Scientific Conference on the Conservation and Utilization of Resources], énergie et minéraux).1951
Premier rapport sur l'état de l'environnement dans le monde, publié par l'Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), qui insiste sur les liens entre économie et énergie.16 décembre 1964
Loi n° 64-1245 relative au régime et à la répartition des eaux et à la lutte contre leur pollution.1965
Remise d'un rapport sur la pollution environnementale par le conseil scientifique consultatif du président des États-Unis, Lyndon Johnson, avertissant que d'ici à l'an 2000 il y aurait 25% de CO2 en plus dans l'atmosphère, avec pour conséquence des changements climatiques notables.1er mai 1967
Publication d'une étude par Syukuro Manabe et Richard T. Wetherald (Thermal Equilibrium of the Atmosphere with a Given Distribution of Relative Humidity), qui modélise le climat et prévoit l'augmentation des quantités de CO2. La modélisation climatique sera essentielle aux travaux du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC).1968-1988 | Le réchauffement climatique est d'origine humaine | La prise de conscience
Les catastrophes industrielles ne sont pas un fait nouveau, mais leur ampleur mène à une prise de conscience, tant sur les responsabilités de l'homme que sur les conséquences à long terme (marées noires, accidents nucléaires…). Les nations acceptent le fait que le réchauffement climatique est d'origine humaine et décident de l'envisager au travers de grandes conférences internationales et traités. Sous l'égide de l'Organisation des Nations unies (ONU), les premières instances et organisations dédiées au climat et à l'environnement voient le jour.
1968-1973
Famines au Sahel et en Éthiopie, liées à la sécheresse, causant la mort de plus d'un million de personnes. Ces famines alertent sur le réchauffement climatique et ses conséquences. Les famines liées à la sécheresse seront de plus en plus fréquentes.28 février 1970
Discours du président français, Georges Pompidou, sur les problèmes de l'environnement urbain : "L'emprise de l'homme sur la nature est devenue telle qu'elle comporte le risque de destruction de la nature elle-même […] La nature nous apparaît de moins en moins comme la puissance redoutable que l'homme du début de ce siècle s’acharnait encore à maîtriser, mais comme un cadre précieux et fragile qu'il importe de protéger pour que la Terre demeure habitable à l'homme" (Le discours du Président Pompidou à Chicago).7 janvier 1971
Nomination de Robert Poujade, ministre délégué auprès du Premier ministre, chargé de la protection de la nature et de l'environnement.2 février 1971
Signature de la convention sur les zones humides, dite "convention de Ramsar". Destinée à l'origine à préserver les habitats d'oiseaux d'eau, son champ de compétence s'est par la suite étendu à tous les aspects de la biodiversité.Années 1970-1980
Influence de l'homme sur le climat reconnue par les scientifiques. Le débat est de savoir si le changement climatique d'origine humaine a déjà commencé.5-16 juin 1972
Conférence des Nations unies sur l'environnement, ou conférence de Stockholm. Il s'agit de la première grande conférence des Nations unies sur les problèmes environnementaux. Elle marque un tournant dans le développement des politiques environnementales internationales. La création du Programme des Nations unies pour l'environnement (PNUE) est entérinée.3 mars 1973
Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d'extinction (Cites), ou convention de Washington.10 juillet 1976
Catastrophe industrielle à Seveso, en Italie. Un nuage d'herbicide s'échappe de l'usine Icmesa et intoxique de nombreuses personnes. Cette catastrophe est à l'origine d'une prise de conscience en Europe et de la "directive Seveso", contraignant les États membres à identifier les risques industriels, établir un système d'inspection des sites dangereux et prendre les mesures pour faire face à d'éventuels accidents.Loi n° 76-629 relative à la protection de la nature, fondatrice en France.
16 mars 1978
Marée noire. Le pétrolier libérien Amoco Cadiz, qui transporte 223 000 tonnes de pétrole brut et 4 000 tonnes de fioul de soute, s'échoue sur les côtes bretonnes. Au fur et à mesure que le navire se disloque, sa cargaison se répand et pollue 360 km de littoral entre Brest et Saint-Brieuc. Il s'agit de la plus grande marée noire par échouement pétrolier jamais enregistrée.1979
Rapport du scientifique Jule Charney, Carbon Dioxide and Climate: A Scientific Assessment, établissant qu'il existe bien un réchauffement climatique dû aux GES issus de l'usage de combustible fossile par les hommes. Le rapport a été demandé par le président américain à l'Académie nationale des sciences.12-23 février 1979
Conférence mondiale sur le climat à Genève, l'une des premières grandes rencontres sur le changement climatique.23 juin 1979
Convention sur la conservation des espèces migratrices appartenant à la faune sauvage, dite convention de Bonn.3 décembre 1984
Fuite de 45 tonnes de gaz dans l'usine de pesticides de la compagnie américaine Union Carbide à Bhopal, en Inde, qui fait 1 754 morts et 170 000 intoxiqués, dont 12 000 dans un état critique le jour même de l'accident. On estime qu'il y a eu entre 15 000 et 20 000 morts. les conséquences sanitaires et environnementales de cette catastrophe industrielle se font toujours sentir quarante ans après.1985
Découverte du trou dans la couche d'ozone, causé principalement par l'usage de chlorofluocarbures (CFC) dans l'industrie (réfrigérateurs, climatiseurs, aérosols). Plus de la moitié de l'ozone disparaît dans l'Antarctique pendant le printemps austral.Un rapport du PNUE définit les "réfugiés environnementaux" (environmental refugees), dont font partie les réfugiés climatiques.
9 janvier 1985
Loi n° 85-30 relative au développement et à la protection de la montagne, visant à trouver un équilibre entre développement et protection de la montagne, dite "loi Montagne 1".22 mars 1985
Signature de la convention de Vienne, qui établit les principes de protection de la couche d'ozone. Cette convention fait suite aux avertissements de scientifiques quant aux dangers de l'appauvrissement de la couche d'ozone pour l'environnement et la santé humaine.3 janvier 1986
Loi n° 86-2 relative à l'aménagement, la protection et la mise en valeur du littoral, dite "loi Littoral".26 avril 1986
Accident nucléaire de Tchernobyl, en Ukraine. L'incendie du réacteur rejette dans l'atmosphère une quantité de radioactivité équivalent à 200 bombes Little Boy ("Petit garçon", larguée sur Hiroshima). Près de 200 000 km2 de terres ont été contaminées. Dès 1991, un excès de cancers de la thyroïde de l'enfant est apparu dans les régions particulièrement touchées. Entre 1990 et 1998, en Belarus, en Ukraine et en Russie, le taux de cancer de la thyroïde chez les enfants qui avaient moins de 18 ans au moment de l'accident a été multiplié par un facteur entre 10 et 100 (Les accidents dus aux rayons ionisants). L'échelle INES (International Nuclear Event Scale) est créée afin d'aider la population et les médias à comprendre immédiatement la gravité d'un accident nucléaire. L'accident nucléaire de Tchernobyl est classé au niveau 7, le plus élevé.16 septembre 1987
Protocole de Montréal, qui restreint l'utilisation de produits chimiques pouvant endommager la couche d'ozone.23 juin 1988
Audition du scientifique James Edward Hansen devant le Congrès américain, qui déclare que le changement climatique est déjà enclenché.Novembre 1988
Création du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC) en vue de fournir des évaluations détaillées de l'état des connaissances scientifiques, techniques et socio-économiques sur les changements climatiques, leurs causes, leurs répercussions potentielles et les stratégies de parade.1989-2006 | Le réchauffement climatique doit être contenu | Les velléités
Les rapports du GIEC, mais aussi des événements climatiques de plus en plus destructeurs et fréquents, sont les premiers avertissements massifs quant à l'urgence de la situation. Mais le clivage entre pays développés, qui polluent la Terre depuis la fin du XIXe siècle, et pays en développement, qui aspirent pour leurs populations à un "progrès" similaire, enraye la nécessité d'agir face à ce que l'on commence à entrevoir comme une urgence commune. Le protocole de Kyoto lie les pays développés à un objectif de réduction des GES. Les États-Unis quittent le traité, mais sa ratification par la Russie permet son entrée en vigueur.
24 mars 1989
Marée noire. Le pétrolier américain Exxon Valdez, qui transporte 180 000 tonnes de pétrole brut, s'échoue dans le détroit du Prince William, non loin de la ville de Valdez, en Alaska, reconstruite après un raz-de-marée. L'échouement provoque le déversement de 38 500 tonnes de brut, plus de 7 000 km2 de nappes polluent 800 km de côtes. Une des conséquences est la promulgation de l'amendement "double coque" du 6 mars 1992 à la Convention internationale pour la prévention de la pollution par les navires (Marpol).1990
Premier rapport d'évaluation du GIEC, qui confirme la responsabilité humaine dans le réchauffement climatique, le rôle des émissions de gaz à effet de serre et la gravité des changements en cours (FAR Climate Change: Scientific Assessment of Climate Change).3 janvier 1992
Loi n° 92-3 sur l'eau : "L'eau fait partie du patrimoine commun de la nation. Sa protection, sa mise en valeur et le développement de la ressource utilisable, dans le respect des équilibres naturels, sont d'intérêt général."9 mai 1992
Signature de la Convention cadre des Nations unies sur les changements climatiques (CCNUCC), entrée en vigueur le 21 mars 1994. Pour la première fois un traité fixe des objectifs contraignants aux pays industrialisés pour réduire le réchauffement climatique et aider à faire face à ses conséquences.21 mai 1992
Création du réseau européen Natura 2000.3-14 juin 1992
Conférence des Nations unies sur l'environnement et le développement (CNUED), ou conférence de Rio, qui réunit des dirigeants politiques, des diplomates, des scientifiques, des représentants des médias et des organisations non gouvernementales (ONG) de 179 pays pour un effort massif visant à réconcilier l'impact des activités socio-économiques humaines et l'environnement. Ouverture à la signature de la Convention sur la diversité biologique, traité international juridiquement contraignant, et de la Convention des Nations unies sur la lutte contre la désertification.2 février 1995
Loi n° 95-101 relative au renforcement de la protection de l'environnement, qui établit le principe de précaution, "selon lequel l'absence de certitudes, compte tenu des connaissances scientifiques et techniques du moment, ne doit pas retarder l'adoption de mesures effectives et proportionnées visant à prévenir un risque de dommages graves et irréversibles à l'environnement à un coût économiquement acceptable".28 mars-7 avril 1995
Première Conférence des parties (signataires de la CCNUCC), ou COP1, organisée par l'ONU, qui se tient à Berlin. La COP1 voit s'opposer pays industrialisés, responsables du réchauffement climatique, et pays pauvres, souhaitant mener à bien leur développement économique. la COP1 n'aboutit à aucune mesure concrète, mais les participants prennent la mesure de l'urgence et s'accordent sur le fait que les compromis de la CCNUCC ne sont pas adaptés pour atteindre les objectifs fixés.1996
Deuxième rapport d'évaluation du GIEC, qui analyse les aspects scientifiques (groupe de travail I) et socio-économiques (groupe de travail III) de l'évolution du climat (les publications).11 décembre 1997
Signature du protocole de Kyoto, premier traité de réduction d'émissions de GES, lors de la COP3. Le texte lie les pays développés à des objectifs de réduction des émissions de GES (5,2% sur la période 2008-2012 par rapport aux émissions de 1990). Les pays en développement comme le Brésil, la Chine ou l’Inde, sont parties au protocole mais ne sont pas soumis à la réduction d’émissions.11 décembre 1999
Marée noire. Le pétrolier maltais Erika, qui transporte 31 000 tonnes de fioul lourd n° 2, se brise en deux à une trentaine de milles au sud de la pointe de Penmarc'h. Des nappes de fioul se répandent, la plus longue, estimée à 3 000 tonnes, faisant 15 km de long. Le navire, construit en 1975, ne bénéficiait pas d'une double coque.2000
Assèchement de la mer d'Aral. Autrefois 4e plus grande étendue d'eau intérieure du monde, la mer d'Aral, située en Asie centrale, a perdu en un demi-siècle 75% de sa superficie et 90% de son volume. Elle a été utilisée pour irriguer des champs de coton ou de blé.18 septembre 2000
Création du code de l'environnement par l'ordonnance n° 2000-914.2001
Troisième rapport d'évaluation du GIEC, qui détermine ce que constitue "une perturbation anthropique dangereuse du système climatique" en s'appuyant sur de nouvelles données scientifiques. Le GIEC apporte aussi des preuves permettant "de dire que la majeure partie du réchauffement observé au cours des cinquante dernières années est due aux activités humaines" (les publications).Juillet 2001
Refus des États-Unis de ratifier le protocole de Kyoto. Selon le président George W. Bush, les pays industrialisés ont une plus grande charge que les pays en développement dans la réduction des émissions de GES.10 novembre 2001
Signature des accords de Marrakech à l'occasion de la COP7 (Rapport de la Conférence des parties). Malgré la sortie des États-Unis du protocole de Kyoto, les accords détaillent les règles de sa mise en œuvre, entre autres pour aider les pays en développement à affronter le changement climatique.2 septembre 2002
Déclaration du président de la République, Jacques Chirac, lors du sommet mondial sur le développement durable à Johannesburg : "Notre maison brûle et nous regardons ailleurs. La nature, mutilée, surexploitée, ne parvient plus à se reconstituer et nous refusons de l'admettre."6 juin 2002
Signature du Traité international sur les ressources phytogénétiques pour l'alimentation et l'agriculture.Août 2003
Canicule la plus sévère jamais enregistrée en France depuis le début des mesures (1947), causant la mort de près de 20 000 personnes.13 octobre 2003
Directive 2003/87/CE, qui met en place le système d'échange de quotas d'émission (SEQE) de l'Union européenne (UE) au 1er janvier 2005, en vertu du principe pollueur-payeur. L'UE est le troisième émetteur de CO2 au monde, mais elle s'est engagée à réduire ses émissions de 40% d'ici à 2030 par rapport aux niveaux de 1990 (et de 55% à la suite du pacte vert pour l'Europe). Le SEQE a été parfois détourné par certaines entreprises qui ont revendu des quotas gratuits et ainsi augmenté leurs profits.16 février 2005
Entrée en vigueur du protocole de Kyoto après sa ratification par la Russie. Le texte devait être ratifié par au moins 55 pays représentant 55% des émissions mondiales de GES pour entrer en vigueur.1er mars 2005
Loi constitutionnelle n° 2005-205, qui intègre la Charte de l'environnement au bloc de constitutionnalité.11 octobre 2006
Sortie d'un documentaire, Une vérité qui dérange, dans lequel Al Gore, ex-vice-président des États-Unis, avertit sur les dangers pour l'humanité du réchauffement climatique.2007-2018 | Le réchauffement climatique n'est pas assez contenu | Les inquiétudes
Les diverses parties ont par le passé signé des traités juridiquement contraignants, mais l'accord de Paris marque un tournant dans la lutte contre le réchauffement climatique. Les COP prennent en compte les difficultés des pays en développement. La nécessité de contenir le réchauffement climatique sous un certain seuil (2 °C dans un premier temps) devient une évidence, entre autres grâce aux rapports du GIEC. La catastrophe nucléaire de Fukushima, consécutive à un tsunami, la fonte du permafrost, la multiplication des épisodes de chaleur extrême continuent d'avertir l'homme sur ses responsabilités.
2007
Quatrième rapport d'évaluation du GIEC. Le réchauffement climatique est sans équivoque : "On note déjà, à l'échelle du globe, une hausse des températures moyennes de l'atmosphère et de l'océan, une fonte massive de la neige et de la glace et une élévation du niveau moyen de la mer." Le rapport ajoute que "vu les politiques d'atténuation des effets des changements climatiques et les pratiques de développement durable déjà en place, les émissions mondiales de GES continueront d'augmenter au cours des prochaines décennies" (les publications).6 juillet-25 octobre 2007
Grenelle de l'environnement, qui rassemble État, collectivités locales, partenaires sociaux et ONG investies dans les questions environnementales.12 octobre 2007
Al Gore et le GIEC prix Nobel de la paix 2007 pour "leurs efforts de collecte et de diffusion des connaissances sur les changements climatiques provoqués par l'homme et pour avoir posé les fondements pour les mesures nécessaires à la lutte contre ces changements".3-4 décembre 2007
COP13, à Bali. L'Australie annonce qu'elle va ratifier le protocole de Kyoto. Ainsi, seuls les États-Unis ont renoncé à ratifier le traité. Le plan d'action de Bali ouvre officiellement les négociations destinées à donner une suite à la première période d'engagement du protocole de Kyoto.12 décembre 2008
Paquet énergie-climat, adopté lors du Conseil européen. Ce plan d'action doit permettre à l'UE d'atteindre d'ici à 2020 un triple objectif : réduire de 20% les émissions de GES par rapport à leurs niveaux de 1990 ; porter la part des énergies renouvelables à 20% de la consommation et réaliser 20% d'économies d'énergie.3 août 2009
Loi n° 2009-967 de programmation relative à la mise en œuvre du Grenelle de l'environnement, dite "loi Grenelle 1". L'objectif est, à l'horizon 2050, de diviser par quatre les émissions de GES.18 décembre 2009
Accords de Copenhague, signés par les chefs d'État réunis lors de la COP15. Le texte donne des orientations sur le traitement du changement climatique (réduction des émissions de GES et financements pour les pays en développement). L'objectif est de contenir sous 2 °C le réchauffement climatique d'ici à la fin du siècle.5 janvier 2010
Loi n° 2010-2 relative à la reconnaissance et à l'indemnisation des victimes des essais nucléaires français. Entre 1959 et 1996, la France a procédé à 210 essais nucléaires au Sahara ou en Polynésie française. Le vivier de personnes potentiellement contaminées est très large : population locale, militaires de carrière, appelés du contingent, travailleurs civils. L'étude d'impact du projet de loi estime à 150 000 le nombre de travailleurs présents sur les sites sur toute la période. Un rapport sénatorial du 18 septembre 2013 estime que 80 000 personnes des populations locales ont été contaminées. Le rapport déplore "une loi qui s'applique difficilement et indemnise très peu".12 juillet 2010
Loi n° 2010-788 portant engagement national pour l'environnement, dite "loi Grenelle 2".Novembre 2010
Publication du premier rapport Emissions Gap Report, par le PNUE, qui conclut à l'insuffisance des engagements pour contenir le réchauffement sous 2 °C d'ici à la fin du siècle.10 décembre 2010
Accords de Cancún, signés à l'issue de la COP16, qui mettent en place le Fonds vert pour le climat de l'ONU.31 janvier 2011
Rapport de la l'organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (Food and Agriculture Organization – FAO) sur la situation mondiale des pêches et de l'aquaculture en 2010. Les stocks de poissons mondiaux surexploités, épuisés ou en phase de reconstitution (32%) doivent être restaurés d'urgence.11 mars 2011
Séisme de magnitude 9 à 80 km à l'est de l'île de Honshu, au Japon. S'ensuit un tsunami, qui dévaste la centrale nucléaire de Fukushima Daiichi et provoque la fusion des cœurs de trois réacteurs nucléaires. De très importants rejets radioactifs ont lieu dans l'environnement, provoquant une contamination durable des territoires autour de la centrale et de l'océan Pacifique. L'accident nucléaire de Fukushima Daiichi est le second à être classé au niveau 7 de l'échelle INES, après Tchernobyl [L'accident de la centrale nucléaire de Fukushima Daiichi (Japon) de mars 2011].8 décembre 2012
Adoption de l'amendement de Doha au protocole de Kyoto, lors de la COP18, qui ajoute de nouveaux objectifs de réduction d'émissions de GES à 80% des niveaux de 1990, juridiquement contraignant, pour les 38 parties signataires, dont l'UE et ses États membres, sur la période 2013-2020.2014
Cinquième rapport d'évaluation du GIEC. Chacune des trois dernières décennies a été successivement plus chaude à la surface de la Terre que toutes les décennies précédentes depuis 1850. Les années 1983 à 2012 constituent probablement la période de 30 ans la plus chaude qu'ait connue l'hémisphère Nord depuis 1 400 ans. Le réchauffement climatique océanique constitue l'essentiel de l'augmentation de la quantité d'énergie emmagasinée au sein du système climatique et représente près de 90% de l'énergie accumulée entre 1971 et 2010.17 août 2015
Loi n° 2015-992 relative à la transition énergétique pour la croissance verte.12 décembre 2015
Accord de Paris sur le climat, adopté à l'issue des négociations de la COP21. Les parties signataires, dont presque toutes l'ont ratifié, se mettent d'accord sur un objectif commun : contenir d'ici à 2100 le réchauffement climatique bien en dessous de 2 °C par rapport aux niveaux préindustriels et limiter la hausse des températures à 1,5 °C. L'accord est entré en vigueur le 4 novembre 2016. C'est le premier accord mondial et juridiquement contraignant sur le climat.Août 2016
Contamination de quelque 1 500 rennes et d'au moins 23 personnes en Sibérie par la maladie du charbon, dont le bacille, Bacillus anthracis, avait disparu de la région depuis 1941. Des températures ayant atteint 35 °C en Sibérie en juillet 2016 ont entraîné la fonte du permafrost. Des chercheurs ont émis l'hypothèse que la décongélation d'une carcasse de renne contaminée il y a des décennies pourrait être à l'origine de ces cas (Impact du changement climatique sur l'extension géographique des risques sanitaires). En 2015, des chercheurs du laboratoire Information génomique et structurale (CNRS/Aix-Marseille Université), du laboratoire Biologie à grande échelle (CEA/Inserm/Université Joseph Fourier) et du Genoscope (CNRS/CEA), avaient découvert un nouveau virus géant vieux de 30 000 ans dans le permafrost sibérien.4 octobre 2016
Le Parlement européen donne son consentement pour la ratification européenne de l'accord de Paris par 610 voix pour, 38 contre et 31 abstentions.28 novembre 2016
Loi n° 2016-1888 de modernisation, de développement et de protection des territoires de montagne, dite "loi Montagne 2".Octobre 2018
Rapport spécial du GIEC, qui évalue les effets d'une augmentation de la température de 1,5 °C au-delà des niveaux préindustriels. Le taux de réduction des émissions de GES doit être revu à la hausse (Global Warming of 1.5 °C).2019-2023 | "L'effondrement climatique a commencé" | Les faits
Ce qui apparaissait d'abord comme autant de signaux est désormais la marque d'un point de non-retour. Des conséquences dramatiques pour la planète sont d'ores et déjà irréversibles : canicules, incendies hors normes, records successifs tous les ans de "l'année la plus chaude jamais enregistrée"… Le GIEC modélise différents scénarios de la catastrophe en fonction de la volonté internationale (ou des velléités) de lutter contre le réchauffement climatique. Quelques points positifs (ou moins négatifs) : le trou de la couche d'ozone se résorbe, et la pandémie de Covid-19 a montré que l'humanité (quoique sous la contrainte des événements) pouvait se réfréner dans l'exploitation de la planète.
2019
Agriculture et réchauffement climatique. Les émissions de gaz à effet de serre de l’agriculture représentent en France le deuxième poste d'émission de GES (19% du total national et 85 MtCO2 eq). Les émissions de GES de l'agriculture sont essentiellement composées d'autres molécules que le CO2 et issues de processus biologiques. L'élevage est la source de 68% des émissions nationales de méthane. La culture des sols (fertilisation minérale et organique) représente 80% des émissions nationales de protoxyde d'azote. Le secteur de l'agriculture intègre également 11 MtCO2 eq liés à la consommation d'énergie par les engins agricoles. Les émissions de GES de l'agriculture ont diminué en France de 8% entre 1990 et 2019.5 mai 2019
Rapport de la Plateforme intergouvernementale sur la biodiversité et les services écosystémiques (IPBES) : "Sur environ huit millions d’espèces animales et végétales (dont 75% sont des insectes), environ un million sont menacées d’extinction" (Communiqué de presse). Les activités humaines sont considérées comme la principale raison de l'érosion de la biodiversité et des disparitions d’espèces. Le rapport signale que la superficie forestière mondiale actuelle correspond à 68% de la surface estimée à l'époque préindustrielle.28 novembre 2019
Urgence climatique, décrétée par le Parlement européen : la Commission doit veiller à ce que toutes ses propositions soient alignées sur l'objectif de limite de hausse de 1,5 °C en termes de réchauffement climatique ; l'UE doit réduire ses émissions de 55% d'ici à 2030 pour atteindre la neutralité carbone d'ici à 2050 ; le Parlement appelle à la réduction des émissions mondiales issues des transports aérien et maritime.11 décembre 2019
Pacte vert pour l'Europe et un ensemble de textes "Fit for 55" dévoilés par la Commission européenne, en référence à l'objectif de l'UE de réduire ses émissions carbone de 55% d'ici à 2030.2020
Changement climatique et terres émergées : selon ce rapport du GIEC, le secteur "agriculture, foresterie et autres usages des terres" a été à l'origine d’environ 13% des émissions de CO2, de 44% des émissions de méthane et de 82% des émissions de protoxyde d'azote rejetées par les activités humaines au niveau mondial entre 2007 et 2016. Cela représente 23% du total net des émissions anthropiques de GES.Mars 2020
Pandémie de Covid-19. Les confinements ont permis de réduire la pollution atmosphérique et ses effets sur la santé. Un rapport du Haut Conseil pour le climat d'avril 2020, rappelle que "depuis plusieurs années, la communauté scientifique a montré les liens entre pandémies et crises environnementales".21 juin 2020
Fin des travaux de la Convention citoyenne pour le climat. Sur 149 propositions, 146 sont retenues par le président de la République, Emmanuel Macron.8 septembre 2020
Rapport du Sénat sur la pollution des sols par les activités industrielles ou minières. Le rapport souligne qu'"en dépit de son impact majeur sur la santé et l'environnement, la pollution des sols d'origine industrielle ou minière constitue un enjeu encore mal mesuré et insuffisamment pris en compte par la législation. À la différence de l'air et de l'eau dont la protection fait l'objet d'un arsenal juridique sophistiqué, les sols, trop souvent envisagés par le prisme du droit de la propriété, sont en effet restés le parent pauvre de la législation".4 novembre 2020
Retrait des États-Unis de l'accord de Paris par le président américain, Donald Trump, au lendemain de son élection.2021-2023
Sixième rapport d'évaluation du GIEC. La décennie 2011-2020 est la plus chaude depuis 125 000 ans et cela est principalement dû aux activités humaines. En 2019, la concentration de CO2 dans l'atmosphère est de 410 parties par million (ppm), taux qui n'avait pas été atteint depuis 2 millions d'années. Le niveau de réchauffement global de 1,5 °C par rapport à l'ère préindustrielle sera atteint dès le début des années 2030, quels que soient les efforts entrepris en vue de réduire les émissions de GES. Les politiques actuellement en place conduiraient à un réchauffement global de 2,4 °C à 3,5 °C d'ici à la fin du siècle, avec une valeur médiane de 3,2 °C. Même en limitant le réchauffement climatique, les catastrophes naturelles devraient se multiplier, avec des conséquences extrêmes et irréversibles pour la planète et l'humanité.19 février 2021
Retour des États-Unis dans l'accord de Paris. Le président américain, Joe Biden, en fait la demande auprès de l'ONU le 20 janvier 2021, jour de son investiture.29 juillet 2021
Adoption par le Conseil du règlement (UE) 2021/1119, dit "loi européenne sur le climat". La loi inscrit dans le droit européen l'objectif de neutralité carbone de l'UE à l'horizon 2050 et fixe un objectif intermédiaire de réduction des émissions nettes de GES d'au moins 55% d'ici à 2030.22 août 2021
Loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, dite "loi Climat et Résilience", qui traduit une partie des 146 propositions de la Convention citoyenne pour le climat, pour réduire les émissions de GES de 40% d'ici à 2030. La loi, entre autres, inscrit le crime d'écocide dans le droit français : les atteintes les plus graves commises intentionnellement à l’environnement sont passibles d’une peine maximale de 10 ans de prison et de 4,5 millions d’euros d’amende (22,5 millions d’euros pour les personnes morales), voire une amende allant jusqu’à dix fois le bénéfice obtenu par l’auteur du dommage commis à l’environnement.5 octobre 2021
Syukuro Manabe prix Nobel de physique, "pour la modélisation physique du climat de la Terre, pour en avoir quantifié la variabilité et avoir prédit de façon fiable le réchauffement climatique".14 octobre 2021
Condamnation de l'État pour préjudice écologique par le tribunal administratif de Paris dans "l'Affaire du siècle".1er-13 novembre 2021
COP26 à Glasgow. Les parties ne parviennent pas à adopter une position forte sur l'élimination progressive du charbon et des subventions inefficaces aux combustibles fossiles. Alok Sharma, président de la COP26, présente, en larmes, un accord au rabais et se dit "profondément désolé" (COP26 closes with ‘compromise’ deal on climate, but it’s not enough, says UN chief).2022
2022, année la plus chaude jamais enregistrée en France hexagonale, avec un écart de +2,7 °C par rapport à la moyenne 1961-1990. L'année est marquée par des feux dévastateurs : 72 000 hectares de surface brûlée (forêts, espaces naturels, cultures). Trois des plus grands incendies ayant touché la France ces 40 dernières années se sont déclenchés en 2021 et 2022.Selon le rapport de la FAO sur la situation mondiale des pêches et de l'aquaculture 2022, la situation s'aggrave : "La part des stocks halieutiques exploités à un niveau biologiquement durable est passée de 90% en 1974 à 64,6% en 2019, dont 57,3% de stocks exploités au niveau durable maximal et 7,2% de stocks sous-exploités".
10 janvier 2022
Étude de scientifiques sur la sixième extinction de masse : entre 7,5% et 13% des espèces animales auraient disparu depuis l'an 1500, au lieu des 0,04% estimées jusqu'alors. Cette extinction est entièrement due à l'espèce humaine, seule espèce capable de manipuler la Terre à grande échelle et ayant permis que la crise actuelle se produise.2 février 2022
Acte délégué adopté par la Commission européenne, qui intègre comme énergies vertes à la taxonomie européenne le gaz et le nucléaire. Cette classification entraîne de vives critiques des ONG impliquées dans la défense de l'environnement.24 février 2022
Début de l'invasion de l'Ukraine par la Russie. Le pilonnage des forêts, des écosystèmes terrestres et marins, des infrastructures, des habitations, mais aussi la pollution chimique des sols provoquent d'immenses dégâts, avec des conséquences environnementales sur la santé humaine et les écosystèmes, y compris hors des frontières de l'Ukraine. António Guterres, secrétaire général de l'ONU, avertit que le conflit en Ukraine peut avoir des répercussions majeures sur le climat. Désormais, l'environnement et la biodiversité sont aussi perçus comme des "victimes" de la guerre.8 juin 2022
Vote du Parlement européen en faveur de l'interdiction de la vente de véhicules neufs à moteur essence ou Diesel, d'ici à 2035. L'Allemagne obtient toutefois courant 2023 que la Commission propose un texte sur les carburants de synthèse.6-20 novembre 2022
COP27 à Charm el-Cheikh. Les parties s'accordent sur la création d'un fonds pour les pertes et dommages à destination des pays vulnérables touchés par des catastrophes climatiques. Aucun progrès n'est fait dans le sens de l'accord de Paris et d'une limitation du réchauffement climatique en dessous de 1,5 °C.9 janvier 2023
Publication du rapport annuel de l'ONU Environnement sur l'état de la couche d'ozone, dont la reconstitution est en cours, malgré une importante variabilité interannuelle de la taille du trou. Selon le rapport, les mesures prises dans le cadre du protocole de Montréal ont permis de réduire les quantités atmosphériques de substances appauvrissant la couche d'ozone (SAO). La couche d'ozone devrait retrouver ses valeurs de 1980 vers 2040 pour la moyenne mondiale.10 mars 2023
Loi relative à l'accélération de la production d'énergies renouvelables, dite "loi APER".29 mars 2023
Le Parlement européen reconnaît l'écocide (Report on the proposal for a directive of the European Parliament and of the Council on the protection of the environment through criminal law and replacing Directive 2008/99/EC - Rapport sur la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative à la protection de l'environnement par le droit pénal et remplaçant la directive 2008/99/EC).28 avril 2023
Déforestation : 11 594 km2 de forêt ont été rasés sur le territoire de l'Amazonie "légale" brésilienne entre le 1er août 2021 et le 31 juillet 2022, selon l'Institut national de recherches spatiales du Brésil (Instituto Nacional de Pesquisas Espacias – INPE) (A taxa consolidada de desmatamento para os nove estados da Amazônia Legal em 2022 foi de 11.594 km2). En 50 ans, près de 20% de la forêt amazonienne a disparu. En 2022, à l'échelle terrestre, 4 000 000 ha ont disparu des forêts primaires tropicales, pourtant essentielles dans la lutte contre le réchauffement climatique. Ce sont 2,5 gigatonnes de CO2 qui ont été générées en plus, soit l'équivalent d'une année d'émissions fossiles d'un pays comme l'Inde.Juillet 2023
Désignation du lac Crawford, au Canada, comme repère pour le début de l'ère Anthropocène, qui caractérise l'empreinte irréversible de l'homme sur la Terre, par la Commission internationale de stratigraphie. De nombreux géologues estiment que l'Holocène s'est achevé dans les années 1950, avec la dispersion dans l'atmosphère d'importantes quantités de particules radioactives.18 août 2023
Rapport 2023 de l'ESA sur l'environnement spatial. L'Agence spatiale européenne (ESA) rappelle que l'environnement orbital de la Terre est une ressource finie et qu'il est pollué : sur plus de 30 000 débris spatiaux de plus de 10 cm actuellement identifiés, plus de la moitié d'entre eux jonchent l'orbite terrestre basse (moins de 2 000 km). L'année 2022 a vu davantage de lancements de satellites (2 409) que n'importe quelle année antérieure.24 août 2023
Tepco, opérateur de la centrale de Fukushima Daiichi, annonce le rejet dans l'océan Pacifique de centaines de milliers de tonnes d'eaux utilisées pour le refroidissement des réacteurs endommagés lors de la catastrophe de 2011.4 septembre 2023
Rapport d'évaluation sur les espèces exotiques envahissantes et leur contrôle, de l'IPBES (Media Release: IPBES Invasive Alien Species Assessment). Les espèces exotiques envahissantes sont l'un des cinq principaux facteurs directs de perte de biodiversité, aux côtés des changements dans l'utilisation des terres et des mers, de l'exploitation directe des espèces, du changement climatique et de la pollution. Près de 37 000 espèces exotiques ont été introduites dans des régions et des milieux naturels autres que leur milieu d'origine. Ces introductions sont en majeure partie liées à l'augmentation du commerce mondial et des déplacements humains : 218 espèces sont responsables de l'extinction de 1 215 espèces locales, dont 50,9% sont des vertébrés.5 septembre 2023
Été 2023, le plus chaud jamais enregistré sur Terre, selon l'observatoire européen Copernicus (Summer 2023: the hottest on record). Par endroits, la température dépasse 50 °C, avec des incendies massifs et des phénomènes météorologiques extrêmes. Selon António Guterres, secrétaire général de l'ONU, "l'effondrement climatique a commencé". Météo-France place l'été 2023 au 4e rang des plus chauds en France.Et après ?
L'avenir qui attend la planète et l'humanité est particulièrement sombre : augmentation exponentielle des catastrophes climatiques, multiplication probable des pandémies, vastes zones devenues invivables du fait de la sécheresse et de la chaleur, disparition d'espèces essentielles à la biodiversité, fonte des pôles et des glaciers… Même en connaissant les concentrations de GES, l'ampleur du changement climatique est indéterminée du fait de mécanismes inconnus. Des rapports du GIEC ou faits pour l'ONU par des scientifiques donnent des aperçus de ce qui attend la planète.
2030
Réchauffement global de 1,5 °C selon le GIEC, soit dix ans plus tôt que sa précédente prévision.2050
Augmentation de 700% du nombre de pauvres urbains vivant dans des conditions de chaleur extrême augmente de 700% (Extreme Heat. Preparing for the Heatwaves of the Future).Pour la première fois, l'océan Arctique pourrait être libre de glace en septembre au moins une fois avant 2050 (Travaux du GIEC, Changement climatique 2021, résumé pour tous).
Près de 1 milliard d'habitants des régions côtières seraient menacés par les conséquences du réchauffement climatique.
2051-2080
Épisodes de chaleur extrême 3 à 21 fois plus probables qu'en 2023 (rapport sur les chaleurs extrêmes).2100
Réchauffement global de 2,4 °C à 3,5 °C, voire 4,5 °C avec des modèles climatiques simulant des niveaux très élevés d'émissions de GES (énergies fossiles).Le niveau de la mer gagne un mètre. L'incertitude concernant les calottes glaciaires laisse possible l'hypothèse d'une augmentation de deux mètres et de la disparition de 75% du permafrost.
De nombreuses régions d'Amérique, d'Afrique et d'Asie pourraient connaître dans l'année au moins 350 jours avec des niveaux de chaleur mortels (rapport sur les chaleurs extrêmes).
Dans le cas d'un réchauffement de 2 °C, jusqu'à 18% des espèces terrestres ont un risque élevé d'extinction. Dans le cas d'un modèle climatique simulant des niveaux élevés d'émissions de GES, une espèce connue sur deux est menacée.
La probabilité des feux de forêt catastrophiques augmente de 30% à 60%.
MOTS CLÉS
-
Des pluies diluviennes
- Par Thierry LEDRU
- Le 23/06/2024
- 0 commentaire
Je connais bien le hameau de la Bérarde. C'est là-bas que j'allais en été pour l'alpinisme.
La vallée de Chamonix était vraiment devenue invivable pour moi. Beaucoup trop de monde.
La Bérarde, c'est un bout de vallée. Au-delà, c'est à pied et les pentes sont raides...
Aujourd'hui, il n'en reste plus grand-chose et c'est miraculeux qu'il n'y ait pas eu de morts.
Je connais aussi la vallée de la Vésubie qui a connu une catastrophe similaire et des victimes. C'était en octobre 2020 et la réhabiliation de la vallée n'est toujours pas finie. Celle du hameau de la Bérarde ne se fera peut-être même pas. Il est évident que certaines vallées alpines ou pyrénéennes ont un avenir incertain.
Et pourtant, aux élections européennes, dans tous les pays concernés, l'écologie a été délaissée par les électeurs et électrices. Partout, on note une baisse drastique. Quand en France, on voit quatre listes écologistes, c'est n'importe quoi. C'est évident qu'il s'agit avant tout de s'octroyer une belle place et non de défendre l'écologie. Et ça me désole. Il y a bien longtemps que je n'attends rien de la politique. J'irai voter dimanche prochain. Toujours pour l'écologie.
Maintenant, je comprends que les attentes des gens ont été déçues, que les situations économiques sont difficiles, que l'insécurité est sans cesse à la Une des journaux, que le mécontentement social s'agrandit, constamment, année après année et depuis bien longtemps. Je fais partie des gens qui ont été dégoûtés par la Gauche (Mitterand... Jospin..., oui, ça date, je vais avoir 63 ans)...
Ce qui me désole, c'est que la population ne comprend pas que l'écologie est déjà un problème majeur et que son rejet ne fera qu'accentuer les phénomènes d'ampleur. Et en même temps que j'écris ça, j'ai pleinement conscience que ça n'est pas la population française qui pourra changer une problématique planétaire. Et c'est bien pour ça que si j'avais vingt ans aujourd'hui, il est absolument certain que je ne souhaiterais aucunement devenir père de famille...
Alors évidemment, les climato-sceptiques s'en donnent à coeur joie.
"Réchauffement climatique, mon cul ! Tout ça, c'est de la foutaise pour nous taxer !"
etc etc etc...Pourtant, il ne faut pas plus de cinq minutes pour trouver les explications et le rapport entre réchauffement et précipitations. Mais quand on ne veut pas comprendre, il suffit de ne pas chercher.
L'article suivant a été publié en juin 2016.... L'auteure, Valérie Masson Delmotte est une scientifique, spécialiste de la problématique climatique.
"L’augmentation de l’effet de serre, due aux activités humaines, entraîne un réchauffement des océans et de l’atmosphère, près de la surface. Ce phénomène peut renforcer l’évaporation. Une atmosphère plus chaude peut potentiellement transporter 7 % d’humidité en plus par degré de réchauffement, conformément à la relation de Clausius-Clapeyron."
https://theconversation.com/pluies-intenses-et-changement-climatique-quel-rapport-60519
À Nemours, début juin 2016. Kenzo Tribouillard/AFP
Pluies intenses et changement climatique, quel rapport ?
Université Paris-Saclay apporte des fonds en tant que membre fondateur de The Conversation FR.
Voir les partenaires de The Conversation France
Nous croyons à la libre circulation de l'information
Reproduisez nos articles gratuitement, sur papier ou en ligne, en utilisant notre licence Creative Commons.
Dans le contexte des intempéries récentes, on entend dans les médias tout et n’importe quoi sur les relations entre précipitations record et changement climatique. Comment relier un évènement ponctuel, lié à la situation météorologique, et des changements sur le long terme ?
Les chercheurs en sciences du climat développent analyses, observations et simulations pour évaluer s’il y a des changements significatifs dans l’intensité ou la fréquence des évènements extrêmes (ce qu’on appelle « la détection ») et, le cas échéant, comprendre les causes de ces changements (ce qu’on appelle « l’attribution »). De nouvelles méthodes sont mises au point pour comprendre si la même situation météorologique aurait eu le même effet, avec ou sans réchauffement du climat.
L’augmentation de l’effet de serre, due aux activités humaines, entraîne un réchauffement des océans et de l’atmosphère, près de la surface. Ce phénomène peut renforcer l’évaporation. Une atmosphère plus chaude peut potentiellement transporter 7 % d’humidité en plus par degré de réchauffement, conformément à la relation de Clausius-Clapeyron.
Des questions restent cependant ouvertes sur la manière dont le réchauffement peut affecter la circulation atmosphérique ou les mouvements verticaux, importants pour les pluies de forte intensité.
Pour une information toujours plus fiable face au brouhaha médiatique.
Ce que disent le GIEC et de récents travaux
En 2013, le 5e rapport du Groupe I du GIEC rendait publique l’évaluation suivante :
La fréquence ou l’intensité des épisodes de fortes précipitations a probablement augmenté, au moins en Amérique du Nord et en Europe.
Il est probable que les influences anthropiques affectent le cycle mondial de l’eau depuis 1960 : elles ont contribué aux augmentations du contenu atmosphérique en vapeur d’eau, à des changements de la distribution spatiale des précipitations sur les continents à l’échelle du globe, à l’intensification des épisodes de fortes précipitations sur les régions continentales où les données sont suffisantes et à des changements de salinité à la surface des océans.
Les épisodes de précipitations extrêmes deviendront très probablement plus intenses et fréquents sur les continents des moyennes latitudes et dans les régions tropicales humides d’ici la fin de ce siècle, en lien avec l’augmentation de la température moyenne en surface.
Depuis 2013, de nouveaux travaux ont été publiés. Par exemple, en 2015, une étude conduite par deux chercheurs suisses s’est appuyée sur la modélisation du climat. Leurs analyses montrent qu’aujourd’hui, avec 0,85 °C de réchauffement par rapport au XIXe siècle (principalement dû à l’influence humaine), ce réchauffement a déjà affecté 18 % des évènements de précipitations intenses sur les continents (et 75 % des vagues de chaleur) : à la variabilité naturelle du climat se superpose déjà une influence humaine discernable. Pour 2 °C de réchauffement, cette proportion passerait à 40 % des évènements de précipitations intenses. L’impact du réchauffement climatique sur ces évènements extrêmes n’est pas linéaire et il affecte bien davantage les évènements les plus intenses que les moyennes.
Un rapport complet de l’Académie des sciences américaine sur l’attribution des évènements extrêmes a, pour sa part, fait le point sur les développements récents permettant d’évaluer le poids de l’influence humaine à l’échelle de l’évènement, les limites des outils et méthodes, et les incertitudes associées.
Quid de la France…
Pour ce qui est de la situation hexagonale, plusieurs études se sont intéressées aux records de précipitations. Une première analyse pilotée par Robert Vautard a porté sur les records de pluies dans les Cévennes. Elle montre une nette augmentation des records d’automne dans cette région, depuis les années 1950 (+4 % par décennie) et une forte relation avec le réchauffement local.
Une autre étude de Philippe Drobinski, tout juste publiée et présentée au colloque Cordex (Coordinated Regional Climate Downscaling Experiment), montre que l’augmentation de l’intensité des précipitations extrêmes de tout le pourtour méditerranéen devrait suivre la relation de Clausius-Clapeyron (soit 7 % de plus par degré de réchauffement local), avec un rôle tout particulier du réchauffement de surface de la mer Méditerranée.
Une autre étude toute fraîche, portant sur les précipitations les plus intenses dans le sud de la France et pilotée par Juliette Blanchet, conclut à une tendance à l’augmentation sur la moitié de la région étudiée, en particulier sur les reliefs (Cévennes-Vivarais et Alès) et dans la vallée du Rhône, tout en soulignant les limites liées à la durée et la densité des observations.
Enfin, une étude sur les risques futurs relatifs aux précipitations intenses et inondations, pilotée par Philippe Roudier, combine modélisation régionale du climat et modélisation hydrologique en Europe pour un scénario modeste de réchauffement global (+2 °C). Elle conclut à une forte augmentation de l’intensité des crues décennales ou centennales (voir la figure ci-dessous). Le signal s’avère très robuste : il est commun aux 11 modèles de climat et 3 modèles hydrologiques étudiés.
Author provided
Simulation d’évolution du débit des crues décennales et centennales en Europe entre la période 1970-2000 (référence) et la période de 30 ans quand le réchauffement global atteint 2 °C dans les projections climatiques (résultat médian de 3 modèles hydrologiques forcés par 11 simulations climatiques régionales issues de différents scénarios).
En Scandinavie, la diminution des débits de crue est liée à une diminution du manteau neigeux et sa fonte printanière. Les augmentations de débit de crue dans la majeure partie de l’Europe sont liées à une intensification des évènements de fortes précipitations dans un climat plus chaud (adapté de Roudier et al, 2016). Cette étude montre aussi une augmentation du risque de sécheresse (intensité et durée) pour la France et pour le pourtours méditerranéen (non montré).…et des pluies de printemps à Paris ?
La variabilité et l’évolution des pluies au nord de la France a récemment été analysée par Bastien Dieppois et ses co-auteurs, dans une étude publiée en 2016 et portant sur plusieurs siècles de données historiques, remontant en 1688. Elle montre une forte variabilité sur plusieurs dizaines d’années (en relation avec la variabilité des températures à la surface de l’océan Atlantique qui affecte la circulation atmosphérique), et une tendance significative à l’augmentation des pluies printanières.
La variabilité sur plusieurs décennies avait aussi été mise en évidence grâce aux travaux de Julien Boé et Florence Habets.
J’ai repris les données historiques de précipitation à Paris en mars-avril-mai (cumul sur trois mois) à partir du travail de Vicky Slonosky et je les ai complétées jusqu’en 2016 avec les données Météo France.
Author provided
Précipitations de printemps (cumul de mars, avril et mai) à Paris : données pour chaque année (trait fin) et lissées sur 31 ans (trait bleu foncé), à partir de données météorologiques historiques (Slonosky et al, 2002) et des observations de Météo France. Le niveau moyen des précipitations de printemps au XXe siècle est indiqué par la ligne horizontale pointillée. Des études en cours portent sur les précipitations extrêmes (cumul sur 1-3 jours).
La figure montre à quel point ce printemps a été exceptionnellement arrosé depuis 1688, même en moyenne sur 3 mois. Notez aussi à quel point le printemps 2011 avait été exceptionnellement sec. En moyenne, pour les 30 dernières années, l’Île-de-France reçoit 15 % de pluies en plus au printemps par rapport à la moyenne du XIXe siècle.
D’autres analyses à venir
Il faudra un peu de temps pour que les chercheurs qui développent ces méthodes puissent analyser les évènements de forte pluie de ces derniers jours, mais il semble que de nombreux records de précipitations aient été dépassés comme l’indique Météo France, dans un contexte également de températures de surface élevées sur l’océan Atlantique au voisinage de l’Europe.
Des analyses approfondies combinant observations et simulations numériques seront nécessaires pour discerner une éventuelle influence humaine dans l’intensité de ces pluies ponctuelles, ainsi que dans l’augmentation séculaire des précipitations printanières dans le nord de la France.
Ces éléments demandent néanmoins de prendre en compte le risque d’une augmentation de l’intensité des pluies record pour la gestion de l’écoulement des eaux, en protégeant les zones humides pour bénéficier de leur effet « tampon ». Cela s’ajoute à tous les autres aspects de gestion de l’écoulement des eaux en relation avec les plans d’urbanisation et de préparation aux évènements rares.
Je voudrais terminer cet article par une réflexion sur ce que nous voulons protéger. La Convention internationale sur les droits des enfants indique que l’intérêt supérieur de l’enfant doit être une considération primordiale. Les enfants sont particulièrement vulnérables aux aléas naturels et aux conséquences du changement climatique ; il est essentiel de les en protéger.
La planification de l’adaptation au changement climatique et aux évènements extrêmes comme les inondations devrait être centrée sur les besoins des enfants : par exemple, les écoles devraient être construites pour résister aux aléas climatiques, pour assurer la continuité de l’éducation. Rien que dans les vallées de l’Yvette et de l’Orge, tout près de l’Université Paris-Saclay, des dizaines d’écoles maternelles, primaires, collèges, lycées, et l’Université Paris-Sud ont été fortement touchés. Il y a du pain sur la planche.
Valérie Masson-Delmotte a récemment publié : « Parlons climat en 30 questions », « Le climat, la Terre et les hommes » et « Sommes-nous bientraitants avec nos enfants ? ». -
Un article majeur
- Par Thierry LEDRU
- Le 03/06/2024
- 0 commentaire
Bien que je sois un fidèle lecteur de longue date du site REPORTERRE, je n'avais pas vu passer cet article.
Alors qu'il s'agit d'une analyse majeure.
Et il va bien falloir que l'ensemble des peuples occidentaux finissent par comprendre ce qui les attend.
Et quelle est leur part de responsabilité.
Selon l’écrivain Amitav Ghosh, « Le monde se prépare aux changements climatiques en se préparant à la guerre »
https://reporterre.net/Selon-l-ecrivain-Amitav-Ghosh-Le-monde-se-prepare-aux-changements-climatiques-en-se
Pour le grand écrivain indien Amitav Ghosh, le problème posé à l’humanité par la crise écologique est avant tout géopolitique. Dans ses derniers ouvrages, par une lecture historique, il replace l’Occident et sa culture de violence et de domination au cœur des enjeux contemporains. Et envisage l’avenir avec pessimisme.
Amitav Ghosh est un romancier, essayiste et critique littéraire indien, vivant en partie aux Etats-Unis. Il a dernièrement publié Le Grand Dérangement : d’autres récits à l’ère de la crise climatique (Wildprojet, 2021) et La Déesse et le Marchand (Actes Sud, 2021).
Reporterre — Dans « Le Grand Dérangement », vous remarquez que depuis trois ou quatre décennies, le roman a adopté une approche individualiste qui se caractérise par une écriture du soi, de l’intime, alors que nous sommes confrontés à une crise planétaire sans précédent et que l’émission des gaz à effet de serre s’accroît à des niveaux jamais vus. Y a-t-il un lien entre ces deux phénomènes, et si oui, lesquels ?
Amitav Ghosh — Oui, il y a un lien. Cela date de la chute du mur de Berlin. La moitié des émissions de gaz à effet de serre dans l’atmosphère ont été émises depuis 1989. Je pense que c’est à cette époque que le monde entier a été totalement absorbé par la culture de consommation. En même temps, il a adopté le modèle de fiction étasunien né dans les écoles d’écriture créative, écoles dont le développement a été favorisé par la CIA. C’est en Iowa que le premier de ces ateliers d’écriture a vu le jour, avec des écrivains tels que Wallace Stegner. L’idée était de créer une forme d’art et de narration dépolitisée : en réaction au réalisme socialiste soviétique, ils ont encouragé un nouveau modèle caractérisé surtout par une approche apolitique.
J’en constate les effets durables à travers le monde, même en Inde. Quand j’étais jeune, les romanciers indiens, surtout du Bengale occidental ou parfois de l’Inde du Sud, étaient engagés et écrivaient sur l’environnement. Par exemple, la grande écrivaine bengalie Mahasweta Devi, qui a écrit sur la forêt et les communautés tribales de la forêt. Mais aujourd’hui de plus en plus, les romans en Inde, qu’ils soient rédigés en anglais ou dans une des langues indiennes, adoptent souvent le modèle occidental et relatent la vie intérieure.
Est-ce à dire que l’écriture ou le cinéma, en adoptant une approche plus collective dans la description du réel, comme l’ont fait Steinbeck ou Zola à leur époque, pourraient aider à stopper l’augmentation des émissions de gaz à effet de serre ?[Il rit] Les écrivains ne pourront pas changer le cours des choses. La littérature et l’édition ont beaucoup moins de poids qu’il y a trente ou quarante ans. La culture est aujourd’hui dictée par les réseaux sociaux, le cinéma et la télévision, alors que la fiction a un rôle marginal. Mais j’ai toujours été écrivain, et j’ai toujours été fier de réagir au monde autour de moi, c’est pourquoi il est essentiel pour moi en tant qu’écrivain de m’y confronter.
Le personnage de Cinta, dans votre roman « La Déesse et le Marchand », dit à un moment que les histoires existent par ce qu’elles nous permettent de parler avec les animaux. En quoi raconter une histoire peut-il avoir un lien avec les animaux ?Depuis deux siècles environ, on considère que raconter des histoires est par essence une activité humaine. Mais qu’est-ce qu’un récit ? Quelque chose qui se déroule à la fois dans le temps et l’espace. Une narration rattache plusieurs espaces entre eux. Regardez les premières histoires : beaucoup décrivent un voyage à travers l’espace, comme L’Odyssée, Le Ramayana ou La Pérégrination vers l’Ouest, le grand classique chinois [de Wu Cheng’en]. On pourrait même dire que le Nouveau Testament est un récit de voyage particulier. Cette connexion entre moments dans le temps et points dans l’espace n’est pas réservée à l’être humain. Prenez, par exemple, les baleines : elles parcourent des milliers de kilomètres aller-retour, mais elles ne le font pas de façon automatique ; d’une année à l’autre, certaines changent leur comportement, leur chant, leur destination… On voit donc que ce n’est pas chez elles un comportement automatique ou instinctif comme voudraient le faire croire les cartésiens. Comment affirmer alors que les baleines, qui possèdent des moyens de communication extrêmement complexes, n’ont pas d’histoires ? De même, on sait que les éléphants s’arrêtent dans certains lieux où leurs camarades sont morts. Comment affirmer qu’ils ne créent pas de connexions entre ces événements pour en faire une histoire ? Prenons l’exemple tout simple d’un chien. Le chien sait que vous l’emmenez au parc quotidiennement puis que vous le ramenez à la maison. Encore une fois, il traverse un espace, alors comment dire qu’il ne relie pas ces différents espaces entre eux à travers un récit ? Il est évident qu’il le peut. En fin de compte, pour nous les humains, la narration représente notre connexion la plus importante avec l’espace. Et on pourrait dire la même chose en ce qui concerne les animaux.
Donc, raconter des histoires est le plus sauvage de nos attributs, ce que nous partageons le plus avec les animaux. Les animaux ne racontent pas leurs histoires à tout le monde, mais il y a des personnes avec qui ils les partagent, tels les chamanes comme David Kopenawa, qui le raconte dans le livre La Chute du ciel. On y voit bien que ce n’est pas un imposteur ou un illuminé, mais il conte les histoires qui lui sont racontées par les animaux.
« Ce que les Européens ont fait dans les Amériques a créé un modèle de brutalité et de violence qu’on n’avait jamais vu sur Terre. C’est d’un génocide qu’il s’agit. » © Mathieu Génon/Reporterre
Un thème majeur de vos derniers ouvrages est la crise écologique. Comment faire face au monde à venir, alors qu’un de vos personnages dit : « On sait ce qui nous attend » ?
La façon dont les spécialistes, et en particulier les techniciens et ingénieurs, abordent le changement climatique, est complètement erronée ; pour eux, le problème est d’abord technologique, alors que selon moi, il est essentiellement géopolitique. Tant qu’il n’y aura pas une réponse géopolitique, la technologie ne pourra pas apporter la moindre solution.
En quoi le changement climatique est-il un problème géopolitique ?Si vous interrogez un Occidental sur le changement climatique, il vous répondra que c’est d’abord un problème scientifique et technologique. Si vous allez en Asie et demandez à une personne indienne, indonésienne ou chinoise, comme je l’ai fait souvent : « Vous savez que le changement climatique est une vraie menace pour votre pays. Êtes-vous prêt à réduire votre empreinte carbone ? » la réponse sera : « Non, pourquoi changerait-on ? L’Occident est à la source de ce problème, il s’est enrichi à nos dépens lorsqu’on était faibles, il s’est accaparé les ressources de la Terre et les a dilapidées… Mais aujourd’hui, nous ne sommes plus si faibles, alors il est temps pour nous de nous rattraper. » Pour les non-Occidentaux, le concept de dérèglement climatique est considéré comme un problème de post-colonialisme, d’inégalité, de géopolitique.
Donc il faut attendre que l’Occident prenne l’initiative. Ce qu’il ne fera pas…Non, il ne le fera pas.
Dans « Le Grand Dérangement », vous expliquez que l’Asie était prête à participer à l’augmentation des gaz à effet de serre, mais qu’elle en a été empêchée par le colonialisme. Pouvez-vous nous expliquer cette idée ?Prenons la Révolution industrielle à ses débuts. La course aux armements y a joué un rôle majeur quand Anglais et Français étaient en compétition pour la colonisation de l’Amérique. Tous les États occidentaux se sont copiés entre eux, par un mimétisme qui a commencé en Angleterre.
En Inde, les ouvriers de l’industrie sidérurgique aux XVIIIᵉ et XIXᵉ siècles étaient parmi les meilleurs au monde, tout comme les artisans indiens. Au XVIIIᵉ siècle, les navires fabriqués en Inde étaient supérieurs à ceux fabriqués en Grande-Bretagne. C’est grâce à sa puissance militaire que la Grande-Bretagne a réussi à détruire l’industrie navale indienne en lui imposant des réglementations financières. De même, les Britanniques n’ont pas voulu exploiter et développer le charbon indien. Ce que les colonies devaient leur fournir, c’était les produits fournis par l’énergie solaire : jute, opium, thé, sucre…
Pourquoi l’Europe était-elle si agressive au XVIIIᵉ siècle et comment a-t-elle pu écraser l’Inde, la Chine qui à cette époque-là, étaient des nations très développées, comme l’a montré l’historien Kenneth Pomeranz ?Je crois que cela a à voir avec la découverte des Amériques. Le modèle de violence qui s’est déchaînée sur les Amériques au XVIᵉ siècle est sans précédent dans l’histoire de l’humanité. On parle des Mongols, mais les Mongols n’ont jamais détruit 95 % d’un peuple. Ce que les Européens ont fait dans les Amériques a créé un modèle de brutalité et de violence qu’on n’avait jamais vu sur Terre. C’est d’un génocide qu’il s’agit.
Quelles en sont les raisons ? La cupidité ?Bien sûr. Mais au-delà de la cupidité, je crois que c’est durant cette période que les Européens (pas tous, mais ceux qui ont mené des combats similaires contre les classes inférieures en Europe, contre le mouvement des enclosures, contre les femmes avec les procès de sorcellerie), et surtout l’élite technoscientifique, se sont engagés, d’un côté, dans la colonisation de l’Amérique du Nord et, de l’autre, dans la traite des esclaves. À partir du XVIᵉ siècle, l’Europe a inventé une forme de violence armée et de brutalité à une échelle jusque-là inimaginable ; jamais on n’aurait pu croire qu’on pouvait décimer la population d’un continent pour la remplacer par la population d’un autre continent. Cela ne s’était jamais produit avant, c’est un moment sans précédent dans l’histoire du monde. Les Indiens et les Chinois, eux, ne menaient pas ce genre de guerre brutale contre des peuples considérés non humains, et ils étaient incapables de concevoir ce genre de choses. Et, en effet, ces choses-là sont inconcevables.
« En Inde et en Indonésie, les élites reproduisent dans leur propre pays ce que les élites occidentales ont fait subir au monde. Au fond, ce qu’elles disent est qu’elles continueront sur cette voie : les pauvres vont mourir, mais ce n’est qu’un des sacrifices à faire, chacun pour soi et sauve qui peut. » © Mathieu Génon/Reporterre
Vous mentionnez une autre période historique importante : le XVIIᵉ siècle, le petit âge glaciaire, documenté en Chine, en Europe, dans le monde entier, et qu’a étudié l’historien Geoffrey Parker. Est-ce la même crise que celle qui a vu se déchaîner la violence colonialiste au XVIᵉ siècle ?Les deux sont interconnectées. Sur le continent américain, il y a eu tellement de morts que des cités et des campagnes entières ont été englouties par la jungle, provoquant une reforestation massive qui, dit-on, en absorbant des quantités énormes de dioxyde de carbone, a contribué au petit âge glaciaire. C’est pourquoi aujourd’hui, on découvre d’immenses cités au Mexique et dans l’Amazonie enfouies dans la jungle. L’Amazonie était habitée par une population de plus de neuf millions de personnes. Il ne s’agissait pas de forêts vierges ; c’était des lieux de vie où l’on cultivait la terre. Et lorsque les habitants ont commencé à mourir, la forêt a repris ses droits avec les conséquences que l’on sait.
Aujourd’hui, les élites occidentales ont-elles toujours cette culture de violence et de domination ?Je pense que oui, mais le monde a changé et ce changement est surtout dû à la décolonisation. Si l’Occident était aussi puissant aujourd’hui qu’il l’était au XIXᵉ siècle, il aurait empêché par la force l’Inde et la Chine de s’industrialiser, comme il l’a fait à l’époque. Mais ce n’est plus possible, parce que la Chine possède l’arme nucléaire, l’Inde possède l’arme nucléaire, même le Pakistan possède l’arme nucléaire.
Quel est l’état d’esprit des élites indiennes et chinoises ?Elles ont totalement adopté les rêves des élites occidentales, je ne sais pas si c’est autant le cas en Chine, mais en Inde et en Indonésie, les élites reproduisent dans leur propre pays ce que les élites occidentales ont fait subir au monde. Au fond, ce qu’elles disent est qu’elles continueront sur cette voie : les pauvres vont mourir, mais ce n’est qu’un des sacrifices à faire, chacun pour soi et sauve qui peut. Vous ne pouvez pas imaginer les folies commises par le gouvernement indien. Il est en train de détruire toute la réglementation environnementale du pays.
C’est comme si le monde était gouverné par la consommation ostentatoire.Exactement. En Inde, les indigènes, qui autrefois étaient protégés par des lois, sont chassés des forêts pour les rendre accessibles aux sociétés de charbon — ou plutôt à une société en particulier, celle qui est proche du Premier ministre et qui, depuis six ans, a acheté la moitié de l’Inde. Nous sommes témoins d’un capitalisme de gangsters qui se déchaîne sur le monde avec une violence sans précédent.
Vous parlez du capitalisme, mais dans « Le Grand Dérangement », vous affirmez que l’impérialisme est plus important que le capitalisme pour expliquer le « statu quo ».Le capitalisme est un système contenu à l’intérieur d’un autre système encore plus violent, l’impérialisme. Lorsqu’on parle des émissions de gaz à effet de serre, on parle majoritairement d’avions, de voitures, de textiles, etc. Or, 25 % des émissions dans le monde proviennent d’activités militaires. À lui tout seul, le Pentagone est le plus grand émetteur de gaz à effet de serre au monde. Un seul jet supersonique, comme votre Rafale français, produit en quelques heures de vol plus d’émissions qu’une ville française.
Le capitalisme de gangsters et l’impérialisme fondé sur la militarisation, n’est-ce pas la même chose ?Ce n’est pas contradictoire, mais l’importance accordée au capitalisme provient d’un certain état d’esprit qu’on pourrait qualifier d’intellectuel/universitaire, et qui rechigne à parler de la violence organisée, préférant croire que la technologie est la force motrice prédominante. Le philosophe Jean-Pierre Dupuy dit que dans le monde moderne, nous sommes complètement dominés par la pensée économique, que nous aimons penser les choses dans des termes économiques, statistiques. Beaucoup des personnes que j’admire, telle Naomi Klein, en voulant donner au capitalisme une place centrale, succombent en réalité à cette tentation de tout analyser en termes d’économie, en excluant la géopolitique et la violence armée qui la sous-tend. Prenons l’exemple de l’Accord de Paris, où les pays riches se sont engagés à donner 100 milliards de dollars par an pour atténuer les dérèglements climatiques. Nous n’avons même pas vu 10 % de cette somme. Sur la même période, ces mêmes pays ont trouvé plus de mille milliards de dollars à investir dans les armes. La réalité, c’est que le monde se prépare aux changements climatiques, non pas en cherchant à les atténuer mais en se préparant à la guerre. C’est une évidence.
« Il est inconcevable pour nous aujourd’hui qu’Internet s’arrête, le monde entier s’arrêterait avec lui. Il est donc clair que, d’une certaine façon, nous ne sommes plus maîtres de nous-mêmes. » © Mathieu Génon/Reporterre
Comment envisagez-vous l’avenir des enfants d’aujourd’hui, quel que soit leur pays ?
C’est une question difficile. Il y a ce qu’on espère et ce qui nous semble probable. Ce qu’on espère, bien sûr, c’est que le monde trouve une solution miraculeuse. Et je suis disposé à le croire. Un miracle pourrait survenir et on ne peut que l’espérer. Mais pour moi, qui pense que les problèmes sont fondamentalement géopolitiques, je vois qu’il n’y a pas de changement et que les choses empirent. Où donc est la lumière ? Je ne la vois pas.
Dans « Le Grand Dérangement », vous comparez du point de vue littéraire le texte de l’Accord de Paris sur le climat et l’encyclique « Laudato si’ » du pape François. Pouvez-vous nous dire quelques mots sur ces deux textes ?Ces deux textes sont particulièrement intéressants car ils sont parus au même moment et traitent du même sujet. On pourrait s’attendre à ce que ce soit le texte du pape qui soit farfelu, irréaliste et rempli de mots vides, alors qu’en fait, c’est l’Accord de Paris qui tient des propos absurdes, exprimés dans un langage incroyablement pompeux. Le document n’a pas été rédigé pour toucher les êtres humains, il est simplement une excuse pour que les experts puissent se réunir et échanger ensemble. Le Laudato si’, au contraire, fait preuve d’une sincère volonté d’ouverture en employant un langage d’une grande simplicité, bien qu’il soit par ailleurs très bien documenté et parfaitement juste lorsqu’il traite de sujets scientifiques. En fin de compte, le pape a une vision du problème bien plus claire que celle des technocrates, il voit que le problème provient de notre mode de vie, du désir, de ce que les gens veulent avoir. C’est un texte profondément humain et modéré. Je pense sincèrement que le pape François est le seul dirigeant légitime au monde actuellement. C’est lui et lui seul qui nous permet de garder l’espoir.
On observe chez les élites occidentales et peut-être aussi chinoises, sinon une religion de la technologie, du moins une croyance profonde dans l’esprit de la Silicon Valley, avec l’idée de fusion technologique qui créerait une nouvelle espèce grâce à la robotique et à l’intelligence artificielle. Qu’en pensez-vous ?On considérait Internet, les réseaux sociaux, etc., comme des outils mais, de plus en plus, on voit que ce sont nous les outils et non eux, ce sont eux qui dirigent. Il est inconcevable pour nous aujourd’hui qu’Internet s’arrête, le monde entier s’arrêterait avec lui. Il est donc clair que, d’une certaine façon, nous ne sommes plus maîtres de nous-mêmes.
Alors, qui sont les maîtres ?Tant de nos actions sont contrôlées par une forme ou une autre d’intelligence artificielle que ça devient une partie du problème. Nous croyons que les humains conçoivent des politiques et que ces politiques sont mises en œuvre, mais à partir de Descartes, à partir du colonialisme, on a considéré les choses de la Terre comme de simples ressources, ce qui signifie qu’elles sont inertes, incapables d’écrire elles-mêmes leur histoire. Mais aujourd’hui, cela paraît moins évident, les énergies fossiles, par exemple, se sont immiscées dans notre vie de façon si complexe qu’on a du mal à l’appréhender. Ce n’est pas comme si les États-Unis pouvaient décider aujourd’hui d’arrêter l’utilisation d’énergies fossiles. Ils ne le peuvent pas, notamment parce que l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis sont devenus des acteurs incontournables de la géopolitique mondiale. Lors des attentats du 11 septembre 2001, par exemple, George Bush a lui-même organisé le départ de personnalités saoudiennes, alors que la majorité de ceux qui avaient attaqué les États-Unis étaient saoudiens. Les Étasuniens aiment croire que ce sont eux qui contrôlent l’Arabie saoudite, mais ce n’est plus le cas : une partie considérable de la politique étrangère étasunienne est sous le contrôle de l’Arabie saoudite, d’Abou Dabi et du Qatar. Vous voyez ainsi comment les énergies fossiles se sont immiscées dans la vie politique globale, c’est si insidieux, si puissant que c’est une illusion humaine de s’imaginer que ce sont nous qui les contrôlons.
« Cela m’a énormément choqué : la France a été complètement transformée par une périurbanisation à l’américaine. En Italie, ce n’est pas le cas, les villages ont toujours une boutique de pâtes, un boucher… on y trouve de la nourriture. Ce n’est pas le cas dans les campagnes françaises. » © Mathieu Génon/Reporterre
En même temps, l’Arabie saoudite, Abou Dabi et d’autres soutiennent l’Islam, et l’Islam est devenu une force géopolitique puissante.
Oui, et encore une fois, on constate que ce n’est pas uniquement par le pouvoir des idées, mais grâce au pouvoir exercé par les combustibles fossiles, à l’argent du pétrole dépensé par l’Arabie saoudite pour encourager la radicalisation des musulmans dans le monde. Dès qu’on observe une montée des fondamentalismes, on peut être certain que l’argent saoudien n’est pas loin.
Quelle est la stratégie de la Chine ? Comment éviter une crise écologique, alors que la Chine encourage encore une croissance économique de 6 % par an, ce qui est énorme ?Il faut savoir que la Chine a mis de côté 20 % de la surface du pays pour le réensauvagement, ce qui représente une zone immense, plus grande que la France. Et ils le font sérieusement, ce qui n’est pas le cas d’autres pays. De plus, la Chine est loin devant les autres pays en matière de solutions énergétiques alternatives. C’est politique et cela s’explique par le fait que la Chine n’a pas de pétrole. La hiérarchie mondiale actuelle est complètement dépendante des énergies fossiles, qui sont le fondement de la domination du monde anglo-saxon, qui regroupe l’Australie, la Grande-Bretagne, le Canada, les États-Unis… Cela a été délibérément pensé dès le début. Churchill l’a orchestrée, c’est un projet anglo-étasunien à long terme pour créer une dépendance à l’égard des énergies fossiles. La Chine, au contraire, a toutes les raisons de s’en libérer.
Avec la fin des énergies fossiles, verra-t-on la fin du monde anglo-saxon ?Oui, ce sera un bouleversement majeur. Et c’est pour ça que le monde anglo-saxon est tellement divisé ; le monde anglo-saxon compte les seuls endroits au monde où les changements climatiques sont contestés. Ces pays savent très bien que leur pouvoir, comme leur mode de vie, est fondé sur les combustibles fossiles. Même ici, en France, où j’ai été à Hurigny, en Bourgogne, un bourg de 200 à 500 habitants. Il ne possède ni magasins ni marché, et pour acquérir les produits essentiels, on est obligés de prendre la voiture et de parcourir trente kilomètres pour se rendre à l’hypermarché. C’est quelque chose qui m’a énormément choqué : la France a été complètement transformée par une périurbanisation à l’américaine. En Italie, ce n’est pas le cas, les villages ont toujours une boutique de pâtes, un boucher… on y trouve de la nourriture, ce qui n’est pas le cas dans les campagnes françaises.
Comment voyez-vous l’avenir du Bangladesh, dont votre famille est originaire ?Le Bangladesh reste une énigme. D’après plusieurs indicateurs, c’est la nation la plus performante en Asie du Sud dans plusieurs domaines. C’est presque miraculeux. Le PIB par habitant est plus élevé que celui de l’Inde ou du Pakistan, mais aussi l’espérance de vie, la santé, etc. C’est aussi le seul pays au monde où le gouvernement promeut activement l’éducation au changement climatique. Les Bangladais sont donc très informés sur ce sujet, et ont développé différentes formes de résilience que l’Occident ferait bien d’étudier. D’un autre côté, on ne peut nier que de grandes parties du pays sont menacées par les eaux, et certaines sont déjà inondées.
Avec quelles conséquences ?Une migration de masse, qui a déjà commencé.
« L’idée dominante que les pauvres souffriront tandis que les riches s’en sortiront très bien est totalement erronée. Ça ne se passera pas comme ça. Si l’on regarde les parties du monde les plus touchées par les effets du changement climatique, plusieurs d’entre elles sont parmi les lieux les plus riches au monde. » © Mathieu Génon/Reporterre
Y en aura-t-il d’autres migrations à partir d’autres régions du monde ?
Oui, elles existent déjà, mais je pense qu’il faut rester prudents quand on parle des « migrations climatiques ». Ce n’est pas si simple. Lors de mes recherches pour La Déesse et le Marchand, j’ai parlé à des centaines de migrants bangladais en Italie, dont la plupart avaient traversé la Méditerranée sur des bateaux de fortune. Et ce qui m’a vraiment marqué, c’est le rôle que jouent les réseaux sociaux et les nouvelles technologies : ces migrations sont complètement dépendantes des téléphones cellulaires. C’est cette technologie qui permet de payer les passeurs, de s’orienter, d’accéder aux informations… La migration n’est pas due aux changements climatiques. En réalité, la migration et les changements climatiques sont deux conséquences de l’accélération du consumérisme, l’accélération de l’industrialisation, qui est la force motrice derrière tout ça.
Vous écrivez que les riches seront moins résilients que les pauvres face aux futurs défis…Ce n’est pas tout à fait ça que je dis, car dans l’ensemble un pauvre en Californie est riche par rapport à un Africain ou à un Bangladais. Je pense que ceux qui seront les plus affectés, ce sont les classes moyennes et moyennes inférieures. Qui a été les plus touchés par les incendies en Californie ? Pas forcément les pauvres, mais les classes moyennes dont le principal actif est leur maison… et leur voiture. Ces possessions les rendent moins mobiles. On constate la même chose lors des incendies et des ouragans : les habitants refusent d’être évacués. Pourquoi ? Parce qu’ils ont peur qu’on entre par effraction dans leur propriété ou peur de perdre leur maison ou leur voiture. Donc, l’idée dominante que les pauvres souffriront tandis que les riches s’en sortiront très bien est totalement erronée. Ça ne se passera pas comme ça. Si l’on regarde les parties du monde les plus touchées par les effets du changement climatique, plusieurs d’entre elles sont parmi les lieux les plus riches au monde. La ville de Houston, par exemple, qui est la capitale mondiale des carburants fossiles, est dévastée de façon répétée par les inondations, et il est parfaitement clair que ses perspectives sont très sombres. La Californie aussi, avec le rêve californien et ses technofantaisies, où la modernité est plus ou moins née, devient de moins en moins habitable.
Je pense aussi que les citadins sont les moins adaptés pour affronter les catastrophes autour de nous, que ce soit en Occident ou en Inde. Si un citadin indien de classe moyenne devait fuir à la campagne, il ne survivrait pas plus de quelques jours.
Vous avez dit que la guerre nous attend dans l’avenir. Mais que pourrait-elle résoudre ?Les Occidentaux rechignent à considérer le changement climatique sous l’angle du conflit géopolitique, mais prenons l’exemple d’un migrant bangladais. Il arrive d’abord en Libye, où il est immédiatement enfermé dans un camp d’esclavage ; puis, malgré les tirs des gangsters libyens qui le poursuivent, il arrive à s’enfuir. Par miracle, il parvient à se rendre à la frontière, où il monte dans un bateau de fortune qui manque de sombrer ; puis, il traverse les Balkans, où on lui tire dessus ou bien la Turquie, où on lui tire dessus. Beaucoup de migrants atterrissent au Sinaï où, lorsqu’ils ne peuvent payer les passeurs, on leur prélève des organes. Les expériences vécues par ces personnes sont équivalentes aux expériences de guerre. Alors, que ce soit aux frontières de l’Europe ou des États-Unis, que cela nous plaise ou non, la guerre est déjà là. On ne veut pas le voir, mais il s’agit réellement de guerre. Et de plus en plus, on constate que les effets du changement climatique deviennent des armes de guerre. Récemment, le gouvernement algérien a accusé le Maroc d’avoir déclenché des incendies de forêt, de les avoir utilisés comme instruments de guerre. Et il en est de même entre la Turquie et la Grèce. L’humanisme n’est qu’un fantasme devant le mal infini dont sont capables les humains.
La Déesse et le Marchand d’Amitav Ghosh, aux éditions Actes Sud, septembre 2021, 320 p., 22,50 €.
Le Grand Dérangement d’Amitav Ghosh, aux éditions Wild Project, janvier 2021, 250 p., 20 €.
-
Amusement musical
- Par Thierry LEDRU
- Le 01/06/2024
- 0 commentaire
Il a plu toute la journée alors je me suis occupé ^^
J'ai utilisé la chanson "San Francisco" de Maxime le Forestier pour en faire un hommage au potager.
J'ai trouvé sur You tube un accompagnement instrumental.
C'est un beau potager
adossé à la colline
on y vient à pied
avec les outils
et bien motivés
pour toute la journée.
On se retrouve ensemble
plein d'entrain et de bonheur
on vient travailler, avec le sarcloir
et on vient semer, du matin au soir.
Quand le potager s'embrume
ou quand le soleil l'allume
mon potager, tu es ma joie
tu es ma source, tu es mon unique roi.
Suant sous le soleil
enivrés, grattant la terre
on arrosera tous les jeunes plants
on désherbera et on soignera
La brouette et le râteau,
la binette et la serpette
la paille étalée, le broyat posé
les outils rangés,
le jour tombera.
Quand le potager se lève
quand le potager s'élève
mon potager, tu es ma joie
tu es ma source, tu es mon unique roi.
C'est un beau potager
accroché à mon amour
on y vient à pied, on ne frappe pas,
le matin venu on y fait un tour
Peuplé de haricots
de tomates et de courgettes
peuplé de lumière et béni des cieux
il sera le seul à nourrir au mieux.
Car si le vieux monde s'effondre
car si le vieux monde s'effondre,
le potager, nous sauvera
il est la source, il est le plus grand roi.
-
Elle et moi
- Par Thierry LEDRU
- Le 30/05/2024
- 0 commentaire
Elle et moi
C'est l'année de nos noces d'univers que la Belle de ma vie a perdu son dernier feuillage.
De ce jour, je n'ai plus eu goût au printemps.
Nous nous sommes entendus pour préserver nos forces et rester debout. Il nous plaisait de continuer à observer nos compagnons et à leur prouver que la mort physique n'est pas celle de l'âme. Car c'est bien elle qui nous maintient dressés.
Nous racontons nos existences aux petits jeunes qui croissent. Ils nous écoutent attentivement car ils savent ce que nous avons traversé. Le gel brûlant des hivers et les soifs intenses des étés, les vents tempétueux des orages et les nuits étoilées. J'aimais infiniment les couchers de soleil et ma Belle se pâmait dans les clartés lunaires.
Autrefois, le feuillage de ma Belle se mêlait au mien et nos effleurements nous réjouissaient. Désormais, ce sont nos racines qui nous unissent. Nous savons que nos frères humains nous voient comme des arbres morts. Ils n'imaginent pas combien nos étreintes souterraines nous comblent de joie. Un jour, l'un de nous tombera et l'autre abandonnera pour le rejoindre sur la terre. Couchés l'un contre l'autre.
Et nous partirons en lambeaux. Nos fibres nourriront le sol comme une reconnaissance, un retour à la source de toute vie. Et sur l'humus de notre décomposition germeront deux autres graines. Rien ne se perd, tout se transforme, a dit l'un d'entre vous. Celui-là avait compris que la vie est éternelle. -
Voltairine de Cleyre
- Par Thierry LEDRU
- Le 28/05/2024
- 0 commentaire
https://www.philomag.com/articles/voltairine-de-cleyre-aux-sources-de-lanarcha-feminisme
De la suite dans les idées
Voltairine de Cleyre, aux sources de l’“anarcha-féminisme”
Jean-Marie Durand publié le 16 février 2023 8 min
Longtemps négligée par les historiens de l’anarchisme et du féminisme, la pensée « anarcha-féministe » fait aujourd’hui l’objet d’une attention renouvelée. Théorisée en grande partie à la fin du XIXe siècle par une activiste et poète américaine au prénom annonciateur d’une pensée éclairée, Voltairine de Cleyre, l’anarcha-féminisme articule un féminisme radical et une critique viscérale de l’autorité. Présentation.
Le champ du féminisme contemporain abrite en son sein de multiples analyses de la domination masculine, divisées entre une tradition dite universaliste et des approches inspirées de l’intersectionnalité et de l’écoféminisme. Mais, comme le remarque la philosophe italienne Chiara Bottici, directrice des études de genre à la New School for social Research à New York et autrice d’un récent Manifeste anarcha-féministe (Payot, traduction de Pauline Tardieu-Colliner), il est étonnant de constater que les féministes actuels occultent pour partie une vieille et féconde tradition de son histoire intellectuelle, dont procède une partie des études intersectionnelles : le féminisme anarchiste, souvent baptisé « anarcha-féminisme ».
Depuis plusieurs années, les textes fondateurs de ce courant de pensée né au XIXe siècle sont redécouverts, notamment ceux de la figure tutélaire de ce mouvement : Voltairine de Cleyre (1866-1912), militante et théoricienne anarchiste américaine qu’Emma Goldman (1869-1940), elle-même grande intellectuelle et activiste anarchiste, présentait comme « la femme anarchiste la plus douée et la plus brillante que l’Amérique ait jamais produite ».
Qui était Voltairine de Cleyre ?
Théoricienne, activiste, poète, Voltairine de Cleyre a entremêlé dans sa vie plusieurs registres d’action et d’écriture, orientés vers la révolution sociale, la destitution de la domination masculine, l’association du féminisme et de l’anarchisme. Née en 1866 dans une famille pauvre de la classe ouvrière du Michigan, Voltairine de Cleyre avait un père né en France, admiratif de Voltaire. Elle lui doit son prénom peu commun. En 1880, après la séparation de ses parents et fragilisée par une maladie nerveuse, elle est placée dans un couvent. À sa sortie, marquée par cette expérience d’enfermement, elle s’engage dans le mouvement anticlérical de libre-pensée ; elle écrit déjà des articles et des poèmes, donne des conférences dans lesquelles elle partage ses lectures du révolutionnaire américain Thomas Paine, auteur entre autres du Sens commun, mais aussi celles des philosophes Mary Wollstonecraft et Henry David Thoreau.
Très vite, elle s’ouvre à la pensée anarchiste et soutient l’action directe comme technique de révolution sociale. Dans un texte écrit en 1932, son amie Emma Goldman, alors considérée comme l’une des femmes anarchistes les plus dangereuses des États-Unis, raconte leur rencontre à Philadelphie, en août 1893 : elle était « au lit, malade, le crâne pansé de glace, le visage crispé par la douleur ». « J’appris qu’elle traversait ce type d’expériences après chacune de ses apparitions publiques : elle restait alitée pendant des jours, souffrant le martyre à cause d’une maladie du système nerveux apparue dans sa petite enfance et qui ne cessait de s’aggraver avec les années ».
“De la libre-pensée au socialisme, puis à l’anarchisme communautaire, Voltairine de Cleyre finit par se dire anarchiste, tout simplement”
Léa Gauthier, sa traductrice françaiseDès 1888, Voltairine assume la radicalité de son engagement féministe et libertaire, au point de dénoncer l’esclavage sexuel et l’institution du mariage qui légalise le viol selon elle. La souffrance de son corps et la misère de sa condition sociale déterminent tous ses engagements. « De la libre-pensée au socialisme, puis à l’anarchisme communautaire, elle finit par se dire anarchiste, tout simplement », précise sa traductrice Léa Gauthier dans la préface de son recueil de textes Y a-t-il plus fier et libre que nous ? (Payot). Elle est une théoricienne « dont la clarté est louée, une écrivaine à la plume noire, à la voix vibrante ». À rebours de l’archétype de l’anarchiste, éruptive et extravertie, Voltairine fut une personnalité effacée, introvertie, maladive, tout en dispensant des cours aux migrants des ghettos à Philadelphie et à Chicago, et en écrivant sans cesse.
La furie des mots s’ajustait à sa conscience malheureuse, éclairée par la pensée politique. Pour l’historien américain et spécialiste de l’anarchisme, Paul Avrich, une grande part de la révolte de Voltairine de Cleyre provenait de ses expériences personnelles, de la façon dont la traitèrent la plupart des hommes qui partagèrent sa vie et qui « la traitèrent comme un objet sexuel, une reproductrice ou une domestique ». Ce qu’elle théorisa au fil du temps, c’est la transformation radicale de la société, reposant avant tout sur la transformation du statut des femmes. Sans avoir eu le temps de connaître l’âge d’or de l’anarchisme international, ni avoir bénéficié de la reconnaissance qu’elle méritait, fût-ce de manière posthume, elle a permis de construire les bases théoriques du mouvement qui prit son essor dans les années 1920.
“À la question, ’Pourquoi suis-je anarchiste ?’, je pourrais sommairement répondre ‘parce que je ne peux pas faire autrement’”
Voltairine de CleyreQu’est-ce que l’anarcha-féminisme ?
Dans l’un de ses textes les plus connus, « Pourquoi je suis anarchiste » (1897), Voltairine de Cleyre explique son engagement. Elle écrit : « À la question, “Pourquoi suis-je anarchiste ?”, je pourrais sommairement répondre “parce que je ne peux pas faire autrement”, je ne peux pas être malhonnête envers moi-même ; les conditions d’existence m’oppressent ; et je dois faire quelque chose avec ma tête. Je ne peux pas me contenter de regarder le monde comme un enchevêtrement d’évènements à travers lesquels je dois me frayer un chemin, un peu comme dans le dédale d’un grand magasin, sans autre pensée que de le traverser et d’en partir. Je ne peux pas non plus me contenter de suivre le précepte de n’importe qui ».
“Les institutions mises en place par les hommes qui assurent vouloir préserver à travers elles la pureté de la femme mais qui en font un poupon, une irresponsable marionnette”
Voltairine de CleyreSoucieuse de se libérer des conventions vestimentaires et langagières, indignée par la répétition d’hypocrisies formelles propres aux relations sociales ordinaires, elle dit ressentir « par-dessus tout un profond dégoût envers l’enfermement des femmes dans le cercle étroit de la vie quotidienne où on la subordonne, sur le plan matériel, dans l’espace domestique et dans l’éducation ». Elle confie son aversion des idéaux qu’on propose aux femmes, et sa colère contre « les institutions mises en place par les hommes qui assurent vouloir préserver à travers elles la pureté de la femme mais qui en font un poupon, une irresponsable marionnette à qui l’on ne peut pas faire confiance en dehors de sa “maison de poupée” ». À cette colère s’ajuste la voie de l’anarchisme : « Elle vient comme la conclusion logique de trois cents ans de révolte contre l’autorité imposée de l’extérieur, elle n’offre aucun compromis et met à notre portée l’indéfectible idéal de l’homme libre ». Seule l’anarchie construit à ses yeux une lutte cohérente contre toutes les formes de domination, économique, politique, sociale, morale, esthétique, éthique.
“Contre la formule reçue du matérialisme moderne : ‘Les hommes sont faits par les circonstances’, j’oppose en premier lieu cette proposition : ‘Les circonstances sont ce que les hommes en font’”
Voltairine de CleyreOutre son texte clé, « Pourquoi je suis anarchiste », d’autres textes exhumés – citons « Action directe », une conférence prononcée le 21 janvier 1912 à Chicago, « L’esclavage sexuel », prononcée en 1895 devant la Ladies’ Liberal League ou« L’idée dominante », texte publié dans la revue Mother Earth (mai-juin 1910)… – affinent son modèle théorique en questionnant la tension entre la pensée matérialiste et la pensée idéaliste, pour éclairer ce qui guide les actes de nos vies. Sa philosophie de l’histoire, traversée par le goût de l’action et de la révolte, met à distance la conception matérialiste plébiscitée par les socialistes. « Je pense que le déterminisme implacable est une grande et lamentable erreur qui domine notre mouvement moderne et progressiste », affirme-t-elle. « L’idée de la domination absolue de la matière sur l’esprit est une erreur aussi dangereuse que celle d’un esprit existant en dehors de toutes relations avec le monde matériel. Ce qui nous manque, c’est une appréciation exacte de la puissance et du rôle de l’idée […]. Contre la formule reçue du matérialisme moderne : “Les hommes sont faits par les circonstances”, j’oppose en premier lieu cette proposition : “Les circonstances sont ce que les hommes en font.” »
Soucieuse de ne pas se laisser gouverner par l’idée dominante de son siècle, elle défend sa cause en estimant qu’« il y a quelque chose en l’homme qui le sauve de l’absolue tyrannie des circonstances, qui en triomphe ». Son éloge de la volonté individuelle, « laquelle est le salut de l’avenir », s’oppose à l’esprit de son temps : « Tenir jusqu’au bout, voilà ce que signifie avoir une idée dominante que ne peuvent briser les circonstances. Et les hommes qui tiennent jusqu’au bout font et défont les circonstances. »
“L’anarchisme a besoin du féminisme pour lutter contre la subordination continue de toutes les femmes, et le féminisme a besoin de lui s’il ne veut pas devenir le privilège de quelques-unes”
Chiara BotticiUn horizon du féminisme contemporain ?
Longtemps occulté dans le débat public, cet élan anarcha-féministe puisant ses dans l’œuvre de Voltairine de Cleyre peut-il remusculer le corpus théorique du féminisme contemporain ? Cette hypothèse est défendue par Chiara Bottici dans son Manifeste anarcha-féministe. Si l’anarchisme aspire à une société sans relations de domination, il a partie liée avec le féminisme. « Il a besoin du féminisme pour lutter contre la subordination continue de toutes les femmes, et le féminisme a besoin de lui s’il ne veut pas devenir le privilège de quelques-unes. “Soit toutes, soit aucune d’entre nous ne sera libre !” », avance l’autrice.
Un autre féminisme – et un autre monde – est possible, selon Chiara Bottici, grâce à une réarticulation entre ce féminisme libertaire du XIXe siècle et le féminisme intersectionnel du XXIe siècle, développant une approche globale de la domination, mêlant facteurs politiques, économiques, raciaux et culturels. Car il n’y a pas de facteur unique – que ce soit la nature ou l’éducation, l’exploitation économique ou la domination culturelle – « qui puisse être la cause unique et suffisante pour expliquer les sources du patriarcat et du sexisme », estime Chiara Bottici.
Les anarcha-féministes ont de fait souvent critiqué les grands théoriciens anarchistes (Proudhon, Bakounine) qui minoraient trop le problème du patriarcat, voire le validaient. Elles critiquent aujourd’hui aussi les féministes libérales, trop concentrées selon elles sur la seule question de l’accès des femmes au pouvoir. Ce que les anarcha-féministes reprochent aux féministes libérales, c’est de partager au fond le même imaginaire que les hommes dans le rapport au travail et au pouvoir, de ne vouloir qu’une seule forme d’égalité : l’égalité des chances de dominer. Or, pour les anarcha-féministes, un système matriarcal ne saurait par lui-même mettre fin aux dominations. Leur objectif n’est pas de s’emparer du pouvoir mais bien de l’abolir, dans la pure tradition anarchiste, au sein de laquelle vibre un féminisme émancipé de ce tropisme politique trop étroit.
Bref, un féminisme vraiment accompli doit s’accorder à un anarchisme égalitaire, dans une dialectique féconde conduisant à l’anarcha-féminisme, lequel s’oppose à toute forme de relation de pouvoir et dénonce le privilège que détiendraient des femmes émancipées (« puissantes », comme on l’entend aujourd’hui). La théoricienne anarchiste canadienne L. Susan Brown le souligne ainsi : « Puisque l’anarchisme est une philosophie politique opposée à toute relation de pouvoir, il est intrinsèquement féministe. » Chiara Bottici le dit tout aussi clairement : « Mais pourquoi l’anarcha-féminisme ? Parce qu’il s’agit du meilleur antidote contre un féminisme qui deviendrait privilège blanc et donc un outil dans les mains de quelques femmes dominant la majorité de toutes les autres ». Etre archi-féministe, serait-ce donc être anarcha-féministe ?