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Un résumé dans un schéma
- Par Thierry LEDRU
- Le 22/12/2024
- 0 commentaire
Un résumé dans un schéma.
Mais qu'en est-il exactement des "réactions" ? D'où viennent-elles ? Qu'expriment-elles ? Est-il concevable de les contrôler ? Est-il juste, en toutes circonstances, de vouloir les contrôler ? Peut-on associer le terme de "réactions" à celui "d'émotions" ?
Pour ma part, je dirais que l'émotion précède la réaction. Et que la réaction sera proportionnelle à l'émotion. Il est même possible que les deux soient si proches qu'elles en paraissent indivisibles. Dans le cas de la peur par exemple.
Un éclair qui traverse le ciel si près de nous qu'on se ratatine, le corps empli de frissons, tétanisé par la proximité du danger, dans un réflexe qui provient du cerveau limbique. On ne pourra pas dissocier l'émotion de la réaction.
Mais s'il s'agit d'une rencontre amoureuse, de ce "fameux coup de foudre", l'intensité ne sera pas la même, l'envahissement ne sera pas aussi immédiat, l'effet ne sera pas instantané même s'il peut nous sembler a postériori avoir été saisi d'amour. L'émotion aura été puissante et la réaction aura grandi au fil des secondes ou des minutes ou des heures ou de toute une vie.
Les neurosciences ont considérablement exploré le cerveau pour cartographier les zones concernées et expliquer, chimiquement, la raison de ce qui nous fait parfois perdre raison. Pour notre bien ou pour notre mal. Est-il utile de connaître les phénomènes chimiques pour gérer au mieux les méotions et leurs réactions ? Je pense que Spinoza aurait été très intéressé, lui qui cherchait systématiquement les causes des conséquences.
Parvenir à se distancer des effets en l'observant à travers le prisme des données chimiques, physiques, de la cartographie de notre corps, je pense que ça peut s'avérer utile. On le voit dans le sport de haut niveau, dans des interviews de sportifs. Alex Honnold, par exemple, à travers la méditation. Ou Novack Djokovic.
Alors c'est que nous pouvons devenir des sportifs de haut niveau spirituels, en nous-mêmes, puisque nous sommes tous constitués de la même façon.
https://www.futura-sciences.com/sante/questions-reponses/sentiments-cerveau-chimie-guide-t-elle-nos-emotions-7505/
Joie, colère, tristesse… Toutes ces émotions que nous ressentons résultent d’un équilibre subtil de substances dans diverses parties de notre cerveau.
au sommaire
Colère : que se passe-t-il dans le cerveau ?
La tristesse expliquée par la chimie
L’amour, un sentiment complexe
À lire aussi
Les émotions sont les réactions de notre corps provoquées par une stimulation venue de notre environnement. Elles sont traitées dans le système limbique de notre cerveau.
Joie et dopamine
Pour mieux comprendre comment fonctionne la joie par exemple, partons d'abord de la question suivante : à quoi la sensation de plaisir est-elle due ? Les chercheurs Olds et Milner ont découvert, en 1952, que le noyau accumbens gérait la récompense et le bien-être : il reçoit des informations venues, entre autres, de l'aire tegmentale ventrale via un neurotransmetteur, la dopamine. Une fois activé, le noyau accumbens communique avec diverses parties du cerveau en libérant trois neurotransmetteurs :
la sérotonine pour l'euphorie ;
les endorphines contre la douleur ;
les endocannabinoïdes contre l'anxiété.
Colère : que se passe-t-il dans le cerveau ?
Lorsque nous ressentons de la colère, notre cœur s'accélère, notre respiration devient ample, nos muscles se contractent... Dans le cerveau, l'aire septale (noyau basal de Meynert, noyau antérieur du thalamus et corps mamillaires) s'active.
Un message est envoyé à l'hypothalamus médian qui va donner l'ordre de déverser dans l'organisme adrénaline, cortisol et testostérone. Hennig a montré, en 2004, qu'un faible taux de sérotonine est également lié à un comportement agressif.
La tristesse expliquée par la chimie
La tristesse est un moment de pause, d'analyse d'un moment difficile. Chimiquement, elle correspond à une baisse des enképhalines au niveau de l'amygdale. Un message est envoyé à l'hypothalamus qui déclenche une double action :
via le système sympathique, une libération d'adrénaline entraînant ventre noué et respiration accélérée ;
en parallèle, via le système parasympathique, l'acétylcholine et la noradrénaline sont déversées dans l'organisme, ce qui provoque larmes et prostration.
Le cœur, à la fois accéléré et ralenti, semble pris dans un étau...
L’amour, un sentiment complexe
L'amour n'est pas une émotion mais un sentiment complexe, qui met en jeu un large cocktail de substances. Lors d'un coup de foudre, un pic d'adrénaline survient, ce qui provoque un sentiment d'éveil et une accélération du rythme cardiaque. Parallèlement, un pic de dopamine engendre du plaisir.
Si l'amour dure, une activité accrue apparaît dans une région liée au sentiment d'attachement, le globus pallidus, et dans des structures riches en récepteurs à l'ocytocine, l'hormone de l'attachement.
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L'amnésie environnementale
- Par Thierry LEDRU
- Le 20/12/2024
- 0 commentaire
J'ai des souvenirs merveilleux de mon enfance dans les bois. Je pouvais parcourir des kilomètres sans rencontrer de traces humaines comme celles que je vois aujourd'hui : coupes rases qui se multiplient, constructions de lotissements et de zones commerciales. Les bois où j'ai vécu enfant n'existent plus. Ils ont été rasés et à la place, il y a un périphérique et des zones urbaines, lotissements et zones commerciales. Il y avait une zone humide, vaste, emplie de vie. Tout a été asséché, remblayé, bétonné. C'était dans le secteur de Quimper. Puis, plus tard, mes parents ont fait construire une maison près de la mer et de la même façon, tout le littoral est devenu aujourd'hui une enfilade de maisons et de magasins. Ce sont des centaines d'hectares qui ont été transformés.
On a quitté la Savoie pour fuir cette urbanisation frénétique et on est venu dans la Creuse. Et depuis quatre ans, ici, on voit s'étendre les coupes rases, des massacres effroyables. Le relief s'y prête aisément. Pas de grosses pentes, les forêts sont très accessibles, il y a beaucoup de chemins et de pistes forestières. L'avenir des forêts creusoises est très sombre.
Et on a décidé de partir. La maison est vendue.
Méthode
Type
Fiche posture et repère
L'amnésie environnementale : comprendre pour agir
Mots clésL'amnésie environnementale touche de plus en plus et constitue une clé d'analyse dans l'inaction face au réchauffement climatique. Mais qu'entend-on par amnésie environnementale, et comment y remédier ? C'est l'objet de cette fiche repères qui fait le point sur cette notion émergente et des notions connexes telles que l'extinction de l'expérience de nature ou le syndrome de la référence changeante. Si les conséquences sont connues, des pistes d'actions existent également.
1. De quoi parle-t-on ?
Extinction de l'expérience de nature
Des chercheurs ont récemment montré une diminution voire une extinction de l'expérience de nature dans une revue de la littérature (A global synthesis of trends in human experience of nature) [1]. Cela se traduit par une diminution des contacts avec la nature, comme les balades en forêt, mais aussi par le fait que l'humain vit de plus en plus en milieu urbain, loin des espaces naturels et des forêts (2/3 des français vivent en ville en 2021 selon l'INSEE). Aujourd'hui, nous passons ainsi en moyenne plus de 80% de notre temps à l'intérieur (selon Santé Publique France). Or « un haut niveau d'“expérience de la nature” dans l'enfance détermine fortement la connaissance, les valeurs associées et l'attachement émotionnel à la nature des humains », précise une équipe de chercheurs dans le cadre d'une étude publiée en 2022 dans Frontiers in Ecology and the Environment.
Cette extinction d'expérience de nature va de pair avec l'extinction de l'expérience de la biodiversité. Ainsi, R.M. Pyle, dans L'extinction de l'expérience, précise que « la perte d'espèces locales menace notre expérience de la nature. Si une espèce s'éteint dans notre environnement accessible - qui est d'autant plus restreint que nous sommes très âgés, très jeune, handicapé ou pauvre, en un sens c'est comme si elle disparaissait totalement ».
Les bienfaits de la nature sur la santé et sur la projection dans l'avenir
De nombreuses recherches soulignent les bienfaits de la nature sur la santé physique et psychologique : diminution du stress, augmentation de l'immunité, de la vue, de la concentration, de la créativité… Les espaces de nature en ville constituent également des lieux de répit et de réduction des effets des aléas climatiques (canicule notamment) et favorisent la pratique de l'activité physique, les rencontres…
De plus, du point de vue de la psychologie du développement, le rapport à la nature est essentiel car participe à la construction de l'imaginaire de l'enfant, élément déterminant pour transformer ses sensations en représentations. Le jeu dans la nature participe à l'intégration de la personnalité et à la compréhension des autres et du monde. Plus le monde imaginaire de l'enfant est développé, plus il lui sera facile d'imaginer plusieurs issues à une situation négative et de se projeter dans l'avenir.
Cette extinction d'expérience de la nature interroge également l'organisation de nos sociétés modernes où les enfants jouent de moins en moins à l'extérieur et passent plusieurs heures par jour devant les écrans. Ils n'ont ainsi pas ou peu l'occasion d'explorer la nature par eux-mêmes. En outre, lorsqu'ils fréquentent des espaces verts dans les villes, ces lieux de nature sont souvent fortement réglementés dans leur accès public, ce qui contribue à la mise à distance de la nature voire à sa dégradation. Selon un rapport de l'Institut de veille sanitaire 2015, quatre enfants sur dix ne jouent jamais dehors pendant la semaine. La rationalisation et l'uniformisation de nos imaginaires et de nos activités causées par l'explosion de la consommation de contenus à travers nos écrans dégrade grandement nos expériences de nature : les enfants (comme les d'adultes) ont le sentiment de trouver davantage de stimulation dans un écran qu'à travers une expérience de balade en forêt, de randonnée en montagne ou de construction d'une cabane dans un arbre. La biologiste A.C. Prévot illustre pleinement l'enjeu : « quand un enfant grandit loin de la nature, il aura moins tendance à vouloir la protéger ensuite, car elle ne fait pas partie de son cadre de référence. Elle n'existe pas dans sa mémoire » [3].
L'éloignement de la nature et le syndrome de manque de nature
Notre mode de vie actuel, sédentaire et citadin, pousse les humains, notamment les plus jeunes à s'éloigner de la nature voire à en avoir peur. Face à ces constats, corroborés par l'augmentation de l'hyperactivité, de la prise de poids ou encore de la myopie et de l'asthme, le journaliste R. Louv a popularisé le concept de « syndrome de manque de nature » (ou nature-deficit disorder) [4]. Il part du postulat que pour réduire ces symptômes et signes cliniques, le remède est simple : rapprocher de la nature les êtres humains de tout âge.
Aller plus loin en consultant la synthèse réalisée par le FRENE.
L'amnésie environnementale générationnelle et individuelle
Ce sont ces réflexions qui ont nourri l'hypothèse d'une « amnésie environnementale générationnelle ». Selon le psychologue de l'environnement P. H. Kahn, à l'origine de ce concept, l'amnésie environnementale se produit alors que « nous considérons l'environnement naturel dans lequel nous grandissons comme une référence qui nous servira à mesurer les dégradations environnementales plus tard dans nos vies. De génération en génération, les dégradations de l'environnement augmentent. Mais chaque génération considère le niveau dégradé dans lequel elle grandit comme le niveau non dégradé, comme un niveau normal. […On] appelle ce phénomène psychologique l'amnésie environnementale générationnelle » [5].
Sur le plan psychologique, chaque individu construit sa vision du monde en fonction de ses expériences passées, notamment durant son enfance. Cependant, avec l'ampleur et le rythme soutenu de la perte de la biodiversité, les générations successives développent des représentations différentes de ce qu'est l'état originel de la nature. C'est pourquoi S.K. Papworth et d'autres chercheurs [7] ont identifié deux formes d'amnésie environnementale : la générationnelle, où les nouvelles générations perdent le référentiel des conditions environnementales passées, et l'individuelle, où les individus oublient leurs propres expériences passées de l'environnement.
Pour P.J. Dubois, ornithologue et auteur de « La grande amnésie écologique » [8], l'amnésie tient avant tout au manque de transmission de la mémoire environnementale. Selon lui, les individus ayant un contact intime avec le vivant sont parfois trop accablés par les changements qu'ils observent : ils oublient alors d'en parler à leurs enfants. Résultat : les éléments constitutifs de l'environnement sont effacés de la mémoire familiale et intergénérationnelle.
Le syndrome de la référence changeante
Cette notion renvoie au « syndrome de la référence changeante » (shifting baseline syndrome) forgé par le biologiste marin D. Pauly qui déclare lors d'une conférence « nous transformons le monde, mais nous ne nous en souvenons pas » [6]. Il a élaboré ce concept en 1995 après avoir constaté que les chercheurs spécialistes de la pêche prenaient comme référence scientifique la taille et la composition du stock de poissons du début de leur carrière. « Chaque génération de chercheurs oubliait que cet état qu'elle considérait comme normal était déjà dégradé par rapport aux générations précédentes, ce qui avait comme conséquence d'empêcher une prise de conscience globale de l'érosion de la biodiversité marine », précise A.C. Prévot, directrice de recherche au CNRS.
En résumé, l'amnésie environnementale est un mécanisme psychologique où les individus oublient ou sous-estiment les changements négatifs survenus dans leur environnement naturel au fil du temps, accélérant sa destruction. Ce concept souligne que face à des processus denses mais lents et diffus, tels que le réchauffement climatique ou la perte de biodiversité, l'habituation conduit à ce que l'amplitude du changement passe presque inaperçue, de la même manière qu'un parent ne remarque pas forcément le développement pourtant quotidien de son enfant. Ainsi, ce phénomène nous fait accepter comme normal le monde dans lequel nous évoluons même s'il est très différent et plus dégradé que celui que nous avons connu enfant ou dans lequel nos parents ont grandi.
2. Quels sont les risques liés à l’amnésie environnementale ?
Les conséquences de l'amnésie environnementale sont problématiques puisqu'à l'ère de l'Anthropocène, l'action de l'humain sur son environnement transforme le monde sans que nous n'ayons toujours souvenir de l'état antérieur. Or, la transmission du savoir passe principalement par la mémoire. C'est aussi la mémoire des catastrophes naturelles -et des meilleures façons de s'y adapter- qui se perdent. Cela déclenche finalement une conséquence « fataliste » qui nous entraînerait contre notre volonté dans une chute vers l'oubli et nous rendrait inapte à tout changement. P.J. Dubois corrobore cette théorie en précisant que le cerveau met constamment à jour sa perception du monde en écrasant les versions antérieures. Cette hypothèse est approuvée par A.C. Prévot, qui soutient que la nature ne fait plus partie du cadre de référence des enfants et n'est donc plus ancrée dans leur mémoire : en conséquence ils auront moins d'opportunités de vouloir la préserver.
On dénombre alors trois risques sous-jacent liés à cette perte de mémoire et de souvenir, tous accélérant le phénomène :
L'inaction : En s'accoutumant à des situations jadis anormales et en cessant de les percevoir comme telles, nous perdons toute impulsion à agir.
La perte de repères : Au fil du temps, ce qui était autrefois anormal devient la norme. Certaines générations ne perçoivent plus l'état dégradé de leur environnement car n'ont jamais connu de réalité antérieure. Et si la connaissance théorique de cette dégradation peut pousser à agir pour améliorer la situation, elle ne remplace pas l'expérience, moteur de changement et facteur de résilience individuelle et collective. Par exemple, avec le changement climatique les événements météorologiques extrêmes deviennent de plus en plus fréquents. Les populations côtières, habituées pendant des siècles à se prémunir contre les inondations et les tempêtes, se retrouvent aujourd'hui démunies face à ce dérèglement car elles ont perdu le savoir et les repères que leurs ainés avaient acquis par l'expérience.
La perte de sensibilité : Nous observons une diminution progressive de notre connexion avec la nature dans nos vies. Dans ces conditions, comment pouvons-nous être sensibles à la destruction d'une forêt ou à l'extinction d'une espèce animale si nous n'avons que rarement, voire jamais, été en contact direct avec elles ? Sans ressentir d'affection pour ces éléments, il devient extrêmement difficile de se mobiliser pour les préserver - moteur fondamentalement humain.
3. Comment agir face à l’amnésie environnementale ?
Pour limiter l'amnésie environnementale et ses conséquences (l'inaction environnementale notamment), le levier majeur est de renforcer les connexions avec la nature, les expériences de nature en favorisant les expériences collectives qui renforcent le sentiment du pouvoir d'agir. Cela passe aussi par un autre rapport à la nature dont nous faisons partie.
En pratique
De nombreux acteurs développent des actions afin d'agir en faveur du vivant et limiter les effets de l'amnésie environnementale. Il n'existe pas encore de revue de la littérature pour identifier formellement les leviers d'actions efficaces sur l'amnésie environnementale mais les expériences de terrain et une étude de la littérature sur les effets des interventions en éducation relative à l'environnement [9] du Réseau Idée permettent d'identifier des pistes :
Renforcement de la mémoire collective : encourager la préservation de notre mémoire collective des changements environnementaux à travers des initiatives communautaires, des récits historiques et des archives environnementales… Favoriser également le partage des expériences et souvenirs de nature.
Education dehors, multiplication des expériences de nature : encourager les pratiques éducatives dehors, afin d'entretenir le lien avec la nature de manière très régulière.
Education au vivant : renforcer l'éducation à l'environnement pour ouvrir les yeux sur la biodiversité, la richesse du vivant.
Education à la régulation émotionnelle : déployer des actions qui permettent de développer l'empathie envers le vivant et plus globalement qui s'appuient sur la prise en compte des émotions. Certaines émotions peuvent constituer un obstacle à l'action quand d'autres sont de réels leviers donc l'accompagnement dans l'identification et la régulation émotionnelle apparait comme nécessaire.
Création de zones protégées ou débitumisation d'espaces pour favoriser la biodiversité : soutenir la création de parcs naturels, d'aires marines protégées où l'activité humaine est limitée et la débitumisation pour faire revenir des espèces et favoriser ainsi les contacts entre l'humain et la nature.
D'autres formes d'action restent à inventer pour renforcer ce lien au vivant. Travailler avec d'autres acteurs pour sortir des approches morcelées, croiser des approches, créer des nouvelles manières d'agir sont autant de pistes pour réensauvager notre relation au monde comme nous y invite B. Morizot dans « L'Europe réensauvagée ». Cette relation vise à adopter un humanisme qui nous relie intrinsèquement au vivant plutôt que de nous en distinguer. Nous ne devons pas perdre ces liens essentiels avec la vie qui nous entoure : nous sommes façonnés par elle autant qu'elle l'est par nous.
Notes de bas de page
[1] A global synthesis of trends in human experience of nature Frontiers in Ecology and the Environment (Volume 21, Issue 2 Mar 2023).
[2] R. Pyle, L'extinction de l'expérience dans Ecologie et politique N°53
[3] A-C. Prévot, La nature à l'œil nu, Edition CNRS, 2021
[4] Le syndrome de manque de nature, du besoin vital de nature à la prescription de sortie. Dynamique sortir, FRENE.
[5] P.H. KAHN, Children's affiliations with nature: structure, development and problem of environmental generational amnesia, dans: Children and nature: psychological, sociocultural and evolutionary investigations, MIT Press, p. 93-116.
[6] https://www.ted.com/talks/daniel_pauly_the_ocean_s_shifting_baseline/transcript.?subtitle=en
[7] S.K. Papworth, J Rist, L. Coad and E.J. Milner-Gulland (2009), Evidence for shifting baseline syndrome in conservation. Conservation Letters
[8] P.J. Dubois, La grande amnésie écologique ; Delachaux & Niestle, 2012.
[9] C. Préat, Quels sont les effets éducatifs des interventions en éducation relative à l'environnement ? Réseau Idée, 2024.
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Gisèle Pelicot
- Par Thierry LEDRU
- Le 20/12/2024
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Qui sommes-nous ?
Qui sommes-nous ?
Positions est une revue trimestrielle thématique présentant une lecture matérialiste du monde et s’ouvrant à des contributeurs extérieurs.
https://positions-revue.fr/a-lassaut-de-lempire-masculin/
Le premier jour du procès des viols de Mazan, Gisèle Pélicot apparait. Le monde entier découvre cette femme sexagénaire, derrière ses lunettes de soleil rondes. Des milliers de fichiers vidéo témoignent des viols qu’elle a subi par des dizaines d’hommes alors que son mari l’avait plongée dans le coma en lui administrant des médicaments à son insu. Le choix de Gisèle Pélicot de rendre le procès public est assumé comme un acte politique. Un acte pour elle-même et pour toutes les autres. Elle sait que cela lui apportera une forme de protection, elle qui s’apprête à vivre des mois de face à face avec la cinquantaine d’hommes accusés de l’avoir violée ; avec leurs avocats qui voudront montrer qu’elle était à l’origine des violences qu’elle a subies ; avec les experts qui vont décortiquer sa vie et sa psyché pour estimer sa vertu et sa fiabilité. Ses avocats l’ont prévenue, elle sait que la violence n’est pas terminée, elle sait qu’elle ne fait peut-être que commencer. Elle sait aussi que des millions de victimes la regardent, debout face à ces hommes qui se sont servi de son corps comme d’un objet, lui prenant tout jusqu’à ses souvenirs. Face à l’ouragan judiciaire, aussi. Elle vient dire tête haute ce que des millions de victimes et de militant.es crient depuis des années : la honte et la peur doivent changer de camp. En ce premier jour du procès des viols de Mazan, nous sommes des millions à avoir le ventre noué par l’écho que cette histoire a dans nos propres vies, par ce qu’elle dit de nos propres histoires, par ce qu’elle dit de notre société tout entière.
Ce procès a été décrit dans les médias comme « hors norme ». Les actes sont pourtant d’une normalité confondante. On se dépêche de parler de monstres, de fous, de dénier leur humanité à ces hommes qui sont pourtant un panel parfaitement représentatif de la société française. Tous âges, toutes classes sociales, toutes origines, toutes situations familiales. Ils ne sont que le visage tristement commun de la banalité de la violence sexuelle. On aimerait croire qu’il n’y a pas de ça chez nous et qu’ils ne sont pas comme nous. Et il faut alors le répéter : M. Tout-le-monde peut tout à fait être un violeur dans une société qui fabrique des agresseurs. Ils sont les fils sains de la société patriarcale, si on entend par là une société androcentrée où l’explosion progressive de la famille traditionnelle n’a pas mis fin à la hiérarchisation entre les genres et à la violence masculine qui en découle. Ainsi Dominique Pélicot ne se contente pas des viols conjugaux, il livre le corps de sa femme, il a le pouvoir de l’échanger, de le prêter, il reste pendant les abus pour choisir ce qu’on fera de cet objet qui est sa propriété. Il sait qu’elle n’aurait pas été consentante et cela fait partie du plaisir. Outrepasser. Contraindre. Asseoir le pouvoir par la violence. C’est la version spectaculaire de la banalité du viol qui est une affaire de domination bien plus que de pulsion. Un enjeu de hiérarchie plutôt que de biologie. Celui qui viole est celui qui a le pouvoir.
Refuser le qualificatif de monstre pour les violeurs est une nécessité politique absolue. Parler de monstre est une manière d’essentialiser la violence, et ainsi de la rendre immuable. On ne peut combattre notre essence. Acter que la violence se génère, c’est aussi acter qu’on peut ne pas la générer, qu’on peut penser une société moins violente. C’est accepter de penser le sujet révolutionnaire que contient la lutte contre les violences sexistes et sexuelles : nous ne voulons plus de cet ordre social, et nous en avons un nouveau à proposer.
L’ordre bourgeois se précipite sur « l’affaire Mazan » pour ne surtout pas en dire quoi que ce soit d’intéressant. On s’attelle à décrire les faits, les détails, on constate le sordide, on le décortique, sans ne jamais se poser la question de son origine. Ils félicitent la victime car elle est une bonne victime. Elle est mariée, a eu peu d’hommes dans sa vie qu’on a attentivement scrutée. Ce n’est pas une « marginale ». C’est une bonne mère et une bonne grand-mère. Elle ne présente pas de trouble psychique. La bonne victime ne doit pas pleurer trop fort, parler trop fort, ne doit pas exploser de colère. Sa vie doit correspondre aux normes de la bonne morale et son attitude se doit d’être contenue et mesurée. De temps en temps, on s’émeut de la violence que cette femme subit de la part des avocats de la défense. On semble découvrir ce que toutes les victimes rapportent depuis des décennies : leur parcours judiciaire est une seconde violence, la cour d’assise en est l’acmé, la structure même du procès d’assise par l’approche uniquement punitiviste met la victime en position d’accusé. Jamais ces questions ne seront vraiment soulevées. Pour les commentateurs et les médias bourgeois, le plus important reste que chacun soit à sa place et que l’ordre soit préservé. Malgré les très nombreuses mobilisations de mouvements féministes, malgré la volonté de la victime et de ses proches d’en faire un sujet politique et l’occasion de sensibiliser notamment sur la soumission chimique avec l’association #MendorsPas, le mieux que nous pourrons espérer d’eux sera leur mine contrite et une petite tape sur l’épaule : « C’est bien dommage tout ça, ça ne doit pas être facile, rentrez chez vous maintenant ».
En septembre 2024, en même temps que le début de ce procès, sort le livre de Caroline Fourest : Le vertige MeToo. Comme à son habitude, elle se rend sur tous les plateaux pour défendre ceux qui sont déjà défendus partout, parle dans toutes les radios pour dire qu’on ne peut plus rien dire, et remplit à la perfection son rôle de chien de garde de l’ordre établi en se pensant incroyablement subversive. Elle a senti la nécessité d’alerter sur l’urgence du moment : MeToo n’irait-il pas un peu trop loin ? Dans un pays où 10 % des enfants subissent de la violence sexuelle en grande majorité dans leur famille, où les centres de prise en charge du psycho traumatisme affichent des délais d’attente de plus d’un an, où 94% des plaintes pour viols sont classées sans suite alors qu’une condamnation pénale semble être la seule réparation qu’on envisage pour les victimes, Caroline Fourest enfourche son cheval et part à l’assaut des terribles dérives de MeToo. Dans son grand courage, elle choisit comme adversaire principal un magnifique homme de paille : on ne ferait plus de gradation entre les différents types de violences sexistes et sexuelles. On cherche encore qui a bien pu dire, ne serait-ce qu’une fois, qu’une injure sexiste équivaudrait à un viol et qu’une main sur la cuisse équivaudrait à un féminicide. Qu’importe, Caroline Fourest mène son combat d’arrache-pied, soutenue dans l’adversité par la totalité du système médiatique et notamment sa frange la plus droitière.
Presque au même moment, Nicolas Bedos est mis en cause par plusieurs femmes qui l’accusent de leur avoir imposé des contacts intimes et sexuels non consentis. Il est condamné en octobre au tribunal correctionnel à porter un bracelet électronique pendant 6 mois. Bien sûr, l’armée des grands et courageux défenseurs de l’ordre bourgeois est en première ligne pour s’en émouvoir. Le dégout et le mépris que nous inspire cet homme bien né, riche, connu, qui, alcoolisé, saisit une travailleuse par la taille pour lui coller sa bouche sur le cou ne sont pas partagés par ces chevaliers de la vraie justice. Elisabeth Lévy est terrassée par sa condamnation et lance un appel vibrant : « Réveillons-nous de ce cauchemar ! ». Nul doute que si un homme noir ou arabe avait saisi Mme Lévy par la taille alors qu’elle était en train de travailler pour coller ses lèvres sur son cou, elle aurait été tout aussi effrayée que ce dernier puisse être condamné. Dans ce système où ce qui compte n’est pas le respect des êtres humains mais la préservation de l’ordre, au même titre qu’il y a les bonnes et les mauvaises victimes, il y a les bons et les mauvais agresseurs. On redouble d’empathie pour ce pauvre petit Nicolas qui passera six terribles mois dans son appartement cossu et bien chauffé. On s’inquiète de l’impact de cette scandaleuse condamnation sur sa carrière de réalisateur. Jamais on ne parlera des conditions de travail des serveuses, de leurs horaires, de leurs rémunérations, de leur exposition à la violence de clients libidineux qui s’octroient des droits sur leurs corps alors qu’elles sont à leur 8ème heure de travail tard dans la nuit. Jamais on ne s’interrogera sur le traitement des travailleuses du milieu du cinéma, précaires, possiblement exposées à des réalisateurs laissant trainer leurs bouches sur les corps des femmes qui passent à leur portée, quelques mois seulement après qu’on apprenne que notre plus « grand acteur » avait pour habitude de mettre ses mains dans les culottes de celles, figurantes, maquilleuses, habilleuses, qui étaient les plus subordonnées sur les plateaux de tournage.
Des livres, beaucoup de livres, sortent en cet automne 2024 où le sujet des violences sexistes et sexuelles s’invite sur la place publique chaque jour, et sous tous ses aspects. François Bégaudeau, écrivain de gauche, nous fait grâce d’un livre faisant suite à son procès l’opposant à l’historienne Ludivine Bantigny. Des années plus tôt, une conversation avec ses admirateurs sur son blog était rendue publique. Il y avait fait ce qu’il expliquera ensuite être un trait d’humour. Dans les multiples ressorts de blagues sexistes, il n’a pas choisi l’injonction à retourner à la cuisine ou la supposée stupidité de la femme visée, à notre grand regret. Il a choisi de dévaloriser son travail tout en lui prêtant de multiples partenaires sexuels au sein d’une maison d’édition. Le summum de l’humour étant de mettre dans le lot de ces partenaires un homme notoirement homosexuel. La tranche de rigolade est délicieusement sublimée par l’utilisation de l’expression « passer dessus » pour décrire un rapport hétérosexuel. Cela aurait pu rester une phrase minable dans les tréfonds d’internet, mais l’intéressée en a eu connaissance, et a eu l’outrecuidance de ne pas l’apprécier. Il n’a pas jugé utile de s’en excuser, n’a pas été condamné, puis a écrit un livre de plus de 400 pages où il nous partage ses réflexions sur l’art, le féminisme, l’humour, la morale… Dans le cadre de la promotion, il donne de nombreuses interviews assez consternantes où il s’émeut du traitement dont il souffre dans la majorité des milieux de gauche. L’agacement qu’on ressent est à la hauteur de la nullité de toute la séquence. Personne n’est surpris par le fait que, dans une société profondément sexiste, un homme en position de coq dans la bassecour fasse des remarques sexistes et dégradantes. On est en revanche assez atterré par son incapacité à simplement présenter des excuses à l’intéressée. Tout le monde serait passé à autre chose.
Bégaudeau se compare à un enfant qui aurait frappé son camarade de classe et à qui l’institutrice intimerait de demander pardon. Il explique refuser de s’abaisser à ce genre de chose, ses fans en seraient fort déçus. A aucun moment il n’est question de la dimension réparatrice pour la personne visée. Encore moins de la portée politique du fait de reconnaitre qu’on a posé un étron inutile sur la montagne de déjections des violences masculines, de la plus minable comme ici, à la plus sordide comme avec Gisèle Pélicot. Se mettant dans la roue de notre chère Caroline Fourest, il questionne la notion de continuum en ne la comprenant pas. Accordons-lui que, sur l’échelle de la stupidité, il se situe un tout petit peu plus bas. Elle accuse le monde de ne plus faire de gradation au sein des violences. Lui explique que le concept de continuum entre les différentes violences sexistes et sexuelles lui semble fumeux car nous n’avons pas de preuves scientifiques pour affirmer que dire des insanités sur un blog amène au féminicide. Heureusement que nous avons de grands artistes pour nous permettre d’accéder à des informations aussi capitales. Or le continuum ne se joue pas à l’échelle individuelle, ce qui n’est pas aisé à saisir quand on est obsédé par la sienne propre. Le continuum se joue à l’échelle collective. C’est parce que nous sommes des femmes que nous subissons les injures sexistes, le harcèlement sexuel, les viols. C’est parce que nous sommes le genre subalterne qu’on se permet de nous faire subir ça. Ce ne sont pas les mêmes personnes qui en sont auteurs, mais ils participent tous à faire perdurer la structure. Les structures sociales ne sont pas immuables, elles ne lévitent pas au-dessus du monde. Elles s’incarnent dans des personnes et leurs pratiques. Il n’y a aucun doute sur le fait que Bégaudeau qui s’excuse ne soit pas un meilleur homme que Bégaudeau qui ne s’excuse pas. Et l’homme Bégaudeau n’est pas le sujet. C’est en tant que figure publique de la gauche que nous le regardons, et ça lui déplait beaucoup car il est avant tout un immense écrivain. Nous séparons l’homme du jouteur, et lui aimerait qu’on sépare le jouteur de l’artiste. Nous voulons parler des conséquences concrètes de ses paroles, lui aimerait qu’on parle d’art, qu’on s’extraie de la « morale ». Considérer l’art comme au-dessus des basses considérations éthiques et politiques est une morale en soi. Une morale d’homme au ventre plein et à l’existence tranquille. La parole est matérielle, elle est concrète. Les violences que nous subissons le sont aussi. Là où il voit des excités, un homme de gauche conséquent devrait voir la lutte, les violences et les rapports de force qui les sous-tendent. Les évoquer longuement n’a aucun intérêt si c’est pour les faire perdurer ensuite. En définitive, on peut y voir une réaction de petit bourgeois conservateur, bien heureux d’en appeler à la révolution tant qu’il ne s’agit pas d’interroger sur sa propre place dans le système. Une fois confronté au vacillement de sa position, il fait une grosse colère intimant de faire une exégèse complète de son œuvre avant de pouvoir adresser une critique sur la portée politique de ses paroles. Il n’est évidemment ni Pélicot, ni Depardieu, ni Matzneff. En tant qu’homme, il est parfaitement banal dans sa violence, la quotidienne, celle qui se gratte les gonades en forçant un rire bruyant. En tant qu’écrivain, il est un bavard peu consistant qui pense que l’art peut être extrait de sa dimension profondément politique et se permet donc d’extraire les militants de toute possibilité critique artistique par la politique. En tant que figure de gauche, il est un contre-révolutionnaire et il est donc licite de le cantonner à être un excellent écraseur de cloporte de droite.
L’extrême droite, elle, se tortille en cet automne 2024. Que va-t-elle bien pouvoir raconter de nauséabond ? Après une vaine tentative de faire passer le fétichisme de Dominique Pélicot pour du militantisme anti-raciste, elle a finalement jeté son dévolu sur l’horrible meurtre de Philippine. Une jeune fille de 19 ans, violée et assassinée par un homme qui abandonnera son corps dans le bois de Boulogne. L’atrocité des faits coupe le souffle. Elle, comme 104 autres femmes plus tôt dans l’année, a été tuée parce qu’elle elle est une femme. Au même moment, une travailleuse du sexe d’origine camerounaise est retrouvée massacrée à son domicile. Personne n’en parlera. L’extrême droite se repait de la tragédie de Philippine avec une gourmandise de vautour qui soulève le cœur. Car il s’agit d’une bonne victime, avec la bonne couleur de peau et la bonne classe sociale. Et surtout il s’agit du mauvais agresseur. Il n’est pas de nationalité française. Encore mieux pour leur agenda politique, il est marocain. Les charognards redoublent d’énergie pour instrumentaliser le crime et soigneusement éviter de soulever les questions qu’il pose sur notre système judiciaire et carcéral. Le fond de leur discours puant est toujours le même : ce sont nos femmes et nous sommes les seuls à avoir des droits sur elles. Elles seront massivement violées et tuées, c’est dans l’ordre naturel et biologique des choses, mais l’important et qu’elles le soient par ceux qui nous ressemblent.
L’année 2024 s’achève comme toutes les autres avec un gout de sang et de larmes. Comme toujours nous allons compter les mortes et les détruites. Elles sont le moteur de notre révolte. Nous refusons de regarder les cadavres avec résignation. Nous travaillons à disséquer les entrailles de cette violence omniprésente pour savoir par quels bouts l’annihiler. Nous écoutons ce qui en est dit, nous nommons nos ennemis pour mieux les combattre, nous reconnaissons nos amis pour mieux nous unir. Dans ce numéro, nous voulons nous donner des armes pour combattre. Nous pensons notre lutte comme une lutte collective, globale et totale contre l’ordre bourgeois patriarcal, et nous la menons car elle est une nécessité absolue et car nous croyons plus que jamais à ses chances de victoire. -
Philippe BIHOUIX : interview
- Par Thierry LEDRU
- Le 19/12/2024
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Le titre est nul, juste un "put a click" comme ont dit dans le milieu.
Mais pour le reste, c'est bien évidemment très intéressant.126 641 vues 12 nov. 2024 ÉNERGIE
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Deux écologies qui s'opposent
- Par Thierry LEDRU
- Le 16/12/2024
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Il y a deux sortes d'écologie : l'écologie réelle et l'écologie politique. La première est utile, la seconde est néfaste. Ou plutôt, elle l'est devenue par l'arrivisme de certains cadres politiques qui par leurs comportements ont donné à l'écologie une image punitive. L'écologie ne doit pas être politique, elle doit être sociale, existentielle, émotionnelle, affective, c'est à dire essentiellement tournée vers les actes bons, mesurés, conscients, utiles, protecteurs envers la nature. Et non envers un mouvement politique et ses leaders.
L'écologie sociale, c'est celle que nous pratiquons par des gestes respectueux, le tri, la consommation mesurée, le recyclage, une alimentation dé-carnée, la pratique du potager, l'entraide, le troc, la solidarité. L'écologie ne concerne pas que la nature ou l'environnement mais les humains entre eux, le respect de l'autre et si nécessaire sa protection.
D'ailleurs, il est étrange de parler « d'environnement » comme si nous étions séparés de la nature, des êtres à part avec une nature qui nous entoure alors que nous sommes des êtres naturels et totalement insérés dans cette nature. Sans elle, nous ne serions plus là.
L'écologie politique est devenue une écologie punitive parce qu'elle fonctionne par des injonctions alors que des millions de personnes sont déjà dans leur vie quotidienne soumis à des injonctions de survie. Et lorsque ces injonctions politiques sont proclamées par des gens qui vivent dans le luxe et le confort et prennent l'avion pour aller se dorer la pilule dans des pays exotiques pour les vacances de Noël, ça ne peut pas passer. D'autant plus qu'ils sont payés par l'argent public, c'est à dire justement celui dont nous aurions besoin pour vivre un peu mieux.
Il est donc urgent de ne pas mélanger ces deux faces de l'écologie au risque de délaisser la première alors que la situation planétaire tourne au cauchemar.
Personnellement, je pense que les voitures électriques, c'est une aberration et que les lobbies industriels ont encore réussi à imposer leurs visions. Si on regarde les dégâts dans les pays qui fournissent les métaux nécessaires pour la fabrication des batteries, il ne faut pas parler d'écologie. Quand je vois que les cartons qu'on rapporte à la déchetterie pour être recyclés partent au Vietnam par cargos parce que ni en France, ni en Europe on a d'usines capables de les recycler à grande échelle, c'est juste du foutage de gueule. Et des exemples comme ceux-là, il y en a des centaines. Qu'on a arrêté la consigne des bouteilles en verre pour favoriser l'usage du plastique, que la SNCF ait été autorisée à démanteler le réseau qui permettait de couvir la totalité du territoire, condamnant les habitants des régions de la "diagonale du vide" à utiliser les voitures puisque mêmes les transports en commun ont disparu, que les gouvernements successifs aient laissé s'étendre le transport routier en abandonnant le fret ferroviaire, que les lobbies de l'aviation aient été subventionnés alors que le tourisme aérien aurait depuis longtemps dû être surtaxé, que l'éolien soit subventionné mais que jamais on ne parle de décroissance, que les usines à charbon soient remises en service... etc... etc...
etc... etc... etc...
Nous avons le devoir d'être écologistes tout autant que le devoir de résister aux injonctions de l'écologie politique. Nous devons être exemplaires et ne pas suivre l'exemple falsifié des élites. Ces élites qui ont juste réussi à donner à l'écologie une image désastreuse.
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Indignation populaire
- Par Thierry LEDRU
- Le 14/12/2024
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Publié le 06/12/2024 à 23h38 • Mis à jour le 07/12/2024 à 12h42
L'essentiel
Mercredi matin, en plein centre de Manhattan à New York, Brian Thompson, 50 ans, dirigeant de UnitedHealthcare, a été abattu de plusieurs balles devant un hôtel Hilton. Ce crime a été qualifié de « prémédité, planifié et ciblé » par le NYPD, la police de la ville. Alors que l’enquête progresse, les réactions publiques témoignent d’un profond malaise autour du secteur de l’assurance santé aux Etats-Unis.
Cet assassinat intervient en effet dans un climat de tensions croissantes autour des assurances santé aux Etats-Unis. UnitedHealthcare, filiale du géant UnitedHealth Group, assure 51 millions de personnes et collabore avec des programmes publics comme Medicare. L’entreprise est souvent critiquée pour des pratiques jugées abusives.
Des dizaines de milliers d’émojis « rire »
Et, depuis l’annonce de la mort de Brian Thompson, le Network Contagion Research Institute, centre de recherche sur le numérique et réseaux sociaux, a observé une explosion de publications en ligne glorifiant le meurtre, certaines appelant même à de nouvelles violences. Le Network Contagion Research Institute a ainsi recensé « un bond de publications très engagées […] glorifiant l’événement » voire « appelant à des actes de violence supplémentaires, suscitant des dizaines de millions de vues ».
Sur Facebook, UnitedHealth Group, maison mère de UnitedHealthcare, a bloqué la possibilité de commenter son message de condoléances, après des dizaines de milliers de réactions sous forme d’émojis « rire ».
Une colère profonde contre les assurances santé
Plus généralement, les réseaux sociaux ont été inondés de remarques acerbes voire haineuses. « J’ai soumis une demande de prise en charge pour mes condoléances mais elle a été refusée, trop triste », assène, plein d’ironie, un internaute sur TikTok. « Pensées et prières pour tous les patients à qui l’on a refusé une prise en charge », commente un autre.
Retrouvez notre dossier sur les Etats-Unis
Pour des experts, cela témoigne d’une colère profonde aux Etats-Unis contre les assurances santé, secteur privé très lucratif dans un pays aux inégalités abyssales. Ces messages, partagés des millions de fois, reflètent effectivement une colère latente contre les inégalités du système américain, accusé de négliger les patients pour maximiser les profits.
Imaginons une mise en scène (très macabre).
Si on pouvait aligner tous les cercueils de ceux et celles qui sont morts des effets de ces assurances privées de santé, ça serait bien plus terrifiant que la mort de cet homme. Mais c'est justement parce que ça n'est pas visible que certains ne gardent en tête et ne s'offusquent que de la mort violente de ce patron. Et c'est bien ça qui est injuste. Il faudrait un cimetière national comme les cimetières militaires, avec ces milliers de croix blanches alignées.
Non, je ne cautionne pas cet assassinat mais je comprends le mouvement populaire qui le suit et la révolte verbale des gens qui applaudissent le geste du tueur. Il s'agit avant tout d'une indignation, d'une colère larvée qui éclate. Combien d'Américains connaissent personnellement une personne décédée par manque de soins ? Des millions certainement.
Une compagnie d'assurance a déjà annoncé avoir renoncé à raccourcir les durées de couverture des anesthésies. Faut-il donc que la révolte aille jusqu'au meurtre pour que les consciences s'éveillent ? Mais peut-on parler de conscience dans ces grands groupes financiers ? Conscience de leurs bénéfices, assûrément, mais conscience morale, certainement pas.
Maintenant, était-il raisonnable de confier la prise en charge financière de la santé par le secteur privé ? Non, bien évidemment. Et on ne peut qu'espérer que ça n'arrivera jamais ici.
Tous les acquis sociaux dont nous profitons maintenant ont été pris à la classe bourgeoise par la violence, "la classe des riches" comme le dit Warren Buffet. Rien n'a été donné par empathie et solidarité...
Petit rappel utile :
Les trois violences
« Il y a trois sortes de violence. La première, mère de toutes les autres, est la violence institutionnelle, celle qui légalise et perpétue les dominations, les oppressions et les exploitations, celle qui écrase et lamine des millions d’hommes dans ses rouages silencieux et bien huilés.
La seconde est la violence révolutionnaire, qui naît de la volonté d’abolir la première.
La troisième est la violence répressive, qui a pour objet d’étouffer la seconde en se faisant l’auxiliaire et la complice de la première violence, celle qui engendre toutes les autres.
Il n’y a pas de pire hypocrisie de n’appeler violence que la seconde, en feignant d’oublier la première, qui la fait naître, et la troisième qui la tue. »
Dom Helder
Hélder Pessoa Câmara, ou plus couramment, Helder Camara
Citation de Warren Buffet (célèbre milliardaire américain)
"Il y a une lutte des classes, évidemment, mais c'est ma classe, la classe des riches qui mène la lutte. Et nous sommes en train de gagner."
(en) There’s class warfare, all right, but it’s my class, the rich class, that’s making war, and we’re winning.
dans une interview de CNN, le 19 juin 2005, cité par le New York Times, le 26 novembre 2006
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Les animaux du monde
- Par Thierry LEDRU
- Le 13/12/2024
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Quand j'étais petit, je regardais à la télévision tout ce que je pouvais sur les animaux et cette émission-là, je l'adorais. Un générique inoubliable.
Un gang de manchots, un écureuil fou, des chouettes amoureuses : découvrez les lauréats des Comedy Wildlife Photography Awards 2024
Cette année encore, des milliers de photographies humoristiques d'animaux sauvages, venues des quatre coins du monde, ont été soumises au jury des Comedy Wildlife Photography Awards. Les clichés qui ont retenu leur attention sont à admirer ci-dessous.
Article rédigé par Laure Narlian
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié le 13/12/2024 06:00
Temps de lecture : 1min
"Gang of Four" (Le Gang des quatre) du Britannique Ralph Robinson a remporté les félicitations du Comedy Wildlife Photography Award 2024 avec cette photo de manchots sauteurs prise sur les Îles Falkland, aux Malouines. (RALPH ROBINSON)
En montrant avec humour la beauté et l'incroyable diversité des animaux sauvages, les Nikon Comedy Wildlife Photography Award(Nouvelle fenêtre) sensibilisent et rappellent chaque année la nécessité de préserver la nature. Créée par des photographes professionnels et des spécialistes de la conservation animale, cette compétition récompense chaque année des clichés d'animaux saisis dans des positions insolites, cocasses et toujours drôles. Le jury a dévoilé jeudi 12 décembre son palmarès 2024.
Les lauréats par catégories
"Stuck Squirrel" (Écureuil coincé), une photo prise par Milko Marchetti, le 23 avril 2022, dans un parc de Ravenne en Italie, a remporté le Comedy Wildlife Photography Award 2024. (MILKO MARCHETTI)
"Mantis Flamenca" de l'Espagnol Jose Miguel Gallego Molina a remporté le Insect Award. Cette photo d'une mante religieuse qui semble danser, a été prise sur la route près d'un marais espagnol. (JOSE MIGUEL GALLEGO MOLINA)
"Frog in a Balloon" (Grenouille dans un ballon) de l'Allemand Eberhard Ehmke, a remporté le Reptiles and Amphibians Award 2024. (EBERHARD EHMKE)
"Whiskered Tern Crash on Landing" (Guifette Moustac s'écrasant à l'atterrissage) du Bulgare Damyan Petkov a remporté le Photo Birds Award 2024. (DAMYAN PETKOV)
"Smooching Owlets" (Le bécot des petites chouettes) de l'Indien Sarthak Ranganadhan a remporté le Junior Category Award 2024, réservé aux moins de 16 ans. (SARTHAK RANGANADHAN)
"Unexpected Role Swap" (Inversion de rôles inattendue) du Polonais Przemyslaw Jakubczyk a remporté le Fish and Other Aquatic Species Award 2024. (PRZEMYSLAW JACUBCZYK)
"Awkward Smiley Frog" (Étrange grenouille souriante) du Hongkongais Kingston Tam a remporté le Young Photographer Category Award 2024, réservé aux moins de 25 ans. "Mon but avec mes images est d'attirer l'attention sur nos amis humides et à écailles, et de montrer que les animaux non duveteux sont aussi beaux et adorables", a commenté l'auteur. (KINGSTON TAM)
"Shake Ruffle Rattle and Roll" (jeu de mots à partir de la chanson "Shake, Rattle and Roll" de Bill Haley & His Comets) du Finlandais Tapani Linnanmaki a remporté le People's Choice Award 2024. Il s'agit d'un pygargue à queue blanche ébouriffant ses plumes. (TAPANI LINNANMAKI)
Le prix de l'incroyable portfolio (4 photos)
"Dancing to the Music, Rock Guitar, Roly Poly, Weight Lifting", une série de quatre photos du Britannique âgé de 10 ans (!!!) Flynn Thaitanunde-Lobb a remporté le prix de l'incroyable portfolio au Comedy Wildlife Photography Award 2024. Elle montre un écureuil jouant et dansant avec une branche. (FLYNN THAITANUNDE-LOBB)
"Dancing to the Music, Rock Guitar, Roly Poly, Weight Lifting", une série de quatre photos du Britannique âgé de 10 ans (!!!) Flynn Thaitanunde-Lobb a remporté le prix de l'incroyable portfolio au Comedy Wildlife Photography Award 2024. Sur celle-ci, l'écureuil semble jouer de la guitare comme une rock star. (FLYNN THAITANUNDE-LOBB)
"Dancing to the Music, Rock Guitar, Roly Poly, Weight Lifting", une série de quatre photos du Britannique âgé de 10 ans (!!!) Flynn Thaitanunde-Lobb a remporté le prix de l'incroyable portfolio au Comedy Wildlife Photography Award 2024. Sur celle-ci, l'écureuil effectue d'impeccables roulades athlétiques. (FLYNN THAITANUNDE-LOBB)
"Dancing to the Music, Rock Guitar, Roly Poly, Weight Lifting", une série de quatre photos du Britannique âgé de 10 ans (!!!) Flynn Thaitanunde-Lobb a remporté le prix de l'incroyable portfolio au Comedy Wildlife Photography Award 2024. Sur celle-ci, l'écureuil semble faire de l'haltérophilie... (FLYNN THAITANUNDE-LOBB)
Le prix de la vidéo
Elle a été attribuée à l'Américain Kevin Lohman pour cette vidéo d'un renard roux se roulant et glissant avec délices de bon matin dans l'herbe givrée.
Avec les félicitations du jury"Alright Mate Back Off-This is my Bird" (Dis donc, mec, dégage, c'est ma poule) du Britannique Andy Rouse, fait partie des clichés repartis avec les félicitations du Comedy Wildlife Photography Award 2024. (ANDY ROUSE)
"Mafia Boss" (Le Boss de la mafia) du Japonais Takashi Kubo a remporté, lui aussi, les félicitations du Comedy Wildlife Photography Award 2024. "On aurait dit qu'il mâchait un cigare et il ressemblait à un parrain de la mafia", a commenté l'auteur. (TAKASHI KUBO)
"Gang of Four" (Le Gang des quatre) du Britannique Ralph Robinson a remporté les félicitations du Comedy Wildlife Photography Award 2024 avec cette photo de manchots sauteurs prise sur les Îles Falkland, aux Malouines. (RALPH ROBINSON)
"Hide and Seek" (Cache-cache) du Canadien Leslie McLeod a obtenu les félicitations du Comedy Wildlife Award 2024 avec cette photo prise au Kenya. (LESLIE MCLEOD)
"I'm Too Sexy for my Love" (Je suis trop sexy pour mon chéri) du Polonais Artur Stankiewicz a remporté les félicitations du Comedy Wildlife Photography Award 2024. "On aurait dit qu'il sortait de chez le coiffeur avec un grand sourire", a commenté l'auteur. (ARTUR STANKIEWICZ)
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Une anticipation dépassée par l'Histoire
- Par Thierry LEDRU
- Le 12/12/2024
- 0 commentaire
J'espère que mon éditrice ira au bout de la publication de ma quadrilogie parce que plus on avance et plus ce que je raconte prend une tournure réaliste.
Je l'ai déjà écrit ici : ces quatre romans qui au départ sont rangés dans la catégorie "anticipation" finiront par devenir un récit historique.
En Suède, payer par carte ou via mobile est la norme. Mais avec le risque de guerre et de cyberattaques venues de l’Est, la Banque de Suède souhaite faire marche arrière en réintégrant l’argent en espèce dans le quotidien des Suédois.
Article rédigé par franceinfo - Ottilia Ferey
Radio France
Publié le 12/12/2024 16:20
Temps de lecture : 3min
La Suède aspirait encore récemment à devenir totalement "cashless" d'ici à 2030. Illustration. (OLASER / ISTOCK UNRELEASED/ GETTY)
La Suède est un eldorado de l’argent dématérialisé et pour trouver un distributeur, il faut s'armer de patience. On peut tout payer digitalement, sans minimum d’achat, que ce soit un paquet de chewing-gum, un ticket de bus ou même pour verser son obole à l’église. Quatre transactions sur cinq se font de façon électronique. Et la carte bleue est presque devenue "has been". Les Suédois utilisent Swish depuis 2012, un service de paiement instantané électronique mis en place par les banques du pays.
Le pays compte 10 millions d'habitants, technophiles et connectés pour la plupart, à l’image d’Anika qui fait ses courses au supermarché. "Je ne sais pas la dernière fois que j’ai eu de l’espèce sur moi, s'exclame-t-elle. J’y suis si peu familière que je ne sais même plus à quoi certaines pièces ressemblent." Même si on arrive à mettre la main sur des billets, encore faut-il pouvoir s’en servir, parce qu’en Suède, de nombreux commerces n’acceptent tout simplement pas le liquide. Même dans des cafés, bars, restaurants et magasins du centre de Stockholm, les commerçants répondent le plus souvent : "Swish ou carte, personne ne prend de l’espèce ici."
Une force transformée en talon d'Achille
Alors que la Banque de Suède est la plus ancienne banque centrale du monde - elle a été la première à imprimer des billets en Europe au XVIIe siècle - le royaume, connu comme précurseur, aspirait encore récemment à devenir totalement "cashless" d'ici à 2030. Mais la paix s’est fragilisée et les menaces en provenance de la Russie ont changé la donne. Dans le climat de tension actuel, la force digitale de la Suède et sa dépendance au numérique est un peu devenue son talon d’Achille.
: à lire aussi En Suède, la crainte de l'extension du conflit ukrainien est de plus en plus palpable
Si le système bancaire est attaqué, qu’Internet et l’électricité sont coupés, il faut avoir de l’espèce car les téléphones et autres cartes bancaires ne serviraient plus à rien. C’est d’ailleurs ce qui est recommandé dans la brochure envoyée en novembre 2024 à tous les Suédois. Ce petit guide explique quoi faire en cas de crise ou de guerre. Il faut bien se rendre compte que dans la région, la menace n'en est plus au stade de scénarios fictifs. En mars 2024, une cyberattaque d’ampleur(Nouvelle fenêtre) menée par un groupe de hackers russes sur un data center suédois a fortement perturbé les systèmes de paiement en ligne.
Pour lutter sur ce front-là, la Riksbank souhaite faire changer la loi pour que les commerçants qui vendent des biens essentiels, comme de la nourriture, des médicaments ou du carburant, soient obligés d'accepter les espèces. C'est déjà le cas de la Norvège, qui, depuis le 1er octobre, a introduit des amendes pour les magasins physiques qui refusent d'accepter les espèces.