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  • Requiem pour Âmes d'Ombre | Jean-Michel Archaimbault | 2011

     

    Requiem pour Âmes d'Ombre | Jean-Michel Archaimbault | 2011

    Requiem pour Âmes d'Ombre | Jean-Michel Archaimbault | 2011

     

     

    Ces textes ne sont pas que des écrits. Ce sont également des œuvres musicales.

    Il m'est arrivé au moment où je tournais une page de prendre conscience que je ne savais pas de quoi parlait ce que j'avais lu. Car au-delà du récit, j'étais subjugué par la beauté de la musique.

    Je sais que Jean-Michel Archaimbault est féru de musique classique. Personnellement, je n'y connais rien, au point que je ne suis pas certain de citer dix œuvres et leurs compositeurs. Mais j'aime la musique, une autre musique. Et je sais que certaines m'emportent, littéralement, dans un autre espace, une absence de pensées, une réjouissance sensorielle.

    Voilà ce qui m'est arrivé, à maintes reprises, en lisant les textes de ce recueil. Je ne lisais pas, j'écoutais. Je me délectais de la parfaite association de mots, de l'exquise mise en forme, de la richesse du vocabulaire, tout cela mixé dans un concerto permanent. Mais, dans cet état-là, je ne pense pas, je n'en perçois même aucune tentative, elles sont refoulées par la puissance émotionnelle. Je ne suis pas un cerveau qui lit mais un organisme récepteur constitué de fibres, de chair, de sang, de nerfs, de ligaments, de particules, d'atomes et jusqu'à l'infini petit de cet organisme, la musique m'envahit.

    Voilà pourquoi, parfois, au moment où je tournais la page, je réalisais que je devais relire. En n'écoutant pas la musique.

    Je ne saurais donner un palmarès entre cette magnifique musique et les histoires elles-mêmes parce qu'elles sont bien évidemment indissociables. L'une nourrit l'autre. Un autre auteur ne possédant pas la musique n'écrirait peut-être rien de bon avec ces histoires. Non pas qu'elles n'ont pas d'intérêt, loin de moi cette idée, mais elles n'existeraient pas de la même façon, avec la même pureté, avec cette âme.

    Ces textes sont habités. De l'âme de l'auteur et de tous les êtres dont il a croisé la route ou de tous les êtres qu'il s'est efforcé de rencontrer en empruntant des routes inconnues. Des voies oniriques ou des rêves éveillés, des imaginations si fortes qu'elles arrachent leur possesseur à la réalité. Et il est très délicat de parvenir à saisir le seuil entre ces deux mondes. Les espaces sont fluctuants, des éclaireurs ont l'habitude de pousser des explorations déconcertantes dans le territoire voisin. Conscient et subconscient ne sont pas deux entités séparées, elles s'entremêlent, elles s'attirent et se repoussent, elles se fuient et se recherchent.

    Je pourrais penser que Jean-Michel Archaimbault vit entre deux mondes.

    Le monde contemporain et le monde du futur. Mais également le monde contemporain et le monde de l'enfance.

    SEENTHA, un roman de l'auteur, reliait notre époque à des mondes lointains, non seulement dans la distance mais également dans le temps. A des millions d'années lumière et dans des millions d'années.

    SEENTHA de Jean-Michel ARCHAIMBAULT

    Ce REQUIEM POUR AMES D'OMBRES relie le monde adulte et le monde de l'enfance. Un monde empli d'émotions, le monde parallèle de l'imaginaire. Et je me suis vu dans ces récits, plus d'une fois. Le texte « les angles interdits ». Fabuleux récit où j'étais là, c'était moi. Je l'ai vécu cette émotion-là, cette peur du lieu étrange, de l'intuition du danger, de cette précognition merveilleuse que tout enfant va devoir abandonner devant les coups de boutoir de la rationalité.

    Jean-Michel Archaimbault n'invente rien, c'est ça qui est fabuleux. Il ne peut pas inventer ça et le raconter aussi bien. Quand j'ai cette idée-là en tête, je sais que je suis en présence d'un très bon texte, pour moi.

    Je sais ce dont j'ai besoin pour qu'une lecture m'emporte : qu'il s'agisse d'un film, que je sois transporté devant un écran et que je ne me sente plus lire parce que je suis totalement absorbé et nourri par la puissance des images. Il y a la musique, la mise en scène, le jeu des acteurs, le montage, la qualité de la lumière dans les scènes descriptives, la justesse des dialogues, le plaisir délicieux de la voix off, la beauté des paysages, la finesse de leur observation.

    Voilà, je suis au cinéma et quand je ferme le livre, je le pose et j'attends, le temps qu'il faut, que la salle se vide et que je retrouve le silence pour écouter à nouveau la musique des mots et leur enchantement.

    « L'inconnu sur la Terre » de Le Clézio ou « L'enfant et la rivière » de Bosco, voilà où j'étais dans les descriptions de la nature. Parfois magiques, parfois inquiétantes, les natures vivantes de l'auteur sont fines, précises, visuelles, immensément visuelles. On en sent tous les parfums.

    « Les angles interdits »

    extrait :

    À quelques mètres, sous les deux très gros tilleuls qui ombrageaient la façade de l'extension récemment adjointe au pavillon, il y avait un puits. Je ne risquais pas de m'en approcher de trop près, ni de séjourner trop longtemps dans les parages. L'endroit avait été décrété dangereux, mortel, par les adultes de la famille. Dans le puits habitait la Vieille, une créature noire, redoutable et affamée dont j'étais convaincu qu'elle m'attraperait si je passais à portée de ses longs bras aux mains crochues. Tout le monde était donc rassuré, je ne tomberais pas dans ce trou d'eau froide. »

     

    « Lady D'arbanville »

    extrait :

    J'avais erré sans but, à l'heure du crépuscule, sur les vastes terrasses au-dessus des jardins délaissés. Jadis, en pleine vigueur, leurs profusions de plantes et d'essences s'emmêlaient en un tapis chaotique et moribond, déroulé en pentes lasses jusqu'à la rivière en contrebas.

    Fait exceptionnel, il ne pleuvait pas.

    Loin d'ici , sur l'autre berge, par-delà l'îlot minuscule qui portait encore les ruines d'une très vieille tour, les lumières tremblantes de la cité coloraient de soufres oppressants les éternels nuages lourds qui ne se dissipaient plus, même lorsque des vents furieux tentaient de les entraîner dans leurs colères. Ce soir, le ciel grisâtre affichait par endroits des nuances diaprées, subtilement mouvantes. Le phénomène, aussi fascinant qu'inédit, était d'observation assez récente. »

    Une particularité qui m'a frappé, c'est cette qualité de l'auteur à décrire la réalité et le monde imaginaire en les ajustant si adroitement qu'il est parfois difficile de savoir quand le récit vient de basculer dans l'un ou dans l'autre.

    On ne sait plus où on est et c'est magique.

    Le monde intérieur de Jean-Michel Archaimbault a des horizons magnifiques et des lieux secrets, des espaces lumineux et des zones d'ombres, des zones d'ombres emplies d'âmes.

     

     

     

    https://www.legaliondesetoiles.com/Requiem-pour-Ames-d-Ombre--Jean-Michel-Archaimbault--2011_a4768.html

    Requiem pour Âmes d'Ombre | Jean-Michel Archaimbault | 2011

     

     Un article ajouté/rédigé par  | 29/08/2022 | Lu 304 fois


     

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    Requiem pour Âmes d'Ombre | Jean-Michel Archaimbault | 2011

    Requiem pour Âmes d'Ombre | Jean-Michel Archaimbault | 2011

    Je « L »’avais repéré, voici déjà quelque temps. La convention SF de 2022 à Bergerac ayant été l’occasion de revoir Jean-Michel Archaimbault, j’ai bondi sur ladite occasion pour m’emparer de ce recueil et le faire dédicacer puisqu’il promettait de me faire découvrir une autre facette – plus sombre ? plus étonnante ? – de l’auteur. Dans la foulée, je me jurais – croix de bois, croix de fer – d’en écrire la « critique » qui s’imposait à moi.

    J’avais alors le mince espoir que les textes ne m’emporteraient pas autant que l’avais fait Seentha, SF-Opera baroque et flamboyant qui m’avait tellement envoûté que je m’étais retrouvé incapable d’en parler correctement.

    Évidemment, l’espoir était ridicule… mais, car il y a un « mais » et il n’est pas des moindres donc : parce qu’il s’agit là de nouvelles, il est vite apparu qu’il serait plus facile d’en écrire les retours, et ce non pas à pas, mais presque.

    J’attendais un changement de registre, de ton, de point de vue, devinant, et par le titre et par cette sombre couverture, que je ne devrais pas être déçu. Ce qui fut le cas.

    Lire la suite de l’article de J.C. Gapdy pour le Galion des Etoiles :

    Requiem pour Âmes d'Ombre | Jean-Michel Archaimbault | 2011 (legaliondesetoiles.com)

  • Amour et liberté

    Un meurtrier ne tue pas par méchanceté mais parce qu’il aime les impulsivités qui le domine, parce qu’il aime les actes dans lesquels il se retrouve, dans lesquels il se sent exister. Sa victime n’est pas un ennemi mais l’opportunité de s’aimer davantage.

    Un militaire peut tuer par amour pour sa patrie, par amour pour les ordres, par amour pour les armes, par amour pour les idées qui le conditionnent.

    Les marins d’un baleinier tuent par amour pour l’argent.

    Les politiciens mentent par amour du pouvoir.

    Les dictateurs tuent par amour d’eux-mêmes.

     

    Nos actes sont en grande partie générés par cet amour que nous nous portons. Amour pour nos idées, nos passions, nos obsessions, nos certitudes, amour de la confrontation, toujours ce désir de convaincre… Tout est porté par cet amour pour nous-mêmes.

     

    Lorsque nous aimons une autre personne, ne cherchons-nous pas en priorité à recevoir ce qui nous conforte dans cet amour narcissique ? Que l’autre en vienne à ne plus apporter cette nourriture égotique et nous le repousserons. Et si l'amour est vraiment là et qu'il reste à s'en réjouir, il convient d'accepter l'idée que même celui qui aime l'autre, aime ce qu'il fait et s'aime à travers cet amour qu'il donne. Il ne s'agit nullement d'une critique ou d'une présentation qui se voudrait cynique et désabusée. Pour moi, il n'y a rien de néfaste dans cet état de fait. C'est juste une réalité.

     

    Nous sommes des toxicomanes de l’amour propre. Cet amour qui nous forme, qui nous identifie, qui nous remplit, qui nous conditionne. Personne d’autre que nous n’en est responsable. Personne d'autre que nous n'est à même de travailler sur cette affliction... Encore faut-il l'admettre. 

     

    L’état de la planète, l’état de l’humanité ne sont-ils pas les reflets de cet amour personnifié, individualisé, détourné ?

    Nous avons appris à aimer ce que nous portons, appris à respecter les valeurs que nous avons reçues. Il ne s’agit que d’amour et nous aimons ce fonctionnement.

     

    Ne devrions-nous pas apprendre à ne plus aimer ?

    Cet ego qui fait qu’un industriel n’ira jamais contre son amour et sa fascination pour l’argent, le pouvoir, sa capacité à transformer la matière en valeur ajoutée, sans aucune considération pour l’équilibre ou le respect de la vie, cet amour qu’il porte et qui détruit, la solution ne serait-il pas de l’en priver ?

    Mais c’est évidemment impossible… Le mal est fait et c’est pour son bien. Pourquoi s’en priverait-il ?

    Alors ne devrions-nous pas apprendre à nos enfants à ne pas aimer ?

    L’expression est trop effroyable…

     

    Alors c’est qu’il faut aimer autrement.

    Ou commencer à aimer vraiment.

    Il ne s’agit pas de s’aimer soi mais d’aimer ce qui vit en soi. Et dès lors, cet amour devient universel puisque ce qui vit en soi vit de la même façon où que je sois.

    L’industriel ne pourrait plus détruire ce qui est en lui.

    L’enfant ne pourrait plus détruire gratuitement la vie de cette plante qu’il arrache.

    L’agriculteur ne disperserait plus d’engrais chimiques au cœur de la vie qui est en lui.

    Les Amérindiens connaissaient cet amour. Nous n’y avons vu que des « sauvages. » Les Aborigènes, les Inuits, les Tchouktches, les Lapons, les Mentawais, les Kogis… Nous les exterminons à travers la mondialisation car ils sont les images maintenues de notre violence et c’est insupportable à contempler.

     

    Nous ne sommes que des images multiples de la vie. Nous n’existons pas individuellement autrement que sous la forme d’images. La source est commune, les gouttelettes sont innombrables.

    Nous avons appris à aimer les gouttelettes jusqu’à oublier l’océan. Et chaque gouttelette, lorsqu’elle en vient à n’aimer qu’elle, porte en elle la destruction de l’océan, son assèchement.

     

    Nous ne savons pas aimer parce que nous sommes enfermés dans notre amour pour nous-mêmes.

    Beaucoup pensent qu'il s'agit de liberté.

     

    "La vie en société me permet de vivre comme je l'entends, dans le respect des lois et ça me convient."

     

    Mais il n'y a pas eu de choix. Le lieu de naissance ne nous appartient pas. Tout ce que nous connaissons dans notre début d'existence conditionne la suite, c'est inévitable. Nous nous adaptons à notre geôle originelle. Et il arrivera même un moment de l'existence où la personne sera en mesure, si tout se passe pour le mieux, de quitter ce lieu, d'aller chercher une autre terre, voir si c'est plus vert ailleurs. C'est une liberté que certains n'ont même pas. A moins de risquer sa vie.

    Nous sommes donc libres, selon la majorité. 

    Nous sommes libres par exemple de prendre l'avion pour aller passer les fêtes de fin d'année dans un pays exotique. Juste un exemple de tout ce que notre liberté nous autorise. Et tout est pour le mieux puisque j'en suis heureux. Cela signifie donc que notre liberté de nous comporter comme bon nous semble, dans la limite des lois, n'induit aucune restriction quand il est pourtant évident que cela porte atteinte à tous, c'est à dire à la Terre et au clan.

     

    "Les Kogis ne prennent pas l'avion.

    -Oui, mais ce sont des sauvages qui se contentent de leurs montagnes. Ils ne voient pas l'intérêt de voyager. 

    -Si, ils voyagent, ils se déplacent même beaucoup, mais à pied.

    -Ils vont à pied parce qu'ils n'ont pas les moyens de prendre l'avion. Ils ne sont pas libres de faire tout ce que nous on peut faire.

    -Ils sont libres autrement."

    Etc etc etc... Discussion sans fin.

     

     

    Un iceberg fondu n’a pas disparu, il a juste réintégré la source.

    C’est cette disparition qui nourrit notre peur. On apprend aux enfants à se lancer dans le monde comme autant de gouttelettes uniques. L’erreur est effroyable et il y a parmi eux les futurs industriels, les futurs baleiniers, les futurs financiers, les futurs politiciens, les futurs assassins, tous ceux qui vivront dans l’hallucination de leur amour pour eux-mêmes.

     

    L’humanité ne connaîtra l’amour que lorsqu’elle aura disparu dans l’océan d’amour pour la vie.

    Ça prendra le temps qu’il faudra. Et si l’humanité n’y parvient pas et se condamne, ça n’a aucune importance pour l’océan de vie. Son imagination est sans limite.

    Il ne s'agit donc pas de ne pas s'aimer mais d'aimer ce qui vit en tout.
    Dès lors il est possible et même sain de nous aimer puisque cette vie a jugé bon et sain de vivre en nous.
    Au lieu d'être le point central de notre amour nous en devenons l'élément secondaire mais pourtant indispensable.
     
    Aimer l'océan avant d'aimer la gouttelette. 

  • Alex Honnold : hors catégorie.

     

     

    Pourquoi Alex Honnold se met aussi à la course à pied ?

     

    Alex Honnold

    La rédactionLa rédaction

    28 décembre 2022

     4 minutes

    https://www.outside.fr/pourquoi-alex-honnold-se-met-aussi-a-la-course-a-pied/nocache/

     

    Grimpeur de légende, Alex Honnold s’avère être un coureur aussi rapide que discret. Son dernier exploit en date ? La HURT (Honnold Ultimate Red Rock Traverse), un challenge combinant 56 kilomètres, 23 sommets, 14 ascensions, pour plus de 7000 mètres de dénivelé positif en un peu plus de 32 heures. Interviewé par Outside, il dévoile comment et pourquoi il combine performance extrême en escalade et course à pied.

    « Je n’ai jamais été un grand coureur », nous avoue Alex Honnold, 37 ans. Certes, son niveau en la matière n’égale pas ses performances en escalade, son sport de prédilection, mais il est tout de même venu à bout de deux marathons et deux 50 km. En novembre dernier par exemple, le grimpeur a couru les cinquante kilomètres du Red Rock Canyon, terminant à la cinquième place, en 5h23. Un ultra organisé dans le Nevada, aux Etats-Unis, autrement dit, pratiquement dans son jardin. De quoi faciliter la logistique, surtout avec un bébé à la maison.

    « Courir, c’est facile » détaille le grimpeur. « Parce que tu peux couvrir très rapidement une grande distance, le tout de façon relativement décontractée ». Bien sûr, courir est facile. Surtout si on compare ça à l’ascension, en solo intégral, d’El Capitan, le plus gros monolithe d’Amérique du Nord.

    En octobre dernier, Alex Honnold a bouclé la HURT (Honnold Ultimate Red Rock Traverse, plutôt bien nommée : « Hurt » signifiant en anglais « faire/avoir mal ») ), un challenge stupide qu’il a concocté lui-même en combinant 56 kilomètres, 23 sommets, 14 ascensions, pour plus de 7000 mètres de dénivelé positif en un peu plus de 32 heures, près de chez lui, du côté de Las Vegas. La course étant plus pour le grimpeur un moyen de couvrir rapidement de longues distances qu’un outil d’entraînement destiné à l’escalade.

    « Ce n’est tout simplement pas très utile pour progresser en escalade, parce que ça fatigue beaucoup », nous confie-t-il. Sans compter que « juste après avoir couru, je grimpe très mal « . Voilà qui nous rassure : Alex Honnold lui aussi a des limites !

    « C’est un mouvement tellement fondamental »

    Mais le grimpeur n’a jamais oublié ce que lui a confié un jour Corand Anker, son ami avec lequel il grimpe aussi parfois : l’alpiniste mettait un point d’honneur, à l’époque où ses enfants étaient encore jeunes, de courir un ultramarathon et de gravir El Capitan (le grand mur de 1000 mètres dans le parc national du Yosemite) une fois par an. Un défi personnel qu’Alex interprète comme un bon indicateur de condition physique de base. Rappelons tout de même qu’en escalade, il s’agit d’un objectif pour lequel la plupart des grimpeurs s’entraînent pendant des années et qu’en course à pied, seul 0,03% de la population américaine atteint !

    Pour s’entraîner dans la perspective de sa longue traversée, Alex Honnold s’est retrouvé plus d’une fois à miser sur le « fast and light », autrement courir aussi légèrement équipé que possible pour gagner en vitesse. Du trail running, quoi. Une étiquette qui passe carrément au-dessus de la tête du grimpeur car pour lui, ce qui compte, c’est l’efficacité. « En fait, si je courais aussi vite, c’était souvent pour rentrer à temps dîner à la maison », se souvient-t-il. « La perspective d’un bon repas a d’ailleurs motivé la plupart de mes performances ! « , dit-il en riant.

    « J’ai toujours eu beaucoup de respect pour les coureurs et la course en général », souligne-t-il. Il regrette d’ailleurs de ne pas avoir pris l’option athlètisme au lycée, elle lui aurait sans doute donner une meilleure base en aérobie, confie-t-il. . « Le mouvement de la course est tellement fondamental. M’y mettre aujourd’hui est sans doute ma façon de compenser un peu, maintenant que je suis adulte ».

    « J’ai toujours eu la caisse pour marcher en montée toute la journée, mais la course me met vraiment KO »

    Impossible cependant pour Alex d’estimer son volume d’entraînement en course à pied. Tout est fait aux sensations. Etonnant, quand on sait qu’il calcule tout avec précision lorsqu’il s’agit d’escalade. Il garde tout de même une approche générale : 5 à 6 km plusieurs fois par semaine, et quelques sorties à deux chiffres en montagne. occasionnellement un footing pendant les jours où il est en récup grimpe. Tout cela s’est construit sur des années d’entraînement aérobiques non spécifique autour de sa pratique de l’escalade et des marches d’approche en direction des falaises.

    En guise d’entraînement spécifique pour son défi des 50 km, il a fait « une unique sortie longue » sur terrain plat. J’ai toujours eu la caisse pour marcher en montée toute la journée, mais la course me met vraiment KO ». On peut s’interroger si un entraînement plus spécifique ne l’aiderait pas à surmonter ce ressenti, mais cela pourrait aussi nuire à ses performances en escalade.

    Interrogé sur son travail mental, et notamment sur le recours en course à pied à des outils qu’il utiliserait en escalade, Alex Honnold nous a répondu qu’il n’en avait pas vraiment besoin. « Là, il s’agit surtout d’aligner les kilomètres », explique-t-il. Reste que même si la course lui semble relativement facile (par rapport à un solo à des centaines de mètres au-dessus du vide), il admet avoir traversé des moments difficiles pendant ces 50 km. « Je ne peux pas vraiment dire que j’aie l’impression de voler », raconte-t-il. « J’aimerais bien que courir ne soit que joie sans effort, mais non, ce n’est pas exactement comme ça que ça se passe… ”

    Le grimpeur a également appris à utiliser l’équipement de course, notamment les guêtres et les flasques. Mais aussi, sur certaines sorties très verticales, un gilet de course léger ; sans parler des gels et autres collations que connaissent bien les coureurs d’ultra. Cela dit, s’il a bien l’intention de se tenir à son défi annuel « El Cap and Ultra » à la Conrad Anker, ne comptez pas le voir de sitôt au départ de la Western States (161 km, 6000 D+).

    « Je ne courrai jamais sérieusement », précise Alex qui a l’intention de s’en tenir à ses quelques sorties par semaine (au maximum), et ne se montre nullement tenté d’adopter le volume de course nécessaire pour passer la barre des 50 kilomètres.

    Photo d'en-tête : Jimmy Chin

    Thèmes :

  • Wagner, groupe paramilitaire

     

    Cet article-là est juste destiné à montrer combien il est possible de constituer une armée privée, très bien équipée, capable de frapper n'importe où, dans des combats de grande ampleur.

    C'est toujours en rapport avec la tétralogie en cours d'écriture... Je lis beaucoup, beaucoup, beaucoup et je visionne beaucoup, beaucoup, beaucoup. Avant d'écrire. 

     

    Wagner : ce qu'on sait sur le groupe mercenaire russe

    5 avril 2022

    Les forces de sécurité affiliées à la Russie et à la République centrafricaine près du siège du parti de l'actuel président Faustin Archange Touadera à Bangui, en République centrafricaine.

    CRÉDIT PHOTO,GETTY IMAGES

    Légende image,

    Personnel de sécurité russe en République centrafricaine : Le groupe Wagner aurait opéré dans la région.

    Les services de renseignements militaires britanniques affirment que 1 000 mercenaires de la société militaire privée russe, le groupe Wagner, sont en train d'être déployés dans l'est de l'Ukraine.

    Le groupe a été actif au cours des huit dernières années en Ukraine, en Syrie et dans des pays africains et a été accusé à plusieurs reprises de crimes de guerre et de violations des droits de l'homme.

    Lire aussi sur BBC Afrique :

    "Un terrible crime de guerre" : condamnation internationale sévère du "massacre" de civils par des soldats russes

    L'économie russe a jusqu'à présent bien supporté les sanctions, selon The Economist

    L'UE est invitée à traiter les réfugiés africains comme des Ukrainiens

    Comment le groupe Wagner a-t-il été créé ?

    Une enquête de la BBC sur le groupe Wagner a mis en évidence l'implication présumée d'un ancien officier de l'armée russe de 51 ans, Dmitri Utkin. C'est lui qui aurait fondé le groupe Wagner et lui aurait donné son nom, son ancien indicatif téléphonique.

    Il est un vétéran des guerres de Tchétchénie, un ancien officier des forces spéciales et un lieutenant-colonel du GRU, le service de renseignement militaire russe.

    Le groupe Wagner est entré en action pour la première fois lors de l'annexion de la Crimée par la Russie en 2014, explique Tracey German, professeur de conflits et de sécurité au King's College de Londres.

    "On pense que ses mercenaires font partie des "petits hommes verts" qui ont occupé la région", dit-elle. "Environ 1 000 de ses mercenaires ont ensuite soutenu les milices pro-russes qui luttent pour le contrôle des régions de Louhansk et de Donetsk."

    "Wagner recrute principalement des vétérans de l'armée qui ont besoin de rembourser leurs dettes", explique Samuel Ramani, Associate Fellow au Royal United Services Institute. "Ils viennent de zones rurales où il y a peu d'autres possibilités pour eux de gagner de l'argent".

    "Diriger une armée de mercenaires est contraire à la constitution russe", affirme Tracey German, professeur de conflits et de sécurité au King's College de Londres.

    "Cependant, Wagner fournit au gouvernement une force qui est niable. Wagner peut s'impliquer à l'étranger et le Kremlin peut dire : cela n'a rien à voir avec nous."

    Qui finance le groupe Wagner ?

    Certains suggèrent que l'agence de renseignement militaire russe, le GRU, finance et supervise secrètement le groupe Wagner.

    Des sources mercenaires ont déclaré à la BBC que sa base d'entraînement à Mol'kino, dans le sud de la Russie, se trouve à côté d'une base de l'armée russe.

    Les bases Wagner et russes

    La Russie a toujours nié que Wagner ait un quelconque lien avec l'État.

    L'enquête de la BBC, qui a permis d'identifier les liens entre Utkin et le groupe Wagner, a également établi un lien avec Evgeny Prigozhin, l'oligarque connu sous le nom de "chef de Poutine" - ainsi nommé parce qu'il est passé du statut de restaurateur à celui de traiteur du Kremlin.

    De nombreuses sociétés de M. Prigozhin sont actuellement sous le coup de sanctions américaines pour ce qu'elles appellent son "influence politique et économique malveillante dans le monde entier". Il a toujours nié tout lien avec le groupe Wagner.

    Une photo de novembre 2011 montre Evgueni Prigojine (à gauche) assistant Vladimir Poutine lors d'un banquet près de Moscou.

    CRÉDIT PHOTO,REUTERS

    Légende image,

    Une photo de novembre 2011 montre Evgueni Prigojine (à gauche) assistant Vladimir Poutine lors d'un banquet près de Moscou.

    Où le groupe Wagner a-t-il opéré ?

    En 2015, le Groupe Wagner a commencé à opérer en Syrie, combattant aux côtés des forces pro-gouvernementales et gardant également des champs pétrolifères.

    Il est actif en Libye depuis 2016, soutenant les forces loyales au général Khalifa Haftar. On pense que jusqu'à 1 000 mercenaires de Wagner ont participé à l'avancée de Haftar sur le gouvernement officiel de Tripoli en 2019.

    En 2017, le groupe Wagner a été invité en République centrafricaine pour garder les mines de diamants. Il travaillerait également au Soudan, où il garderait des mines d'or.

    Un char appartenant aux forces du général renégat Khalifa Haftar

    CRÉDIT PHOTO,REUTERS

    Légende image,

    Les forces du général renégat Khalifa Haftar en Libye : des membres du Groupe Wagner auraient aidé ses troupes.

    En 2020, la Trésorerie américaine a déclaré que Wagner avait "servi de couverture" dans ces pays pour les sociétés minières de M. Prighozin, telles que M Invest et Lobaye Invest, et les a placées sous sanctions.

    Plus récemment, le groupe Wagner a été invité par le gouvernement du Mali, en Afrique de l'Ouest, pour assurer la sécurité contre les groupes militants islamiques. Son arrivée en 2021 a influencé la décision de la France de retirer ses troupes du pays.

    Samuel Ramani affirme que le groupe Wagner compte au total quelque 5 000 mercenaires opérant à travers le monde.

    Quels crimes Wagner aurait-il commis ?

    Les Nations unies et le gouvernement français ont accusé les mercenaires de Wagner d'avoir commis des viols et des vols à l'encontre de civils en République centrafricaine et l'UE leur a imposé des sanctions pour cela.

    En 2020, l'armée américaine a accusé les mercenaires de Wagner d'avoir posé des mines terrestres et d'autres engins explosifs improvisés dans et autour de la capitale libyenne, Tripoli.

    "L'utilisation irréfléchie de mines terrestres et de pièges par le Groupe Wagner nuit à des civils innocents", a déclaré le contre-amiral Heidi Berg, directeur du renseignement au Commandement Afrique de l'armée américaine.

    Des membres de Wagner en Syrie

    CRÉDIT PHOTO,@RSOTM TELEGRAM GROUP

    Légende image,

    Des membres de Wagner en Syrie

    Que fait le Groupe Wagner dans la guerre actuelle en Ukraine ?

    Dans les semaines qui ont précédé l'invasion de l'Ukraine par la Russie, on pense que les mercenaires du groupe Wagner ont mené des attaques sous faux drapeau dans l'est de l'Ukraine pour donner à la Russie un prétexte pour attaquer, explique Tracey German.

    Aujourd'hui, des messages sont apparus sur les réseaux sociaux russes pour recruter des mercenaires en les invitant à "un pique-nique en Ukraine". Cependant, ces groupes de mercenaires portent d'autres noms, comme "Les Faucons".

    Candace Rondeaux, professeur d'études russes, eurasiennes et d'Europe de l'Est à l'université d'État de l'Arizona, estime qu'il s'agit peut-être d'une tentative de se détourner du nom Wagner, car "la marque est entachée".

  • Des virus en attente

     

     

    Je mets ce reportage ici pour le retrouver si, un jour, ma tétralogie en cours est publiée. Le scénario est parfaitement plausible. 

     

     

    La Terre se réchauffe et les pôles fondent, faisant apparaître une menace silencieuse. Dans ces terres gelées en permanence, appelées le permafrost, des virus et bactéries sont conservés intacts, grâce au froid, depuis des dizaines de milliers d’années, mais sont prêts à refaire surface. L’équipe d’Élément Terre s’est rendue à Longyearbyen, dans l’extrême nord norvégien, à la rencontre de chercheurs et d’habitants qui vivent avec ce danger.

    Dans ce village de l'archipel du Svalbard, par exemple, sept mineurs ont été enterrés à la fin de la Première Guerre mondiale, emportés par la grippe espagnole. Le virus peut-il émerger ? La menace est-elle réelle ou fantasmée ?

    Le permafrost est une boîte de Pandore dont on ne connait pas le contenu, avec des conséquences sanitaires imprévisibles.

    Reportage Marina Bertsch, Florence Villeminot, Jonathan Walsh et Sonia Baritello.

  • "LE DÉSERT DES BARBARES" : Casting de la trilogie

     

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    La liste des personnages principaux pour :

    LES HÉROS SONT TOUS MORTS (publié aux éditions du 38)

    TOUS, SAUF ELLE

    LE DÉSERT DES BARBARES

     

    Le tome 4 est en cours de construction dans ma tête. D'autres personnages viendront s'ajouter.

    Pour l'instant, je m'applique à suivre les conseils de Philippe, un ami écrivain.

    "L'apocalypse de Roger" Philippe Renaissance (cliquez sur le lien)

    Corrections orthographiques, constructions de phrases, ponctuation... Pour le tome 2.

    Une fois fini, je l'enverrai aux éditions du 38 et j'attendrai leur avis.

    Pendant ce temps-là, ça sera la correction du tome 3, une dernière fois.

    Puis, je reprendrai toutes les notes que je prends au fil de mes idées pour le tome 4 et je me lancerai...

    Sur l'ensemble des tomes 2 et 3, j'arrive à 528 pages et 183665 mots. Donc, la correction, c'est long...

    Je tiens à présenter un manuscrit le plus "propre" possible. Seule, l'histoire doit accrocher le lecteur de la maison d'édition qui jugera le texte. 

     

    CASTING

    Laure Bonpierre : sportive professionnelle, adepte de l'ultra-trail et records d'ascension.

    Gaston Floc’h: chasseur

    Lucas Marcieux : lieutenant à la SRPJ, ancien compagnon de Laure

    Lucie : compagne actuelle de Lucas

    Moses : guide africain, accompagnateur de Laure au Kilimandjaro

    Fabien Dumont : lieutenant de police

    Mathieu Denis : lieutenant de police

    Francis Thiébaut : flic, équipier de Mathieu et Fabien

    Thomas Blanchard : militaire, ami de Lucie.

    Alfonso : ami italien de Francis, receleur

    Vincenzo : ami italien d’Alfonso, faussaire

    Raphaël Guérini : truand

    Paolo Midugno : porte-flingue

    Martin Kravanski : diamantaire, receleur.

    Figueras : Indien Aruhaco, ami des Indiens Kogis.

    Kalèn ; Mamu (sage) Indien Kogi

    Ayuka : Indien, guide.

    Pierre Favre : deuxième identité de Francis Thiébaut

    Walter Zorn : Chef suprême de l’Ordre des Immortels. Concepteur du plan Nemesis.

    Fabiola Mesretti : banquière, première femme intégrant l’Ordre des Immortels

    Jonas : père de Walter Zorn

    Abraham : grand-père de Walter Zorn

    Tariq : fanatique islamiste de Daech

    Farid : frère de Tariq, mort à Kaboul

    Jacques : flic

    Martial : flic

    Laurent : flic

    Zack : garde du corps de Walter Zorn.

    Docteur Flaurent : chirurgien, hôpital sud de Grenoble

    Terence : trader pour Walter Zorn

    Nacer : islamiste, coordonnateur des attentats à Paris.

    Sélim Karmaz : banquier à Istanbul

    Akram : homme de main de Sélim Karmaz

    Aziz : islamiste, héberge Tariq

    Tian : étudiant

    Louna : étudiante

    Elizabeth : mère de Tian

    Antoine : père de Tian

    Boris Strogo: milliardaire russe, membre de l’Ordre des Immortels

    Hans Van de Kerkoff : milliardaire belge, membre de l’Ordre des Immortels

    Yves : père de Laure Bonpierre

    Lisette : mère de Laure Bonpierre

    Tim : Frère de Laure Bonpierre

    Aurore : compagne de Tim

    Alec : radio-amateur

    Gros Bill : tenancier à Christchurch

    Langlois : flic, patron de la brigade

    Didier : père de Louna

    Fabienne : mère de Louna

    Anne : compagne de Didier

    Sophie et Tristan : le couple qui a fondé un groupe de survivalistes 

    Emma et David : couple ami

    Moussad : ancien combattant de Daech, intégré au groupe de Sophie

    Kenza : ancienne otage de Daech, libérée par Moussad

    Delphine et Jean Mangin : Couple survivalistes voisins du groupe de Sophie

    Martha : fille de Delphine et Jean

    Joachim Nichols : colonel américain, ami de Walter Zorn

    Valentin Volkoff : ancien militaire russe

    Fanfan : ami de Valentin

    Markus Solberg : norvégien, homme d’entretien de l’université de biologie de Longyaerbyen.

  • LES HEROS SONT TOUS MORTS : Figueras, un personnage majeur

     

    Figueras est un Indien de Colombie, un Arhuaco, ami des Indiens Kogis, peuplade autochtone vivant dans la Sierra Nevada de Santa Marta, massif montagneux de la Cordillère des Andes.

    Laure Bonpierre le rencontre dans un train, alors qu'elle tente de rejoindre le clan des Indiens Kogis.

    Ce personnage énigmatique, porteur d'un très grand savoir, joue un rôle très important, dans ce roman et dans les deux suites que je viens de finir.

    Il sera toujours là dans le tome 4.  

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    Train de marchandises. Elle avait obtenu une place dans le wagon des mécanos. Elle y avait mis le prix. Elle n’avait pas aimé le regard surpris du chef de la loco. Trop d’argent d’un coup. Elle avait appâté un poisson qui pourrait bien la bouffer. Elle imaginait l’air réjoui de la peur qui s’imposait en elle une nouvelle fois.

    Un indien. Une intuition. Il devait avoir un rôle peu important, l’employé aux tâches ingrates. Il s’était assis face à elle. Il ressemblait au Grand Chef du Vol au-dessus d’un nid de coucou. Gigantesque, des mains comme des battoirs. Il l’étranglerait comme on tue un poussin. La peur, insoumise, l’imagination en bataille. Elle chercha à se rassurer, à s’extraire de cet étau qui l’étouffait. Compartiment rudimentaire, des bancs couverts par de vieilles toiles délavées, le revêtement plastique du plancher était déchiré à plusieurs endroits, des placards aux portes délabrées, des outils sommairement rangés, une hache fixée au mur, sans doute pour dégager des arbres tombés sur la voie. Le panneau coulissant de l’entrée était ouvert. Le vacarme des roues la raidissait.

    Il la regardait. Elle ne voulut pas soutenir son regard. Elle posa les yeux sur ses pieds. Le sac à dos en support.

    « De quoi as-tu peur ? » lança-t-il.

    Elle repassa la phrase dans sa tête, interloquée et incertaine du sens.

    « De quoi as-tu peur ? » redemanda-t-il.

    Elle leva les yeux. Il souriait.

    Ils étaient seuls dans le compartiment.

    « Pourquoi dis-tu que j’ai peur?

    -Je le sens sur ma peau. »

    Un Indien. Une certitude. Que faisait-il là ? Qui était-il ? L’impression qu’elle devait cesser de trembler intérieurement. Une intuition rassurante.

    « Personne ne te volera ici. »

    Un regard d’aigle, les yeux plissés, une peau brune qui luisait. Des muscles saillants sous sa tunique. Elle lui donnait quarante ans. Il était très beau. Des cheveux noirs et fins tombant sur ses épaules.

    « Pourquoi tu vas à Santa Marta?

    -Je veux aller voir des amis Kogis dans la montagne. »

    Le vacarme du train sur un aiguillage l’empêcha d’entendre la réponse. Elle pencha la tête en avant pour le lui signifier.

    L’Indien se leva et vint s’asseoir à ses côtés. Une démarche féline. Des sandales rafistolées, un pantalon déchiré sur les genoux.

    « Je suis un Arhuaco. Je connais les Kogis. Qui veux-tu voir ?

    -Kalén, un Mamu.

    -Il est dans le village du haut en ce moment. Tu lui donneras mon salut. Je suis Figueras.

    -Il va bien ?

    -Il va avec son âge. Je l’ai vu l’an passé. Mais il vit toujours. Sinon, je l’aurais senti. »

    Elle ne chercha pas à comprendre. Tout était possible ici. Elle le savait bien puisqu’elle aurait dû mourir sur cette terre. Et qu’un chaman l’avait sauvée. Tout était possible ici. Même ce qui n’est encore jamais arrivé.

    « Personne ne te volera dans le train.

    -Comment le sais-tu ? demanda-t-elle.

    -Je suis le chef ici. »

    Elle croisa son regard. Des pupilles comme deux soleils noirs. Elle se sentit explorer jusqu’à l’âme.

    « Même si j’ai l’air d’un mendiant », ajouta-t-il en souriant.

    Il se leva et se dirigea vers un placard. Il dénoua la ficelle qui retenait les vantaux. Il revint s’asseoir avec un panier de fruits. Il posa le récipient sur le banc.

    « Tu peux prendre.

    -Merci, répondit-elle, honteuse désormais de ses suspicions.

    -Pourquoi vas-tu chez les Kogis ? Ils n’aiment pas être dérangés par les Blancs.

    -C’est une vieille histoire. Kalén m’a sauvé la vie. Je veux les aider.

    -Comment ? »

    Elle devait mentir. Ne pas s’étendre.

    « Je voudrais créer un mouvement de soutien en Europe, pour récupérer de l’argent et les aider à racheter leurs terres au gouvernement.

    -C’est bien. Avec le malheur que les Blancs ont fait ici, il faudra beaucoup de gens comme toi pour que la terre revive. Mais il ne faut rien attendre en retour. Même pas la pureté de vos âmes. Sinon, tu la souilleras encore. »

    Une claque. L’observation de ses intentions, le désir d’être reconnue, la bienfaitrice, la femme blanche qui vient sauver le peuple des Kogis. Oui, elle devait bien admettre qu’elle s’était attribué tous ces honneurs et qu’il n’y avait rien de gratuit dans sa démarche. Les Blancs étaient-ils condamnés à n’être jamais autre chose que des esprits tortueux et torturés ? Portaient-ils comme un fardeau ancestral les dérives de leurs prédécesseurs ? Connaîtraient-ils un jour la paix véritable ?

    « Mais ne crois pas que les Indiens sont tous bons. Beaucoup sont devenus comme les Blancs. Avides et perdus. Et quelques Blancs sont devenus comme les Indiens. Il faut apprendre à sentir ce que les gens portent. Toi, tu as peur mais tu veux faire le bien aussi. Tu vas aller voir un ami à Santa Marta. Il te guidera. »

    Elle sentait la fatigue l’envahir de nouveau. Tellement de sommeil perdu. Comme une vase qui l’engloutissait, des sables mouvants où elle s’enfonçait. Jusqu’à la nausée.

    « Il faut que je me repose un peu.

    -Dors. Tu as le temps. Et laisse dormir tes peurs aussi. »

    Il se leva et se dirigea vers la locomotive. Il ferma la porte en lui adressant un sourire.

    Elle sortit une veste de son sac et le poussa sous le banc puis elle ajusta la pochette sous sa chemise. Elle devinait la sueur contre sa peau. Elle s’allongea sur le banc et glissa le vêtement sous sa tête.

    Elle s’appliqua à entortiller une sangle du sac autour de son poignet."

    Puis, elle ferma les yeux.

    ...............................................................................

    Elle courait à en mourir, l’impression qu’elle allait vomir son cœur, un étrange détachement alors qu’elle sentait la mort autour d’elle, une lucidité extrême, comme une conscience décuplée, elle savait parfaitement ce qu’elle devait accomplir mais elle ne parvenait pourtant pas à se libérer de la pesanteur de ses pas, elle devait produire des efforts gigantesques pour avancer de quelques mètres, comme si elle devait se mouvoir dans un espace gluant, un océan invisible qui ralentissait chacun de ses gestes, elle n’éprouvait étrangement aucune peur, juste l’application de ses actes, sans aucune émotion, sans aucune pensée invalidante, malgré le danger, malgré la mort, malgré l’incertitude. Rien. Elle courait au ralenti dans une extrême vigilance. L’impression d’être surveillée, un regard qu’elle n’identifiait pas, une énergie qui coulait en elle, comme un don… Incompréhension.

    Le train passa sur un aiguillage et le vacarme la réveilla.

    Elle avait vu les yeux étroits qui l’observaient. Des yeux d’Indien.

    Elle se frotta le front et s’assit sur le banc, le corps endolori et lourd. Elle leva la tête.

    Il était là, face à elle. Son regard scintillant, les prunelles comme deux soleils noirs.


     

    « Tu vois, la peur est encore en toi mais tu es sur le bon chemin. Tu commences à l’accepter et à ne plus lutter contre elle. Plus tu luttes, plus tu la nourris de ton énergie. Un jour, tu comprendras.

    -Comment vois-tu tout ça ?

    -Je ne le vois pas. Je le sens. Vous, les Blancs, vous passez votre temps à regarder avec vos yeux et c’est pour ça que vous ne voyez rien. Écoute, respire, touche, et retourne tes yeux vers l’intérieur. Là, tu pourras apprendre. Mais surtout, bien plus important que tout, arrête de penser quand ça ne sert à rien. Tu manges quand tu as faim, tu bois quand tu as soif, tu dors quand tu es fatiguée, tout cela est nécessaire parce que ton corps en a besoin. Fais la même chose avec ton esprit, apprends à penser quand c’est nécessaire. Là, tu pourras saisir la réalité. Sinon, tu l’étouffes. »

    Ces leçons de vie dans un vieux train de Colombie, face à un Indien qui lui parlait comme s’il la connaissait depuis son enfance. Un million caché sous son gilet en toile. Est-ce qu’il le savait? Que pouvait-il voir ou sentir? L’odeur de l’argent? Ou l’odeur de la peur de celle qui le porte…

    « Tu vas aller voir Ayuka. Tu lui diras qu’il doit t’accompagner jusqu’aux Kogis. Tu lui diras mon nom. Il ne te posera aucune question, il ne te demandera pas d’argent.

    -Je vais bien le payer quand même ?

    -Oui, mais c’est toi qui décideras de la somme. Une toute petite part de tout ce que tu transportes. »

    Elle le fixa et baissa les yeux. Certaine d’avoir retenu son souffle sans le vouloir, un coup au ventre, comme s’il venait d’ouvrir la sacoche et de répandre les billets sur le sol.

    « Vous avez inventé les trains et les moteurs, vous avez fait voler des avions, mais vous ne savez pas voyager à l’intérieur de vous. Alors, vous ne pouvez rien savoir des autres. Pour celui qui sait lire les âmes, tout ce qui est en vous est visible parce que ça ne vous appartient pas, tout vous échappe. Et vous croyez en plus que vous pouvez mentir aux autres. C’est à vous que vous mentez. Je ne sais pas lire les mots et les hommes qui sont allés à l’école me méprisent. Mais ils ne savent lire que les mots et ce savoir les aveugle jusqu’à ne rien savoir d’eux-mêmes. »

    Elle ne savait pas répondre. Une telle ignorance. Cette impression d’être une enfant devant un Maître et de découvrir soudainement l’immensité des espaces à parcourir. Elle courait sur les montagnes du monde et ne savait rien de ce qui la constituait, de ce qui émanait d’elle, de ce qui était perceptible.

    Et c’est pour cela qu’elle avait peur.

    Une évidence.

    Nous ne pourrions vivre en paix, les uns avec les autres, qu’avec une connaissance absolue de nous-mêmes.

    Figueras était en paix. Une paix qui semblait l’envelopper comme si l’espace intérieur ne suffisait plus, comme si cette énergie bienfaitrice éprouvait le désir des autres, comme s’il fallait propager cette lumière. Le soleil noir de ses pupilles. Et ce sourire bienveillant sur son visage, rien de connu, comme un amour diffusé, elle se sentait enlacée.

    Il lui raconta son enfance dans les montagnes, les humiliations et les spoliations, la misère existentielle des Indiens qui avaient perdu leurs racines, attirés par des illusions fatales, il parla de ses luttes, de son engagement, des enseignements qu’il avait reçus. Il avait vécu une nuit une intuition d’une force immense, une révélation sublime qui l’avait bouleversé jusqu’aux larmes. Devenir le ver dans le fruit, rogner de l’intérieur les croyances néfastes des hommes civilisés, sonder les âmes et révéler les failles. Il avait longtemps été animé par un esprit de vengeance, un désir d’humiliations puis il avait compris, peu à peu, qu’il entretenait dès lors la scission des âmes, que sa mission était souillée par des intentions perverses, qu’il devait lui-même apprendre à tendre son âme vers les autres, à ne pas juger, à ne pas souiller l’intention de la Vie. Sa colère n’était qu’une citadelle dressée. Elle n’ouvrait pas les enceintes des âmes rencontrées. Il avait sombré pendant de longues saisons, comme rongé par un Mal insaisissable, un poison qu’il avait mis longtemps à identifier. Il avait dû connaître l’effondrement pour apprendre à aimer.

    « Je te remercie infiniment Figueras. »

    Elle ne savait pas parler d’elle et elle comprit avec une violence soudaine que son ignorance intime, que cette méconnaissance des méandres intérieurs l’avait privée des plus belles flamboyances, qu’elle n’avait toujours été qu’une âme perdue cherchant frénétiquement des ancrages existentiels. Elle courait depuis des années pour une reconnaissance extérieure. Comme si une ombre pouvait se remplir, comme si les regards reçus pouvaient suffire à combler les vides.

    Un Indien venait de lui parler de son âme et elle ressentait désormais en elle un vide incommensurable.

    « Ne te juge pas, reprit Figueras. Ta colère contre toi ne serait qu’une condamnation. Réjouis-toi simplement de savoir désormais qu’il te reste beaucoup à apprendre. Reconnais simplement que tout est déjà en toi. Mais simplement que tu ne le savais pas. Simplement. Tu vois l’importance de ce mot ? Lorsque les choses que tu vis te semblent compliquées, c’est que tu n’es plus reliée à la Vie. Le réel problème n’est pas ce qui survient mais la façon dont tu le perçois. Un jour, tu comprendras. »


     

    Elle raconta ses courses en montagne, la découverte de ses qualités physiques, ses premières compétitions et la fierté qu’elle éprouvait, les premiers sponsors et l’entraînement acharné qu’elle devait supporter, la pression de plus en plus forte et ce sentiment de gâchis au sommet du Kilimandjaro.

    « C’est bien, écoute bien tout cela. Et réjouis-toi. »

    Elle ne comprenait pas d’où venait cette impression qu’il souriait en permanence alors que rien sur son visage ne l’indiquait. Une neutralité totale. Et pourtant, cette joie qui l’inondait. Elle en éprouva de la gêne. Comme un lien physique qu’elle ne commandait pas. L’impression d’être reliés, non pas d’elle à lui, mais comme deux énergies compatibles, un flux sans matière, une reconnaissance cellulaire.

    « Quand tu sauras lire en toi, tu comprendras ce que les autres portent. »


     

    Il lui raconta encore la vie de ses ancêtres, la communion avec la Nature, l’hommage rendu à chaque élément de la Terre Mère, la vie des enfants dans les tribus, les explorations spirituelles par le travail solidaire et les jeux, l’apprentissage des connaissances ancestrales, des ancrages qu’il honorait chaque jour, un respect immuable qui nourrissait ses cheminements. Les enfants recevaient des racines qui leur donnaient des ailes.

    Elle songea aux enfants de l’Ancien Monde, les ailes rognées de leurs âmes, leurs racines empoisonnées par une Histoire immonde, ces tombereaux de morts et de massacres, ces peuples exterminés et ces génocides orchestrés par des Puissants avides de richesses et de pouvoir. Rien n’avait changé. Les justifications avaient pris des tournures honorables mais les intentions restaient les mêmes. Les petits d’hommes recevaient en héritage des avenirs prémâchés, une pâte infestée par des esprits pervers, des égrégores toxiques qui les condamnaient à une imitation formatée.

    Elle réalisa soudainement que son projet était dérisoire. L’intuition que son désir consistait à emballer dans du papier cadeau des charniers infinis. Elle sentit une boule gonfler dans sa gorge, comme si la révélation l’empêchait de respirer, toute la beauté du don envisagé périssait sous les assauts impitoyables de la réalité. Peut-être même portait-elle dans ce projet, le désir de soulager sa conscience. Mais que pouvait bien représenter l’argent dispensé dans des âmes violées par des siècles d’outrages?

    L’impression que tout cela allait voler en éclat.

    Elle regarda Figueras. Il ne la quittait pas des yeux, comme attentif à des messages sans paroles, percevant des pensées insoumises.

    « Tu auras tes réponses quand elles seront nécessaires », avança-t-il en souriant pour de bon.


     

  • L'empreinte carbone d'AVATAR 2

    Je n'ai pas l'intention d'aller voir ce deuxième film. Autant j'avais trouvé l'image magnifique, une technologie effectivement stupéfiante mais le scénario guerrier de la deuxième partie et des scènes de bataille interminable m'avaient franchement déçu et lassé. 

    La question s'était posée pour moi de l'empreinte carbone d'un tel déploiement de haute technologie quand le film se veut porteur d'un message écologique. 

    Cet article reprend cette problématique et montre comment James Cameron a tenté de la résoudre. Et où on voit la puissance décisionnaire des financiers au regard de la promotion du film...

    Je lis par ci par là que le message écologique est puissant et peut toucher les jeunes générations. J'aimerais alors savoir si les jeunes générations vont aller voir ce film pour son aspect "philosophique" ou pour les effets spéciaux. Et la question est donc de savoir si l'emploi considérable de cette technologie est vraiment nécessaire quand on veut développer un message spirituel. S'il s'agit de montrer la richesse extraordinaire de la nature et les conflits entre colons et peuples autochtones, le film de Terence Malick, " Le nouveau monde" est à mon sens bien plus puissant. Et je ne parle pas de la beauté de la musique de ce film au regard de la musique assourdissante du premier Avatar...

     

     

     

    Publié le 16 décembre 2022 à 17h09

    Pop culture

    Séries et cinéma

    Les coulisses d’Avatar 2 sont-elles aussi écolos que le film ?

     

    Panneaux solaires et repas végans

    Temps de lecture : 6 min

    L'avatar de Marcus Dupont-Besnard

    Marcus Dupont-Besnard

    Source : Avatar 2 : La Voie de l'Eau

    Avec Avatar : La Voie de l’Eau, James Cameron livre un grand film écologique, construit autant comme un conte que comme du grand spectacle. Mais le message d’Avatar 2 est-il cohérent avec la façon dont il a été produit ? La réponse est oui — à ceci près que c’est pour la promotion que le bât blesse.

    À l’image d’Avatar, et peut-être plus encore, sa suite Avatar : La Voie de l’Eau est un chef-d’œuvre. La beauté visuelle n’est pas la seule raison, car c’est aussi dans l’écologie que ce second opus brille d’intelligence et de poésie. Ce constat est particulièrement rare à l’échelle de blockbusters.

    Une question peut alors légitimement se poser : les coulisses de tournage, de production et de promotion du film sont-ils cohérents avec les messages du film ? La réalité est meilleure que ce que vous pouvez imaginer… mais n’est pas épargnée par quelques paradoxes.

    Une production « zéro carbone »

    Assez tôt par rapport aux usages, James Cameron a milité pour l’usage de drones, plutôt que d’hélicoptères, pour tourner les scènes aériennes. Mais le réalisateur s’est aussi engagé, dès 2012, dans une tâche ambitieuse : produire les suites d’Avatar à l’énergie propre.

    Kiri, la fille de Neytiri et Jake, dans Avatar 2. // Source : Avatar : La Voie de l'Eau

    Kiri, la fille de Neytiri et Jake, dans Avatar 2. // Source : Avatar : La Voie de l’Eau

    L’objectif : réduire l’empreinte carbone d’Avatar 2 et d’Avatar 3, voire atteindre un bilan zéro carbone, concernant en tout cas la réalisation des films. Il détaillait alors durant un reportage de l’époque : « Je ne veux pas que les gens puissent venir me voir à la sortie en me disant ‘vous êtes un écologiste faisant un film sur comment on devrait se comporter et pourtant vous utilisez toute cette énergie pour alimenter ces ordinateurs’. J’ai entendu cette critique, quand on a fait le premier film, donc on a fait quelque chose pour ça. »

    Il y a dix ans de cela, donc, James Cameron s’engageait dans la construction de panneaux solaires pour le studio principal de tournage et de production de sa saga — afin que cette énergie solaire alimente en électricité les ordinateurs et les systèmes de capture de mouvement.

    « Nous avons fait installer un mégawatt de panneaux solaires sur le toit de notre studio »

    James Cameron

    C’est donc ainsi que La Voie de l’Eau, et le troisième opus pour 2024, ont été réalisés. « Nous avons établi très tôt quelle serait la quantité d’énergie nécessaire et, à la suite de ces études, nous avons fait installer un mégawatt de panneaux solaires sur le toit de notre studio. Non seulement ils ont fourni l’énergie nécessaire pour tous nos ordinateurs et nos serveurs, mais nous avons obtenu en prime un surplus que nous avons pu vendre aux Manhattan Beach Studios », rappelait récemment le réalisateur, au magazine Trois Couleurs. « C’était donc une très bonne affaire financièrement, en plus de nous garantir une empreinte carbone négative. »

    Des repas végans sur le tournage

    La mise en pratique des messages du film ne s’arrête pas là. Avatar : La Voie de l’Eau aborde la protection des espèces — un propos d’autant plus pertinent à l’époque de la 6e extinction de masse causée par les activités humaines. Si James Cameron est végan (non-consommation de tout produit de provenance animale), qu’en est-il des tournages ?

    Les espèces marines de Pandora sont à l'honneur dans cette suite // Source : Avatar La Voie de l'Eau

    Les espèces marines de Pandora sont à l’honneur dans cette suite // Source : Avatar La Voie de l’Eau

    Là encore, le réalisateur a impulsé une mise en cohérence : l’intégralité des repas servis dans les selfs des studios étaient des plats végans. Pour tous les studios, toutes les régies, toutes les sections de capture de mouvement — bien que tout le monde était évidemment libre d’aller manger ailleurs que dans ces cantines.

    « Nous devons vivre nos vies, en tant que personnes travaillant sur ces films, en cohérence avec le message des films. »

    James Cameron

    Il a expliqué à Deadline : « Je me suis assis avec toute l’équipe — environ 130 personnes alors — et j’ai dit : ‘Ces films, nous ne les faisons pas seulement pour gagner de l’argent ou pour faire des images cool et imaginatives avec des animations incroyables. Nous les faisons dans un but plus élevé, parce qu’ils signifient quelque chose. Et nous devons agir en conséquence. Nous devons vivre nos vies, en tant que personnes travaillant sur ces films, en cohérence avec le message des films. Nous allons donc tous manger végan sur cette production.’ Vous auriez pu entendre une épingle tomber dans une pièce de 130 personnes. »

    La limite : la promotion du film ?

    Voilà qui dresse un tableau assez positif des coulisses d’Avatar 2 et d’Avatar 3 en matière d’empreinte environnementale. Un élément reste toutefois encore en suspens dans l’équation : la promotion du film. C’est là que le bât blesse pour un blockbuster. Évidemment, il y a l’ensemble des trajets, en avion notamment, entrepris par l’équipe du film. S’ajoutent les écrans publicitaires. Et la liste de ces ingrédients pourrait être plus longue.

    Le clan Metkayina est le peuple maritime de Pandora. // Source : Avatar 2

    Le clan Metkayina est le peuple maritime de Pandora. // Source : Avatar 2

    Mais ce qui a le plus attiré l’attention des fans de la franchise est une vidéo prise au Japon, début décembre, où l’équipe du film (dont James Cameron) assiste à un spectacle promotionnel impliquant des dauphins captifs. Or, le Japon est réputé pour sa cruauté dans la capture de cette espèce. La situation contrevient pleinement aux idées de James Cameron et à ce que défend le film. Une phrase du réalisateur semble d’ailleurs teintée à demi-mot de son propre malaise : « Je suis sûr que tout le monde leur a demandé la permission pour les intégrer au spectacle… J’aime ces animaux, j’aime leur intelligence. »

    Qu’en est-il de la cohérence sur laquelle le réalisateur a tant travaillé pendant 10 ans ? La réalité derrière cette séquence est assez limpide : l’équipe n’a pas eu son mot à dire. La distribution est gérée à l’échelle du studio de production (20th Century Fox / Disney) et les événements auxquels assister sont contractuellement imposés. Il semblerait que personne, au département marketing, n’ait perçu (ou eu envie de percevoir) l’absurdité de la situation. Si le studio est peut-être prêt à concéder des efforts dans le processus de création, étant donné le poids de Cameron à Hollywood, les enjeux financiers pour la réussite du film en salles sont une tout autre histoire. Et l’Asie est un marché conséquent.

    Il y a d’ailleurs un passif en la matière, puisqu’on sait que James Cameron et la Fox s’étaient déjà opposés par le passé. Un cadre de la production aurait demandé, pour le premier film, à ce que le message environnemental soit tout bonnement… supprimé. « Il y avait une inquiétude, concernant Avatar, que les thèmes environnementaux — explorés à un niveau profond et spirituel — nuisent au film. Quelqu’un à la Fox, qui n’est plus là aujourd’hui, a dit : ‘Y a-t-il un moyen de réduire ces conneries de New Age, d’écologistes et de hippies ? », relatait-il en 2011.

    Alors : Avatar, blockbusters écolo ou non ?

    Indéniablement, Avatar 2 : La Voie de l’Eau est d’autant plus unique en son genre que la dimension écologique au cœur du film est cohérente avec son processus créatif — tout du moins en partie (ce qui est déjà beaucoup pour un blockbuster mettant en jeu des dizaines de millions de dollars). Il est donc vrai que James Cameron a su changer les choses et pousser la logique aussi en coulisses.

    Le biome de Pandora fait rêver. // Source : Avatar 2

    Le biome de Pandora fait rêver. // Source : Avatar 2

    Mais la réalité d’un monde où l’écologie n’a pas tant que cela sa place dans la prise de décisions est vite revenue en pleine figure de la saga : pour diffuser le message d’Avatar, il faut passer par le circuit type de l’entertainment, lui-même empreint de capitalisme et donc d’une considération assez faible pour l’écologie.

    Sauf que James Cameron l’a dit lui-même en 2012 : il avait été touché par les critiques sur le coût énergétique de production du film, et c’est aussi pour cela qu’il a eu la motivation d’améliorer cet aspect. Le buzz de la vidéo prise au Japon ne restera probablement pas lettre morte en coulisse. Les fans, qui aiment la saga et le réalisateur pour leur amour du vivant, peuvent légitimement ressentir de la déception. On peut toutefois imaginer que, pour Avatar 3, une telle situation en inadéquation totale avec l’œuvre devienne impossible.

    Il y a par ailleurs un tableau plus large encore. L’impact d’Avatar sur la société n’est autre qu’une vaste diffusion de la conscience écologique — c’est aussi dans les imaginaires que cela se joue. Et l’impact de sa production sur Hollywood est une démonstration objective que certaines méthodes plus positives sont tout bonnement… possibles !

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