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La douleur de la conscience
- Par Thierry LEDRU
- Le 17/04/2023
- 0 commentaire
"La connaissance ouvre la conscience. Vaut-il mieux être malheureux en conscience ou heureux par inconscience ?"
Sylvie Raffin-Callot
C'est une phrase que j'ai trouvée en commentaire d'un article sur une page FB, "Au coeur de la philosophie".
J'ai vécu une partie de ma vie dans une totale insouciance au regard de l'état de la nature. J'ai goûté au bonheur de la haute montagne, des randonnées en forêts, des baignades dans des lacs d'altitude, des raids à vélo, des sorties de ski de randonnée, des milliers d'heures à courir, à marcher, à pédaler, à skier, à nager, à contempler les beautés de la Terre.
Puis, avec l'âge et de multiples lectures sur la biodiversité, l'impact de l'humain sur la faune, la flore, le climat, les cours d'eau, les océans, l'atmosphère, la souffrance animale, j'ai basculé de l'insouciance à une forme de désespérance, un assommoir qui ne cesse de me frapper, une connaissance pesante et qui reste, malgré ses effets, absolument nécessaire parce qu'elle me permet d'agir en conscience.
Alors oui, cette conscience est douloureuse mais cette douleur est compensée par les effets de mon engagement, un effet dérisoire au regard du désastre planétaire mais un effet qui me permet de me supporter, en tant qu'humain.
J'ai même longtemps écrit des textes qui explorait la dimension spirituelle et quelque peu philosophique, à mon humble niveau. Puis j'ai arrêté ce travail intérieur parce que cette conscience de la vie et de mon impact sur elle me montrait à quel point ma quête spirituelle était artificielle, déconnectée du monde réel, ce que j'ai fini par appeler "mon insignifiante réalité".
Je vivais dans une sphère "intellectuelle" qui conférait à un état de "hors sol" bien que je passais la majeure partie de ma vie dehors, au plus près de la nature. Une nature dont je ne connaissais finalement pas grand-chose. Elle n'était qu'un terrain de jeu, une scène plaisante qui répondait à mes besoins physiques.
Il n'aurait servi à rien que je regrette cet état d'insouciance, que je me flagelle pour toutes les erreurs passées. Puisque j'avais enfin accédé à un état de conscience libérée de "l'ego encapsulé" (Alan watts), il fallait que j'en fasse quelque chose.
Comme le dit très justement Sylvie Raffin-Callot (que je remercie pour la concision parfaite de sa réflexion), j'alterne entre la douleur générée par cette conscience et la satisfaction d'agir désormais selon ma conscience. Je gagne à travers la douleur une sérénité réelle et non un bien-être égotique. La question se pose d'ailleurs de savoir si toutes les thérapies qui proposent d'aller mieux dans un monde qui va mal ne participent pas finalement elles-mêmes à ce monde. Si l'objectif est de supporter ce monde et de parvenir à s'y insérer sans souffrance mais sans rien y changer, c'est juste un travail sur soi mais cela n'a aucune incidence sur le monde lui-même.
Ce monde va-t-il mal parce que trop de gens le supportent encore ? Faudra-t-il donc attendre que la douleur de l'état de conscience se généralise pour commencer à entrevoir la possibilité d'une évolution planétaire ?
Alors qu'advienne la douleur de la conscience, pour tous, qu'elle soit si forte que les nuits en deviennent blanches.
Voici l'article en question.
https://aucoeurdelaphilo.wordpress.com/2023/01/08/pourquoi-les-gens-intelligents-sont-souvent-malheureux/?
Pourquoi les gens intelligents sont souvent malheureux ?
(Crédits image : Aron Wesenfeld)
« Tout le monde cherche à être heureux, même celui qui va se brûler la cervelle » Pascal
***
Lorsque j’étais enfant, et que j’avais dû mal à juguler mes innombrables angoisses, il m’arrivait de lire la Bible.
Et lorsque je lisais la genèse – parmi d’autres points qui interpellaient ma sagacité d’enfant – je ne comprenais pas pourquoi Adam et Eve avaient été punis pour avoir consommé le fruit de la connaissance.
La connaissance, c’est à priori quelque chose de positif ! Nos parents ne nous motivent-ils pas tous les jours à apprendre ? à accumuler des connaissances ? Pis encore, je ne comprenais pas pourquoi Adam et Eve, qui n’avaient tué/fait du mal à personne – devaient endurer les pires souffrances et être malheureux pour le restant de leurs jours, ainsi que leur descendance. Et encore une fois, pour avoir – JUSTE- consommé le fruit de la connaissance.
***
Vous le savez, l’un des conflits opposant la philosophie et la religion concerne l’accès au bonheur.
Pour les philosophes (excepté l’ami Rousseau), du moins, pour nombre d’entre eux, l’accès au bonheur passait par la connaissance, le culte de la raison pour accèder au vrai (Aristote avec la spéculation contemplative comme stade ultime du bonheur dans son éthique à Nicomaque, l’hédonisme raisonné des épicuriens, les stoïciens etc.). « Il vaut mieux être Socrate insatisfait qu’un imbécile satisfait » disait l’ami John Stuart Mill.
A contrario, et sans aller jusqu’au fameux “Heureux les pauvres en esprit, car le royaume des cieux est à eux”, pour les religions, le bonheur a longtemps consisté – et consiste encore – dans le fait d’avoir la foi (entre autres, la foi pour les vérités fournies par la religion sans se poser trop de questions).
Et si pour une fois, les religions étaient dans le vrai ? Et si la connaissance était en réalité un cadeau empoisonné ?
***
Il y a de cela quelques années, et dans un tout autre ordre d’idées, j’avais lu dans un article rédigé par un psychologue que les gens intelligents avaient souvent tendance à être malheureux, du moins malheureux par rapport à leurs pairs. (l’intelligence peut être d’une grande aide quant à l’accès à la connaissance)
A la première lecture, cela m’avait étonné. Mais en faisant quelques recherches, je m’étais effectivement rendu compte qu’un certain nombre d’études semblait bel et bien attester ce phénomène.
Ainsi, d’après une étude (1), réalisée par Norman P. Li et Satoshi Kanazawa sur un échantillon de 15 000 jeunes adultes âgés de 18 à 28 ans, et publiée dans le British Journal of Psychology, les deux chercheurs expliquaient que les personnes les plus intelligentes préféraient vivre dans des zones moins densément peuplées et avoir un moins grand nombre de relations sociales. Les deux chercheurs expliquaient par ailleurs que, si les personnes les plus sociables sont souvent les personnes les plus satisfaites et les plus épanouies dans leurs vies, ceux qui étaient dotés d’une intelligence supérieure à la moyenne avaient souvent tendance à souffrir aussi bien de la solitude, que la sociabilisation avec leurs pairs)
Et au fond, c’est vrai qu’en y pensant, une extrême intelligence [mais aussi la connaissance] vous éloignent malheureusement parfois des autres.
Vous avez certainement tous entendu parler de ce vieux conte arabe qui relate l’histoire d’un royaume qui était naguère gouverné par un roi extrêmement sage. Un soir, une sorcière empoisonna le puit, de manière à ce que l’au rende fou. Et c’est ce qui arriva à tous les individus – excepté le roi qui burent de cette eau le lendemain. Problème : Au fur et à mesure que les jours passaient, tous les habitants devenaient vindicatifs et répandaient des rumeurs sur le fait que le roi était devenu fou, qu’il ne dirigeait plus de manière sage etc. Un soir, le roi finit donc par boire l’au du puit, et il fut par la suite acclamé par le peuple comme un roi à nouveau sagace, raisonné, éclairé…
Certains passages de l’allégorie de la caverne (cf Platon) évoquent également ce côté douloureux de la connaissance. Ainsi l’individu qui réussit à se libérer de la caverne éprouvera d’abord une vive douleur aux yeux ( du fait de la lumière, n’ayant pas l’habitude d’évoluer dans un environnement naturel, inondé de soleil etc). Par ailleurs, il se peut qu’en redescendant dans la caverne pour aller libérer les autres prisonniers, ces derniers soient plutôt sceptiques, et en viennent même à la supprimer comme le relate Platon dans le livre VII de La République.
***
Lorsqu’on a d’immenses connaissances et/ou conscience d’un certain nombre de choses, lorsqu’on a des capacités cognitives assez poussées, cela nous éloigne ipso facto de certains de vos semblables.
Les personnes extrêmement intelligentes/érudites sont parfois un peu comme l’Albatros de Baudelaire, prince dans les nuées [des idées], mais qui sur terre, deviennent « infirmes » au milieu des huées, leurs ailes de géant les empêchant de marcher, [et d’évoluer/côtoyer leur semblables].
D’ailleurs, il se peut que certains d’entre vous l’aient déjà ressenti, cette sensation d’être un martien, cette sensation d’étrangeté, cette sensation d’être en décalage avec vos pairs. Avec l’irruption du fin fond de votre âme du fameux “Et si, c’était moi le problème ?”
***
Face à cela, et parce que l’homme est un être social, le psychologue expliquait que d’aucuns allaient jusqu’à utiliser un masque pour s’intégrer au mieux. Mais cela n’arrangeait pas la chose; bien au contraire. Ce sentiment de mal-être continuait même à grandir derechef.
L’auteur notait également que chez les personnes intelligentes, il y avait une dimension assez désagréable – et d’ailleurs bien souvent non voulue par les intéressés – qui était relative au côté “cerveau tout le temps allumé”, le cerveau qui ne s’arrête jamais, éventuellement les insomnies etc.
Ce doute et le questionnement permanent face à des décisions à prendre (un imbécile qui marche va plus loin qu’un intellectuel assis comme disait Audiard); la volonté de toujours comprendre, de toujours se questionner [ce qui ne peut que occasionner de l’insatisfaction].
Certes l’intelligence et la connaissance, ce n’est pas forcément la même chose.
Toutefois, ceux qui font de la recherche ou ceux qui ont soif de connaissance le savent. Plus on fait des recherches et on accumule des connaissances sur un sujet, plus on se rend compte à quel point on est ignorant, et qu’il faudra encore plus de recherches/lectures pour combler cette ignorance (d’où l’insatisfaction permanente)
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Mais même sans aller jusqu’à utiliser des exemples relatifs aux gens étant des scientifiques, des gens aux capacités cognitives étendues, etc. l’image qui me vient spontanément à l’esprit et qui me semble symboliser le fait que la connaissance n’est pas forcément synonyme de bonheur, c’est l’image de l’enfance.
Lorsqu’on était enfant, on était tous relativement insouciants (Du moins, on était plus insouciants qu’à l’âge adulte).
On était notamment insouciant parce qu’on ne savait pas tout ce qui se passait dans le monde, parce que nos parents essayaient de nous protéger des tristes vérités de ce monde (Guerre, boulot, ruptures, morts, racisme etc.), parce qu’on croyait aux contes de fées qu’on nous racontait (Le père Noël, le bien qui triomphe toujours, les copains/copines avec qui on resterait toujours copains etc.)
Bref, on était là « tranquilles, entre gosses insouciants, ignorants des choses de la vie. Et puis, sans avoir vu le temps passer, on se retrouve à présent, inquiets, entre adultes » ayant désormais connaissance de la réalité, et de ses innombrables contraintes et tragédies.
***
De ce point de vue là, l’allégorie d’Adam et Eve condamnés à être malheureux [pour avoir mangé le fruit de la connaissance] peut se comprendre.
Quand en effet, face aux mystères du Cosmos et de la nature, face aux innombrables tragédies de ce monde, face à la complexité de la nature humaine, des relations sociales, votre ignorance/inquiétude peut être comblée par l’invocation de Dieu, de la destinée, du dessein intelligent, c’est sans doute plus aisée de vivre sa vie.
La vie d’un homme serait en effet intolérable, nous dit Anatole France, « s‘il savait ce qui doit lui arriver. Il découvrirait des maux futurs, dont il souffrirait par avance, et il ne jouirait plus des biens présents, dont il verrait la fin. L’ignorance est la condition nécessaire du bonheur des hommes, et il faut reconnaître que, le plus souvent, ils la remplissent bien. Nous ignorons de nous presque tout ; d’autrui, tout. L’ignorance fait notre tranquillité ; le mensonge, notre félicité. »
***
Peut-être est-ce là une autre vérité contenue dans les spiritualités et religions d’autrefois. Peut-être est-ce là la signification profonde l’allégorie d’Adam et Eve, du mythe de Pandore (qui mena l’humanité à sa perte du fait de sa curiosité)…
Après tout, le sage ne dit-il pas : “ La vie est un mystère qu’il faut vivre, et non un problème à résoudre »
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Bref, et vous, qu’en pensez-vous ? A choisir, vous préfèreriez opter pour un bonheur adossé à l’illusion/l’ignorance, ou une existence misérable/dépressive dans la connaissance ?
Wilfried M.
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Potager pour l'autonomie
- Par Thierry LEDRU
- Le 14/04/2023
- 0 commentaire
Transformer une partie d'un jardin d'agrément en potager, ça ne représente pas un travail titanesque mais un travail sur le long terme. En un an, les récoltes peuvent déjà être abondantes.
En deux ans, il n'est plus nécessaire d'acheter le moindre légume si la diversité a été mise en avant.
C'est notre cas.
Pour ce qui est des fruits, c'est bien plus long évidemment. Il faut travailler sur les arbres mais aussi sur les haies fruitières dont la production est bien plus rapide : cassis, mûres, groseilles, groseilles à maquereaux, framboises, baies de goji, myrtilles...
Exploit : dans son micro-jardin, Joseph produit 300 kilos de légumes
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<p>Pour rentabiliser chaque mètre carré de son petit jardin, Joseph a multiplié les astuces. Il a réussi à y caser un potager, un verger, une mare, une serre et à y faire pousser une centaine de fruits et légumes différents.</p>
Par Thibaut Schepman
·Publié le 21 novembre 2016 à 15h40·Mis à jour le Mis à jour le 27 juillet 2015 à 08h28
Temps de lecture 6 min
Le jardin de Joseph, à Sotteville-lès-Rouen, le 10 juillet 2015 - Thibaut Schepman/Rue89
(De Sotteville-lès-Rouen, Seine-Maritime) Un coin de gazon, quelques rangs de légumes, une petite serre. Vu de la rue, on pourrait croire qu’on passe devant un jardin comme un autre, cultivé depuis quelques décennies par un gentil papi consciencieux. On aurait tout faux.
L’autonomie ?
Joseph ne cultive ni pommes de terre, ni ail, ni endives. Il n'est donc pas autonome à 100%. « Par contre, on a encore des courges et des petits pois de l’an dernier, on est capables de faire le tour de l’année, d'avoir des légumes pendant la saison la plus dure, vers mars et avril. »
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Le jardinier note tout, avec une rigueur impressionnante : « Je pèse tout ce qui sort de mon jardin et je compile dans un tableau Excel (voir ci-dessous). Ça me permet de tirer des conclusions, de ne rien oublier. »
Joseph Chauffrey et sa compagne ont emménagé à Sotteville-lès-Rouen – à quelques minutes en métro du centre-ville de Rouen (Seine-Maritime) – il y a quatre ans. A l’époque, ils étaient presque néophytes et une bonne partie du jardin actuel était bitumée.
Depuis, cet espace de 150 m² est devenu un micro-jardin hyper-productif.
On y trouve un potager de 25 m2, un verger de 10 m2 mais aussi une mare et une serre minuscules.
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En 2014, 252 kilos de plus d’une centaine de fruits et légumes différents ont été récoltés ici.
Suffisant pour que Joseph et sa compagne – qui pèsent consciencieusement chaque récolte – n’achètent quasiment plus aucun légume.
En 2015, Joseph pense passer la barre des 350 kilos de production. Et bien plus encore les années suivantes, quand les arbres fruitiers auront atteint une taille adulte. Le tout en consacrant « pas plus de dix heures par semaine au maximum au jardin ».
Voir le document
Si l’on ne s’aperçoit pas de cette incroyable productivité au premier coup d’œil, c’est que Joseph s’est en prime ajouté ce défi :
« Je ne voulais pas que le jardin soit seulement un potager, je voulais qu’il soit aussi beau, agréable, qu’il attire les insectes et les oiseaux [d’où la mare, ndlr]... J’ai donc essayé de concevoir plusieurs espaces complémentaires de telle façon à ce que chacun d’eux ait plusieurs fonctions et que chacun des besoins du jardin soit rempli de plusieurs façons différentes. »
Récolte de légumes dans le jardin de Joseph, en août 2014
Pour remplir tous ces objectifs a priori bien différents, Joseph a dû recourir à de nombreuses astuces, qu’il a trouvées en fouillant dans sa bibliothèque ou en passant de nombreuses heures sur Internet.
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Il assure :
« Finalement, la petite taille de mon jardin est un avantage, ça me force à innover et ça me permet d’accorder beaucoup plus de temps et d’attention à chaque mètre carré disponible. »
Les boîtes à graines de Joseph, à Sotteville-lès-Rouen, le 10 juillet 2015
Jean-Paul Thorez, ingénieur agronome auteur de nombreux ouvrages sur le jardinage biologique, a visité plusieurs fois le jardin de Joseph Chauffrey. Il nous confirme :
« Ce jardin est probablement l’un des jardins les plus productifs du monde au mètre carré sous ces latitudes. C’est le fruit de sa démarche qui est à la fois technique et intellectuelle. Il y a chez lui un mélange d’attention extrême et d’une recherche constante d’optimisation. Il n’a rien inventé, mais il a su s’inspirer des bonnes sources, entre les pionniers de la bio, les références techniques, des choses moins connues comme les jardins créoles en trois dimensions. »
Les baies de Joseph, à Sotteville-lès-Rouen, le 10 juillet 2015 - Thibaut Schepman/Rue89
Petit tour de jardin et de ces innovations « low-tech » :
La vidéo qui change tout
Ces prouesses ont valu à Joseph un petit succès dans le cercle des jardiniers connectés quand, en août dernier, il a tourné une petite vidéo sur son jardin et l'a publiée sur Youtube. Depuis, de nombreuses personnes le contactent pour échanger avec lui et l'imiter.
des courges dans les airs : entre juillet et septembre, on peut voir des courges et des haricots suspendus un peu partout dans le jardin de Joseph, comme le montrent la photo et l’extrait vidéo ci-dessous :
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« J’essaye de cultiver de manière verticale. Je laisse pendre des fils sur lesquels grimpent les haricots, je tends aussi des cordes pour faire grimper les courges sur le toit de mon abri de jardin ou sur ma pergola. Ça fonctionne très bien, le pédoncule se renforce et peut tout à fait supporter le poids du fruit. »
Les courges de Joseph grimpent à à Sotteville-lès-Rouen, en août 2014 - DR
Des légumes perpétuels : de la livèche – plante d’un mètre de haut dont les feuilles ont goût de céleri. Du chou Daubenton, légume vivace dont les feuilles se dégustent toute l’année. Mais aussi des choux brocolis vivaces ou des oignons perpétuels. Dans le jardin de Joseph, nombre de légumes ne meurent jamais :
« J’ai tapé “légumes perpétuels” sur Le Bon Coin, je suis tombé sur un mec de l’Est qui vendait des graines dans de petites enveloppes. Ça remplace finalement beaucoup de choses, par exemple, je pense que je ne cultiverai bientôt plus d’épinards, c’est compliqué alors qu’il y a énormément d’alternatives qu’on peut mélanger quasiment toute l’année, comme le chénopode, la bourrache, la consoude ou les arroches. »
Joseph dans la partie potagère de son jardin, à Sotteville-lès-Rouen, le 10 juillet 2015. Au premier plan, les oignons perpétuels - Thibaut Schepman/Rue89
De l’urine et de la paille : une partie du jardin de Joseph était dallée. Inexploitable ? La lecture d’un livre sur la culture sur botte de paille a inspiré à Joseph une solution : le micro-jardinier a repiqué tomates et choux directement dans trois bottes de paille.
« Ça fonctionne vraiment très bien. Ça permet d’imaginer beaucoup de choses, des jardins déplaçables par exemple. La paille ne demande pas plus d’eau, au contraire, elle est creuse et donc la retient bien. La botte va tenir deux ans puis elle va peu à peu se composter en son centre et je pourrai l’utiliser pour recouvrir et enrichir mon sol. La seule chose, c’est que la paille est une matière très carbonnée, il faut donc y ajouter de l’azote. Beaucoup de gens proposent d’utiliser d’énormes quantités d’engrais, mais l’urine est une très bonne solution, j’ai testé les deux et obtenu des résultats comparables. Ça ne pose aucun problème d’hygiène bien sûr. »
Culture sur botte de paille, à Sotteville-lès-Rouen, le 10 juillet 2015 - Thibaut Schepman/Rue89
Des buttes de culture : dans son petit espace potager, Joseph a enterré une grande quantité de bois mort qui va nourrir son sol pendant plusieurs années. Il a recouvert la butte obtenue de paille, et posé des planches de bois sur le sol. Aussi le sol cultivé est vivant, jamais compacté... et hyper-productif.
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Prolonger les saisons : pour produire plus, il faut aussi gagner du temps. Pour ce faire, Joseph a lu des ouvrages de maraîchers nord-américains, comme Eliot Coleman. Il sème des graines très tôt en mini-mottes à l’intérieur de sa maison ou, dès que c’est possible, dans sa petite serre ou dans un châssis qu’il a fabriqué en recyclant une vieille porte-fenêtre.
La porte-fenêtre recyclée de Joseph, à Sotteville-lès-Rouen, le 10 juillet 2015 - Thibaut Schepman/Rue89
Une fois ses plants poussés et les beaux jours venus, il peut les repiquer dans son jardin ou en pot sur sa terrasse, où les murs blancs permettent encore de gagner de la chaleur et du temps. C’est ainsi qu’il déguste des tomates dès la fin mai, une prouesse dans la région. De même, il sème des graines de légumes juste avant l’hiver, pour que les plants végètent pendant plusieurs mois et « repartent » au moindre signe d’arrivée du printemps.
Joseph entre dans sa serre, à Sotteville-lès-Rouen, le 10 juillet 2015 - Thibaut Schepman/Rue89
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Cuba et la révolution verte urbaine
- Par Thierry LEDRU
- Le 13/04/2023
- 0 commentaire
37 321 vues 11 déc. 2011
« En 1959 c'est la révolution à Cuba. Les États-Unis, mécontent de ce pied de nez révolutionnaire, décide d'imposer un embargo international contre Cuba qui sera ainsi forcé de se tourner vers l'URSS afin de maintenir ses exportations et importations.
En 1989, c'est la chute de l'URSS, Cuba se retrouve dans une situation économique très précaire créant un problème de sécurité alimentaire. Pour solutionner ce problème, Cuba choisit de développer l'agriculture urbaine et écologique. 20 ans plus tard, Cuba est un leader mondial en la matière.
Dans ce documentaire, avec l'aide de l'INIFAT (Instituto de Investigaciones Fundamentales en la Agricultura Tropical), nous montrons l'ampleur, la diversité et l'ingéniosité des projets d'agriculture urbaine dans la région de La Habana. Une nouvelle révolution verte est en cours!
http://documentairesemences.blogspot.com
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Dangerosité des pesticides
- Par Thierry LEDRU
- Le 12/04/2023
- 0 commentaire
« Les industriels essaient d’orchestrer le doute sur la dangerosité des pesticides »
INTOX
12 avril 2023 par Nolwenn Weiler
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Pour François Dedieu, sociologue à l’Institut national de la recherche agronomique, auteur de Pesticides : le confort de l’ignorance , il est urgent de réduire l’usage des pesticides et d’aller vers une autre agriculture. Entretien.
Publié dansÉCOLOGIE
Temps de lecture : 9 minutes
Autre proposition de titres :« Sur les pesticides, chaque lanceur d’alerte est décrédibilisé au nom de la science »
Basta! : Les pesticides, aujourd’hui considérés comme à l’origine d’une pollution majeure, ont d’abord été considérés comme une sorte de miracle. Pouvez-vous nous raconter pourquoi ?
François Dedieu : À la sortie de la Deuxième Guerre mondiale, les besoins pour nourrir les populations française et européenne sont considérables. Apparaît alors une nouvelle technologie chimique : les pesticides agricoles, qui viennent de l’industrie de l’armement, et qui sont effectivement considérés comme miraculeux, car peu chers, très efficaces, et permettant un gain de temps considérable.
François Dedieu
Sociologue à l’institut national de la recherche agronomique et de l’environnement (Inrae), ses recherches portent sur l’action publique en matière environnementale. Il a publié en 2022 Pesticides. Le confort de l’ignorance (Seuil).
Cette technologie était réellement vue comme d’une grande modernité à l’époque, puisqu’elle allait permettre de quitter le dur labeur des champs. Elle a accompagné tout le développement de l’agriculture intensive, jusqu’à aujourd’hui. Néanmoins, depuis les années 1990, le regard que l’on porte sur ces produits a changé de manière plutôt spectaculaire, puisque les pesticides sont aujourd’hui considérés comme un problème écologique majeur en France, en Europe et dans le monde.
Quelles sont les raisons de ce changement de regard ? Et y a-t-il une spécificité française ?
Le changement de regard arrive en fait très peu de temps après l’apparition des pesticides, dès les années 1960 avec la publication du livre de la biologiste américaine Rachel Carson, Printemps silencieux. C’est la première qui se penche sur cette question des effets des pesticides.
Elle constate deux choses : on retrouve des pesticides partout dans l’environnement, et ils ont des effets délétères. Elle s’aperçoit par exemple que l’épaisseur des œufs dans les zones de traitement est beaucoup plus fine et menace donc la survie des grands oiseaux. Rachel Carson va notamment dénoncer le DDT, grand pesticide organochloré de l’époque, et contribuer à son interdiction.
« Il s’agit de marchands de doute qui utilisent la science contre elle-même pour leur seul bénéfice »
Aux États-Unis, la sortie de ce livre entraîne la naissance du mouvement environnemental, ainsi que celle des premières agences indépendantes d’évaluation des pesticides. En France, le livre a été très mal accueilli. Il y a eu une cabale sans nom organisée par le ministère de l’Agriculture et par l’administrateur civil Henri Siriez qui s’est débattu pour montrer que des travaux venant d’une femme, nécessairement hystérique, n’étaient pas sérieux et ne devaient par conséquent pas faire l’objet d’un intérêt particulier. Elle a été complètement décrédibilisée alors qu’aujourd’hui, 60 ans après, on voit à quel point ses travaux étaient pertinents.
Ensuite, on n’entend plus trop parler des pesticides en France, jusqu’aux années 1990, période à laquelle ils reviennent sur le devant de la scène par le biais de l’apiculture. Les apiculteurs dénoncent alors une classe d’insecticides très particulière, les néonicotinoïdes, qu’ils pensent être à l’origine du déclin des abeilles, et ils vont mettre 15 ans à faire reconnaître le problème.
Je lis, j’aime, je soutiens
Basta est en accès libre.
Comme Rachel Carson en 1962, les apiculteurs vont être considérés comme peu sérieux, partisans, et donc peu dignes d’intérêt…
Tout à fait. Sur cette question des pesticides, chaque lanceur d’alerte est décrédibilisé au nom de la science, et accusé de travailler de manière peu rigoureuse scientifiquement. La science et la raison seraient du côté des industriels et des pouvoirs publics. Le discours qui nous est tenu aujourd’hui par le ministère de l’Agriculture et les agences d’évaluation c’est : « On a une batterie de tests toxicologiques impressionnante qui nous permettent de dire qu’un pesticide est dangereux ou pas. »
« On vient réparer le mal alors qu’il faudrait plutôt le prendre à la racine en interdisant les produits les plus dangereux »
Or ce n’est pas le cas. Prenons l’exemple des néonicotinoïdes. On a reproché aux apiculteurs de ne pas avoir de démarche scientifique. On a reproché aux premiers scientifiques qui se sont penchés sur la question de ne pas l’être assez. Or, quatre ans, cinq ans, six ans plus tard, on s’aperçoit qu’effectivement, il existait un effet de désorientation des abeilles à une faible dose qu’ils soupçonnaient à la suite de leurs observations. Il ne s’agit pas de dire que les tests toxicologiques sont tous faux ou impartiaux, mais ils sont souvent réducteurs, ainsi que très prétentieux vis-à-vis des lanceurs d’alerte, à tort.
Cette stratégie qui consiste à jeter le discrédit sur des lanceurs d’alerte, et à instiller du doute sur les connaissances qui s’accumulent concernant la dangerosité d’un produit, a été mise au point par les industriels du tabac. Et reprise par ceux qui commercialisent les pesticides, avec la bénédiction des États…
Tout porte à croire que ces « stratégies du doute » mises en place par les marchands de tabac sont à l’œuvre dans le cas des pesticides. Ce qui se passe avec ces produits, c’est que la charge de la preuve est souvent difficile à apporter, car les pollutions sont d’origines multiples, c’est diffus.
La charge de la preuve repose donc sur des corrélations entre différents effets. La grande ruse des industriels du tabac, c’est de dire que la corrélation n’est pas la causalité et qu’il faut donc rechercher des causalités plus fines. Mais en essayant de trouver plusieurs causalités, on noie la causalité principale alors même qu’elle était connue dès le départ. L’historien des sciences américain Robert Proctor a démontré cette ruse dans son ouvrage sur les industriels du tabac, Golden holocaust. La conspiration des industriels du tabac.
Pour les pesticides – dont le bénéfice mondial annuel s’élève à 60 milliards d’euros – les industriels vont faire de même. Quand une molécule est remise en question, ils vont utiliser la science pour demander d’aller plus loin dans la recherche des causalités des effets constatés, pour voir si finalement le glyphosate, par exemple, est bien cancérigène.
Cela permet de retarder les choses d’une dizaine d’années pendant lesquelles on s’épuise à trouver ces causalités complémentaires et, par conséquent, on continue à utiliser ces pesticides. Il s’agit réellement de marchands de doute, qui utilisent la science contre elle-même pour leur seul bénéfice.
Vous ajoutez que ces manœuvres des industriels, doublées d’un lobbying intensif auprès des décideurs politiques, ne sont pas le seul problème, ni même le plus important. Pour vous, il faut aussi regarder du côté des processus d’homologation des pesticides. Pourquoi ?
Pesticides. Le confort de l’ignorance, François Dedieu, Le Seuil, 2022.
Les industriels font clairement preuve de manœuvres coupables pour essayer d’orchestrer le doute sur la dangerosité des pesticides, et ainsi retarder leur interdiction. Mais le problème fondamental vient surtout de la manière dont on a conçu la toxicologie réglementaire. Il y a 75 ans, les pouvoirs publics ont dit aux industriels : « Si vous voulez développer vos produits, à vous de payer pour la recherche et développement. »
Il y a donc un choix délibéré des pouvoirs publics de travailler main dans la main avec les industriels pour pouvoir développer les tests de toxicologie, et les valeurs de référence de cette toxicologie. Il ne faut donc pas s’étonner si aujourd’hui le poids de la science produite par l’industrie est aussi important.
« Le nombre de substances chimiques en circulation est tellement important qu’il obstrue la recherche de causalité sur les effets des pesticides »
Ce qui est remarquable, c’est que les universitaires des champs scientifiques concernés (la toxicologie) sont en général d’accord avec les industriels. C’est normal, ils regardent les mêmes choses, se posent les mêmes questions et ne débattent jamais à propos des limites de la toxicologie réglementaire. Industriels, scientifiques et politiques prêtent à cette technologie des qualités quasi divinatoires alors qu’elle voit les choses de manière très limitée sur la santé et sur l’environnement notamment. Tout cela participe à la construction de l’ignorance et à l’illusion de la connaissance.
Pouvez-vous préciser en quoi la toxicologie réglementaire voit les choses de manière très limitée sur la santé et sur l’environnement ?
Comment se déroulent les processus d’homologation quand on a affaire à ce que j’appelle des savoirs inconfortables, c’est-à-dire des connaissances qui viennent contredire ce que l’on sait, ou pensait savoir sur tel ou tel produit ? On ne les prend pas réellement en compte. Ces savoirs sont dilués. Une étude publiée en mai 2022 par l’Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer (Ifremer) et l’Institut national de la recherche agronomique (Inrae), consacrée à l’impact des pesticides sur la biodiversité, montre que dans les processus d’homologation, des effets sont omis.
Par exemple, les effets indirects tels que la destruction des habitats qui viennent perturber toute la vie sauvage des vers de terre et des chauves-souris. Ou encore les effets des faibles doses, dont on sait que pour certains produits ils sont encore pires que ceux de doses plus élevées, etc. Tout cela, l’homologation ne le voit pas, mais on fait comme si on le voyait. Pourquoi ? Parce que cela arrange énormément de monde, aussi bien les industriels que les pouvoirs publics, et le modèle agricole en général, jusqu’aux consommateurs.
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Parmi les zones aveugles des effets des pesticides, on pourrait aussi évoquer la santé des agriculteurs, gravement affectée par les pesticides et aujourd’hui largement documentée notamment par les reconnaissances du caractère professionnel de leurs maladies ?
Oui, tout à fait. Dans les zones aveugles des processus d’homologation, on compte un certain nombre d’effets sur la santé. Mais dans le système actuel, les pouvoirs publics considèrent que, une fois que l’on connaît certains effets délétères des pesticides, il suffit de reconnaître les maladies et que, ensuite, tout ira bien. On indemnise les personnes concernées, et c’est tout. On vient réparer le mal alors qu’il faudrait plutôt le prendre à la racine en interdisant les produits les plus dangereux.
Normalement, les industriels paient une taxe pour compenser tous ces coûts : maladie, pollutions de l’eau, etc. Mais est-ce que les montants de ces taxes correspondent au coût réel ? On peut en douter. Ce que je pense, c’est que ces coûts réels sont tellement vertigineux qu’ils sont invisibles.
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L’idée que je défends est que la science à elle seule ne permettra pas de sortir de l’ignorance. Le nombre de substances chimiques actuellement en circulation est tellement important qu’il obstrue la recherche de causalité sur les effets des pesticides. Il est donc urgent de réduire ce nombre de pesticides, d’avoir une autre agriculture, et un autre mode de consommation.
Il s’agit d’aller complètement à rebours de ce qui est fait aujourd’hui, avec des exploitations toujours plus grandes, et une spécialisation qui ne cesse d’augmenter. Or, à partir d’une certaine échelle d’exploitation, les pesticides sont fondamentalement inscrits dans les manières de fonctionner et dans le modèle économique. Si on souhaite s’en débarrasser, il faut donc sortir de ce système-là.
Propos recueillis par Nolwenn Weiler
Photo : ©Agir pour l’environnement
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L'écoterrorisme
- Par Thierry LEDRU
- Le 12/04/2023
- 0 commentaire
Publié dansÉCOLOGIE
Temps de lecture : 7 minutes
« Écoterroristes ». C’est le terme utilisé par le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin pour désigner le collectif des Soulèvements de la Terre, l’un des organisateurs de la manifestation de Sainte-Soline contre les mégabassines. Le ministre en demande désormais la dissolution.
Au même moment en Espagne, le président de la région des Asturies, Adrian Barbon, dénonce de son côté des « terroristes environnementaux ». Mais notre ministre de l’Intérieur et l’élu espagnol ne désignent pas du tout des mêmes personnes.
Darmanin vise des activistes environnementaux engagés contre l’artificialisation des terres et pour le partage de la ressource en eau, usant de stratégies d’actions variées légitimées selon eux par l’urgence climatique. Le président de région espagnol, lui, cible lui des incendiaires criminels qui détruisent des forêts.
Fin mars, les premiers grands feux de forêt de l’année ont éclaté en Espagne : près d’une centaine, tous d’origine criminelle selon les autorités. Il y a « clairement une action coordonnée de terroristes environnementaux », de « terroristes de la forêt », déclare le président régional Adrian Barbon.. Ces incendies auraient pu faire « des centaines de morts », dénonce-t-il le 1er avril.
Incendies criminels au profit de l’agrobusiness
Qui sont les véritables terroristes de l’environnement ? Les activistes des Soulèvements de la Terre et autres « zadistes », qui tentent de sauvegarder des espaces naturels, comme semble le penser Gérald Darmanin ? Ou les individus et entreprises qui détruisent sciemment l’environnement ?
Repère :
Aux origines du mot « écoterrorisme »
Lire l’encadré
En août 2019, dans l’État brésilien du Pará, des dizaines de grands propriétaires terriens et des personnes spécialisées dans la falsification de titres de propriété pour accaparer des terres, s’étaient coordonnées sur WhatsApp pour mettre le feu à la forêt amazonienne. Ils avaient organisé un « dia de fogo », un jour de feu.
Il s’agit d’incendies criminels provoqués tout le long de la grand-route BR 163, qui traverse cette partie de l’Amazonie, reliant les grands élevages et plantations plus au sud aux ports de matières premières situés sur les affluents de l’Amazone. L’objectif de ces incendiaires était de manifester leur soutien au président brésilien d’alors, Jair Bolsonaro, qui prônait l’ouverture de larges zones de l’Amazonie à l’industrie minière ou à l’agrobusiness.
Des multinationales, « criminels climatiques »
Il y a aussi ces entreprises multinationales responsables de 70 % des émissions globales de gaz à effet de serre. Des « criminels climatiques », comme les appelle le journaliste Mickaël Correia dans son livre-enquête du même nom. Les trois premières multinationales qui recrachent le plus de CO2 au monde, Saudi Aramco (Arabie Saoudite), Gazprom (Russie) et China Energy (Chine), déploient un arsenal de stratégies comme la corruption et le lobbying pour perpétuer le recours aux énergies fossiles.
Les scientifiques le disent depuis 2015 : pour limiter le chaos climatique, il faudrait laisser dans nos sous‑sols 80 % des réserves de charbon, la moitié de celles de gaz et un tiers de celles de pétrole. « Toute firme qui continue à mettre de l’argent dans les énergies fossiles relève forcément du criminel climatique puisqu’elle le fait en toute connaissance de cause », estime Mickaël Correia. Non seulement ces entreprises n’ont aucun réel plan de transition écologique d’ici la fin de la décennie, mais elles ont prévu d’augmenter leur production d’énergies fossiles en moyenne de 20 % d’ici 2030, rappelle-t-il encore.
« 1700 activistes pour l'environnement assassinés depuis dix ans, il est là le véritable écoterrorisme »
À travers le monde, les activistes environnementaux sont bien souvent eux-même la cible de violences. Rien qu’en 2021 (les derniers chiffres disponibles), 200 défenseuses et défenseurs de l’environnement et du droit à la terre ont été assassiné·es a comptabilisé l’ONG Global Witness.
54 ont été tué·es au Mexique, 33 en Colombie, 26 au Brésil, 19 aux Philippines, 8 en République démocratique du Congo. Au Kenya, l’écologiste Joannah Stutchbury, 67 ans, qui pratiquait la permaculture et défendait la forêt de Kiambu qui se trouve en banlieue de Nairobi, a été abattue alors qu’elle rentrait chez elle en juillet 2021.
Global Witness a commencé à recenser les assassinats d’activistes environnementaux en 2012. En dix ans, l’organisation a compté 1733 meurtres ! « Je regrette l’emploi du mot “écoterroriste” par Gérald Darmanin, qui me paraît complètement inconséquent et irresponsable, réagissait le politologue François Gemmenne le 1er novembre 2022 sur France Inter. 1700 activistes pour l’environnement assassinés depuis dix ans, il est là le véritable écoterrorisme. »
Des menaces récurrentes en France
En France, les violences et intimidations à l’encontre des défenseurs de l’environnement se sont multipliées ces dernières semaines. Le 22 mars dernier, des agriculteurs en Charente-Maritime protestent contre les restrictions d’usage de l’eau d’irrigation et d’épandage de pesticides. Ils se rendent au domicile de Patrick Picaud, vice-président de l’association Nature Environnement 17. L’intéressé est absent, mais son épouse est là. Du fumier est projeté sur la maison, des déchets et des pneus usagés sont jetés dans le jardin, la route et les murs sont tagués avec des inscriptions homophobes.
Je lis, j’aime, je soutiens
Basta est en accès libre.
« L’épouse de M. Picaud a été brutalisée, insultée et elle a reçu des jets de fumier », rapporte la juriste de l’association. Le couple a porté plainte.
Le 27 mars, c’est la secrétaire nationale d’Europe écologie Les Verts (EELV), Marine Tondelier, qui fait l’objet d’un communiqué de presse menaçant du président de la chambre d’agriculture de Lot-et-Garonne, Serge Bousquet-Cassagne et de la présidente de la Coordination rurale 47, Karine Duc.
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La répression, les menaces et intimidations s’accentuent contre les opposants aux mégabassines
« Ne venez pas chez nous, ça va mal se passer ! Vous n’êtes pas la bienvenue, le territoire vous est hostile ! » préviennent-ils. Marine Tondelier se rend tout de même sur place, refusant de se laisser intimider. Le ministre de l’Agriculture Marc Fesneau a fini par condamner ces intimidations. « Il n’est pas admissible, en aucune circonstance et sous couvert d’aucune cause, de justifier l’intimidation, les menaces sur les personnes et les biens, le non-respect de la loi, la vie et l’expression démocratiques. Jamais. Sinon c’est la violence qui fera sa loi », a-t-il écrit sur Twitter.
Le 30 janvier, l’agriculteur Paul François, qui a fait condamner Bayer-Monsanto après avoir été intoxiqué par un de leurs produits, a également été violemment agressé à son domicile par des hommes cagoulés. Là encore, une enquête a été ouverte par le parquet d’Angoulême pour « agression et séquestration », « administration de substances » et de « violences en réunion ».
Une journaliste menacée
La journaliste Morgan Large, connue en Bretagne pour ses enquêtes sur l’agro-industrie et ses effets nocifs, est menacée depuis des années pour son travail. Elle annonce, le 29 mars, le dépôt d’une nouvelle plainte après le déboulonnage d’une roue de sa voiture. Un sabotage identique et potentiellement meurtrier avait déjà eu lieu sur son véhicule il y a deux ans.
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« Nous considérons que ce sabotage est une nouvelle tentative de porter atteinte à la vie et au travail d’enquête de notre collègue et consœur. En instillant la peur dans la profession, il participe du climat de menaces qui pèse sur la liberté de la presse et sur les lanceurs d’alerte », dénonce la rédaction de Splann !, média d’investigation qu’elle a cofondé.
Dans la nuit du 30 au 31 mars, l’Office français de la biodiversité à Brest est incendié sur le port de commerce. Dans les heures précédant l’incendie, une manifestation a été organisée par les marins-pêcheurs protestant contre un projet européen de restriction de la pêche de fond. Une enquête est ouverte par le parquet.
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La criminalisation dont use Gérald Darmanin a de lourdes conséquences, estime Michel Forst, rapporteur spécial des Nations unies sur les défenseurs de l’environnement : « Lorsqu’on criminalise les défenseurs de l’environnement, c’est la cause elle-même qui est mise au ban de la société, et cela a un effet très néfaste sur la réaction du public. »
Sophie Chapelle, Rachel Knaebel
Photo de une : mobilisation à Sainte Soline le 25 mars 2023 contre les méga-bassines / © Les Soulèvements de la terre
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Harcèlement scolaire (3)
- Par Thierry LEDRU
- Le 11/04/2023
- 0 commentaire
J'ai eu droit à ce harcèlement scolaire, pendant mes années de collège. J'étais asthmatique et à l'époque, le traitement, c'était la cortisone, à dose de cheval et interdiction de sport. "C'est trop dangereux pour lui, il pourrait faire une crise." Voilà ce que disait le médecin de famille et mes parents l'écoutaient. A 14 ans, je pesais 68 kilos.
"Alors, bouboule ça roule!
-Ledru gros cul
-Gros tas, tu veux finir mon assiette ? "
Constamment, les chefs de bande et les autres qui suivaient.
J'étais dispensé de sport, j'allais en classe d'étude.
"Alors, bouboule, t'as pas trop transpiré ?
-Tu veux que je te porte ton cartable l'handicapé?"
Un de ces caïds est entré dans les toilettes pendant une récréation. J'étais en train d'uriner. Il a ouvert un robinet et a mis sa main pour diriger le jet sur moi. Je me suis fait arroser. Et là, j'ai senti une rage folle m'emporter, toutes ces heures d'humilation. Le gars criait "Ledru s'est pissé dessus ! "
Je suis allé vers lui, il me dépassait d'une tête, il était en troisième et moi en cinquième (je redoublais, détruit par le harcèlement). Je l'ai frappé de toutes mes forces, un coup de poing énorme, je lui ai cassé le nez puis j'ai balancé mon pied dans ses testicules. Il s'est écroulé, la figure en sang. D'autres garçons ont vu la scène et sont sortis des toilettes en criant.
J'ai été emmené chez le proviseur. Il a téléphoné à ma mère. Elle est venue.
J'ai été renvoyé trois jours mais comme il s'agissait de harcèlement, ça n'a pas été notifié dans mon dossier scolaire : circonstances atténuantes.
De ce jour, plus personne ne m'a jamais humilié.
Et c'est là que j'ai décidé de jeter tous les médicaments dans les WC puis j'ai dit à mes parents : "Maintenant, ça passe ou ça casse". Ma mère était paniquée. Je ne me souviens pas de la réaction de mon père. Quelques jours plus tard, ma mémé Crédou m'a donné son solex dont le moteur avait rendu l'âme. Je suis rentré avec en pédalant. Dix-huit kilomètres. Je suis arrivé épuisé mais heureux. J'ai pulvérisé le moteur à grand coups de masse. J'avais un vélo ! Et je me suis mis à pédaler, comme un mort de faim, puis à courir, des heures. Des milliers d'heures. Trois passages à l'hôpital dans les mois qui ont suivi : crise d'asthme de grande ampleur. Sous oxygène et sous surveillance. J'avais juste envie de vomir pour rejeter les médicaments. Je savais qu'une fois dehors, je recommencerai. Je me suis inscrit dazns un club de vélo à Saint-Evarzec, que des adultes, des sorties de plus de cent kilomètres tous les dimanches matins. Un jour, sur le trajet du retour, après avoir quitté le groupe, je me suis endormi contre un talus, toujours assis sur ma selle. Une autre fois, je me suis trompé de maison. Je rentrais hagard, décomposé mais empli d'une joie que je n'aurais pour rien au monde refusée. J'étais heureux. le sport m'avait sauvé.
Je n'ai jamais arrêté. J'ai 60 ans, je pèse 55 kilos. Je cours, je pédale, je marche, je skie, je nage, des milliers de kilomètres tous les ans. Je n'ai plus d'asthme. Tout ça a disparu. A 17 ans, j'étais au sommet du Mont-Blanc.
Oui, j'aurais pu mettre fin à ce harcèlement en parlant. Je ne savais pas le faire. J'étais un taiseux, solitaire. Je le suis toujours d'ailleurs.
TEMOIGNAGE. Adolescent obèse et harcelé devenu triathlète, le parcours de Sylvain, jeune homme sauvé par le sport
Publié le 30/03/2023 à 18h05 • Mis à jour le 31/03/2023 à 10h36
Écrit par Josette Sanna
Sylvain Dhugues, un jeune montpelliérain de 22 ans, se mobilise contre le harcèlement scolaire dans les écoles de la métropole. Aujourd'hui triathlète, il raconte son parcours et comment il s'est sauvé grâce au sport de haut niveau pour aider les jeunes à lutter contre l'obésité. • © S. Dhugues
Sylvain Dhugues, 22 ans, se mobilise contre le harcèlement scolaire dans les écoles de Montpellier. Aujourd'hui triathlète, il raconte son parcours et comment il s'est sauvé grâce au sport de haut niveau pour aider les jeunes à lutter contre le harcèlement et l'obésité.
C'est un grand gaillard affûté avec une bouille d'enfant aux yeux bleus. Sylvain Dhugues n'a que 22 ans mais il a déjà vécu plusieurs vies. Celle d'un enfant maltraité qui s'est réfugié dans la solitude et la nourriture. Celle ensuite d'un adolescent obèse, harcelé au collège, celle enfin d'un triathlète qui vise les championnat du monde d'Iron man.
J'étais Fat man (l'homme gros), je suis devenu Iron man (l'homme de fer).
Sylvain Dhugues.
Triathlète
De l'âge de 10 ans jusqu'à ses 16 ans, Sylvain Dhugues comble son mal-être et sa solitude par la nourriture. Tous les jours, "le gros" essuie les moqueries, les bousculades, les coups sans rien dire à personne.
Le harcèlement. On n'ose pas parler parce qu'on a honte.
Sylvain Dhugues
Sylvain Dhugues, adolescent obèse devenu triathlète se mobilise contre le harcèlement dans les écoles à Montpellier. • © DR
La honte, la solitude, les envies de suicide. Son calvaire va durer six ans. Un jour il finit par se confier au CPE (Conseiller principal d'Education) de son lycée. La machine est lancée. Ses agresseurs seront exclus du lycée. "Pour s'en sortir, il faut en parler. Ne pas rester seul", assure Sylvain Dhugues face aux élèves l'école Winston Churchill à Montpellier, où il a lui même effectué toute sa scolarité.
"C’est une revanche personnelle d’avoir traversé le harcèlement scolaire, les violences physiques et familiales. C’est une vraie revanche d’aller toucher des enfants en commençant par ceux de mon ancienne école primaire", sourit le jeune homme.
Harcèlement : sables mouvants
Etre victime de harcèlement, c'est comme être dans des sables mouvants. On s'enfonce encore plus si on se débat seul.
Guillaume Lahouze
Directeur de l'école Winston Churchill ( Montpellier)
On ne peut s'en sortir que grâce à une aide extérieure, une main tendue", ajoute Guillaume Lahouze, le directeur de l'école.
Un enfant sur 10 est victime de harcèlement scolaire.
Effet de groupe
Impliqué dans la prévention contre le harcèlement scolaire, il a connu Sylvain lorsqu'il était enfant. Il l'a naturellement invité pour évoquer son parcours devant les élèves de l'école. "Il faut aussi casser l'effet de groupe", ajoute l'enseignant. "Une personne harcelée est seule contre un groupe. Il faut faire prendre conscience aux élèves de ce phénomène. Casser cette situation en amont pour ne pas avoir de résultats dramatiques".
Son histoire, Sylvain Dhugues, il la raconte aux enfants pour lutter contre le harcèlement scolaire et l'obésité. S'il s'en est sorti, il veut à présent aider les autres. "Si je peux en sauver un ou deux, je serai content".
Sylvain Dhugues lors de son intervention auprès des scolaires à l'école primaire Winston Churchill à Montpellier. • © J. Sanna/FTV
Le déclic
Un jour devant sa télé, Sylvain Dhugues tombe sur l'Iron man. Une épreuve sportive de très haut niveau. D'une distance totale de 226 kilomètres, c'est une course multidisciplinaire consistant à enchaîner 3,8 km de natation, 180,2 km de cyclisme puis un marathon de 42,195 km. Ce jour-là, il a le déclic. Le lendemain, dans la cour de récréation, je réponds à une énième moquerie : "Vous verrez, celui qu'on a longtemps appelé FATMAN deviendra IRONMAN".
"J'avais 16 ans, 1m67 et 98,8 kilos. Un copain m'a proposé d'aller courir avec lui.
J'ai couru un, puis deux puis trois kilomètres. Je suis entré dans un cercle vertueux. Je me suis dit que j'étais capable. Que je pouvais tout accomplir.
Sylvain Dhugues
Triathlète
Fat man va devenir Iron man. "Deux ans plus tard, le 22 Mai 2022, "je termine l'Ironman d'Aix en Provence après 13h36 de sueur et de larmes".
Courir contre le harcèlement
Sylvain Dhugues se livre et raconte son parcours aux enfants. Il a créé une association : Agir pour devenir". Ce mercredi 30 mars, il a organisé un cross "contre le harcèlement", avec le centre de loisirs Alain Savary à Montpellier. Objectif : toucher 1000 jeunes en quatre jours.
durée de la vidéo : 00h02mn25s
Sylvain Dhugues, 22 ans, se mobilise contre le harcèlement scolaire dans les écoles de Montpellier. Aujourd'hui triathlète, il raconte son parcours et comment il s'est sauvé grâce au sport de haut niveau pour aider les jeunes à lutter contre le harcèlement et l'obésité. • ©J.Sanna et C.Monteil/ FTV
Championnats du monde d'Ironman
En parallèle, il s'entraîne sans relâche en espérant se qualifier pour les championnats du monde Ironman (l'épreuve reine des triathlons longue distance) l'an prochain à Hawaï. Au delà du défi sportif, il veut délivrer un message : "se dépasser pour se reconstruire et toujours croire en soi".
Les mots d'encouragement des enfants rencontrés qu'il fera graver sur son maillot, vont certainement lui donner des ailes pour vaincre. Une fois de plus.
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Macron aux Pays-Bas
- Par Thierry LEDRU
- Le 11/04/2023
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La constitution n'est pas la démocratie.
La Corée du Nord possède une constitution et ça n'est pas une démocratie.
Donc le sophisme de dire que le 49.3 est démocratique parce que c'est constitutionnel, est faux.
Le 49.3 est légal car c'est un outil juridique constitutionnel, mais ça n'a rien à voir avec la démocratie.
Macron respecte la constitution, mais pas la démocratie.
Quant à l'argument qui consiste à dire que la situation sur l'âge de la retraite est pire ailleurs, c'est vraiment l'argument le plus pitoyable qui soit. Si on prend l'exemple du pire, on peut dire que les femmes battues, violées et assassinées en France, ça n'est pas si grave quand on regarde le sort des femmes en Afghanistan. Voilà où mène la dialectique du pire.
Emmanuel Macron interrompu par des manifestants au début d’un discours à La Haye
En déplacement aux Pays-Bas, le président français a été chahuté par des activistes avant son discours sur l’Europe.
Emmanuel Macron face à une banderole contestataire, ce mardi à La Haye. (Robin Van Lonkhuijsen/ANP.AFP)
par LIBERATION et AFP
publié aujourd'hui à 16h59
(mis à jour le 11 avril 2023 à 17h17)
La crise des retraites et la contestation sociale poursuivent Emmanuel Macron jusqu’aux Pays-Bas. Le président français a été interrompu ce mardi à la Haye par des manifestants alors qu’il s’apprêtait à prononcer un discours sur l’avenir de l’Europe. «Vous avez des millions de gens dans les rues. La convention sur le climat n’est pas respectée. Qu’est-ce que vous voulez nous dire à propos de l’Europe ?», lui ont rappelé, en anglais, plusieurs personnes depuis les tribunes de la salle où il devait s’exprimer.
«Où est la démocratie française ?», ont également hurlé ces manifestants, en déroulant une banderole sur laquelle était écrit en anglais «Président de la violence et de l’hypocrisie». Après une bonne minute d’interruption, Emmanuel Macron a pu reprendre la parole, ne manquant pas de réagir à ces interpellations surprises. «C’est très important d’avoir un débat social», a-t-il appuyé. «Je peux répondre à toutes les questions sur ce dont nous discutons en France», «ceci est une démocratie et une démocratie est exactement un endroit où l’on peut manifester» et voir «ce type d’interventions», a-t-il souligné.
Mais «le jour où vous vous dites “Quand je suis en désaccord avec la loi qui a été adoptée ou les personnes qui ont été élues, je peux faire ce que je veux car je décide moi-même de la légitimité de ce que je fais”, vous mettez la démocratie en danger», a poursuivi le chef de l’Etat. Reprenant le fil de son discours sur la politique économique européenne, le président français est ensuite revenu à sa réforme visant à reporter de 62 à 64 ans l’âge de départ à la retraite, sur le fond. «Quand je compare» avec les autres pays européens, les Français «devraient être moins énervés à mon encontre», a-t-il soupiré. «Car dans votre pays», l’âge de la retraite «est beaucoup plus élevé, et dans de nombreux pays en Europe c’est beaucoup plus élevé que 64 ans.» Un âge plus élevé, certes, mais un taux d’emploi des seniors qui l’est tout autant, puisque d’après Eurostat, 71,4% des 55-64 ans y travaillent encore, contre 55,9% en France.
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L'eau potable contaminée
- Par Thierry LEDRU
- Le 11/04/2023
- 0 commentaire
Combien de personnes en France ont vraiment conscience du problème de l'eau ?
Mille, cent mille, un million ? Il faudra bien que tout le monde réalise la gravité de la situation un jour ou l'autre.
Quant aux mesures à prendre, elles sont connues.
Mais les politiciens ont d'autres priorités et la santé de la population n'en fait pas vraiment partie. La FNSEA veille au grain, à "son" grain. Et le ministre de l'agriculture industrielle les soutient.
"Le ministre de l’Agriculture, Marc Fesneau, a également annoncé récemment que l’utilisation du S-métolachlore, un autre pesticide présent dans de nombreuses eaux souterraines à travers la France, serait autorisée à se poursuivre."
https://42mag.fr/2023/04/des-traces-de-pesticides-interdits-decouvertes-dans-leau-du-robinet-en-france/
L’agence française de sécurité alimentaire a déclaré qu’un tiers des échantillons prélevés contenaient des sous-produits du pesticide interdit chlorothalonil. Paris et l’ouest de la France parmi les zones touchées
Un tiers des échantillons d’eau du robinet prélevés en France étaient contaminés par des traces d’un pesticide interdit, selon un nouveau rapport.
L'étude a révélé qu’un échantillon sur trois prélevé présentait des niveaux élevés de métabolites du chlorothalonil, un pesticide interdit en Europe depuis 2019.
Avant son interdiction, le pesticide (également connu sous le nom de R471811) était utilisé depuis 1970 et vendu par la société agrochimique Syngenta. Les craintes concernant la contamination de l’eau du robinet ont commencé à croître parmi les gestionnaires des services d’eau il y a plusieurs mois.
L’étude – réalisée par l’Anses, l’agence française de sécurité sanitaire des aliments – a vu des échantillons prélevés dans les eaux de surface et souterraines.
Le métabolite n’a pas pu être «vu» jusqu’à récemment, car les laboratoires chargés de cette tâche viennent tout juste de pouvoir le tester.
En janvier 2022, l’Anses a classé le R471811 comme « pertinent » (c’est-à-dire « potentiellement problématique »).
Les métabolites du pesticide, sous-produits de sa dégradation, doivent donc respecter les mêmes seuils réglementaires que sa « molécule mère ».
Ceci est considéré comme un cancérogène probable par les autorités sanitaires européennes et a causé des tumeurs du foie lors d’expériences sur des souris de laboratoire.
Rien n’indique que les niveaux de métabolites dans l’eau en France pourraient être dangereux, mais les résultats montrent des niveaux supérieurs au seuil bas acceptable.
L’Anses suggère qu’environ 34% de l’eau en France pourrait être non conforme à la réglementation, bien que ce chiffre ne soit qu’une estimation basée sur des échantillons de l’agence. Le pesticide n’est pas encore testé en standard par les agences régionales de santé, il n’est donc pas facile de déterminer les niveaux exacts.
Un responsable d’un grand opérateur public, qui a souhaité rester anonyme, dit Le Monde: « Je suis convaincu que plus de la moitié de la population française est concernée. »
Paris fait partie des quartiers les plus touchés
Le rapport montre également que les zones très peuplées sont les plus touchées, notamment Paris et ses environs.
Le Syndicat régional de l’eau Le Syndicat des eaux d’Ile-de-France (Sedif), qui approvisionne quatre millions de personnes, a confirmé qu’environ trois millions d’entre elles reçoivent une eau dont le taux de R471811 est quatre à cinq fois supérieur à ce que la réglementation autorise.
Sylvie Thibert, responsable des risques au Sedif, a déclaré : « Les eaux de surface, qui constituent 97 % de nos ressources, de la Seine, de la Marne et de l’Oise, sont toutes contaminées. Sur nos trois usines de production, celle de Méry-sur-Oise dispose de deux lignes de traitement, l’une conventionnelle, l’autre à membranes.
« Seul ce dernier nous permet de ramener l’eau que nous fournissons en qualité réglementaire. »
L’ouest de la France est également touché.
Mickaël Derangeon, vice-président du service public de l’eau de Loire-Atlantique Atlantic’Eau, a déclaré : « Nous étudions cette molécule depuis janvier et nous la retrouvons un peu partout. »
Résoudre le problème
L’Anses a déclaré que l’eau du robinet en France n’a jamais dépassé le seuil « fixe » de trois microgrammes par litre (ce qui signifierait qu’elle ne serait plus considérée comme potable), et qu’il n’y a pas de restrictions requises aux niveaux actuels.
Cependant, les niveaux actuels ne sont légalement pas autorisés à rester plus de trois ans (renouvelables une fois). Après six ans, les fournisseurs sont tenus de ramener l’eau à des niveaux acceptables pour lui permettre de rester potable pour les clients.
M. Derangeon a toutefois déclaré: « Le chlorothalonil étant utilisé depuis 50 ans, il semble à peu près certain que les gens boivent de l’eau non conforme à la réglementation depuis un certain temps. »
Le pesticide est interdit en France depuis 2019. Malheureusement, en Suisse, où les mêmes métabolites ont été trouvés en 2010, la suspension de l’utilisation du pesticide pendant plusieurs années n’a pas réduit les niveaux trouvés dans l’eau, a déclaré le responsable des eaux de Lausanne, Pierre- Antoine Hildbrand.
Des études suisses ont même trouvé que les métabolites pouvaient être présents dans l’eau en bouteille, y compris Evian. On estime qu’environ 8% des Suisses (700 000 personnes) reçoivent de l’eau du robinet non conforme, selon une étude des autorités sanitaires suisses.
La Suisse a été le premier pays à alerter les autorités européennes sur la possible présence de la molécule dans les Etats membres, dont la France.
Surveillance renforcée en France
En France, la Direction générale de la santé (DGS) a tenu à rassurer les consommateurs en précisant que son « programme de bilan de santé intégrera progressivement, à partir de 2023, le chlorothalonil et ses métabolites, en accord avec la montée en puissance de nos laboratoires. [to test it]”.
La Première ministre Elisabeth Borne a été mise au courant de la situation, indique Le Monde. Cependant, l’annonce récente d’Emmanuel Macron de son « plan eau », qui visait à apporter des solutions à l’eau face à l’aggravation de la sécheresse, n’a pas fait mention des pesticides.
Le ministre de l’Agriculture, Marc Fesneau, a également annoncé récemment que l’utilisation du S-métolachlore, un autre pesticide présent dans de nombreuses eaux souterraines à travers la France, serait autorisée à se poursuivre.
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