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Incendies et avions.
- Par Thierry LEDRU
- Le 26/07/2023
- 0 commentaire
Il y a un sérieux problème.
D'un côté, on a ça :
Résultats financiers de la société Ryanair : "Les clients reprennent l'avion : le trafic voyageurs a repris des couleurs augmentant de 8,1 millions de personnes à 45,5 millions sur un an. Le taux de remplissage des avions a suivi avec une progression de 73% à 92%. Ryanair entend booster ce trafic passagers à 165 millions de voyageurs sur d'ici la fin de l'exercice 2023 dans son ensemble (+11% par rapport au trafic avant Covid)."
et de l'autre, on a des touristes en vacances en Grèce qui sont désespérés d'avoir dû s'enfuir en catastrophe et rentrer en France, par avion, et qui disent qu'ils sont vraiment très inquiets des effets du réchauffement climatique, que leurs enfants ont eu très peur, que toute cette nature qui brûle, c'est vraiment triste, qu'ils ont dépensé leurs économies pour ce séjour, que c'est compliqué de trouver un vol pour rentrer etc etc...
Moi, ce qui m'affole, c'est de voir à quel point, le niveau de réflexion des gens est limité...
Avion-réchauffement climatique-pollution-tourisme de masse...
Il n'y a pas quelque chose qui fait tilt dans leurs têtes ? Une espèce de début de prise de conscience de leurs responsabilités ? Rien ?... Bon, ben alors qu'ils se taisent à tout jamais.
France Télévisions
Publié le 21/07/2023 06:01Mis à jour le 26/07/2023 16:02
Temps de lecture : 10 min.
Avec le réchauffement climatique, les incendies deviennent de plus en plus nombreux et intenses. (ASTRID AMADIEU/FRANCE INFO)
Face à une sécheresse accrue, les risques de départs de feu sont multipliés. Pour les suivre, franceinfo publie plusieurs cartes à différentes échelles, mises à jour régulièrement.
Alors que les températures ne cessent de grimper et que la sécheresse sévit à travers le monde, la menace d'incendies de grande ampleur pèse de plus en plus lourdement sur la planète. Au Canada, plus de 10 millions d'hectares de forêt et de prairie sont partis en fumée, soit l'équivalent d'un cinquième de la France hexagonale, Il s'agit de la "pire saison des feux jamais enregistrée", selon le gouvernement canadien. Dans ce contexte alarmant, le suivi quotidien des incendies est crucial pour prévenir les catastrophes environnementales et humaines qui en découlent.
Un programme d'observation de la Nasa, baptisé Fire Information for Resource Management System (FIRMS), permet de savoir en temps réel où la Terre brûle. "L'agence spatiale américaine récupère les données sur les feux actifs grâce aux deux satellites en orbite Aqua et Terra équipés de capteurs optiques appelés Modis", explique à franceinfo Olivier Boucher, climatologue à l'Institut Pierre-Simon Laplace. Ces capteurs détectent les anomalies de rayonnement caractéristiques des températures élevées à la surface du sol en lien avec les incendies. Ces deux satellites scannent deux fois par jour la totalité de la surface terrestre, collectant des informations précises sur la localisation et l'intensité des feux. Cette intensité est mesurée via un indice nommé "puissance radiative". "Il s'agit d'un indicateur précieux qui combine à la fois l'intensité et la taille de l'incendie. Son seul défaut, c'est qu'il ne permet pas de différencier un feu petit et très chaud d'un feu de taille plus importante, mais d'intensité plus faible", détaille le chercheur.
En exploitant ces données, franceinfo a réalisé ce tableau de bord rassemblant trois cartes à différentes échelles qui seront mises à jour régulièrement.
En France, des incendies pas seulement dans le Sud
En France, le risque d'incendies ne concerne plus uniquement le massif forestier aquitain et les forêts méditerranéennes. A cause d'un déficit pluviométrique important et des températures record constatés sur l'ensemble du territoire, ces incendies estivaux remontent désormais jusque dans la moitié nord du pays. Auparavant épargnées, certaines régions comme la Bretagne voient leurs forêts partir en fumée, comme dans les monts d'Arrée (Finistère) en 2022. Pour y faire face, le gouvernement doit s'adapter. Le protocole Héphaïstos, créé en 1984 pour lutter contre les feux de forêt dans 23 départements du sud de la France, a été étendu à l'ensemble du territoire pour l'été 2023.
Suivi des incendies en France au 26/07/2023
Intensité du feu (en MW)
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L'intense chaleur émise par certaines aciéries, comme celles de Dunkerque et Fos-sur-Mer, peut occasionner des fausses détections d'incendies.
Source: Fire Information for Resource Management System (FIRMS), NASA
Après les incendies qui ont ravagé 66 393 hectares de forêt et de végétation durant l'été 2022, notamment en Gironde et dans le Jura, d'autres dispositifs ont vu le jour. En prévision d'un été 2023 chaud et sec, une météo des forêts a été lancée. M ise à jour quotidiennement par Météo-France, elle informe sur le niveau de risque de feu dans les massifs forestiers hexagonaux. A cette démarche d'information et de prévention, s'ajoute un arsenal terrestre et aérien renforcé pour les pompiers. Le nombre d'appareils disponibles est ainsi passé de 38 en 2022 à 47 en 2023, selon la Sécurité civile.
En Europe, des feux dans le bassin méditerranéen
Les températures caniculaires actuelles, combinées à une sécheresse sans précédent, créent des conditions propices à la propagation rapide du feu en France, mais aussi en Europe. Sur la carte ci-dessous, les données de la Nasa attestent d'incendies actifs en Turquie, en Italie, mais aussi en Grèce. Ces observations vont dans le sens des projections sur le long terme de Copernicus. Selon le programme européen d'observation de la Terre, le risque d'incendies est particulièrement élevé entre les mois de juin et de septembre dans le sud de l'Espagne, en Italie, sur la côte méditerranéenne, en Grèce et en Bulgarie. En Turquie, le danger est même qualifié d'"extrême" dans certaines régions.
Suivi des incendies en Europe au 26/07/2023
Intensité du feu (en MW)
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L'intense chaleur émise par certaines aciéries peut occasionner des fausses détections d'incendies.
Source: Fire Information for Resource Management System (FIRMS), NASA
Pour détecter les incendies actifs, la Nasa localise les signaux de chaleur repérés par les satellites. Certains d'entre eux peuvent ne pas être issus de feux de forêt. On peut ainsi observer sur la carte les feux liés aux bombardements dans le sud de l'Ukraine. Selon Olivier Boucher, d'autres "fausses détections" peuvent survenir. "Les éruptions volcaniques, les cheminées d'usines et les torchères de l'industrie pétrolière peuvent parfois être confondues avec des feux actifs, mais ces erreurs sont rapidement corrigées par les algorithmes de traitement des données", explique le climatologue.
Dans le monde, des incendies récurrents au Canada, en Afrique, en Amazonie et en Russie
D'après les observations de la Nasa, l'Afrique subsaharienne semble être la région du monde en proie au plus grand nombre d'incendies actifs. "La savane brûle pendant la saison sèche et c'est en partie normal, relativise le climatologue Olivier Boucher . Ces feux font partie intégrante du cycle de la végétation et sont vitaux pour qu'elle puisse se régénérer." On observe cependant une augmentation des incendies dans cette zone à cause de l'activité humaine. "Ces milieux ont été modifiés par les sociétés humaines avec le pâturage et l'agriculture", détaille le chercheur. Parmi ces pratiques agraires, les brûlis, qui consistent à défricher les champs par le feu, sont encore très implantés en Afrique.
Les incendies qui ravagent l'Afrique équatoriale et, sur le continent sud-américain, l'Amazonie, trahissent une autre activité humaine, bien plus dévastatrice. "Ils sont associés à la déforestation et au défrichement, à la fois pour exploiter la forêt et libérer de l'espace pour les cultures", détaille Olivier Boucher.
Suivi des incendies dans le monde au 26/07/2023
Intensité du feu (en MW)
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Source: Fire Information for Resource Management System (FIRMS), NASA
Des feux brûlent aussi en Sibérie, aux confins de la Russie, tout près de l'Arctique. De gigantesques incendies s'y étaient déclarés et avaient battu des records historiques en mars 2022. En 2023 encore, d'importants feux de forêts ravagent cette région. On y observe la présence persistante de feux de tourbe qui ont survécu à l'hiver 2022 et qui se réactivent aujourd'hui. Ces "feux zombies", souterrains et difficiles à éteindre, sont accentués par la sécheresse, les températures élevées et les activités humaines. "Dans ces zones, les feux peuvent être naturels, mais le changement climatique accroît leur nombre et leur intensité", souligne Olivier Boucher.
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Jancovici : Sur l'alimentation
- Par Thierry LEDRU
- Le 18/07/2023
- 0 commentaire
"Moins de pétrole dans une économie qui se décarbone trop lentement, c'est un arbitrage de la collectivité qui se modifie.
Quand les gens auront moins d’argent, vont-ils continuer à avoir un smartphone et regarder Netflix, en ne mangeant que des pâtes?
Ou vont-ils privilégier de manger des légumes et d’avoir un smartphone de moins bonne qualité?"
Thèmes abordés : - Transport et dépendance des villes - Viande et surface cultivable par personne - Epuisement des énergies fossiles - Pauvreté du monde agricole - Nappe phréatique - Pic pétrolier - PIB mondial et pétrole - Puissance publique et arbitrage - Prix de la nourriture, diversification de la production et déspécialisation des régions - Emploi - Comment faire rentrer de l’argent dans le secteur agricole?
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Blog : Terre et bois
- Par Thierry LEDRU
- Le 18/07/2023
- 0 commentaire
J'ai reçu un commentaire d'un lecteur et je présente ici une partie de son travail.
Un blog à lire sans modération.
https://terre-bois.fr/les-12-principes-permaculture/
Qu’est-ce que la permaculture ?
Les origines : La permaculture (ou agriculture permanente) a été développée dans les années 1970 en Australie par Bill Mollison et David Holmgren en s’appuyant sur un modèle développé par Masanobu Fukuoka, un agriculteur japonais. Cette méthode agricole vise à s’inspirer de la nature pour créer des systèmes agricoles en synergie, en utilisant la diversité des cultures pour renforcer leur résilience et leur productivité naturelle.
David Holmgren
Bill Mollison
Photos de David Holmgren et Bill Mollison tirées du court métrage “Permaculture The Documentary”
Définition : La permaculture est une approche holistique de l’agriculture et du jardinage qui s’inspire de la nature pour créer des systèmes durables, écologiques et productifs. Elle repose sur une compréhension profonde des écosystèmes naturels, de leurs interconnexions et de leurs cycles de vie. Contrairement à l’agriculture conventionnelle qui utilise des pesticides, des herbicides et des engrais chimiques, la permaculture privilégie des méthodes naturelles telles que la culture en association, la rotation des cultures, la gestion de l’eau, la conservation des sols, la biodiversité et le compostage.
LES GRANDS PRINCIPES DE LA PERMACULTURE
La permaculture se fonde sur 12 principes de design qui peuvent être appliqués à tous les aspects de la vie, y compris l’agriculture, l’habitat, l’énergie, l’entreprise et la communauté. Voici ces principes selon David Holmgren :
1. Observer et interagir
La première étape de la permaculture est l’observation attentive du site, des plantes, des animaux et des êtres humains qui y vivent. Cette observation permet de comprendre les besoins, les comportements et les interactions de chaque élément, et de concevoir un système qui prend en compte ces facteurs.
2. Collecter et stocker l’énergie
La permaculture utilise les énergies naturelles telles que le soleil, le vent, l’eau et la biomasse pour créer un système autonome et résilient. Elle encourage également la collecte et le stockage des ressources, notamment l’eau de pluie, les aliments en conserve et le bois de chauffage.
3. Obtenir un rendement
Maximiser la production de nourriture, de fibres et d’autres ressources utiles tout en minimisant les efforts et les coûts sont des objectifs clairs de la permaculture. Elle utilise des méthodes efficaces et économiques pour réduire les pertes et optimiser les récoltes.
4. Appliquer l’auto-régulation et accepter les rétroactions
Encourager la régulation naturelle des écosystèmes, en favorisant l’équilibre entre les espèces et en évitant les interventions excessives. Cette approche accepte également les rétroactions de l’environnement et des utilisateurs pour améliorer la conception et la gestion du système.
5. Utiliser et valoriser les ressources renouvelables et locales
La permaculture privilégie les ressources renouvelables telles que le bois, le fumier, les plantes vivaces et les semences locales. Elle encourage également l’utilisation de technologies appropriées et de pratiques traditionnelles pour réduire la dépendance aux ressources externes.
6. Produire aucun déchet
La réduction des déchets et leur transformation en ressources. Elle utilise des méthodes de compostage, de recyclage et de réutilisation pour minimiser les déchets et maximiser la production de nutriments.
7. Concevoir à partir de modèles et d’éléments
La permaculture encourage à observer et à s’inspirer des modèles et des éléments de la nature pour concevoir des systèmes durables et efficaces. Cette approche implique également de prendre en compte les caractéristiques et les besoins de chaque élément dans le système, afin de maximiser les interactions positives et de minimiser les conflits. En d’autres termes, la permaculture vise à imiter la nature pour créer des systèmes résilients et productifs.
8. Intégrer plutôt que séparer
La permaculture cherche à intégrer les éléments du système de manière harmonieuse plutôt que de les séparer. Elle utilise la synergie et les relations symbiotiques pour maximiser les bénéfices mutuels.
9. Utiliser les solutions lentes et progressives
La permaculture favorise les solutions durables plutôt que les solutions rapides et temporaires. Elle utilise des méthodes telles que la succession naturelle et la récolte étagée pour créer des systèmes durables et résilients.
10. Utiliser la diversité
La permaculture encourage la diversité des espèces, des variétés et des écosystèmes pour créer des systèmes résilients et productifs. Elle utilise également la diversité pour maximiser les bénéfices mutuels et pour éviter la propagation des maladies et des ravageurs.
11. Utiliser les limites et valoriser les marges
La permaculture considère les limites et les marges comme des opportunités plutôt que des obstacles. Elle utilise les marges pour favoriser la biodiversité et pour maximiser la production, et elle utilise les limites pour créer des écosystèmes plus résilients et adaptatifs.
12. Répondre créativement aux changements
La permaculture encourage l’adaptation et la créativité pour faire face aux changements. Elle utilise des méthodes telles que l’observation, l’expérimentation et la gestion adaptative pour concevoir et gérer des systèmes résilients et durables.
Cette liste n’est pas exhaustive mais permet déjà de bien comprendre sur quoi repose la permaculture. Il s’agit d’une approche durable et écologique pour concevoir et gérer des systèmes alimentaires, énergétiques et sociaux. Elle est basée sur des principes éthiques et écologiques, et elle encourage la collaboration et la créativité pour créer des systèmes résilients et productifs. Si vous êtes intéressé par la permaculture, je vous encourage à vous former et à expérimenter avec des systèmes permaculturels chez vous ou dans votre communauté.
LES QUESTIONS AUTOUR DE LA PERMACULTURE
Voici les 5 questions les plus fréquentes sur la permaculture pour un débutant:
Comment débuter en permaculture ?
Pour débuter en permaculture, il est recommandé de se former auprès d’un expert ou de participer à des ateliers. Il est également important de commencer petit, en expérimentant avec un petit jardin ou un potager.
Quels sont les avantages de la permaculture ?
Les avantages de la permaculture sont nombreux: elle permet de créer des systèmes durables et productifs, de préserver la biodiversité, de réduire la dépendance aux ressources externes et de favoriser une alimentation saine et locale.
Comment concevoir un système permaculturel ?
Pour concevoir un système permaculturel, il est recommandé de suivre les principes de design de la permaculture, en observant le site, en favorisant la biodiversité, en utilisant des ressources locales et en privilégiant des méthodes durables et écologiques.
Comment entretenir un système permaculturel ?
Pour entretenir un système permaculturel, il est important de respecter les cycles naturels, de favoriser la régulation naturelle, de pratiquer la culture en association et la rotation des cultures, de favoriser la biodiversité et de maintenir une bonne santé des sols.
Quelles sont les plantes recommandées pour un système permaculturel ?
Les plantes recommandées pour un système permaculturel dépendent du climat, du sol et des besoins spécifiques du système. Cependant, en général, il est recommandé de privilégier les plantes vivaces, les espèces indigènes, les plantes compagnes et les plantes qui ont des usages multiples (alimentaires, médicinales, etc.).
SOMMAIRE
Les grands principes de la permaculture
2. Collecter et stocker l’énergie
4. Appliquer l’auto-régulation et accepter les rétroactions
5. Utiliser et valoriser les ressources renouvelables et locales
7. Concevoir à partir de modèles et d’éléments
8. Intégrer plutôt que séparer
9. Utiliser les solutions lentes et progressives
11. Utiliser les limites et valoriser les marges
12. Répondre créativement aux changements
Les questions autour de la permaculture
Ma vie est dédiée à explorer la nature et à acquérir des connaissances solides dans ces domaines. Je partage mes aventures et mes découvertes, tout en promouvant des pratiques durables et respectueuses de l'environnement. En combinant mes compétences en bushcraft et en permaculture, je cherche à inspirer les autres à vivre en harmonie avec la nature et à développer des modes de vie autonomes et durables. Rejoignez-moi dans cette aventure pour découvrir les trésors de la nature et apprendre à créer un monde plus écologique.
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Sténose canalaire lombaire
- Par Thierry LEDRU
- Le 13/07/2023
- 0 commentaire
J'avais 25 ans.
Je venais d'être opéré d'une première hernie discale. Opération ratée.
Dépression. Mon rêve de devenir guide de haute montagne s'effondrait. On n'entre pas à l'école de ski et alpinisme de Chamonix avec un dos détruit.
De 55 kilos, je suis monté à 85.
Puis, je me suis reconstruit, lentement.
J'ai quitté la Bretagne pour les Alpes.
A trente-sept ans, cette hernie qui continuait à me faire souffrir s'est dédoublée. L4/L5/S1.
Paralysie de la jambe gauche. Un chirurgien m'a opéré en me prévenant des risques. Risques immédiats mais aussi sur le long terme.
J'ai repris la marche, lentement. Puis les sommets.
A quarante-quatre ans, tout a recommencé. Paralysie, morphine, des douleurs à devenir fou. Le chirurgien a proposé une opération qui me condamnait, soit au fauteuil roulant, soit à la perte de ma jambe gauche, soit à pouvoir remarcher, sans doute avec une canne mais en tout cas, en abandonnant toute idée de sport.
J'ai refusé.
C'est une médium magnétiseuse qui m'a sauvé.
Aujourd'hui, j'ai soixante ans et les risques qui m'avaient été énoncés se réalisent.
J'ai une sténose du canal lombaire. Ossification du ligament jaune si importante que j'ai une excroissance en bas du dos, au niveau des hernies. Comme une bosse dure et qui grossit. Les nerfs sont comprimés.Mon mollet gauche s'atrophie depuis trois ans. C'est même devenu visible à l'oeil nu.
Des crampes nocturnes, l'obligation de me lever et d'aller marcher.
Le matin, mon bassin est douloureux, pris dans un étau. Je dois faire des étirements bien précis, des mouvements que j'ai fini par mettre au point tout seul. De toute façon, aucun kiné n'y peut rien.
La progression est inéluctable.
Le diagnostic le plus sombre est celui de la perte de mobilité de la jambe gauche, une paralysie partielle, voire totale. Les nerfs se nécrosent. Je perds peu à peu la sensiblité dans certains orteils du pied gauche.
On vient de rentrer, on a passé six jours sur les sommets en Ariège. 8000 mètres de dénivelée, 90 kilomètres, des sorties de 6 à 8 heures.
Je marche, je cours, je grimpe. Et ce sont les montagnes qui me tiennent debout. Je m'appuie contre elles.
Tant que je mettrai un pied devant l'autre, je n'arrêterai pas. Et si je tombe là-haut et ne me relève pas, le décor me convient.
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C'est toujours là.
- Par Thierry LEDRU
- Le 04/07/2023
- 0 commentaire
Je n'ai rien inventé. C'est toujours là.
Je l'ai vécu et ça me manque.
L’impression qu’il était réfugié dans une grotte close et que l’agitation du monde s’approchait. Il sentit en ouvrant les yeux que les constellations de vie qui couraient en lui se retiraient dans un antre, comme des bêtes craintives cherchant l’obscurité, une cache protectrice où rien ne pourrait les atteindre. Son cœur s’ouvrit pour les accueillir, vaste troupeau de particules animées, condensé pétillant d’énergies volages, il entendit battre dans les secrets de sa poitrine des marées de vie commune, des ressacs puissants qui s’engouffrèrent dans la brèche de son cœur béant.
Là-haut, dans les confins de l’inaccessible, tout était si beau. Ce désir immense de cloisonner le refuge et de se retirer à tout jamais. Rien ne pouvait égaler cette splendeur. Cette clameur irritante qui cherchait à l’atteindre, il n’en voulait plus, cette dispersion agitée, il en avait trop souffert, son cœur y avait perdu son âme, il voulait plonger dans le courant, quitter de nouveau cette enveloppe étroite et se disperser dans le flux.
Il ferma les yeux, de nouveau, et s’abandonna aux visions.
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Patience et détermination
- Par Thierry LEDRU
- Le 01/07/2023
- 0 commentaire
J'attends la réponse de l'éditeur pour l'acceptation ou le refus de TOUS, SAUF ELLE, la suite de LES HEROS SONT TOUS MORTS.
Je n'ai aucune certitude sur la décision finale.
Il y a un personnage que j'aime, tout autant que le peuple dont il est issu : Figueras.
LES HEROS SONT TOUS MORTS : Figueras, un personnage majeur
Il est dans les quatre tomes de la tétralogie. Les Kogis sont aussi présents dans trois des romans de JARWAL LE LUTIN. J'ai envoyé les quatre tomes à la maison d'édition et j'attends, là aussi.
Tout comme j'attends une réponse pour LES EGARES.
Et pendant ce temps, je travaille à l'écriture de RESET, le tome 4 de la tétralogie. Être un auteur, finalement, c'est une passion qui demande beaucoup, beaucoup de patience, de détermination et de détachement.
En tout cas, si la suite de LES HEROS SONT TOUS MORTS est publiée, sa lecture sera indispensable car il s'agit bien d'une suite.Elle courait à en mourir, l’impression qu’elle allait vomir son cœur, un étrange détachement alors qu’elle sentait la mort autour d’elle, une lucidité extrême, comme une conscience décuplée, elle savait parfaitement ce qu’elle devait accomplir mais elle ne parvenait pourtant pas à se libérer de la pesanteur de ses pas, elle devait produire des efforts gigantesques pour avancer de quelques mètres, comme si elle devait se mouvoir dans un espace gluant, un océan invisible qui ralentissait chacun de ses gestes, elle n’éprouvait étrangement aucune peur, juste l’application de ses actes, sans aucune émotion, sans aucune pensée invalidante, malgré le danger, malgré la mort, malgré l’incertitude. Rien. Elle courait au ralenti dans une extrême vigilance. L’impression d’être surveillée, un regard qu’elle n’identifiait pas, une énergie qui coulait en elle, comme un don… Incompréhension.
Le train passa sur un aiguillage et le vacarme la réveilla.
Elle avait vu les yeux étroits qui l’observaient. Des yeux d’Indien.
Elle se frotta le front et s’assit sur le banc, le corps endolori et lourd. Elle leva la tête.
Il était là, face à elle. Son regard scintillant, les prunelles comme deux soleils noirs.
« Tu vois, la peur est encore en toi mais tu es sur le bon chemin. Tu commences à l’accepter et à ne plus lutter contre elle. Plus tu luttes, plus tu la nourris de ton énergie. Un jour, tu comprendras.
-Comment vois-tu tout ça ?
-Je ne le vois pas. Je le sens. Vous, les Blancs, vous passez votre temps à regarder avec vos yeux et c’est pour ça que vous ne voyez rien. Écoute, respire, touche, et retourne tes yeux vers l’intérieur. Là, tu pourras apprendre. Mais surtout, bien plus important que tout, arrête de penser quand ça ne sert à rien. Tu manges quand tu as faim, tu bois quand tu as soif, tu dors quand tu es fatiguée, tout cela est nécessaire parce que ton corps en a besoin. Fais la même chose avec ton esprit, apprends à penser quand c’est nécessaire. Là, tu pourras saisir la réalité. Sinon, tu l’étouffes. »
Ces leçons de vie dans un vieux train de Colombie, face à un Indien qui lui parlait comme s’il la connaissait depuis son enfance. Un million caché sous son gilet en toile. Est-ce qu’il le savait? Que pouvait-il voir ou sentir? L’odeur de l’argent? Ou l’odeur de la peur de celle qui le porte…
« Tu vas aller voir Ayuka. Tu lui diras qu’il doit t’accompagner jusqu’aux Kogis. Tu lui diras mon nom. Il ne te posera aucune question, il ne te demandera pas d’argent.
-Je vais bien le payer quand même ?
-Oui, mais c’est toi qui décideras de la somme. Une toute petite part de tout ce que tu transportes. »
Elle le fixa et baissa les yeux. Certaine d’avoir retenu son souffle sans le vouloir, un coup au ventre, comme s’il venait d’ouvrir la sacoche et de répandre les billets sur le sol.
« Vous avez inventé les trains et les moteurs, vous avez fait voler des avions, mais vous ne savez pas voyager à l’intérieur de vous. Alors, vous ne pouvez rien savoir des autres. Pour celui qui sait lire les âmes, tout ce qui est en vous est visible parce que ça ne vous appartient pas, tout vous échappe. Et vous croyez en plus que vous pouvez mentir aux autres. C’est à vous que vous mentez. Je ne sais pas lire les mots et les hommes qui sont allés à l’école me méprisent. Mais ils ne savent lire que les mots et ce savoir les aveugle jusqu’à ne rien savoir d’eux-mêmes. »
Elle ne savait pas répondre. Une telle ignorance. Cette impression d’être une enfant devant un Maître et de découvrir soudainement l’immensité des espaces à parcourir. Elle courait sur les montagnes du monde et ne savait rien de ce qui la constituait, de ce qui émanait d’elle, de ce qui était perceptible.
Et c’est pour cela qu’elle avait peur.
Une évidence.
Nous ne pourrions vivre en paix, les uns avec les autres, qu’avec une connaissance absolue de nous-mêmes.
Figueras était en paix. Une paix qui semblait l’envelopper comme si l’espace intérieur ne suffisait plus, comme si cette énergie bienfaitrice éprouvait le désir des autres, comme s’il fallait propager cette lumière. Le soleil noir de ses pupilles. Et ce sourire bienveillant sur son visage, rien de connu, comme un amour diffusé, elle se sentait enlacée.
Il lui raconta son enfance dans les montagnes, les humiliations et les spoliations, la misère existentielle des Indiens qui avaient perdu leurs racines, attirés par des illusions fatales, il parla de ses luttes, de son engagement, des enseignements qu’il avait reçus. Il avait vécu une nuit une intuition d’une force immense, une révélation sublime qui l’avait bouleversé jusqu’aux larmes. Devenir le ver dans le fruit, rogner de l’intérieur les croyances néfastes des hommes civilisés, sonder les âmes et révéler les failles. Il avait longtemps été animé par un esprit de vengeance, un désir d'affront puis il avait compris, peu à peu, qu’il entretenait dès lors la scission des âmes, que sa mission était souillée par des intentions perverses, qu’il devait lui-même apprendre à tendre son âme vers les autres, à ne pas juger, à ne pas souiller l’intention de la Vie. Sa colère n’était qu’une citadelle dressée. Elle n’ouvrait pas les enceintes des âmes rencontrées. Il avait sombré pendant de longues saisons, comme rongé par un Mal insaisissable, un poison qu’il avait mis longtemps à identifier. Il avait dû connaître l’effondrement pour apprendre à aimer.
« Je te remercie infiniment Figueras. »
Elle ne savait pas parler d’elle et elle comprit avec une violence soudaine que son ignorance intime, que cette méconnaissance des méandres intérieurs l’avait privée des plus belles flamboyances, qu’elle n’avait toujours été qu’une âme perdue cherchant frénétiquement des ancrages existentiels. Elle courait depuis des années pour une reconnaissance extérieure. Comme si une ombre pouvait se remplir, comme si les regards reçus pouvaient suffire à combler les vides.
Un Indien venait de lui parler de son âme et elle ressentait désormais en elle un vide incommensurable.
« Ne te juge pas, reprit Figueras. Ta colère contre toi ne serait qu’une condamnation. Réjouis-toi simplement de savoir désormais qu’il te reste beaucoup à apprendre. Reconnais simplement que tout est déjà en toi. Mais simplement que tu ne le savais pas. Simplement. Tu vois l’importance de ce mot ? Lorsque les choses que tu vis te semblent compliquées, c’est que tu n’es plus reliée à la Vie. Le réel problème n’est pas ce qui survient mais la façon dont tu le perçois. Un jour, tu comprendras. »
Elle raconta ses courses en montagne, la découverte de ses qualités physiques, ses premières compétitions et la fierté qu’elle éprouvait, les premiers sponsors et l’entraînement acharné qu’elle devait supporter, la pression de plus en plus forte et ce sentiment de gâchis au sommet du Kilimandjaro.
« C’est bien, écoute bien tout cela. Et réjouis-toi. »
Elle ne comprenait pas d’où venait cette impression qu’il souriait en permanence alors que rien sur son visage ne l’indiquait. Une neutralité totale. Et pourtant, cette joie qui l’inondait. Elle en éprouva de la gêne. Comme un lien physique qu’elle ne commandait pas. L’impression d’être reliés, non pas d’elle à lui, mais comme deux énergies compatibles, un flux sans matière, une reconnaissance cellulaire.
« Quand tu sauras lire en toi, tu comprendras ce que les autres portent. »
Il lui raconta encore la vie de ses ancêtres, la communion avec la Nature, l’hommage rendu à chaque élément de la Terre Mère, la vie des enfants dans les tribus, les explorations spirituelles par le travail solidaire et les jeux, l’apprentissage des connaissances ancestrales, des ancrages qu’il honorait chaque jour, un respect immuable qui nourrissait ses cheminements. Les enfants recevaient des racines qui leur donnaient des ailes.
Elle songea aux enfants de l’Ancien Monde, les ailes rognées de leurs âmes, leurs racines empoisonnées par une Histoire immonde, ces tombereaux de morts et de massacres, ces peuples exterminés et ces génocides orchestrés par des Puissants avides de richesses et de pouvoir. Rien n’avait changé. Les justifications avaient pris des tournures honorables mais les intentions restaient les mêmes. Les petits d’hommes recevaient en héritage des avenirs prémâchés, une pâte infestée par des esprits pervers, des égrégores toxiques qui les condamnaient à une imitation formatée.
Elle réalisa soudainement que son projet était dérisoire. L’intuition que son désir consistait à emballer dans du papier cadeau des charniers infinis. Elle sentit une boule gonfler dans sa gorge, comme si la révélation l’empêchait de respirer, toute la beauté du don envisagé périssait sous les assauts impitoyables de la réalité. Peut-être même portait-elle dans ce projet, le désir de soulager sa conscience. Mais que pouvait bien représenter l’argent dispensé dans des âmes violées par des siècles d’outrages?
L’impression que tout cela allait voler en éclat.
Elle regarda Figueras. Il ne la quittait pas des yeux, comme attentif à des messages sans paroles, percevant des pensées insoumises.
« Tu auras tes réponses quand elles seront nécessaires », avança-t-il en souriant pour de bon.
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SOLARIS
- Par Thierry LEDRU
- Le 30/06/2023
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SOLARIS
Un film de Steven SODERBERGH (2002)
Avec Georges CLOONEY, Natasha McElhone
Je ne suis aucunement passionné par les films de science fiction. Mais le titre SOLARIS m'avait intrigué.
J'avais vu, il y a longtemps, la version d'Andreï TARKOVSKI que j'admire profondément. Des films qui m'ont considérablement marqué. ANDREÏ ROUBLEV, LE SACRIFICE, NOSTALGHIA, LE MIROIR et l'immense STALKER.
STALKER d'Andreï Tarkovski (lien)
C'est donc avec une certaine appréhension que je me suis lancé dans la version de SODERBERGH.Et j'aurais eu tort de ne pas dépasser mes craintes car ce film est, pour moi, absolument magique, magnifique, d'un esthétisme et d'une puissance émotionnelle indéniable.
C'est avant tout une histoire d'amour, une histoire de science fiction, au premier abord mais ce n'est pas ainsi que je le vois, bien que la majeure partie du film se déroule dans une station spatiale, aux abords de la planète SOLARIS.
Chris Kelvin (Georges CLOONEY) est un psychologue envoyé en urgence dans la station Prometheus, à la suite d'un message reçu par un des astronautes s'y trouvant, un message très énigmatique qui semble contenir une menace.
Dès son arrivée, il découvre des traces de sang dans les couloirs.
L'astronaute qui avait contacté Chris s'est suicidé et Chris cherche à comprendre ce qui se passe dans la station.
L'ambiance est lourde et on peut s'attendre à une suite horrifique. Il n'en est rien, absolument pas. Je n'aurais pas tenté de le visionner si je n'en avais été convaincu, à moins que Soderbergh ait totalement renié l'oeuvre de Tarkovski, ce que je ne pouvais imaginer au regard du profond respect que lui portent les grands réalisateurs.
Chris rencontre Snow ( Jérémy DAVIES, informaticien, impressionnant dans son jeu) et Gordon (Viola DAVIS, médecin, tout aussi parfaite).
Aucun de ces deux personnages ne donnent d'explication à la menace qui pèse dans la station.
La quasi totalité du film tournera autour de quatre personnages et un mystère semblant émaner de la planète SOLARIS.
Dès la première nuit, Chris rêve de sa femme, de leur rencontre, de leur approche, de l'émergence de leur amour et à son réveil, Rehya (Natasha McElhone, absolument magnifique, superbement filmée) est à ses côtés. Sauf que Rehya, sur Terre, est morte.
Et à partir de là, le film bascule dans le paranormal et nous entraîne dans une réflexion profonde, troublante, puissante sur le poids du passé, de la culpabilité, de la puissance du sentiment amoureux, de l'impact des souvenirs sur le présent, de la frontière entre la folie et la raison.
La musique du compositeur Cliff MARTINEZ est d'une qualité sans égale. Elle m'a fait penser à un compositeur, LOSCIL, que j'aime infiniment. Une musique aucunement angoissante, ni stressante mais qui développe une aura de mystère tout en étant parfois contemplative, méditative, particulièrement lorsqu'on voit la planète SOLARIS par un hublot.
SOLARIS aurait donc la capacité à matérialiser les souvenirs les plus intenses et cela expliquerait l'apparition parfaitement « naturelle » de Rehya.
Gordon, le médecin, prévient, à maintes reprises Chris que Rehya n'est pas humaine mais celui-ci ne peut pas l'admettre et, après un déni complet à sa première rencontre avec la "réincarnation" de sa femme, s'enfonce dans le bonheur de ces retrouvailles miraculeuses.
Il n'est pas question de dévoiler la suite.
Le film oscille entre flash-back et situations présentes dans la station. On découvre peu à peu toute l'histoire de ce couple, tragiquement détruit.
La mise en scène, le jeu des acteurs et actrices, la beauté visuelle, la lumière, les prises de vue, tout est à mon sens parfait, énigmatique et beau, étrange et émouvant.
On pourrait dire qu'il ne se passe rien, que le scénario est creux, vide, sans aucune surprise. Il n'y a pas pléthore d'effets spéciaux, pas de monstre, pas de combat, pas de cascades, pas de rebondissements inattendus et pourtant, pourtant, il m'était impossible de décrocher .
Comme si SOLARIS, la planète, m'avait moi aussi phagocyté...
Le mystère de cette réincarnation, Rehya, tout aussi vraie que nature, mais malgré tout en proie à une totale incompréhension de ce qu'elle est réellement, est un fil conducteur qui ne peut être rompu. (Natasha McELHONNE m'a fortement impressionné, elle est belle, fragile, émouvante, rayonnante, désemparée). Tout autant que la perdition progressive de Chris (excellent Georges CLOONEY) qui vit dans cet amour retrouvé une deuxième chance qu'il refuse de rompre. Des premiers jours où il rejette, rationnellement, cette incarnation incompréhensible à sa totale adhésion, on suit son cheminement intérieur, la progression des sentiments qui finissent par l'emporter sur la raison.
Se pose dès lors le fond de l'histoire.
Et là, il ne s'agit que de mon interprétation.
La présence du passé en nous, des traumatismes, des regrets, des remords, de la culpabilité, de la honte, de la colère, de l'incompréhension, de tout ce qui peut rester ancré et nous tourmenter, est-ce donc possible que ça soit si puissant, si intense que le présent s'en trouve modelé, transformé, sculpté, jusqu'à nous égarer, jusqu'à nous priver de notre bon sens, de notre instinct vital à nous protéger de la folie ? Car si nous ne sommes plus là, inscrits dans le temps présent, c'est que nous ne sommes plus nulle part et que nous avons sombré dans un espace temps qui relève peut-être de la folie.
Il pourrait en être ainsi du futur mais le futur n'est pas émotionnel puisqu'il n'a pas été vécu. Il est toujours possible d'imaginer des émotions mais elles n'auront évidemment pas l'impact que peuvent avoir les émotions vécues dans le passé.
Le passé, on le sait tous, existe en nous au regard des émotions que nous y avons connues. Sans ces émotions, le passé disparaît. Mais dans le cas de l'amour, de l'amour flamboyant, l'amour ultime, l'amour sublime, il est impossible que les émotions s'effacent. Ou alors, il ne s'agissait pas d'amour mais de la croyance de l'amour.
Par conséquent, Chris, en retrouvant sa femme décédée, malgré l'impossible compréhension du phénomène, retrouve la puissance de l'amour, l'énergie vitale, le fondement même de l'existence de tout. Et sa raison vacille, emportée par le flot surpuissant des émotions réanimées.
Quelle est donc cette planète capable de tels phénomènes ? Doit-on la chercher quelque part dans l'Univers ? Ou est-elle plus simplement en nous, dans les méandres de notre cortex ?
L'amour est-il donc une forme de déraison, une déraison délicieuse qui serait pourtant à la source même de la vie ? La vie, ici représentée par SOLARIS, cette planète capable d'offrir une deuxième chance à l'amour, recréant à travers les émotions les plus intenses le sens même de l'existence, nous démontre-t-elle que la raison est une limite qu'il faut repousser ?
Peut-être.
Mais un des quatre personnages va également nous montrer que cette déraison délicieuse peut conduire à des extrêmes qui ne sont pas recevables. Le fil du rasoir est tranchant...
Et puis vient la fin de l'histoire.
Et les dernières paroles prononcées.
« Tout nous a été pardonné. »
A chacun et chacune d'en comprendre le sens et de réaliser à quel point ce pardon qu'on s'accorde est une véritable guérison.
Un film dont je garde une multitude d'images, une floraison d'émotions, une infinité de réflexions que je ne peux toutes révéler au risque de spoiler.
Ce qui serait déraisonnable.
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"Le grand pouvoir du Chninkel"
- Par Thierry LEDRU
- Le 26/06/2023
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Le grand pouvoir du Chninkel | Van Hamme, Rosinski | 1988
Le grand pouvoir du Chninkel, intégrale noir et blanc @ 1988 Casterman, Jean Van Hamme, Grzegorz Rosiński
Ce volume contient :
- Le Commandement
- Le Choisi
- Le JugementFiche de lecture
Daar est un monde en guerre perpétuelle, menée par les Trois Immortels qui s'affrontent à chaque croisée des Soleils. J'on, un Chninkel, petit être de la taille d'un lutin, est chargé par U'n, le maître créateur des mondes, qui lui apparaît sous la forme d'un grand parallélépipède noir (référence à Kubrick), de rétablir la paix sur Daar, faute de quoi la planète sera engloutie dans une apocalypse de feu. Afin que J'on puisse réussir, U'n lui confie le « Grand Pouvoir », sans toutefois en préciser la nature.
J'on est un anti-héros, un être qui n'a d'autre désir que de vivre en paix, caché et si possible avec une compagne aimant autant que lui les étreintes amoureuses.
Les péripéties de J'on commencent donc après cette rencontre avec le monolithe et diverses rencontres se succèdent, dont G'wel, dont il tombe amoureux quand elle ne voit en lui que le « Choisi » dont parlent les prophètes et qui doit délivrer son peuple de l'asservissement. (Source : Wikipédia)
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J'ai lu la version en noir et blanc, version originale, puis la version colorisée, qui à mon avis dessert la puissance de l'histoire. Le monde du Chninkel est un monde brutal, sombre, terriblement incertain, un monde où la mort peut frapper sans prévenir. La nature n'y est pas resplendissante mais ignorée.
L'U'n est le Dieu créateur et il est rancunier car, il y a bien longtemps, les Chninkel se sont laissés convertir à la religion créée par N'ôm l'hérésiarque. Jusque-là, les Chninkel vivaient sereinement et la nature les comblait de ses bienfaits. L'U'n a donc envoyé les trois Immortels et ses armées pour propager la barbarie, le sang, la mort, la souffrance, l'esclavage.« Du Sep venait Barr-Find Main Noire et la masse écrasante de ses légions d'airain. Brutes sans visage, bardées de fer, juchées sur leurs pesants Womochs cracheurs de feu.
De L'Hor fondait Jargoth le Parfumé et l'escadre mortelle de ses archers volants. Cruels androgynes, fendant les airs sur les voiles végétales des Orphyx carnivores.
Du Far se ruait Zembria la Cyclope et la horde déchaînée de ses amazones borgnes. Féroces guerrières à la paupière cousue, emportées au massacre par le galop d'acier de leurs Traganes sauvages. »
Dans sa quête, J'on va rencontrer un sage, sous la forme d'un arbre immense, Sualtam.
Sualtam apprend à J'on qu'avant la guerre, les Chninkel étaient maîtres de Daar, mais que, pour avoir vénéré des idoles à la gloire d'un de leurs rois, N'ôm l'Hérésiarque, ils avaient été punis par le maître créateur à être réduits en esclavage par trois nouvelles races chacune commandée par un Immortel.
Afin de connaître l'avenir, J'on va ensuite trouver Volga la Devineresse qui, en plus de le dépuceler, lui crie une nouvelle prophétie : « La paix reviendra... Quand les trois s'uniraaaaah... »
Il est clair pour moi que nous sommes là dans une critique des trois religions monothéistes. L'U'n, c'est le « Deus sive natura » de Spinoza. Les Chninkel se sont détournés de cette voie naturelle en adoptant une religion adorant chacune « leur » Dieu. »
Les références au Nouveau Testament sont évidentes : le Messie (le Choisi), la Cène avec les Anciens, gardiens séniles de la parole divine, la trahison par un proche, la crucifixion.
Il ne s'agit aucunement de prosélytisme, bien au contraire... Car l'U'n se révélera un Dieu si rancunier qu'il ne tiendra aucunement la promesse faite à J'on.
La fin du récit assène une claque monumentale et un tombereau de réflexions infinies, un trouble profond. Car c'est de nous, humains, dont il s'agit.
Une œuvre très actuelle par conséquent. Il ne s'agit plus d'imaginer que les trois religions monothéistes s'uniront mais que l'homme, d'où qu'il soit, prendra enfin conscience que la Terre est divine puisqu'elle dispense la vie. Nous sommes très loin encore de cette conscience universelle. Si tant est qu'elle arrive un jour.
Voilà pour le fond, tel que je l'interprète, ce qui bien entendu, n'est aucunement une vérité.
Quant à la forme, je la classe dans les œuvres magistrales de la bande dessinée.
Dix lectures ne feront pas le tour de tout ce qui s'y trouve.