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De l'Anthropocène au Pyrocène : les méga feux
- Par Thierry LEDRU
- Le 16/07/2022
Entretien — Climat
Mégafeux : « Nous ne vivons pas seulement dans l’Anthropocène mais dans le Pyrocène »
Pour Joëlle Zask, auteure de « Quand la forêt brûle », les feux géants qui se multiplient dans le monde ne sont pas des phénomènes naturels. C’est bien le réchauffement climatique qui nourrit ces incendies et maintenant que ces derniers sont rentrés dans les villes, « on ne peut plus en faire abstraction ».
Joëlle Zask enseigne au département de philosophie de l’université Aix-Marseille. Elle est l’auteure de plusieurs ouvrages, dont Quand la forêt brûle (Premier Parallèle, 2019).
Joëlle Zask.
Reporterre — Que vous évoquent les incendies qui ravagent en ce moment l’Australie ?
Joëlle Zask — Ces incendies vont au-delà même de tout ce que j’avais pu imaginer et décrire dans mon livre. C’est d’une gravité extrême. Le désastre est devant nous : plus les zones brûlées s’étendent et plus les feux deviennent intenses, moins la réversibilité de la situation semble envisageable. On parle de 500 millions d’animaux carbonisés. Des milliers de personnes sont obligées de se réfugier sur les plages pour éviter le brasier. On voit un pays littéralement partir en fumée. Cela crée un choc psychologique. Nous entrons dans une époque où les conséquences du réchauffement climatique sont particulièrement palpables. Le feu détruit non pas la planète, mais les conditions d’existence des êtres humains et de nombreux animaux sur Terre.
Un autre aspect me révolte : l’attitude négationniste du Premier ministre Scott Morrison. Le gouvernement, qui a longtemps été climato-sceptique, refuse d’arrêter la production de charbon. Ces feux ne sont pourtant pas un phénomène naturel. Le croire est criminel.
Du feu près du lac Conjola (Nouvelle-Galles du Sud), en Austalie.
L’activité humaine est-elle ici en cause ?
Indéniablement. Ces incendies sont nourris par le réchauffement climatique. L’augmentation des températures fait baisser le taux d’humidité, la végétation sèche et devient extrêmement inflammable. Les forêts sont aussi de plus en plus attaquées par des insectes ravageurs et des pathologies qui croissent avec la chaleur. En Californie, une région qui a connu aussi de nombreux incendies ces dernières années, un arbre sur dix est victime d’agents pathogènes, de virus ou de champignons. Les forêts sont malades, les écosystèmes fragilisés et donc plus vulnérables à des incendies. Avec la sécheresse et le réchauffement climatique, la saison des feux s’allonge. En Australie, il reste encore trois mois d’été. On n’est donc qu’au début de la catastrophe.
Cette année a aussi été marquée par des feux en Amazonie, en Sibérie, au Portugal. On a l’impression que la forêt brûle partout. Est-ce inédit ?
Non, cela fait plus de dix ans que le phénomène des feux s’est aggravé et que les incendies sont devenus hors norme. C’est notre perception qui a changé récemment. On a commencé à en parler, à les voir, à les conscientiser. On revient de loin. Quand j’ai commencé la rédaction de mon livre [Quand la forêt brûle], il y a trois ans, la vulgate disait que les incendies étaient bons pour la forêt, qu’ils la régénéraient.
Les positions ont évolué depuis que les feux sont rentrés dans les villes, quand les habitants de Singapour ont commencé à suffoquer à cause des incendies en Indonésie ou que les gens de Sao Paulo étouffaient du fait de l’Amazonie en feu. En Australie, c’est parce que le brasier menaçait Melbourne et Sydney que les médias et les politiques ont commencé à s’emparer de la question. On ne peut plus en faire abstraction, l’incendie vient défier notre société urbaine, frapper à ses portes. Ses fumées entraînent de nombreuses maladies respiratoires et condamnent des dizaines de milliers de personnes à une mort prématurée. Canberra, en Australie, est désormais la ville la plus polluée du monde, avec un taux de pollution de l’air plus de 20 fois supérieur au maximum autorisé. Les gens s’empoisonnent. Désormais, on le sait. Avant le territoire des indigènes ou des ruraux brûlait en silence, sans susciter l’indignation. Ça prouve que pour se mobiliser contre le réchauffement climatique, il faut le vivre dans sa chair, ses tripes. C’est ce que découvrent aujourd’hui des populations urbaines partout sur la planète.
Le 31 décembre 2019, en Nouvelle-Galles du Sud (Australie).
Quels liens faites-vous entre ces multiples incendies à travers le monde ?Dans mon livre, je les ai rassemblé autour du terme de « méga feux ». Ces dernières années, le régime du feu a évolué. Les incendies sont devenus, selon les commentateurs, « extrêmes », « very large », « inextinguibles ». On parle de « monstre » en Australie, de « bête » en Californie. Ils sont incontrôlables. Quel que soit le nombre de personnes qu’on met sur le terrain, on ne peut plus les éteindre. On n’arrive même plus à protéger les logements. On fait simplement fuir les gens. La stratégie militaire qui déclare « la guerre au feu », à grand renfort de techno science, est impuissante.
Les incendies éclatent partout. Même le Groenland a brûlé en 2017. Des plaines enneigées ont pris feu. À l’été 2018, c’était au tour de la Lettonie et de la Suède jusqu’au cercle polaire. On ne peut pas les arrêter. En Sibérie, il a fallu attendre le changement de saison et la pluie pour que les feux s’éteignent. En Corse, on a des saisons du feu qui durent cinq mois.
Certains scénarios de la Nasa envisagent un embrassement des terres émergées. Quand on regarde le planisphère des feux, on se rend compte que leurs foyers se rapprochent de plus en plus les uns des autres. On estime qu’en 2050, 50 % des municipalités françaises seront exposées aux méga feux. (On le voit cet été 2022)
Comment les méga feux contribuent-ils au dérèglement climatique ?
Ces feux sont d’une telle intensité qu’ils génèrent leur propre climat. Par exemple ils augmentent la vitesse des vents et peuvent même déclencher la foudre. Sans compter que leurs cendres se déposent sur les glaciers et précipitent la fonte des glaces. C’est ce qui se passe en ce moment même en Nouvelle Zélande, les glaciers ont pris une couleur caramel avec la cendre qui provient des feux australiens, et du coup vont moins réfléchir la lumière et fondre plus vite.
Une utilisatrice de Twitter a posté cette photo de neige « caramélisée par la poussière des feux de forêts », près du glacier Franz Josef en Nouvelle-Zélande.
Les méga feux libèrent aussi beaucoup de gaz à effet de serre. Ils doublent l’activité humaine. En 2018, les feux de Sumatra ont généré autant de gaz à effet de serre que l’activité économique des États-Unis tout entier. En 2019, les incendies en Sibérie émettent autant de dioxyde de carbone que 36 millions de voitures. Nous ne vivons pas seulement dans l’Anthropocène mais dans le Pyrocène. Le feu est responsable d’une accélération du réchauffement climatique.
On parle beaucoup aujourd’hui d’adaptation au réchauffement climatique. En quoi les méga feux montrent-ils les limites de cette vision ?
Les méga feux sont des voisins infréquentables. Ils balayent tout et créent le désert. On ne peut pas s’adapter à un incendie. En prônant l’adaptation au réchauffement climatique, les politiques révèlent leur impuissance à lutter contre ses causes.
C’est absurde. Il faut imaginer que la surface qui a brûlé en Australie équivaut au quart sud-est de la France, de Marseille à Lyon. Le feu a vidé la population de ce territoire. Aucune adaptation n’est possible. La lutte contre l’incendie n’est pas non plus la solution. Reste alors la prévention.
Des personnes évacuées de Mallacoota, en Australie, le 2 janvier 2020.
Quelle est-elle ?
Il faut évidement lutter contre les causes du réchauffement climatique mais aussi remettre en cause les croyances qui irriguent la pensée occidentale : l’idéologie qui voudrait soumettre la nature, la dominer, mais également le préservationnisme - c’est-à-dire l’idée selon laquelle les équilibres naturels et la présence humaine sont incompatibles, que la nature fait bien les choses, qu’il faut s’en retirer, la protéger en la sanctuarisant et en la mettant sous cloche. Au contraire, je pense qu’il faut prôner une sorte de coopération et de partenariat, développer un modèle de soin de la forêt où cette dernière ne serait pas uniquement vue sous l’angle de l’extractivisme.
Concrètement, cela veut dire revenir à des pratiques menées par des peuples indigènes mais aussi par les paysans traditionnels. Monter la garde, débroussailler, habiter le territoire, faire des feux de surface pendant la saison des pluies. Devenir l’auxiliaire de la nature. Faire avec elle plutôt que contre. S’opposer à la nature, c’est la détruire mais c’est aussi détruire nos chances de vie sur la Terre.
La gestion industrielle des forêts peut-elle être à l’origine de certains incendies ?
Tout à fait. J’ai été frappée par les feux de forêt, totalement inédits, en Suède, à la fin de l’été 2017. C’était sidérant parce que l’on ne s’attendait pas à ce que des forêts boréales et même arctiques brûlent. Ces incendies ont révélé le fait que la Suède possédait une forêt à 70 % industrielle. Des plantations de pins, des monocultures uniformes qui appauvrissent les sols et affament les rennes qui manquent de lichens. Les méga feux se sont rapidement propagés du fait de l’extrême densité de ces pins et de la vulnérabilité de ces forêts industrielles. On voit la même chose se développer en Espagne ou au Portugal avec les plantations d’eucalyptus particulièrement inflammables. Le feu n’a donc rien d’un phénomène naturel, il est éminemment politique.
Propos recueillis au téléphone par Gaspard d’Allens
Quand la forêt brûle, de Joëlle Zask, Premier Parallèle, août 2019, 208 p., 17 euros.
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L'esprit de tribu
- Par Thierry LEDRU
- Le 16/07/2022
C'est le fond du roman que j'écris depuis des mois..."Le désert des Barbares"
Dans le scénario d'un effondrement de la société, c'est l'esprit de "tribu" ou de "communauté" qui deviendra le seul moyen de survivre.
"Quand nous avons cessé d'être des tribus, l'unité a craqué. Nous pensions que le couple, ou le noyau familial allaient suffire, tandis que les amitiés et les cercles d'appartenance nous donnaient les miettes de cohabitation éphémères.
La tribu est bien plus que des amis et des frères de sang. La tribu est l'appartenance spirituelle à une fraternité qui soutient et nous invite à soutenir. La tribu est l'endroit où les rôles naturels sont partagés, échangés et interagis.
Les mères aujourd'hui maternent seules sans le groupe de confinement et de soutien. Les enfants ont des frères qui sont toujours les mêmes, ceux du sang, et les frères spirituels qui sont nombreux devraient jouer ensemble, en train de cocréer. Nous nous séparons en petites propriétés privées, courant d'un côté à l'autre pour trouver la subsistance du noyau familial.
Le naturel c'est de se regrouper et pendant que certains sèment, d'autres éduquent, d'autres construisent, d'autres cuisinent, et au bon moment nous nous réunissons pour manger, célébrer, continuer à tribuer.
Sans tribu, c'est comme un corps humain démembré essayant de fonctionner, chaque membre séparément.
Nous devons retourner dans les tribus où les grands-parents sont dignes et les oncles sont tous. Le commerce, la propriété privée et l'individualisme nous ont arrachés comme des branches du tronc qui nous unit.
Dans la tribu tous les dons sont les bienvenus, et les rôles rotatifs ne créent ni ennui ni saturation. Dans les tribus il y a tellement de frères et sœurs que le partage est délicieux et les modèles alternent.
Maintenant, on commence à utiliser le vieillissement entre amis, et c'est apprécier la tribu. Nous pouvons commencer plus tôt et donner aux enfants un environnement sain où le partage est naturel et où il y a de nombreuses références à apprendre.
La tribu : c'est pour créer l'amour."
LE DESERT DES BARBARES
Martha dormait, la tête sur l’épaule de Moussad.
« Ils sont morts, annonça-t-il en murmurant lorsqu’il rejoignit le groupe. Martha s’était cachée. »
Tristan prit la petite fille dans ses bras, son corps lourd, profondément endormi. Anne posa la main sur son épaule.
« On va l’installer dans la chambre. Je vais la veiller.»
Kenza enlaça Moussad qui déposa un baiser dans son cou.
« Je vais bien, » souffla-t-il à son oreille.
Il déposa le sac qu’il avait porté sur la poitrine, il sortit la gourde et se déshydrata.
« Tout était fini là-bas, il n’y avait plus personne, raconta-t-il au groupe. Ils ont mis le feu à la maison, je pense que les corps de Jean et Delphine y étaient, je ne les ai pas trouvés. Martha était cachée à l’orée de la forêt, elle m’a reconnu. Elle m’a dit qu’il y avait quatre voitures, des 4X4 et le dernier avait une remorque. Jean a dit à Martha de partir se cacher dans la forêt. Elle a entendu des coups de feu. Elle avait une cabane où elle allait jouer parfois. Elle s’y est cachée. Elle les a attendus puis elle s’est endormie et ce matin, elle est retournée à la ferme. Elle m’a vu quand je tournais sur le terrain. Ils ont tué et emporté toutes les chèvres, c’est pour ça qu’ils avaient une remorque. J’ai trouvé les corps des deux chiens. Martha voulait qu’on les enterre. Je m’en suis occupé. La petite était épuisée, elle a beaucoup pleuré. Elle a compris que ses parents sont morts. Elle a du courage. »
Ils s’étaient tous regroupés dans la salle commune. Tristan avait pris son tour de garde.
« Ils viendront ici aussi, on est connu dans le coin et les pillards sont toujours des gens du pays. En tout cas, au début. Ils vont chercher tous les lieux où ils pourront trouver de la nourriture et tout ce qu’ils pourront revendre. Le carburant, le matériel agricole, les voitures, les groupes électrogènes, les batteries des panneaux solaires. En ville, il ne doit plus y avoir grand-chose à voler. C’est maintenant que ça va devenir le plus dangereux pour nous. »
Sophie avait pris la parole et comme à chaque fois, Tian observa le groupe. Il était fasciné par l’écoute de tous.
« Ils cherchent de la nourriture, c’est facile de s’en prendre aux fermes isolées. Mais ils ne savent pas qu’on est tous armés. Jean n’avait que son fusil de chasse. Aucune chance contre un groupe entier. »
Quelques instants de silence. Chacun dans les pensées sombres, un scénario dramatique qu’ils ne voulaient pas connaître.
« Il faudra deux gardes en permanence. Un à mi-parcours de la piste, au niveau du dernier virage, un autre à l’entrée du hameau. Si un groupe passe, le premier guetteur laisse passer le dernier véhicule et il déclenche les hostilités. Pas de sommations. Il faut les prendre tout de suite entre deux feux. C’est eux ou nous. Dites-vous qu’un mort parmi eux, c’est un vivant parmi nous. Le premier guetteur devra prendre la radio, le second poste restera ici sur écoute en permanence. Didier, tu surveilles l’alimentation des deux.»
Louna était estomaquée. Non pas par les paroles de Sophie mais par l’adhésion totale du groupe à tout ce qu’elle disait. Elle réalisa combien elle admirait cette femme, sa détermination, son pouvoir de décision, la clarté de ses interventions. Là, dans le scénario détaillé, comme dans tout ce qu’elle avait pu entendre depuis qu’elle était arrivée.
Sophie écoutait les remarques, les analysait, les commentait mais au final, c’est ce qu’elle proposait qui était toujours retenu.
« Je rappelle à tous qu’en plus de votre arme à feu, vous devez toujours avoir un poignard avec vous et que vous ne devrez avoir aucune hésitation à vous en servir. Rappelez-vous toujours ce que Moussad nous a appris. Dans une situation de combat, celui qui hésite est mort. Si vous disposez de deux secondes pour tuer un ennemi, n’en prenez pas trois.
-Sophie ?
-Oui, Tian.
-Louna et moi, on n’a pas d’arme à feu et on n’a jamais appris à tirer.
-Moussad vous donnera un pistolet et des balles mais il est trop tard pour apprendre. Des coups de feu seraient entendus. On ne peut pas prendre ce risque. En cas de coup dur, vous resterez à l’abri avec Martha. Est-ce que vous avez un poignard ?
-On a un couteau chacun mais c’est pareil, on n’a jamais appris à se battre.
-Moussad, tu t’occuperas de leur donner quelques rudiments.
-Ok, on commence aujourd’hui, répondit Moussad.
-Louna et Tian, reprit Sophie, j’ai bien conscience que vous puissiez être choqués par mes propos. Vous n’avez certainement jamais envisagé de devoir vous battre pour survivre. Pour nous, c’est une évidence que ça devait arriver et on s’est préparé à ça. Ce que vous avez vu jusqu’ici, c’est l’aspect tranquille du mode survivaliste. L’autonomie alimentaire, énergétique, l’eau, l’élevage, l’entraide, le bricolage, la récupération. Tout ça, c’est bien joli, ça fait un peu baba-cool et nouveau monde, ça fait rêver. Mais il y a un autre aspect qui ne doit pas être occulté. Et c’est malheureusement ce que Jean et Delphine n’ont pas voulu entendre. Ne survivront que ceux qui sont en groupe parce que dans le chaos, il y a inévitablement des bandes armées qui ne respectent plus rien. Si Martha avait été attrapée, il faut imaginer qu’elle aurait été violée avant d’être tuée et j’espère que Jean et Delphine ont été rapidement abattus.»
Une voix monocorde, le silence dans la salle.
« On s’est regroupé ici pour survivre ou en tout cas se donner une chance d’y parvenir. Le monde a basculé dans le chaos, c’est une certitude, nous avons des informations suffisantes pour n’avoir aucun doute. Le monde d’avant est en train de disparaître. Je sais Louna que tu pleures ta mère mais maintenant, il faudra te battre pour ne pas pleurer ton père ou Tian. Et nous ferons tout notre possible pour ne jamais avoir à te pleurer. Voilà ton monde désormais. Notre groupe, rien d’autre. »
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Tour de la Creuse à vélo
- Par Thierry LEDRU
- Le 12/07/2022
Voilà vingt ans qu'on fait nos raids à vélos avec des VTT, bien lourds et cette année, on a décidé d'investir dans de nouvelles montures.
Le magasin "La boîte à vélos" de Guéret nous a confectionné deux vélos de voyage sur mesure. Des merveilles. Une équipe au top, de très bons conseils et ils se sont sacrément démenés pour pouvoir nous livrer les vélos avant l'été malgré toutes les ruptures de stock.
Voilà donc notre premier raid effectué, le tour de la Creuse. Cinq jours, 400 km, 4600 mètres de denivélée. La Creuse, c'est très vallonné. Et c'est magnifique.
On est en autonomie, tente, duvets, vêtements, réchaud, popote, des bouteilles d'eau etc... Les bivouacs, c'est notre bonheur. La Creuse regorge de ruisseaux et d'étangs et ça nous suffit pour nous rafraîchir après une journée à pédaler. Un pré, une lisière de forêt, c'est tout ce qu'il nous faut.
Les petites routes empruntées sont très peu fréquentées et de toute façon, les locaux sont très respectueux des cyclistes.
La gentillesse des Creusois, on a encore pu l'apprécier pleinement. De belles rencontres avec des gens du terroir et des discussions passionnantes. Voyager à vélos, c'est le gage d'une curiosité sympathique de la part des habitants et des commerçants. Les Creusois entendent tellement dire qu'ils habitent dans le trou .... du monde que lorsqu'on leur clame notre amour pour ce département, ils sont heureux.
Quinze euros de dépense par jour par personne, uniquement en alimentaire. C'est certain que l'investissement dans les vélos est conséquent mais c'est pour des années, tant qu'on pourra pédaler. Donc, le voyage à vélo, c'est économique.
Et puis, c'est là qu'on sent une terre, qu'on l'entend, qu'on la respire, qu'on la voit réellement.
"On n'arrête pas le vélo parce qu'on devient vieux mais on devient vieux quand on arrête le vélo."
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Sécheresse encore et toujours.
- Par Thierry LEDRU
- Le 05/07/2022
L'eau manque. De plus en plus tôt dans l'année.
Gorges du Verdon: les activités touristiques menacées par la sécheresse
Mis en ligne le 30/06/2022 à 11:51
En ce début d’été, les Alpes-de-Haute-Provence, très prisées des touristes européens, ont l’impression de « toucher du doigt » le réchauffement climatique.
Des gorges du Verdon sans rafting cet été faute d’eau, un lac réduit à peau de chagrin: en ce début d’été, les Alpes-de-Haute-Provence, très prisées des touristes européens, ont l’impression de « toucher du doigt » le réchauffement climatique.
Au bord de la plage du lac de Castillon, enserré entre les montagnes alpines à 900 mètres d’altitude, il ne reste même pas 40 cm de fond. L’eau a reculé comme sous l’effet d’une grande marée.
« Quand on voit ce spectacle, ça donne pas envie », admet tristement Serge Prato, le maire de Saint-André-les-Alpes, un village de quelque 980 habitants qui vit en partie du tourisme.
La mort dans l’âme, le maire s’apprête à interdire la baignade car le niveau d’eau du lac est cinq mètres au-dessous de la cote habituelle.
Le parc aquatique n’ouvrira pas. Et le ponton où se louent les bateaux électriques et autres pédalos a les pieds à sec.
« On va même pas faire le quart de notre chiffre d’affaires. Les touristes sont déjà énervés (Oh les pauvres, ils n'ont pas d'eau pour leur trempette...On voit le niveau de conscience de ces gens...Effrayant) et quand il y aura beaucoup de monde, qu’est-ce qu’on va pouvoir leur proposer ? », se désespère Inès Flores, responsable de la base nautique Bike Beach.
« En quelques décennies, on est passé d’une sécheresse tous les cinq ans, à trois sécheresses tous les cinq ans », explique Claude Roustan, président de la fédération de la pêche de ce département du sud-est de la France.
Avec le réchauffement climatique, l’intensité et la fréquence des épisodes de sécheresse risquent encore d’augmenter même si le monde parvient à limiter la hausse des températures à +1,5°C par rapport à l’ère pré-industrielle, selon les experts de l’ONU pour le climat.
Déjà comme une fin d’été
Dans ce coin des Alpes françaises, un hiver avec peu de pluie et de neige sur le Val d’Allos a créé une situation hydrologique « historique », explique Olivier Savoye, délégué territorial pour la compagnie électrique EDF pour le Verdon.
Barrages et lacs artificiels ont été aménagés sur cette rivière au XXe siècle afin d’assurer une production d’électricité ( Je rappelle qu'une vingtaine de centrales nucléaires sont en arrêt pour maintenance (de la rouille...). Il y en aura d'autres par manque d'eau pour le refroidissement. ) mais aussi l’alimentation en eau de la Provence jusqu’à Marseille et son irrigation.
Avec leurs eaux émeraude, les cinq lacs et les gorges - le plus grand canyon d’Europe - sont aussi devenus de hauts lieux des loisirs nautiques avec un million de touristes par an dont beaucoup de Néerlandais, Belges ou Allemands. Mais cette année, les activités y seront réduites.
EDF, qui a maintenu un débit minimum dans le Verdon pour préserver la faune, ne fera pas de lâchers d’eau dans les gorges, compromettant pour la première fois toute une saison de rafting.
Le célèbre lac de Sainte-Croix est lui à un niveau de fin d’été. Les activités nautiques sont pour l’instant maintenues mais qu’en sera-t-il en août ?
Plus au Nord, sur le lac de Serre-Ponçon, plus grand lac artificiel de France, les activités de nautisme (9 plages, 15 bases nautiques, 12 ports) tout comme l’agriculture sont menacées, s’inquiète la région Provence-Alpes-Côte d’Azur qui promet d’aider à adapter les structures à ces « nouveaux enjeux du dérèglement ».
« Il faut que les habitants comme les touristes aient conscience de cette situation exceptionnelle », insiste la préfète des Alpes-de-Haute-Provence, Violaine Démaret. ("Conscience" ? pas pendant les vacances, c'est inimaginable...)
« Changer »
Il faudra aussi encourager les activités annexes (VTT, randonnée) dans ce pays de la lavande, même si l’incendie récent de 1 800 hectares dans un camp militaire proche a rappelé que la sécheresse fragilise aussi la végétation.
« Est-ce qu’on va réussir à la fois à faire de l’électricité, de l’agriculture, du raft et du kayak? », s’interroge Jacques Espitalier, vice-président du Parc naturel régional du Verdon.
« On est dans le pays de Manon des sources (le roman de Marcel Pagnol) mais ce n’est pas chacun sa source et son eau », insiste Violaine Démaret au moment où certains hameaux aux sources taries doivent être ravitaillés en eau potable. (Et c'est là qu'on voit pourquoi le rejet du tourisme de masse n'en est qu'au début)
Chaque acteur devra faire des concessions: EDF a « sacrifié » sa production hydroélectrique depuis six mois pour préserver les autres usages, explique Mme Démaret.
« A quoi bon accorder des permis de construire si on a des problèmes d’eau? », réfléchit à haute voix le maire de Castellane, Bernard Liperini qui hésite désormais à attirer 500 personnes de plus sur sa commune de 1 600 habitants comme il l’envisageait.
L'Italie frappée par la sécheresse : "Cela fait trois mois qu'il ne pleut pas ici", témoigne un maraîcher du Sud du pays
Tout le pays est confronté à un manque d'eau en cette fin juin et les agriculteurs soumis à des restrictions d'irrigation. Nous avons rencontré des producteurs de fruits qui ont déjà perdu une bonne partie de leurs récoltes.
Article rédigé par
Radio France
Publié le 30/06/2022 08:28Mis à jour le 30/06/2022 08:29
Temps de lecture : 2 min.
(PIERO CRUCIATTI / AFP)
Fabiano Santapria marche sur les feuilles sèches de ses pastèques. Ce maraîcher de la province de Latina, dans le Sud de l'Italie, a une petite exploitation de quatre hectares et cultive ses fruits sous serre mais ils ont besoin de beaucoup d'eau et en continue. En raison de la sécheresse qui sévit dans tout le pays et des fortes chaleurs - juqu'à 43 degrés en Sicile - l'eau est désormais rationnée pour les agriculteurs. Ce mercredi 29 juin, Fabiano est autorisé à arroser, alors il ouvre les vannes.
L'eau coule en abondance mais demain le fournisseur coupera l'alimentation 24h pour faire des réserves, dimanche aussi. À quelques kilomètres, les coupures sont quotidiennes mais seulement 6 heures. L'impact est immédiat pour Fabiano : "Cette année nous avons déjà 20% de pertes au moins, en terme de quantité mais aussi de qualité car sans eau la pastèque est plus farineuse. Et vous voyez juste-là j'ai un terrain sur lequel je voulais planter des courgettes mais sincèrement sans la garantie d'avoir de l'eau je ne peux pas. Cela fait trois mois qu'il ne pleut pas ici".
L'Italie manque de réservoirs d'eau
Le président de la section locale du syndicat agricole Coldiretti n'a jamais vécu une telle situation, avec des coupures d'eau anticipées d'un mois par rapport à la dernière grande sécheresse. À ces restrictions, s'ajoute le coût du transport de l'eau car l'énergie est plus chère et c'est l'agriculteur qui paie, explique Denis Carnello : "On parle de 30 à 35 centimes du mètre cube, c'est énorme par rapport aux années passés, on payait moins de 20 centimes. Donc ça a quasiment doublé... Et en plus on n'a même pas de service fiable, ce n'est pas de la faute du fournisseur mais bien du manque d'eau".
En revanche, les compagnies des eaux et les pouvoirs publics ont bel et bien une responsabilité dans l'acheminement de l'eau car les conduites fuient et pas qu'un peu, affirme Anna Gianetti, la président de la ligue de l'environnement Legambiente locale : "70,3% : c'est le taux énorme de fuite de notre réseau d'eau. C'est dû notamment au vieillissement des infrastructures. Notre compagnie des eaux a un plan d'investissement mais il est clairement insuffisant. Imaginez qu'au niveau national on est à 40% de pertes, nous, ici, on est a presque deux fois plus que la moyenne nationale !" L'Italie manque aussi cruellement de réservoirs d'eau, ils ne collectent que 11% des eaux de pluie.
Espagne et Portugal en février...
Ils se plaignent mais on voit quand même un arrosage de cultures en plein soleil...Du grand n'importe quoi...Et quand je fais une recherche, on voit le même genre de reportages depuis des années. Avant, c'était en août, maintenant, c'est en juin. Mais rien ne change au niveau de la prise de conscience. Les gens râlent et c'est tout...
Les Américains et leur arrosage de pelouse...Population d'inconscients et d'irresponsables.
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Rejet du tourisme de masse (2)
- Par Thierry LEDRU
- Le 01/07/2022
On a remonté ces gorges lorsque les enfants étaient jeunes, il y a une vingtaine d'années. C'était en plein été. On n'a vu personne. Pas un seul randonneur... Cinq heures de marche dans l'eau, certains passages à la nage, à contre courant. C'était même un peu engagé vu le débit de la rivière. Il y avait eu un orage deux jours avant...On maîtrisait. J'avais mon matériel d'escalade s'il avait fallu sortir par la falaise.
Un lieu magnifique, sauvage.
Et aujourd'hui...
On connaît plusieurs autres gorges du même type, dans des endroits perdus, inconnus. Il faut chercher, sans chemin, sans road book, à travers la végétation en suivant les sentes des animaux. On n'en parle plus. Jamais, à personne. C'est la seule raison pour laquelle il n'y a plus de récits de nos sorties sur ce blog.
Sur le tourisme de masse :
Méditerranée : tourisme, industrie, pollution.
Les gorges du Toulourenc étouffent, un maire interdit l'accès à la rivière
Mercredi 22 juillet 2020 à 16:04 -
Par Philippe Paupert, France Bleu Vaucluse, France Bleu Drôme Ardèche
Le maire de Saint-Léger-du-Ventoux interdit l’accès aux gorges du Toulourenc (Vaucluse) pour préserver ce site classé Natura 2000 au pied du Ventoux. La qualité de l'eau est dégradée par la surfréquentation. Les poissons et insectes aquatiques fuient. Un garde pourrait filtrer les visiteurs.
La surfréquentation du Toulourenc étouffe la rivière l'été © Radio France - Philippe Paupert
Les gorges du Toulourenc étouffent. Cet espace naturel protégé derrière le Ventoux est pris d'assaut chaque été par des vacanciers qui transforment la fragile rivière en piscine. L'eau de la rivière est dégradée par cette surfréquentation. Les poissons, les insectes aquatiques fuient, les scientifiques mettent en garde.
Le maire de Saint-Léger-du-Ventoux vient d'interdire l'accès aux gorges du Toulourenc.
Accès interdit, mais touristes irresponsables
La baignade, la promenade... tout est interdit dans les gorges du Toulourenc quand on vient de Saint-Léger-du-Ventoux. Le maire Eric Massot ne supporte plus la foule. Il souhaite limiter la surfréquentation avec son arrêté municipal : "ça fait 10 ans qu'on en parle. On voit la fréquentation augmenter chaque année, c'est catastrophique pour ce patrimoine naturel" mais les baigneurs ne respectent pas l'interdiction.
Laudine est venue de la Vienne pour se baigner. Elle montre des truites fario piégées dans un creux à quelques centimètres de la serviette de cette touriste complètement ignorante des dangers qu'elle fait courir à la fragile nature du Toulourenc . "Je ne savais pas, s'exclame-t-elle en riant. Je ne sais pas en quoi elle est fragile. Il y moins d'eau dans le Toulourenc mais c'est pour d'autres raisons que le tourisme. Le tourisme n'est pas le principal responsable."
Les baigneurs dégradent l'eau du Toulourenc
Moins d'eau, davantage de baigneurs, "l'eau du Toulourenc se dégrade", explique Eric Massot, le maire Saint-Léger-du-Ventoux : "quand les gens se baignent, la crème solaire se dilue dans l'eau ce qui nuit aux poissons et petits animaux. Au niveau du pont de Veaux (Malaucène), l'eau n'est pas bonne pour la baignade."
Julie est venue de Carpentras avec ses enfants : "on déplace des cailloux, on fait des barrages, on saute, on plonge" Chaque fois qu'on marche ou qu'on bouge des pierres du Toulourenc pour créer de minuscules barrages, on dégrade davantage la rivière. Juliette Chassagnaud est en charge de cet espace Natura 2000 : "les sédiments vont se remettre en suspension. L'eau va se réchauffer, les algues vont se développer. Toutes les espèces aquatiques, les insectes, les poissons vont fuir cet espace. Chaque barrage va piéger des poissons. L'eau va stagner et sa qualité va se dégrader. On étouffe le Toulourenc par cette surfréquentation".
Le Toulourenc étouffe, il ne faut plus fréquenter les gorges l'été
En trois ans la fréquentation a été presque multiplié par quatre. Le Toulourenc est en danger Juliette Chassagnaud est en charge de cet espace Natura 2000 pour le futur parc naturel du Ventoux : "on est très inquiet. La surfréquentation provoque un stationnement anarchique des voitures le long des routes et même dans les parcelles privées, notamment les vignes. Certains vacanciers vont aussi laisser leur déchets sur place. Il ne faut plus fréquenter le Toulourenc en période estivale. Le site étouffe."
Un garde pour compter les visiteurs du Toulourenc ?
Le maire de Saint-Léger-du-Ventoux a donc interdit l’accès aux gorges. Eric Massot envisage de compter les visiteurs l'année prochaine et d'installer un ou plusieurs gardes : "on définit un nombre de personnes par jour. Quand on atteint ce nombre, on ferme. Il faut qu'on puisse mettre un garde qui compte pour réguler le nombre de personnes dans les gorges du Toulourenc. Ca sera le seul moyen pour garder notre patrimoine intact".
Des travaux devraient aussi débuter à l'automne pour réduire les parkings d’accès aux gorges du Toulourenc.
Le Toulourenc étouffe l'été
Chaque barrage sur le Toulourenc piège les poissons et réchauffe l'eau © Radio France - Philippe Paupert
La surfréquentation des gorges provoque un stationnement anarchique prés du Toulourenc © Radio France - Philippe Paupert
Bouger ds pierres ou construire des barrages fragilise la faune du Toulourenc, site Natura 2000 © Radio France - Philippe Paupert
La fréquentation a été multiplié par quatre en quelques années : le Toulourenc étouffe l'été © Radio France - Philippe Paupert
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Rejet du tourisme de masse
- Par Thierry LEDRU
- Le 01/07/2022
Ce mouvement de contestation prend de l'ampleur et personnellement, je trouve ça très bien. Les dégâts sur les lieux mêmes sont très importants. Et on peut rajouter bien entendu l'empreinte carbone liée aux innombrables voyages en avion.
Ce temps-là est révolu à moins que ces gens considèrent qu'ils ne sont pas concernés par l'état de la planète et les atteintes à la biodiversité.
Je trouve totalement consternant qu'il y ait encore autant de gens à se payer des croisières quand on sait la pollution générée par ces bateaux. Même chose avec l'avion bien entendu.Sur place, ce sont les piétinements, les déchets, les excréments, le bruit, la pollution des eaux, la bétonnisation, la déforestation, le déplacement forcé des populations autochtones. Il est impossible de dire : "je ne savais pas". Il conviendrait plutôt de dire "je m'en fous".Là, ça serait la vérité.
Pendant des années, j'ai partagé sur Facebook et sur mon blog des photos et des descriptifs de nos sorties en montagne, de nos raids à vélo, des sommets en ski de randonnée, des sorties en raquettes à neige. Je ne mets plus rien. Je ne veux pas participer à ça. Sur Facebook, j'ai effacé tout l'historique. Ici également pour ce qui concerne les descriptifs.
Je suis allé mettre le feu aux poudres sur un groupe Facebook où les gens viennent partager leurs itinéraires. Je me suis fait incendier, accusé d'être un égoïste, un profiteur des beautés de la nature qui veut les garder pour soi. Non, je souhaite juste qu'elles restent dans le meilleur état possible. Et tout ce qui contribue au tourisme de masse va à l'encontre de cet objectif. Et d'ailleurs, les plus beaux itinéraires qu'on a connus sont ceux qu'on a découverts tout seul parce que la notion d'engagement et d'aventure était total. Mais qui a encore envie d'aventure dans un monde ultra sécuritaire ? Voilà la question...
La calanque d'En Vau en photo ci-dessous, je l'ai connue quand j'avais seize ans. Un stage escalade organisé par le club de Brest où j'étais affilié. On est venu aux vacances de la Toussaint. On était seul. Une dizaine de grimpeurs. J'y suis revenu en été deux ans plus tard et même en période estivale, il y avait très peu de monde. On voit ce qu'il en est aujourd'hui. J'imagine bien le nombre de déchets abandonnés partout. Et l'état des sentiers ravagés par des millions de pieds.
La croissance démographique et le fait qu'un très gros pourcentage de la population a une voiture et le partage sur les réseaux sociaux et les offices de tourisme. Beaucoup de causes pour des conséquences dévastatrices parfois.
C'est désolant pour ce merveilleux site naturel mais d'un autre côté, il n'y a toujours personne dans des tas d'autres lieux que nous connaissons. Et dont je tairai le nom...
Calanques : surfréquentation du parc et accès limité en 2022
Par Volodia Petropavlovsky
Publié le 23 juillet 2021 à 20:22
Victime de son succès, la calanque de Sugiton sera accessible sur inscription. Une décision qui s’inscrit dans une stratégie de « démarketing » du parc surfréquenté.
©ydecaseneuve - wikimedia commonsLe site attire trop de monde : l’an dernier, ils étaient près de 2500 par jour à se rendre à la calanque de Sugiton, « menaçant la pérennité du couvert végétal est menacée, comme la régénération de la pinède », et laissant de nombreux déchets sur place. Face à cette sufréquentation, le parc national des Calanques a décidé de limiter l’accès à Sugiton à partir de 2022. Si les modalités ne sont pas encore clairement définies, l’on sait déjà que, dès février ou mars prochain, il faudra réserver son entrée gratuitement. Ce pass sera obligatoire pour les touristes comme pour les locaux, et réservable quatre semaines à l’avance. Avec cette mesure forte (une première pour un parc national français), le jauge devrait s’abaisser à 400 ou 500 personnes maximum par jour.
Seul le fond de la calanque sera soumis à cette autorisation, les sentiers en hauteurs devraient être toujours libres d’accès.
Une stratégie de démarketing du parc
© capture d’écran.- parc national des CalanquesCréé en 2012, le parc national des Calanques accueille chaque année près de 3 millions de visiteurs, contre 1 million il y a une dizaine d’années. Cet afflux de masse, particulièrement l’été, s’est accentué depuis le début de la pandémie. « La crise sanitaire a joué un rôle primordial et a donné envie aux gens de renouer avec la nature. On s’est retrouvé avec des phénomènes nouveaux comme la queue pour accéder à la plage d’En Vau », explique Zacharie Bruyas, en charge de la communication du parc, à France Télévisions.
Un attrait renforcé par les réseaux sociaux selon le parc, notamment les post instagram de mer turquoise et de paysages paradisiaques. Depuis l’hiver dernier, un stratégie de « démarketing » est à l’œuvre, autant pour faire prendre conscience aux usagers de la fragilité du milieu que pour dissuader un grand nombre d’entre eux de s’y rendre.
Dans l’onglet « plages et baignade » du site web du parc, on peut par exemple lire les descriptions suivantes :
« Massif montagneux en bord de mer, les Calanques offrent peu de plages. Situées au creux des criques, dénuées d’équipements, elles sont souvent difficiles d’accès, exiguës et prises d'assaut pendant la période estivale. »
« Tous les lieux de baignade populaires du Parc national sont difficiles d’accès, de taille réduite et surfréquentés en été. Vous n’y trouverez ni commerces, ni points d’eau, ni toilettes, ni poubelles. »
4 nouveaux mouvements de contestation contre "le tourisme qui détruit le monde"
"La montée du ressentiment contre les touristes est un problème à prendre au sérieux" avance le secrétaire général de l'Organisation mondiale du tourisme.
Eddy FougierPolitologue, consultant
"Le tourisme détruit le monde!", c'est ce que l'on pouvait lire sur les planches protégeant la vitrine d'une agence de voyages locale à Valence dans la Drôme où s'étaient réunies le 2 février plus de 5000 personnes dans le cadre des mobilisations hebdomadaires de gilets jaunes. Jusqu'alors, lorsque l'on pensait contestation de l'activité d'entreprises et d'autres acteurs économiques, on pensait aux activités extractives, au nucléaire, à l'agrochimie, aux biotechnologies (OGM), à la finance ou encore à la "malbouffe", mais assez peu au tourisme, a fortiori dans un pays qui s'enorgueillit d'être la première destination mondiale du tourisme international. Est-ce en train de changer?
On ne peut pas dire à proprement parler que l'on assiste à un tourismebashing en France, mais on peut tout de même remarquer à propos de ce secteur que l'on retrouve les quatre formes de critiques courantes des activités des entreprises. Certaines de ces critiques relèvent de la "tourismophobie", pour reprendre l'expression de Paul Arseneault, c'est-à-dire d'un rejet de l'industrie touristique, de ses partenaires institutionnels (administration publique, municipalité, offices du tourisme) ou commerciaux (hôtels, AirBnb, transporteurs), tandis que d'autres prennent la forme d'une "touristophobie", soit d'un rejet des touristes en tant que tels, ce rejet pouvant aller jusqu'à des agressions dans certains cas.
On a ainsi pu voir émerger ces dernières années en France, comme ailleurs, quatre formes de contestation du développement de l'activité touristique de masse. La première de ces critiques est de nature intellectuelle. Elle est émise par des chercheurs et des universitaires. Elle peut être indirecte, à l'instar de ces chercheurs de l'université de Sydney qui ont publié en 2018 une étude dans la revue Nature Climate Change sur la base d'une évaluation des émissions de gaz à effet de serre du secteur touristique (qui représenteraient 8% du total des émissions de GES), ou bien plus directe. Certains universitaires développent, en effet, une critique d'ordre éthique du tourisme. C'est le cas du sociologue Rodolphe Christin, auteur d'un Manuel de l'anti-tourisme (Editions Ecosociété, 2018), de L'Usure du monde. Critique de la déraison touristique (Editions L'échappée, 2014) et qui a co-dirigé avec Philippe Bourdeau un ouvrage collectif intitulé Le tourisme: émancipation ou contrôle social? (Editions du Croquant, 2011).
La seconde forme de contestation émane du monde des ONG et des associations à l'instar des associations britanniques Tourism Concern, qui publie notamment un Guide du voyage éthique, ou The Travel Foundation ou en France, de l'Association pour le tourisme équitable et solidaire. Ces associations jouent un rôle de "vigie éthique" face à un certain nombre de dérives du tourisme de masse et tendent à défendre un tourisme durable ou un tourisme équitable et solidaire. Cette critique peut être aussi le fait d'autres types d'associations qui ont été amenées à s'intéresser au tourisme, comme des associations environnementalistes –l'association France nature environnement (FNE) a publié en 2015 une étude dans laquelle elle estimait qu'un paquebot à l'arrêt polluait autant qu'un million de voitures (en termes d'émission de particules fines et de dioxyde d'azote), l'ONG allemande Nabu a, quant à elle, mesuré les émissions de particules fines des paquebots à Marseille et l'ONG World Animal Protection a dénoncé les selfies de touristes pris avec des animaux sauvages qui feraient l'objet de maltraitance.
La troisième est une critique des activités ou de projets de nature touristique à un échelon local par une partie des riverains dans une logique de type NIMBY (Not In My Back Yard, pas dans mon arrière-cour ou à côté de chez moi), et notamment par des agriculteurs qui voient une partie de leurs terres expropriées, mais aussi par des élus locaux. Des habitants de grandes villes comme Barcelone, Venise ou Dubrovnik se sont, en effet, mobilisés depuis 2015-2016 contre les effets d'un "surtourisme": détérioration des lieux visités, nuisances diverses (bruit, pollution, incivilités), impact sur le prix des loyers, etc. En France, on a pu voir un tel phénomène à Marseille où des habitants des quartiers nord, notamment réunis dans l'Association Cap au Nord, se plaignent de l'impact environnemental des grands paquebots de croisière. Une partie des riverains se sont opposés également à divers projets de nature touristique –projet de Center Parcs en Forêt de Poligny dans le Jura ou à Roybon en Isère (projet actuellement bloqué), de station de ski sous dôme à Elancourt dans la région parisienne (projet qui a été abandonné), de parc à thème autour du roi Arthur (Avalonys) à Guipry-Messac en Ille-et-Villaine (projet abandonné dans ce lieu) – ou à des projets visant à attirer de nombreux touristes, comme Europacity, un projet d'espace commercial et de loisirs dans le triangle de Gonesse comprenant notamment des hôtels et des restaurants. Enfin, des élus locaux ont à plusieurs reprises dénoncé l'impact du développement des locations meublées saisonnières de type AirBnb dans leur ville, notamment sur la disponibilité des logements pour la location, sur les prix des loyers et la désertification des centre-villes. Ce fut le cas d'Anne Hidalgo à Paris, comme des municipalités d'autres villes comme Amsterdam, Barcelone, Berlin ou Londres.
Enfin, la quatrième forme de contestation correspond à des actions directes menées par des individus ou des groupes radicaux contre des activités ou des projets touristiques dans une logique généralement anticapitaliste. En France, cela concerne plus particulièrement des projets touristiques assimilés par ces activistes à ce qu'ils appellent des "grands projets inutiles imposés". Le cas le plus emblématique est bien évidemment celui du projet de Center Parcs à Roybon qui a été bloqué depuis 2014 à la fois d'un point de vue pratique avec la mise en place par ces activistes d'une Zone à défendre (ZAD) et d'un point de vue juridique. Ces actions de blocage, voire de sabotage, peuvent concerner aussi des projets susceptibles de favoriser les flux de touristes, comme des aéroports (Notre-Dame-des-Landes) ou des lignes de TGV (par exemple la ligne Lyon-Turin). À l'étranger, des actions directes antitouristiques quelquefois violentes ont pu être menées notamment en Espagne ou aux Etats-Unis. Le groupe anticapitaliste et indépendantiste catalan Arran a perpétré des actes de vandalisme contre des installations touristiques ou des actions "coup de poing" dans des lieux touristiques: prise d'assaut d'un bus de touristes à Barcelone ou irruption dans un restaurant à Palma de Majorque avec un déploiement de banderoles, des jets de confettis et l'utilisation de fumigènes. Aux Etats-Unis, un groupe animaliste radical a provoqué en 1998 un incendie de cinq bâtiments et de quatre remonte-pentes dans une station de ski du Colorado pour dénoncer un projet d'extension de la station dans une zone d'habitat naturel du lynx d'Amérique du Nord.
Tout ceci reste néanmoins très minoritaire. Mais, on ne peut qu'être d'accord avec Taleb Rifai, le secrétaire général de l'Organisation mondiale du tourisme (OMT), lorsqu'il affirme que "La montée du ressentiment contre les touristes est un problème à prendre au sérieux", d'autant plus si ce rejet du tourisme et/ou des touristes tend à coïncider avec d'autres tendances négatives pour le tourisme, comme l'impact du changement climatique, les actions terroristes visant des zones touristiques ou l'évolution du prix de l'énergie (et donc des coûts de transport).
Barcelone, Venise… Ces villes européennes en guerre contre le tourisme de masse
Publié le : 11/08/2019 - 17:55
Venise veut s'unir avec d'autres ports contre les dangers des paquebots géants. Sur cette photo, le bateau de croisière MSC Magnifica, le 9 juin 2019 à Venise. MIGUEL MEDINA / AFP
Texte par :David Pauget
Dès septembre prochain, Venise va instaurer une taxe à l'entrée de la ville pour tenter d’endiguer le tourisme de masse dont elle souffre. Elle n’est pas la seule à renforcer sa législation en Europe.
Des hommes au visage masqué en train de taguer, crever les pneus et casser au marteau le pare-brise de voitures de location. La scène a eu lieu à Palma de Majorque, en Espagne. Ces actes de vandalisme ont été filmés et diffusés sur les réseaux sociaux le 5 août par le mouvement d'extrême gauche Arran, qui milite chaque été contre le tourisme de masse.
Pour cette organisation, le tourisme est synonyme de pollution, de dénaturation du cadre de vie et d’augmentation des loyers. Au-delà des actions de mouvements extrémistes, la lutte contre le tourisme de masse s’intensifie, en Espagne comme dans d’autres villes européennes.
Des villes submergées par les touristes
Dans le centre-ville de Barcelone, difficile de passer à côté des nombreuses banderoles « Tourist, go home » (« Touriste, rentre chez toi »). La capitale catalane, de 1,6 million d'habitants, reçoit environ 30 millions de visiteurs par an.
Depuis plusieurs années, la ville voit ainsi fleurir des mouvements de contestation contre le tourisme. Les Barcelonais dénoncent notamment le développement sans fin des locations Airbnb, augmentant les loyers, ce qui a pour conséquence de les chasser du centre au profit des touristes.
L’exemple le plus frappant reste Venise. Chaque année, la ville accueille près de 30 millions de visiteurs. Les Vénitiens, eux, ne sont plus que 55 000 (soit un habitant pour 550 touristes !). Pour la « Sérénissime », classée au patrimoine mondial de l'Unesco, c’est un flux incessant abîmant ses fondations, de plus en plus fragiles.
Comment enrayer le phénomène ? « Le problème est que, pendant des décennies, les élus ont considéré que le tourisme était forcément bénéfique, sans se préoccuper des conséquences réelles en termes de bénéfices locaux », explique Saskia Cousin, anthropologue, spécialiste des questions de tourisme. « Le problème, ce ne sont pas les touristes, mais la mise en œuvre de régulations. Aucune ville n’accepterait une industrie sans aucune norme et régulation. Or, avec les croisières et les plateformes type Airbnb, c’est bien ce qui s’est passé. »
Des mesures pour limiter l’afflux de touristes
Face aux risques découlant du tourisme de masse, de plus en plus de villes européennes commencent à se ressaisir. Toujours à Venise, les images de paquebots hors de contrôle, en juin et juillet derniers, avaient fait le tour des réseaux sociaux et relancé les polémiques. Pour éviter de nouveaux incidents, Venise a lancé le 1er août un appel aux autres ports historiques européens. Le but : unir leurs forces contre les multiples dangers que posent les paquebots géants.
De plus, la mairie a décidé qu’à partir de septembre prochain, chaque visiteur devra s’acquitter d’une taxe, comprise entre 2,50 et 10 euros selon la période de l’année, qui servira à l’entretien de la ville. Elle devrait rapporter quelque 50 millions d'euros par an
À Barcelone, à la suite de son élection comme maire en 2015, Ada Colau avait déclaré qu’elle agirait pour faire en sorte que sa ville ne devienne pas « un magasin de souvenirs bon marché ». Depuis, les amendes se sont multipliées contre les locations illégales (600 000 euros d’amende en 2016) dans le but de réguler l’activité.
Ceux qui voyagent le plus, ça reste les catégories sociales supérieures.
Bertrand Réau
David Pauget
La municipalité d'Amsterdam aux Pays-Bas a aussi adopté, en mai 2018, des mesures pour endiguer le tourisme de masse : locations limitées à 30 jours par an, augmentation des taxes touristiques, cars touristiques bannis du centre-ville.
Cette dernière mesure a d’ailleurs inspiré la ville de Paris. Début juillet, la mairie a annoncé que ces véhicules n’étaient « plus les bienvenus dans l'hypercentre », De plus, depuis le 1er janvier 2019, les locations sur la plateforme dans la capitale sont limitées à 120 nuitées par an, et un numéro d'enregistrement est exigé.
1,8 milliard de touristes dans le monde d’ici à 2030
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Le phénomène est tel que des lieux, pendant longtemps peu visités, commencent à y être confrontés. En Islande, le nombre de touristes a été multiplié par quatre en quelques années, passant de 500 000 visiteurs en 2010 à 2,4 millions de touristes en 2018. Le gouvernement a ainsi décidé de limiter l’accès à certains sites comme la station thermale du Lagon bleu.
« Peu de lieux sont finalement concernés », nuance Philippe Violier, directeur de la section tourisme et culture à l'université d'Angers. « Il y a largement plus de lieux dans le monde qui aimeraient avoir des touristes. Ils sont toujours trop ou pas assez. »
Le risque avec les mesures prises contre le surtourisme, selon Philippe Violier : qu'elles soient socialement discriminatoires. « Il est possible d’essayer d’anticiper, d’agir pour que la vie des habitants soit possible avec le tourisme... mais cela demande de la réflexion, or nous en manquons. Des solutions peuvent être trouvées à condition de les chercher plutôt que de condamner en bloc le tourisme de masse qui reste une conquête sociale et un levier de développement économique. »
1,2 milliard de touristes ont voyagé à travers le monde en 2016, selon l'Organisation mondiale du tourisme (OMT). Selon les prédictions, ce chiffre devrait augmenter de 3,3 % par an dans les dix prochaines années, pour atteindre 1,8 milliard d’ici à 2030.
►À lire aussi : Faut-il interdire le tourisme ?
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Cour suprême : qui sont-ils ?
- Par Thierry LEDRU
- Le 30/06/2022
Voilà deux exemples pour reprendre l'article précédent.
Deux informations qui, à leur lecture, me révoltent mais contre lesquelles je ne peux rien. Donc, je les dépose ici. Je me rends compte d'ailleurs à quel point ce blog est devenu une sorte d'exutoire. Il y a quelques jours, 3700 et quelques pages ont été lues dans la journée avec 120 visites. Ce qui signifie sans doute qu'une personne a lu beaucoup, beaucoup d'articles. J'ai éprouvé une sorte de tristesse pour elle. Alors bien sûr, c'était son choix mais j'espère qu'elle n'est pas repartie d'ici totalement dépitée.
Qui sont les juges de la Cour suprême qui ont voté la révocation du droit à l'avortement?
VIA ASSOCIATED PRESS
Les neuf juges de la Cour suprême, le 23 avril 2021.
AVORTEMENT - Divisée sur l’avortement à l’image de la société américaine, la Cour suprême a décidé, ce vendredi 24 juin, de révoquer son arrêt “Roe v. Wade”, qui garantissait depuis 1973 le droit constitutionnel des Américaines à avorter. Désormais, chaque État est libre de faire son choix et une dizaine d’entre eux ont déjà interdit l’IVG.
Sur les neuf juges qui composent la plus haute juridiction américaine, cinq, dont trois juges nommés par Donald Trump durant son mandat, ont voté en faveur de la révocation de l’accès à l’avortement. La Constitution américaine prévoit que les neuf sages sont nommés à vie par le président et confirmés par la chambre haute du Congrès. Ils peuvent cependant quitter leur fonction.
Les cinq juges qui ont voté pour la révocation:
Samuel A. Alito, Jr., 72 ans
VIA ASSOCIATED PRESS
Samuel Alito
Nommé par George W. Bush, le conservateur Samuel Alito a été officiellement élu à la Cour suprême en janvier 2006 en remplacement de la juge Sandra Day O’Connor, partie à la retraite.
Début mai, l’avant-projet d’une décision majoritaire remettant en cause l’arrêt “Roe versus Wade” qu’il avait rédigé avait fuité dans la presse, provoquant l’émoi aux États-Unis.
Amy Coney Barrett, 50 ans
VIA ASSOCIATED PRESS
Amy Coney Barrett
Nommée par Donald Trump, la fervente catholique Amy Coney Barrett siège à la Cour suprême depuis octobre 2020 en remplacement de la progressiste et militante engagée dans la lutte pour l’émancipation des femmes, Ruth Bader Ginsburg.
Amy Coney Barrett est l’une des figures de la droite religieuse américaine. Son arrivée à la Cour suprême a signé l’une des plus grandes victoires de Donald Trump et des conservateurs. Sa nomination fait ancrer durablement à droite la haute juridiction et désespérer le camp démocrate.
Neil M. Gorsuch, 54 ans
VIA ASSOCIATED PRESS
Neil Gorsuch
Neil Gorsuch est l’un des trois juges, avec Amy Coney Barrett et Brett Kavanaugh, a avoir été nommé par Donald Trump à la Cour suprême. Il y siège depuis 2017.
Brett M. Kavanaugh, 57 ans
VIA ASSOCIATED PRESS
Brett Kavanaugh
Choisi par Donald Trump pour remplacer Anthony Kennedy, parti à la retraite, Brett Kavanaugh y a été confirmé en 2018 malgré une accusation d’agression sexuelle le visant et pour laquelle il avait été auditionné par le Sénat américain.
Dans son argumentaire en faveur de la révocation de “Roe vs Wade”, Brett Kavanaugh affirme que la remise en cause du droit à l’avortement “ne menace pas” les autres droits. Mais la majorité de juges conservateurs à la Cour suprême fait redouter aux démocrates, à des juristes et à de nombreuses associations que d’autres droits, dont celui au mariage pour les personnes de même sexe, puissent être prochainement sur la sellette.
Clarence Thomas, 74 ans
VIA ASSOCIATED PRESS
Clarence Thomas
Nommé juge à la Cour suprême par le président Georges H.W. Bush en 1991, Clarence Thomas a estimé, dans un argumentaire personnel, vendredi que “dans de futurs dossiers” concernant, eux aussi, le respect de la vie privée, “nous devrions revoir toutes les jurisprudences”.
Il cite trois arrêts en particulier: “Griswold v. Connecticut” de 1965, qui consacre le droit à la contraception, “Lawrence v. Texas” de 2003, qui rend inconstitutionnelles les lois pénalisant les relations sexuelles entre personnes de même sexe. Et, aussi, “Obergefell v. Hodges”, l’arrêt de 2015 protégeant le mariage pour tous au niveau des États-Unis, et qui reste une cible prioritaire de la droite religieuse.
Les juges qui n’ont pas voté pour la révocation du droit à l’IVG au niveau national:
Stephen Breyer, 83 ans
VIA ASSOCIATED PRESS
Stephen Breyer
Le juge progressiste a été nommé à la Cour suprême en 1994 par Bill Clinton. En janvier 2022, il fait part de sa décision de quitter la haute juridiction. Joe Biden nomme donc Ketanji Brown Jackson, 51 ans, première femme noire nommée à la Cour suprême. Mais sa prochaine arrivée à la Cour ne renversera pas le déséquilibre entre les conservateurs et les progressistes.
Elena Kagan, 62 ans
VIA ASSOCIATED PRESS
Elena Kagan
Juge de la Cour suprême depuis 2010, Elena Kagan a été nommée par Barack Obama.
Sonia Sotomayor, 68 ans
VIA ASSOCIATED PRESS
Sonia Sotomayor
La juge progressiste Sonia Sotomayor a été nommée à la Cour suprême par Barack Obama en 2009. Elle est la première personnalité hispanique à accéder à cette fonction.
Le cas particulier du juge en chef:
John G. Roberts Jr, 67 ans
VIA ASSOCIATED PRESS
John G. Roberts Jr.
Actuel juge en chef de la Cour suprême (depuis 2018), il a été nommé en 2005 par George W. Bush. Décrit comme un ”équilibriste” par Le Monde en 2020, en raison de ses efforts pour contenir les assauts de Donald Trump, John Roberts Jr avait voté avec les juges libéraux pour annuler la fin du programme fédéral qui protège les “Dreamers”, des migrants sans papiers arrivés aux États-Unis durant leur enfance.
Il est aujourd’hui dit “isolé” et dépassé par les cinq juges conservateurs de la Cour suprême par le New York Times. Pour le journal américain, le 24 juin 2022 -jour de la révocation du droit à l’IVG- marque le jour où “il a perdu sa propre Cour”.
Vendredi, John Roberts a expliqué être d’accord en partie avec les juges conservateurs, mais a pris une décision séparée. Il a voté pour que la loi du Mississippi, qui interdit l’avortement après quinze semaines de grossesse, soit adoptée mais il a indiqué que la Cour suprême n’aurait pas dû se prononcer sur le fait que l’avortement était un droit fédéral ou non.
À voir également sur Le HuffPost: Les États-Unis (un peu plus) divisés après la révocation du droit à l’avortement
Etats-Unis : la Cour suprême restreint les moyens de l’Etat fédéral dans la lutte contre le réchauffement climatique
Six jours après avoir enterré un arrêt qui garantissait le droit des Américaines à avorter, cette décision controversée constitue un nouveau tour de vis conservateur de la part de la juridiction.
Article rédigé par
France Télévisions
Publié le 30/06/2022 16:45Mis à jour il y a 38 minutes
Temps de lecture : 3 min.
La centrale électrique de Longview, qui fonctionne au charbon, le 21 août 2018 à Maidsville, en Virginie Occidentale (Etats-Unis). (SPENCER PLATT / GETTY IMAGES NORTH AMERICA / AFP)
Cette décision pourrait avoir un lourd impact sur le réchauffement climatique. La plus haute juridiction des Etats-Unis a décidé, jeudi 30 juin, de limiter les moyens de l'Etat fédéral de lutter contre les gaz à effet de serre.
Ses six juges conservateurs se sont accordés, contre l'avis de leurs trois collègues progressistes, pour limiter les prérogatives de l'Agence pour la protection de l'environnement (EPA), une agence fédérale indépendante du gouvernement qui met en place des standards environnementaux à l'échelle nationale en fonction de la loi. La majorité des juges ont estimé que l'EPA ne pouvait pas édicter de règles générales pour réguler les émissions des centrales à charbon, qui produisent près de 20% de l'électricité aux Etats-Unis.
"Il n'est pas plausible que le Congrès ait donné à l'EPA l'autorité d'adopter une telle mesure", écrit le juge John Roberts dans l'arrêt. Or, d'après ce même juge, "une décision d'une telle ampleur et conséquence appartient au Congrès lui-même, ou a une agence qui agit après avoir reçu une délégation claire" de la part du pouvoir législatif. La conséquence de cette décision, c'est que "chaque fois qu'une agence fait quelque chose d'important et de nouveau, la régulation est présumée invalide, à moins que le Congrès l'ait spécifiquement autorisé à réguler ce domaine", comme le résume la radio publique américaine NPR (article en anglais).
De quoi laisser aux différents Etats du pays le droit d'édicter leurs propres règles en la matière et, s'ils le veulent, de continuer d'exploiter les centrales à charbon, voire même de les développer. Et ce alors que John Roberts reconnaît également que "mettre une limite aux émissions de dioxyde de carbone à un niveau qui imposerait de renoncer au niveau national au charbon pour produire l'électricité pourrait être une solution pertinente à la crise d'aujourd'hui."
L'Agence de protection de l'environnement dans le viseur de la Cour
"Aujourd'hui, la Cour a retiré à l'Agence de protection de l'environnement le pouvoir que le Congrès lui a donné de répondre au 'problème le plus pressant de notre époque'", dénonce dans un argumentaire distinct la magistrate Elena Kagan au nom des progressistes, en rappelant que les six années les plus chaudes ont été enregistrées au cours de la dernière décennie. Le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres a dénoncé "un recul dans notre lutte contre le changement climatique, alors que nous sommes déjà très en retard dans la réalisation des objectifs de l'accord de Paris".
La Maison Blanche a dénoncé "une nouvelle décision dévastatrice de la Cour qui vise à ramener notre pays en arrière", selon son porte-parole. Le président américain Joe Biden "n'hésitera pas à utiliser les pouvoirs que lui confèrent la loi pour protéger la santé publique et s'attaquer à la crise du changement climatique", a ajouté le responsable dans une courte déclaration transmise à la presse. Le président américain avait rétabli des dispositions environnementales supprimées par son prédécesseurs Donald Trump, mais avait vu certaines de ses mesures écologiques les plus ambitieuses bloquées par le Congrès.
Cette décision controversée constitue un nouveau tour de vis conservateur de la part de la Cour suprême. Vendredi, la plus haute juridiction américaine avait enterré un arrêt qui, depuis près d'un demi-siècle, garantissait le droit des Américaines à avorter. Dans la foulée, plusieurs États américains avaient annoncé prendre des mesures pour interdire les interruptions volontaires de grossesse sur leur territoire. Cette décision avait provoqué une émotion mondiale chez les défenseurs des droits des femmes.
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Costa Rica :les droits des entités naturelles
- Par Thierry LEDRU
- Le 30/06/2022
Voilà un pays où j'aurais aimé vivre. Non pas que tout y est merveilleux mais tout est fait pour que ça le devienne.
Costa Rica : une ville reconnaît la citoyenneté des pollinisateurs et végétaux
En pratique, toutes ces espèces de la faune et de la flore sont considérées comme des infrastructures ou des agents produisant des services écosystémiques essentiels pour le bien de la communauté, comme la production d’oxygène, l’épuration des eaux, la pollinisation, la séquestration de carbone, ou encore l’entretien de la biomasse. À ce titre, elles jouissent de nombreux droits et peuvent être défendues.
25 mai 2020 - Augustin Langlade
Générations, notre nouveau livre qui marque dans le temps l’esprit d’une génération qui se bat pour préserver notre monde
- Thème : Changements climatiques, répression policière, inégalités, agroécologie, politique, féminisme, nature…
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Curridabat, une petite ville du Costa Rica, vient d’octroyer la citoyenneté aux insectes pollinisateurs, aux arbres et aux plantes indigènes, un statut juridique qui leur permet maintenant d’être défendus devant des institutions judiciaires. Cette démarche s’inscrit dans un projet plus large de reconnaissance de la nature comme d’une entité morale, de reboisement et de création d’un réseau national de corridors biologiques.
Le Costa Rica, une politique écologique audacieuse
Une côte sur l’Atlantique, une autre sur le Pacifique, des cordillères volcaniques : le Costa Rica, petit pays de 5 millions d’habitants à la jonction de l’Amérique du Nord et du Sud, ne couvre que 0,03 % du territoire mondial ; et pourtant, ses 51 100 kilomètres carrés abritent plus de 6 % de la biodiversité connue de notre planète.
Grâce à une politique audacieuse de protection de l’environnement menée depuis les dernières décennies du XXe siècle, un quart du pays est aujourd’hui devenu un « espace naturel protégé » et la forêt recouvre désormais 52 % du territoire national, contre seulement 20 % dans les années 1980.
Alors que son énergie est déjà issue à 99 % de sources renouvelables, le Costa Rica ambitionne d’atteindre la neutralité carbone en 2050, et il met tout en œuvre pour y parvenir.
Il faut croire que la bonne volonté paie, car tout n’est pas rose au pays de la biodiversité. Depuis une vingtaine d’années, le Costa Rica fait face à un exode rural inédit, en particulier vers sa capitale, San José, qui concentre à elle seule 2,5 millions d’habitants, soit la moitié de la population.
Motivés par le chômage et le monopole de l’agriculture par de grandes firmes étrangères, ces déplacements massifs ont augmenté la pollution et provoqué une urbanisation chaotique, ainsi qu’une dégradation du niveau de vie dans les centres et les périphéries.
« En quinze ans, nous sommes passés d’une société rurale à une société urbaine, et nous n’étions pas prêts pour un changement aussi rapide », a déclaré l’année dernière au « Parisien » le ministre de l’Environnement costaricien, Carlos Manuel Rodriguez.
Dans le reste du monde, les villes ont doublé de superficie depuis 1992.
Crédit : Zdeněk Macháček
La citoyenneté reconnue aux pollinisateurs et aux végétaux
Au lieu de subir un tel transvasement démographique, certaines communes du Costa Rica ont fait un pari à contre-courant de toutes les doctrines : accélérer la transition écologique des espaces urbains et leur résilience. C’est le cas de Curridabat, aussi connue sous le nom de Ciudad Dulce, ou « Douce Ville ».
Comme le rapporte le quotidien anglais « The Guardian », cette banlieue de 34 000 habitants située au sud-est de San José vient « d’étendre la citoyenneté aux pollinisateurs, aux arbres et aux plantes indigènes », faisant de ce territoire normalement perdu pour la nature « un refuge pionnier de la faune urbaine ».
Abeilles et papillons, chauves-souris, colibris et grenouilles, guanacastes, figuiers et eucalyptus sont devenus des citoyens de la municipalité de Curridabat.
En pratique, toutes ces espèces de la faune et de la flore sont considérées comme des infrastructures ou des agents produisant des services écosystémiques essentiels pour le bien de la communauté, comme la production d’oxygène, l’épuration des eaux, la pollinisation, la séquestration de carbone, ou encore l’entretien de la biomasse. À ce titre, elles jouissent de nombreux droits et peuvent être défendues.
Cet octroi de la citoyenneté aux non-humains relève d’un projet plus large, depuis longtemps théorisé par les penseurs écologistes : la création d’un réseau de corridors biologiques. À l’aide des techniques de cartographie modernes, la commune entend tout d’abord :
« orienter les projets de reboisement sur les lieux où vivent les résidents âgés et les enfants afin de s’assurer que ceux-ci bénéficient de l’élimination de la pollution atmosphérique et du refroidissement que les arbres fournissent ».
En multipliant les zones où les espèces indigènes prolifèrent et en les connectant spatialement entre elles, la commune de Curridabat espère ensuite créer des milieux résilients à l’intérieur-même de la ville, au sein desquels les pollinisateurs pourront proliférer et les animaux vivre, transiter et se reproduire.
À terme, chaque rue est destinée à devenir un corridor biologique et chaque quartier un petit écosystème, sachant que ce projet s’intègre dans une politique nationale de réduction des structures, des déchets et des véhicules polluants.
« Les corridors biologiques interurbains ont un double objectif », confie au « Guardian » Magalli Castro Álvarez, responsable du réseau de biocorridors du Costa Rica. « Ils suscitent une connectivité écologique [une non-fragmentation des milieux, ndlr] et consolident aussi les infrastructures vertes, au moyen des routes et des berges bordées d’arbres qui sont reliées aux petites aires boisées existant encore dans les zones métropolitaines. Ils améliorent la qualité de l’air et de l’eau et procurent aux gens des espaces de détente, d’amusement et de santé. »
Certes bien différents de leurs homologues des campagnes, les biocorridors urbains permettent de réintroduire la nature dans les villes et de subordonner le développement de celles-ci au paysage.
Enterolobium cyclocarpum, national tree of Costa Rica, in Guanacaste, Costa Rica – Flicka
La reconnaissance citoyenne pour en finir avec une vision du monde anthropocentrée
Donner des droits aux animaux, octroyer la citoyenneté à des plantes, reconnaître des fleuves ou des espaces naturels comme des entités morales, toutes ces décisions juridiques qui fleurissent dans des pays de plus en plus nombreux ces dernières années poursuivent un but commun : mettre fin à la souveraineté de l’homme sur la nature et renverser la distinction millénaire entre personnes et choses, entre humains et non-humains.
En 2017, le Parlement de Nouvelle-Zélande a accordé au fleuve Whanganui le statut « d’entité vivante », refermant le plus long litige juridique de l’histoire du pays. Le fleuve sacré des Maoris —y compris ses affluents, son embouchure et tous les êtres vivants qui habitent ses bords — a désormais les mêmes droits qu’une personne humaine : il est possible de le défendre devant la justice, des plaintes peuvent être déposées en son nom, et les membres de la tribu maori, loin d’en être les propriétaires, en sont les gardiens.
D’autres exemples existent dans le monde, en Équateur, en Bolivie et en Colombie, ou encore dans des comtés aux États-Unis. Selon Valérie Cabanes, juriste mondialement connue militant pour que le crime d’écocide soit intégré aux constitutions nationales au même titre que les crimes de guerre ou contre l’humanité, la conscience de la nature des citoyens occidentaux évolue à une vitesse prodigieuse et tend à rejoindre celle des peuples premiers, qui ne font pas de distinction entre l’humanité et son environnement.
« Depuis le judéo-christianisme et la suprématie de l’Occident sur le monde, l’homme s’est positionné comme dominant. Mais ce n’est qu’une vision du monde, qui est manifestement arrivée à ses limites » a-t-elle déclaré au journal « Le Monde », à l’occasion de la victoire des Maoris au Parlement néo-zélandais.
Le renforcement des droits des entités naturelles permet non seulement de mieux les protéger, mais fait aussi évoluer la vision du monde des êtres humains. Le droit, constituant historiquement nos régimes et déterminant nos rapports en société, représente un outil de choix pour infléchir la relation de l’homme avec la nature et le vivant, qui dans le cas de la Nouvelle-Zélande ou du Costa Rica ne sont plus considérés comme de simples biens de propriété.
L’évolution du droit de l’environnement semble une voie royale pour conduire les populations à abandonner des habitudes de pollution et d’anthropie que nulle institution ne remet dans la pratique en question.
Couv : Photo by Chris Charles
25 mai