Blog
-
Les pesticides et les frontières
- Par Thierry LEDRU
- Le 29/01/2020
Je pourrais mettre sur ce blog des dizaines d'articles par semaine...Je fais beaucoup de recherches...
Des dizaines d'articles qui rendent compte de la folie de ce monde moderne.
De notre impuissance.
De notre empoisonnement.
De notre insignifiance face à la puissance des marchands.
De notre lâcheté aussi devant cette habitude à ne plus pouvoir concevoir la moindre révolte individuelle, le moindre combat, le moindre engagement. Comme si tout cela relevait désormais d'une falatité épouvantable, inéluctable, d'un cauchemar dont nous ne pourrons plus jamais nous réveiller.
Interdit dans huit pays européens, le pesticide chlorpyrifos traverse les frontières Le chlorpyrifos, neurotoxique et perturbateur endocrinien, est toujours présent dans les produits alimentaires importés en France.
Par Stéphane Horel Publié le 17 juin 2019 à 00h45 - Mis à jour le 17 juin 2019 à 14h46
La libre circulation des marchandises en Europe comporte quelques désagréments. Les résidus de pesticides peuvent voyager à bord de fruits, légumes et autres aliments jusqu’aux pays où ils sont pourtant interdits, et aux organismes de leurs habitants. C’est le cas du chlorpyrifos.
Lire notre enquête : Les dangers ignorés du chlorpyrifos, pesticide toxique
Dans l’Union européenne (UE), huit pays interdisent l’insecticide pour tous ses usages (Allemagne, Danemark, Finlande, Irlande, Lettonie, Lituanie, Slovénie, Suède). Depuis 2016, la France ne le tolère plus que pour la culture d’un seul légume, les épinards, qui bénéficient d’une exception à la suite d’une évaluation de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail qui a conclu à une absence d’effets nocifs dans les conditions d’usage. Cette année-là, il s’en était vendu plus de 156 tonnes dans le pays sous la forme d’une quarantaine de produits commerciaux portant les noms de Kregan, Nelpon ou encore Pyrinex, selon les données du ministère de l’agriculture.
En 2013, par exemple, une étude menée en Suède a détecté la présence de chlorpyrifos dans les urines de femmes âgées de plus de 40 ans alors que l’insecticide n’a jamais été homologué pour un usage agricole dans le pays. Au Danemark, où l’usage du chlorpyrifos est très restreint, plus de 140 « couples » d’écoliers et leurs mères ont participé à un projet de recherche européen de biosurveillance, Democophes. Les urines de la quasi-totalité d’entre eux contenaient des traces d’organophosphorés, de la famille du chlorpyrifos.
Chaque année, dans toute l’UE, les autorités nationales effectuent des tests aléatoires sur des échantillons d’aliments. Le chlorpyrifos figure parmi les pesticides les plus détectés. C’était aussi le pesticide perturbateur endocrinien le plus présent sur les fruits et légumes testés en 2015, selon un rapport de l’ONG Pesticide Action Network (PAN Europe) à partir de ces données officielles centralisées par l’Autorité européenne de sécurité alimentaire (EFSA).
Le chlorpyrifos, insecticide toxique, reçoit un avis négatif de l’Agence européenne pour la sécurité des aliments L’exposition à ce pesticide pendant la grossesse ou lors des premiers mois de l’enfant est associée à des déficits de QI ou à un retard de développement mental.
Le Monde avec AFP Publié hier à 15h47, mis à jour hier à 16h55
Lecture 2 min.
Un pas vers un retrait du marché ? L’Agence européenne pour la sécurité des aliments (EFSA) estime vendredi 2 août que le chlorpyrifos, un insecticide dont les effets nocifs ont été prouvés par des études scientifiques, ne remplit pas les critères pour que son autorisation soit renouvelée dans l’Union européenne (UE).
Au mois de juin, Le Monde et plusieurs journaux européens avaient publié une enquête sur la toxicité du chlorpyrifos, longtemps ignorée par l’UE.
Lire aussi Chlorpyrifos : les dangers ignorés d’un pesticide toxique
L’article relevait que les données scientifiques venant de plusieurs études de suivi des populations, menées aux Etats-Unis, se recoupaient. Elles montrent qu’une exposition au chlorpyrifos ou à ses cousins organophosphorés, avant la naissance ou dans les mois qui suivent, est associée à des déficits de QI, à un retard de développement mental, une mémoire de travail réduite, des troubles de déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité.
« Effets génotoxiques et neurologiques »
Le chlorpyrifos fait actuellement l’objet d’une évaluation scientifique menée par l’EFSA dans le cadre de sa demande de réautorisation – sa licence dans l’UE expire à la fin de janvier 2020. Si l’étude n’est pas tout à fait finalisée, l’EFSA affirme d’ores et déjà que la substance « ne répond pas aux critères requis par la législation pour le renouvellement de son autorisation dans l’Union européenne ». Selon nos informations publiées en juin, la Commission européenne s’apprête à proposer son retrait du marché.
La Commission européenne, qui chapeaute les comités d’experts chargés d’étudier les demandes d’autorisation en matière de pesticides, a demandé à l’EFSA de fournir une première évaluation des résultats disponibles en matière de santé humaine, explique l’agence.
« L’EFSA a identifié des problèmes sur de possibles effets génotoxiques ainsi que des effets neurologiques pendant le développement, soutenus par des données épidémiologiques indiquant des effets sur les enfants. Cela signifie qu’aucun niveau d’exposition sûr – ou de valeur de référence toxicologique – ne peut être fixé pour la substance. »
Déjà interdit dans certains pays de l’UE
Après la mise sur le marché de l’insecticide en 2005, dans le cadre d’une procédure différente, car l’EFSA n’en était alors qu’à ses débuts, l’agence européenne a effectué depuis plusieurs mises au point, en révélant certains risques et en abaissant les niveaux résiduels autorisés.
L’EFSA avait également indiqué à la mi-juin que son évaluation en cours inclurait une étude réalisée aux Etats-Unis et publiée en mars. Selon Le Monde, cette étude « montre une augmentation de la fréquence de l’autisme et de lésions cérébrales précoces chez des enfants exposés au chlorpyrifos avant et après la naissance ».
Huit pays de l’UE ont déjà interdit sur leur territoire des produits contenant du chlorpyrifos. Depuis 2016, la France ne permet plus qu’une exception, pour les épinards.
Pour être commercialisée dans l’UE, une substance doit être autorisée par un comité d’experts composé de représentants des Etats membres et présidé par la Commission européenne. Chaque pays est ensuite responsable d’autoriser au non les produits qui contiennent cette substance.
Chlorpyrifos : les dangers ignorés d’un pesticide toxique
Associé notamment à des déficits de QI chez l’enfant, l’insecticide est toujours autorisé malgré des études scientifiques accablantes. Son processus de renouvellement dans l’UE arrive à son terme.
Par Stéphane Horel Publié le 17 juin 2019 à 00h08 - Mis à jour le 17 juin 2019 à 09h40
Cultures de légumes à El Ejido, dans la province d'Almeria (Espagne), en juin 2017. Le chlorpyrifos y est couramment utilisé. MARCOS GARCIA REY
C’est une famille de pesticides qui vole en moyenne 2,5 points de quotient intellectuel (QI) à chaque enfant européen. Son principal représentant, comme beaucoup de produits chimiques, porte un nom compliqué qui lui garantit le confort d’un certain anonymat. Pourtant, il contamine notre vie quotidienne. D’abord pulvérisé sur les cultures pour éliminer pucerons ou chenilles, le chlorpyrifos poursuit son existence sous la forme de traces dans les oranges, les pommes, la laitue, l’urine des enfants et le cordon ombilical des femmes enceintes.
Au fil d’un demi-siècle de pulvérisation, les données scientifiques se sont accumulées sur les effets nocifs de cet insecticide. Censé remplacer le DDT et ses effets délétères en 1965, le produit de la firme américaine Dow endommage en fait le cerveau des enfants de manière irréversible.
Les éléments scientifiques sont désormais si accablants que, d’après les informations du Monde, la Commission européenne s’apprête à proposer son retrait du marché. Or, notre enquête démontre que les autorités ont mis près de vingt ans avant d’évaluer les données du fabricant. Des données qui, de plus, étaient erronées.
Huit pays européens n’autorisent pas, ou plus, le chlorpyrifos pour un usage agricole. Depuis 2016, la France ne permet plus qu’une exception pour les épinards. Une évaluation de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail a conclu à une absence d’effets nocifs dans les conditions d’usage. Mais l’exposition à l’insecticide ne s’arrête pas aux frontières : elle perdure par le biais des produits importés.
« Neurotoxique et perturbateur endocrinien »
« On peut se demander pourquoi il n’a pas déjà été interdit, déplore Barbara Demeneix, professeure de biologie au laboratoire Evolution des régulations endocriniennes (CNRS-Muséum national d’histoire naturelle) à Paris. Le chlorpyrifos est toxique pour le système nerveux central, c’est-à-dire neurotoxique, et c’est un perturbateur endocrinien qui agit notamment sur la signalisation thyroïdienne. Il peut donc interférer avec le développement du cerveau. »
Mis au point comme gaz innervant pendant la seconde guerre mondiale, les organophosphorés, dont fait partie le chlorpyrifos, ont ensuite été adaptés pour tuer les insectes à des doses plus économiques. Pour ce faire, ce dernier inhibe les circuits d’une enzyme qui dégrade un neurotransmetteur essentiel au bon fonctionnement du système nerveux central, l’acétylcholine. Or, de nombreux animaux sont également équipés de ce circuit. Parmi eux : les êtres humains...
-
Pandémie écologique...
- Par Thierry LEDRU
- Le 29/01/2020
L'humanité est un coronavirus pour l'ensemble du vivant, une véritable pandémie. Un virus dévastateur dont une bonne partie de cette humanité se contrefiche.
Lorsque j'ai besoin d'aller dans le supermarché du secteur, je regarde les caddies des clients. Parfois, j'ai envie de prendre le consommateur par le col et de lui gueuler dessus, de hurler à sa figure que c'est un crétin de la pire espèce, que c'est un assassin, un collaborateur, un exterminateur, un dévastateur, un ignare, un abruti, un illétré, un consanguin...Je me retiens...Les médias tartinent leur "une" de ce fameux coronavirus, ils nourrissent la peur. La peur d'une pandémie qui toucherait les humains. Mais la pandémie, elle n'est pas "humaine", elle est écologique.
Personnellement, que dix millions de Chinois trépassent, j'en ai rien à cirer. Que les choses soient claires.
Il me suffit de regarder les yeux de cet orang-outan pour oublier tout le reste.
Et si cette pandémie finissait par arriver jusqu'en Savoie, ça ne changerait rien. Survivront ceux qui pourront. Ça fera moins de crétins dans les supermarchés. J'ai déjà des masques FFP2 et si on doit rester en quarantaine à la maison, on tiendra.
Oui, j'ai la rage. Une rage animale et si elle pouvait contaminer les crétins et les réduire à néant, je serais même capable d'aller en ville pour me mêler à la foule.
Extinction des espèces, déforestation de forêts millénaires… L’huile de palme, un fléau inarrêtable
64 % des oiseaux et 54 % des mammifères menacés d’extinction se trouvent dans des espaces ruraux où des palmiers à huile sont cultivés. Après avoir ruiné la biodiversité et accéléré le réchauffement climatique, l’huile de palme se retrouve dans notre alimentation et il est désormais de notoriété publique que ce gras est un sérieux danger pour la santé et un très mauvais nutriment.
28 janvier 2020 - Augustin Langlade
Envie d’une vraie déconnexion ? Évadez-vous avec notre nouvelle bande dessinée !
- Thème : effondrement de la société, abordé de manière douce et positive
- Format : 130 pages
- Impression : France
À l’inverse de son utilisation dans les biocarburants, véritable tartufferie des industriels de la pétrochimie, l’emploi de l’huile de palme dans notre alimentation semble aujourd’hui indispensable, malgré son impact catastrophique sur le vivant. Pire, elle ne peut pas être remplacée par un équivalent, puisque les conséquences de cette substitution seraient encore plus désastreuses pour l’environnement. Que faire ? Il ne nous reste plus qu’à temporiser ou à changer radicalement de système.
Que ce soit dans les gâteaux, les plats préparés, les produits de beauté ou les biocarburants, trois milliards de personnes, presque la moitié de la population mondiale, consomment tous les jours de l’huile de palme, qui représente plus d’un tiers de la production mondiale d’huiles végétales, loin devant le soja. En France, au moins 50 % de cette huile est destinée à l’alimentation de nos voitures en « biocarburant » (qui n’a de biologique que le nom), mais dans le monde, elle est surtout utilisée par le secteur agroalimentaire, qui en absorbe 80 %, dont l’essentiel nourrit des populations pauvres ou entre dans la composition de produits de basse qualité.
Crédit photo : Rich Carey Très prisée parce qu’elle est peu chère et constitue un acide gras saturé naturel permettant d’éviter les acides gras synthétiques, hautement cancérigènes, cette huile représente une production de 60 millions de tonnes annuelles, en croissance de 3 % par an. Pour vous donner une idée, il est prévu que cette production fulgurante, qui a quadruplé entre 1995 et 2015, quadruple de nouveau d’ici 2050.
Le journal Guardian l’écrivait en février 2019 :
« Chacun d’entre nous consomme en moyenne 8 kg d’huile de palme par an » et « souvent, les consommateurs ne sont même pas conscients qu’ils l’utilisent ». Aujourd’hui, nous sommes si dépendants de cette source de gras « qu’il pourrait bien être impossible de s’en passer » à l’avenir.
Cependant, les conséquences funestes de la culture d’huile de palme sur l’environnement sont aujourd’hui dénoncées par de nombreuses organisations ; et maintenant qu’il semble trop tard pour faire marche arrière, le bilan ne laisse d’abasourdir. Les palmiers à huile occupent actuellement 25 millions d’hectares, dont une très grande part ont été grignotés au fil des années sur les forêts tropicales et les zones humides, qui se caractérisent par leur très riche diversité vivante.
Toutes ces forêts millénaires rasées aux quatre coins du globe sont substituées par des mono-cultures qui non seulement absorbent bien moins de carbone que les vieilles forêts mais n’abritent plus aucune espèce vivante du fait des nécessités agricoles et des produits chimiques qui y sont appliqués. En rongeant les espaces naturels, l’huile de palme participe à assassiner 193 espèces considérées comme menacées par la liste rouge de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) ; nous connaissons les orangs-outans, dont l’image a participé à médiatiser l’huile de palme, mais ce sont aussi les tigres, les gibbons et des quantités considérables d’oiseaux et d’insectes qui voient leur habitat détruit par ces cultures.
Crédit photo : Nomads.team 64 % des oiseaux et 54 % des mammifères menacés d’extinction se trouvent dans des espaces ruraux où des palmiers à huile sont cultivés. Après avoir ruiné la biodiversité et accéléré le réchauffement climatique, l’huile de palme se retrouve dans notre alimentation et il est désormais de notoriété publique que ce gras est un sérieux danger pour la santé et un très mauvais nutriment.
Dans cette perspective, est-il recommandable que nous interdisions simplement toute importation d’huile de palme ? La réponse est non. Une prohibition catégorique, qui ne serait pas anticipée et accompagnée par un changement profond de nos modes de production et de consommation, entraînerait des conséquences écologiques encore plus désastreuses. En effet, comme l’indique un rapport de l’UICN publié en 2018, l’interdiction de l’huile de palme ne ferait que « déplacer le problème » en augmentant drastiquement « la production d’autres cultures oléagineuses pour répondre à la demande d’huile ».
Or, les substituts que seraient le colza, le soja ou le tournesol exigeraient « jusqu’à neuf fois plus de terres que l’huile de palme pour la même production » et risqueraient de précipiter davantage les fléaux que représentent la déforestation et l’extension des terres agricoles. Alors qu’ils occupent moins de 10 % de la surface agricole mondiale destinée aux cultures oléagineuses, les palmiers à huile, dont le rendement est le plus fort dans cette catégorie, sont à l’origine de « 35 % de toute l’huile végétale utilisée dans le monde ». En comparaison, le soja s’octroie 40 % de cette même surface cultivée et ne produit que 22 % des huiles végétales que l’être humain consomme. Il est donc impensable de remplacer les palmiers à huile.
Crédit photo : Rich Carey – Plantation d’huile de palme après déforestation Sans une véritable volonté politique de régulation, sans une remise en question radicale de ce que nous mangeons tous les jours et utilisons parfois dans nos moyens de transport quotidiens, le bannissement de l’huile de palme serait une invitation faite au marché à se réguler lui-même, c’est-à-dire à déforester davantage, à éradiquer davantage d’espèces et à nourrir la surenchère catastrophique qui frappe les régions productrices d’huiles végétales, comme l’Amérique du Sud, l’Indonésie ou la Malaisie.
Ce qui veut dire qu’en l’état actuel des choses, la seule alternative dont nous disposons consiste à cesser de consommer toute huile végétale (y compris soja, colza et tournesol) ou à promouvoir une agriculture durable et certifiée d’huile de palme, sorte de demi-teinte qui semble avoir beaucoup de succès dans le vieux monde, puisque c’est ce que recommande l’UICN dans son rapport. Certification, transparence, protection des forêts tropicales, limitation de l’huile de palme non alimentaire, remplacement des cultures de soja ou de colza par celle des palmiers, toutes ces recommandations très « réalistes » s’annoncent comme autant de leviers dont disposent les gouvernements pour maintenir le statu quo. Serons-nous capables aujourd’hui de faire autrement ? Tous les problèmes écologiques nous ramènent à la même question.
28 janvier 2020 - Augustin Langlade
Extinction des espèces, déforestation de forêts millénaires… L’huile de palme, un fléau inarrêtable
Livre-Journal 04 : VivantPablo Servigne, Vandana Shiva, Lamya Essemlali et d'autres auteurs de renom nous expliquent l'importance de protéger notre Terre et de devenir de véritables gardiens du Vivant. L'humanité est en passe de détruire, en cinq décennies, un écosystème qui a mis des milliards d'années à se constituer. Idées concrètes, réflexions et partages de savoir vous inspirerons à devenir des défenseurs de la Vie. -
La France poursuivie en justice
- Par Thierry LEDRU
- Le 29/01/2020
25 juillet 2019 On en est où maintenant ?...
La France poursuivie en justice par la Commission Européenne pour sa chasse aux oiseaux protégés
25 juillet 2019 - Laurie Debove
Envie d’une vraie déconnexion ? Évadez-vous avec notre nouvelle bande dessinée !
- Thème : effondrement de la société, abordé de manière douce et positive
- Format : 130 pages
- Impression : France
Grâce au dossier déposé par la LPO, la Commission européenne demande des comptes à l’Etat français avant de l’attaquer en justice pour non-respect de la Directive européenne « Oiseaux ». En cause : sous prétexte de tradition, la France continue d’autoriser la chasse aux oiseaux migrateurs et d’autres espèces protégées, malgré l’effondrement de la biodiversité.
La France en justice pour la chasse illégale d’oiseaux protégés
La Directive européenne « Oiseaux » est un texte fondamental voté en 1979 pour la protection de l’avifaune et commun à tous les Etats membres de l’UE. Chacun d’eux est libre de choisir la façon dont il remplit ses objectifs, mais légalement tenu de les atteindre.
Depuis des années, la LPO dénonce publiquement et au tribunal la chasse illégale des oiseaux migrateurs et d’espèces en mauvais état de conservation et les piégeages traditionnels cruels, qui frappent à l’aveugle n’importe quel animal, perpétrés par la France.
« Cela fait des années que nous déposions des recours ponctuels auprès de la Commission Européenne sur les tourterelles, le piégeage à la glue, ou le massacre des oies sauvages, et à chaque fois ce n’était pas suffisant. Cette fois-ci, on a réuni assez de preuves pour monter un dossier global qu’on a remis en main propre à Daniel Calleja Crespo, le Directeur de la Commission Européenne, le jour des 40 ans de la Directive, soit le 4 avril 2019 ! On ne s’attendait pas à une décision aussi rapide, cela prouve la gravité des faits. Si l’affaire part à la Cour de Justice Européenne, l’Etat français risque une amende qui peut atteindre des dizaines de millions de d’euros. » témoigne, pour La Relève et La Peste, Yves Verilhac, Directeur Général de la LPO
Dans le viseur de la Commission Européenne et des protecteurs du vivant : des pratiques de chasse non sélectives, comme la chasse à la glu et au filet, la tolérance et l’autorisation généralisées de la chasse à l’oie cendrée (Anser anser) après que celle-ci a commencé sa migration vers ses sites de reproduction, et la mise en danger de la tourterelle des bois.
Crédit photo : Rudmer Zwerver – Tourterelle des bois Cette espèce est considérée comme « vulnérable » à la fois sur la liste rouge mondiale des oiseaux et sur la liste rouge européenne des oiseaux. Parmi tous les pays de l’UE, la France accueille 10 % de la population reproductrice de la tourterelle des bois. Entre 1996 et 2016, sa population a décliné de 44 % dans l’Hexagone.
Un Etat récidiviste sous influence
Après avoir perdu 12 fois devant le Conseil d’Etat, l’Etat français a voulu justifier la chasse aux oiseaux grâce à un amendement dans la loi créant l’Office français de la biodiversité.
Ainsi, sur les 64 espèces d’oiseaux chassables en France, une vingtaine sont en déclin. De plus, la France s’apprête à autoriser la destruction de 30 000 tourterelles des bois (espèce menacée au niveau mondial) et 6 000 Courlis cendrés (menacés au niveau européen), tout en renouvelant les autorisations pour piéger des milliers d’oiseaux avec de la glu, des matoles et des filets, les écraser avec des pierres plates ou les étrangler avec des collets.
Pour les associations de protection de l’environnement, la décision de la Commission Européenne est un soulagement.
« Cela nous rassure parce qu’à force d’entendre le gouvernement dire qu’ils sont les champions de l’environnement, on finirait par les croire si on n’était pas sur le terrain. La situation est devenue tellement catastrophique que nos succès aujourd’hui, c’est quand on arrive à empêcher une régression ! On est vraiment dans une posture défensive face à une offensive permanente de l’Etat. On n’arrive plus à classer de nouvelles zones en aire protégées, parce que l’enjeu autour de la biodiversité n’a clairement pas été identifié par le gouvernement. Quand on entend la secrétaire d’Etat à l’Ecologie se vanter que grâce à elle on va tuer « seulement » 30 000 tourterelles, alors qu’elles sont menacées au niveau mondial, on marche sur la tête ! Comment peut-on autoriser à chasser des espèces qui vont disparaître ? » explique Yves Verilhac, Directeur Général de la LPO, pour La Relève et La Peste
Pourtant, l’importance vitale de maintenir le plus grand nombre d’être vivants possible a été bien comprise par une large partie de la société. Le dernier rapport de l’IPBES nous a averti : en continuant à anéantir à une vitesse jamais égalée les autres espèces du vivant, l’humain fera lui aussi partie de la sixième extinction de masse. ( le lien avec les pandémies, peut-être...)
Ainsi, des citoyen-ne-s français-e-s s’étaient massivement mobilisés récemment contre le massacre de milliers d’animaux sauvages.
Crédit photo : Eder Pozo Pérez Malgré 65 % d’avis négatifs émis sur la consultation, le gouvernement français avait quand même décidé d’autoriser le carnage. Il s’était justifié en préférant suivre l’avis « d’instances qualifiées comme le CNCFS (Conseil National de la Chasse et de la Faune Sauvage) ».
« C’est à croire que nos gouvernants vivent sur une autre planète, celle de certains lobbies agricoles et de la chasse. Pour la consultation sur le piégeage des oiseaux, Emmanuel Macron a reçu trois fois le CNCFS, mais il a refusé de recevoir le collectif de 14 associations de protection de la nature qui comptent pourtant 2 millions d’adhérents ! » explique Yves Verilhac, Directeur Général de la LPO, pour La Relève et La Peste
Malgré cette débâcle démocratique, la LPO est convaincue qu’il reste important pour les citoyens de participer à ces consultations publiques lorsqu’elles ont lieu, comme les onze arrêtés en cours sur le piégeage de centaines de milliers d’oiseaux.
Lorsque l’Etat prend une décision qui va à l’encontre de l’intérêt général et de l’avis majoritaire des citoyens, le rôle des lobbies est mis en lumière avec ces consultations.
« Imaginez que seuls les chasseurs répondent : l’Etat aurait beau jeu de signer ses arrêtés sans changement. La LPO a d’ailleurs saisi la Commission Nationale du Débat Public pour examiner la sincérité des consultations et va très prochainement rendre un rapport sur le sujet. Nul doute qu’il sera intéressant à lire… » prévient Yves Verilhac, Directeur Général de la LPO, pour La Relève et La Peste
Avec quatorze affaires contre neuf pays différents, l’UE semble enfin placer la protection de la nature en tête de ses priorités. L’Espagne est aussi poursuivie pour la Tourterelle des bois, l’Allemagne et la Slovénie pour destruction à grande échelle de prairies protégées, tandis que le Portugal, la Pologne et la Roumanie sont visés pour ne pas avoir désigné suffisamment de sites Natura 2000 pour la préservation de la biodiversité. Avec l’ouverture de ce contentieux, la France a maintenant deux mois pour répondre à la Commission Européenne. Sinon, elle sera traduite devant la Cour de Justice Européenne.
-
A propos du coronavirus (1)
- Par Thierry LEDRU
- Le 29/01/2020
"Les hommes sont comme les pommes ; quand on les entasse, ils pourrissent"
Michel de MontaigneIl ne s'agit pas d'un problème de santé publique.
Il s'agit d'un problème économique.
Le gouvernement chinois, dans la crise sanitaire liée au SRAS, avait été fortement critiqué par la communauté internationale car la gestion calamiteuse du virus avait plongé la Chine dans un fort ralentissement économique et bien évidemment, en tant que moteur mondial de la croissance, tous les pays de la planète en avaient subi le contrecoup.
Cette fois, le gouvernement chinois a mis le paquet... Cinquante millions de personnes en quarantaine...Une bagatelle...
Pour quelle raisons ? L'équilibre financier de la planète est sur le fil du rasoir et depuis la crise des subprimes, aucune leçon n'a été tirée. Les risques systémiques sur les marchés financiers sont toujours aussi importants et un ralentissement planétaire de la croissance pourrait avoir des conséquences dévastatrices.
Pour l'épidémie de SRAS : L’impact économique fut estimé à plus de 3.8 milliards d’euros de pertes.
Il suffit de faire quelques recherches. Tout est enregistré.
Maintenant, ça n'a pas empêché la croissance de repartir...Même si elle n'est plus du même niveau. Mais ce qui est clair, c'est que la santé publique et les quelques milliers de morts éventuels, ou même centaines de milliers, n'ont strictement aucune importance pour le gouvernement chinois.
Pour moi non plus d'ailleurs.
Je n'ai strictement aucune empathie pour le peuple chinois. Il pourrait perdre des centaines de milliers d'individus que ça me laisserait froid. Pour ceux qui ne comprendraient pas une telle indifférence, je les laisse chercher les raisons. Ici, ça prendrait trop de place.
Par contre, vu les effets mortels du comportement des consommateurs chinois avec la faune sauvage, il me plaît parfois d'imaginer le même phénomène avec les consommateurs français qui se contrefichent que les poussins soient broyés vivants et que les porcelets soient castrés à vif. Comme une espèce de retour de bâton...
"Même si l'épidémie de coronavirus est maîtrisée plus rapidement que le SRAS en 2003, l'impact économique semble maintenant être au moins d'une ampleur similaire", a écrit Mark Williams, économiste en chef pour l'Asie chez Capital Economics dans une note lundi.
Selon une estimation de Capital Economics, le SRAS a ralenti la croissance de la Chine de trois points de pourcentage au cours de son trimestre le plus touché. Dans l'ensemble, la croissance a ralenti de 8% en glissement annuel à 5% au cours de cette épidémie.
"Les données très limitées disponibles jusqu'à présent suggèrent que l'impact actuel n'est pas encore aussi grave, mais il pourrait finir par être similaire", a déclaré Williams. "Mais il est désormais certain que l'épidémie aura un impact significatif sur le PIB chinois ce trimestre".
Focus Santé & Société - Le SRAS, dix ans après (10/11/2013)
https://hongkong.consulfrance.org/Focus-no1-Le-SRAS-dix-ans-apres
Article rédigé le 09/11/2013
Le SRAS (Syndrome Respiratoire Aigu Sévère) a été la première maladie grave et transmissible à émerger au début du 21ème siècle. Transmise depuis la province de Guangdong (Chine) fin 2002, le coronavirus responsable de l’infection a contaminé 8096 personnes (dont 774 décès) autour du globe en quelques mois. La pandémie s’est avérée particulièrement sévère à Hong Kong qui dénombra 1755 cas dont 299 décès. Entraînant une désorganisation économique et sociale majeure au sein de la ville, l’épidémie fut finalement confinée, notamment grâce à des mises en quarantaine exceptionnelles, mais laissa une trace indélébile dans l’esprit des habitants et des services de santé hongkongais.
Un peu plus de dix ans après l’apparition du SRAS à Hong Kong, l’expérience acquise en termes de santé publique et les mesures mises en place depuis devraient permettre aux autorités hongkongaises d’affronter toute nouvelle émergence de maladie infectieuse. L’objectif de ce rapport est de faire le bilan de cette crise et des enseignements tirés.
1. Historique de la propagation du SRAS à Hong Kong
Le SRAS fit sa première apparition en novembre 2002 à Foshan, dans la province du Guangdong, avant de s’étendre dans d’autres localités du delta de la rivière des perles pendant plus de 3 mois. Le ministre chinois de la santé alerta mi-février de l’occurrence de 305 cas de "pneumopathie atypique", tout en stipulant que l’épidémie était "sous contrôle". Du fait que le monde ait été tenu au secret pendant plus de 3 mois de la dangerosité et du sérieux de l’épidémie frappant la province du Guangdong, les autorités hongkongaises furent prises au dépourvu lorsque les premiers cas de SRAS apparurent fin février. C’est la visite, le 21 février 2003, d’un médecin de la province du Guangdong ayant traité auparavant des patients atteints de "pneumopathie atypique" qui déclencha le début d’épidémie dans la ville. Durant sa nuitée au Metropole Hotel de Kowloon, il infecta 10 autres clients, tous séjournant au même étage. Parmi eux, neuf étaient des visiteurs étrangers qui déclenchèrent des débuts d’épidémie au Vietnam, à Singapour et à Toronto, et un était résident hongkongais. Le résident hongkongais fut admis au Prince of Wales Hospital de ShaTin où il infecta par la suite plus de 100 personnes (patients, personnel hospitalier et visiteurs). Pour le grand public, le rideau se leva le 12 mars 2003, lorsque l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) lança une alerte mondiale portant sur une épidémie de "pneumopathie atypique" baptisée Syndrome Respiratoire Aigu Sévère (SRAS) dont l’origine se situe en Chine. Cependant le facteur étiologique du SRAS était toujours inconnu. Mi-mars, les hongkongais furent informés que l’épidémie était confinée aux hôpitaux et que la chaîne de transmission inter-humaine avait été rompue. Cependant, entre le 29 Mars et le 31 Mars, 100 nouveaux patients furent hospitalisés pour des cas de SRAS. Parmi ces 100 personnes, 58 venaient de la même résidence (Amoy Gardens) et tous vivaient dans des appartements situés les uns au-dessus autres, démontrant que le virus ne se répandait pas uniquement par contact direct entre personnes. Il s’avéra que le virus circulait verticalement dans les canalisations des salles de bain (à cause d’un système d’évacuation des eaux usées défectueux), se disséminant à une vitesse prodigieuse d’un appartement à l’autre. Le département de santé de Hong-Kong développa un avis de mise en quarantaine immédiat et exceptionnel imposant aux habitants de Amoy Gardens de rester confinés dans leurs appartements pour une durée de 10 jours. Quand la police et les services de Santé arrivèrent à la résidence, ils ne trouvèrent que la moitié des résidents, nombre d’habitants ayant fui en apprenant la nouvelle via les médias. L’épidémie de SRAS était bien en train de s’étendre dans la ville. La peur du SRAS s’imbriqua alors dans la vie des hongkongais. Les places publiques étaient désinfectées plusieurs fois par jour, les masques de protection respiratoire portés en toutes circonstances, les restaurants et cinémas désertés et les écoles fermées afin de limiter la dispersion du virus. La pandémie fut finalement jugulée, selon l’OMS, en juillet 2003 soit 8 mois après le premier cas observé.
Au final, Hong Kong compta un total cumulé de 1755 cas de SRAS (dont 386 travailleurs de santé et 321 résidents d’Amoy Gardens) comptant pour 20.8% du total cumulé mondial.
L’impact économique fut estimé à plus de 3.8 milliards d’euros de pertes.
2. Leçons à tirer de l’épidémie de SRAS de 2002-2003
Plus qu’un veritable challenge de santé publique, l’épidémie de SRAS a été une tragédie pour Hong Kong, pour ses citoyens, son système de santé ainsi que son économie. Elle souligna l’urgent besoin de revoir les capacités du système de santé afin d’être prêt dans le cas de l’émergence de nouveaux virus. Bien que l’épidémie ait été globalement bien maîtrisée, il y eut cependant des dysfonctionnements importants lors des premiers jours de l’épidémie, alors que la maladie et sa cause n’étaient pas encore ou peu connus.
L’absence de déclaration de la présence d’un foyer infectieux dans le Guangdong fut en grande partie responsable de la dissémination du virus. Ce manque de communication mis en exergue que, dans un monde globalisé, les frontières nationales sont poreuses aux défis microbiens ; soulignant pour l’intérêt général que les pays partagent le plus rapidement possible les informations dont ils disposent.
Le SRAS souligna également que l’anxiété publique est capable de se répandre plus vite que le virus lui-même. Dans le cas de la résurgence d’une nouvelle épidémie, il faudra en particulier améliorer la communication publique. A l’heure où les réseaux sociaux sont capables de véhiculer des rumeurs infondées à grande échelle et en un temps record, il est du ressort des services de santé de ne plus se contenter des voies de communications traditionnelles (télévision, journaux...). Il sera également de la responsabilité de tous (systèmes de santé, gouvernements, médias...) de ne pas dissimuler et minimiser les informations comme le firent un premier temps les autorités chinoises portant un lourd préjudice au contrôle de l’épidémie.
Le SRAS a également mis en exergue les graves répercussions qu’un problème de santé peut avoir sur l’économie et la stabilité sociale. Les alertes mondiales de l’OMS et la forte exposition médiatique durant l’épisode SRAS ont suscité une prise de conscience générale par rapport aux maladies émergentes.
3. Conséquences à Hong Kong de l’épidémie de SRAS de 2002-2003
Même si la region de Hong Kong n’était pas totalement prête à faire face à une pandémie en 2003, tout laisse à penser que les mesures sanitaires prises depuis permettront à la ville d’être mieux préparée en cas de nouvelle épidémie.
La refonte du système hospitalier, la meilleure formation du personnel de santé en termes de protection sanitaire et une sensibilisation accrue de la population hongkongaise par rapport aux règles d’hygiène de base font partie de l’actif que le SRAS a laissé en héritage. C’est dans ce contexte qu’a été crée le Center for Health Protection (CHP) en Juin 2004. Ce centre renforce le système de santé publique hongkongais en mettant en place et en gérant des systèmes de surveillance, de notifications et d’éducation, en mettant en place les plans de lute anti-infectieuse et en coordonnant des collaborations dans le domaine de la recherche médicale. L’expérience SRAS a également souligné l’extraordinaire coopération scientifique mise en place afin de trouver l’agent étiologique de la maladie. Les scientifiques et cliniciens du monde entier ont été capables d’oublier leurs rivalités professionnelles pour oeuvrer ensemble dans l’intérêt de la santé publique. Un mois seulement après la directive de l’OMS de créer une coopération internationale rassemblant 11 laboratoires afin de trouver l’agent pathogène responsable, les scientifiques annoncèrent de manière collective la découverte d’un virus (SRAS-Coronavirus) de la famille des Coronaviridae, responsable de la pathologie.
4. Après le SRAS, une nouvelle menace international par un nouveau coronavirus
L’OMS a appelé le 16 février 2013 à la vigilance après la découverte d’un 12ème cas de contamination par un nouveau coronavirus (cousin éloigné du SRAS coronavirus de 2003). Identifié en septembre 2012 sur un patient décédé d’une grave infection respiratoire au Moyen-Orient, il est pour l’instant responsable de 130 infections et a entraîné la mort de 58 personnes. Ce nouveau coronavirus (baptisé MERS-Coronavirus) inquiète la communauté internationale de par son fort caractère pathogène, mais également par le fait qu’il est capable d’infecter plusieurs hôtes (homme, porc, chauve-souris) soulignant que la barrière d’espèce est faible.
A l’heure actuelle, la manière dont les humains ont été contaminés par ce nouveau coronavirus reste floue. En 2003, le travail mené par la communauté virologique mondiale avait permis de déterminer que les civettes d’élevage constituaient le réservoir du SRAS-coronavirus. L’hypothèse la plus plausible était qu’un élevage de civettes naturellement sauvages ait été infecté par un virus présent chez les chauves-souris du genre Coronaviridae, conduisant en plusieurs étapes à l’émergence d’un virus hautement pathogène pour l’homme. Concernant le MERS-Coronavirus, les premières analyses phylogénétiques ont montré que son plus proche parent est un coronavirus présent chez la chauve-souris. Ainsi comme pour le SRAS-Coronavirus, un hôte intermédiaire pourrait avoir contracté le virus avant de le transmettre lui-même à l’homme. Dans les deux cas, il semblerait que le MERS-Coronavirus et le SRAS-Coronavirus aient comme réservoir naturel les chauves-souris. Les coronavirus sont présents depuis plusieurs millions d’années chez les chauves-souris. La forte diversité (plus de 900 espèces), la longue vie du mammifère (entre 10 et 15 ans) et le fait que de nombreuses espèces partagent un habitat commun font que les coronavirus sont à même de subir un brassage génétique important. Ces recombinaisons génétiques permettent parfois aux coronavirus de s’adapter à de nouveaux hôtes, et de manière ponctuelle de les infecter (comme ce fut le cas en 2003 avec la civette). Le mode de contamination est directement lié au mode de vie de la chauve-souris. Le régime alimentaire des chauves-souris, influencé par son mode de déplacement (vol), font qu’elles ne peuvent ingérer de grandes quantités de nourriture. Ainsi, les chauves-souris frugivores mâchent sans les avaler les fruits (afin d’en extraire les sucres) puis les régurgitent au sol. D’autres espèces animales peuvent par la suite consommer ces fruits partiellement digérés et être infectés par les particules virales contenues dans les résidus salivaires.
Il semble illusoire de croire pouvoir se débarrasser des coronavirus, ces derniers étant implantés de manière pérenne chez la chauve-souris depuis des millions d’années. Cependant il est de la responsabilité scientifique de mieux comprendre l’écologie des chauves-souris ainsi que de définir les déterminants impliqués dans la transmission et l’adaptation des Coronavirus de chiroptères à leurs nouveaux hôtes, afin de prévenir l’émergence d’infections virales chez les humains.
5. Conclusion : Hong Kong 10 ans après le SRAS
Bien que les récents cas d’infection par un proche parent du SRAS coronavirus de 2003 au Moyen-Orient mettent en garde la communauté mondiale contre la possible résurgence d’une nouvelle épidémie, l’expérience dont bénéficie Hong Kong vis à vis des maladies émergentes laisse à penser que la ville sera prête à faire face à prochain challenge. Les scénarios de développement d’épidémies dépendant d’un grand nombre de variables, il est impossible de prédire où, quand et comment apparaîtra la prochaine maladie émergente. Néanmoins les avancées technologiques en termes de santé publique apporté par l’épisode SRAS à Hong Kong ont façonné les stratégies qui seront appliquées à l’avenir pour lutter contre les épidémies de maladies infectieuses.
-
Transition écologique : l'illusion
- Par Thierry LEDRU
- Le 29/01/2020
Il n'y aura pas de transition écologique sans crise ni krach financier
Olivier Passet - Directeur de la recherche, Xerfi
24/01/202006:44
"Lorsque l’on pense climat ou écologie aujourd’hui, on y adosse presque automatiquement le mot transition — transition écologique, transition climatique… — suggérant que ce processus de transformation de nos économies sera graduel, qu’il se fera sans heurt, sans grande rupture. La transition calme la peur d’un grand effondrement du système économique. Chacun sait que le temps est compté. Que sans arbitrage drastique dès aujourd’hui le réchauffement excèdera les 2°C supposés limiter les grands chambardements en termes de montée des eaux, de migration, etc…
Face à cela, on assiste au déni des dirigeants, et notamment de Trump, celui qui gouverne le pays qui émet le plus de CO2 derrière la Chine. Celui-ci en a encore fait la démonstration à Davos, fustigeant ouvertement les « prophètes de malheur » qui promettent « l’apocalypse ». Et puis il y a les autres, plus ou moins actifs. Et ceux-là agissent au nom d’une doctrine inexprimée, implicite, qui mérite que l’on s’y arrête.
La transition se ferait grâce au marché
La transformation du capitalisme se fera à travers le marché, et il s’opérera graduellement. Pour ce là,1) il suffit de mettre en place un système de prix, via les taxes carbones, qui modifie les comportements de consommation et d’investissement ;
2) le processus d’innovation réglera une partie du problème : au fur-et-à mesure qu’une technologie est disqualifiée car son coût carbone est prohibitif, grevant sa rentabilité, les investissements se porteront spontanément sur les process et technologie bas carbone de substitution ;
3) les marchés boursiers vont eux-mêmes intégrer graduellement dans les cours le risque de disqualification et de perte de rentabilité des secteurs émetteurs, accélérant le processus de redéploiement du capital.
Au diapason de cette représentation, Larry Fink a récemment fait sensation. Le patron de BlackRock, leader mondial de la gestion d’actifs a exprimé sa volonté de se désengager de l’industrie du charbon et son souhait que le reste de ses actifs soit aligné sur les accords de Paris.Selon cette vision, le capitalisme se réformerait de l’intérieur par le marché. Face au spectre d’un totalitarisme vert — qui imposerait d’autorité de nouvelles pratiques et qui bute sur l’impossibilité d’une gouvernance mondiale coordonnée et pacifique de la transition — s’oppose la grande confiance dans la résilience du système capitaliste, qui a toujours su internalisé par le passé les nouvelles contraintes, se réinventer et prospérer à travers ces contraintes.
1) Face à la gouvernance mondiale impossible, le système de prix est le seul outil efficace pour coordonner de façon invisible les initiatives privées.
2) La transition écologique ouvre un processus de destruction créatrice qui génère à terme un modèle de croissance verte… La contrainte sera convertie en opportunité. Bref, la transition sera douce, voire heureuse et permet d’accéder à un nouveau palier de bien-être humain.
De rares solutions de substitution au carbone
Même à supposer que les objectifs climatiques soient atteints à termes, peut-on croire à cette version de la transition douce ? Le premier point d’achoppement, on le connaît : le juste prix du carbone se heurte à deux réalités contrariantes.
• Premièrement, il est socialement problématique, pénalisant de façon insoutenable les bas revenus. Face à cela, dit-on, il suffit de mettre en place des chèques compensateurs pour amortir les effets anti distributifs des taxes. Néanmoins, 85% des émissions mondiales de gaz à effet de serre ne sont toujours pas tarifées à ce jour, et les trois-quarts environ des 15% restant le sont à un prix inférieur à dix dollars la tonne, alors même que les experts préconisent entre 40 et 80 dollars la tonne en 2020, et entre 50 et 100 dollars en 2030. Autant dire que la bombe sociale écologique est loin d’être désamorcée et que le levier magique de conversion du capitalisme aux enjeux climatiques paraît tout simplement ni politiquement, ni socialement mobilisable.
• Deuxièmement, il n’existe pas sur le marché de solutions de substitution dans de nombreux cas, permettant des comportements de substitution.Concernant l’automobile, l’option électrique est coûteuse et n’offre ni une autonomie, ni des infrastructures de soutien équivalentes à celle des véhicules essence. Sur ce champ précis, peut-être peut-on considérer que l’on est proche du but. Mais il est clair que côté offre, l’industrie automobile se hâte à ne pas presser le pas, face à un bouleversement qui dynamite toute leur chaîne de valeur. Mais que dire du transport aérien, que dire de l’industrie chimique, de l’agriculture, de l’agro-alimentaire ? Où sont les modèles de production alternatifs, technologiquement murs ? Comment espérer dans ce contexte pricer le carbone et éviter un choc de demande massif ?
Le risque des actifs échoués
Au-delà de ce problème, et plus déstabilisant encore, il y a la problématique des actifs potentiellement échoués de la transition écologique : il s’agit de toutes les immobilisations dans les industries productrices d’énergie fossile, mais aussi les compagnies aériennes, le transport maritime, l’automobile, le bâtiment…Atteindre les objectifs de Paris, cela signifie déclasser massivement du capital installé… Je ne me hasarderai pas à chiffrer cette masse. Elle est considérable et incontestablement cela veut dire aussi un choc massif sur les capitalisations financières, avec en ricochet un très fort risque sur les gestionnaires d’actifs et les fonds d’assurance et de retraite. On peut toujours croire que la magie du marché remplacera 1 pour 1, le capital détruit…. Mais on le sait aussi, historiquement, quand il faut produire un effort massif d’investissement, en peu de temps, avec un retour sur investissement à très long terme, ce sont les États qui sont en première ligne.
Croire que le marché va tout résoudre, est un pur phantasme. Il faut bien alors se l’avouer : il n’y aura pas de transition écologique sans désordre et sans de violents krachs financiers. Si les prix ne font pas le job, c’est la crise qui le fera."Je renvoie à ce film :
Et à ces anciens articles :
-
"Renaissance écologique" de Julien Dossier
- Par Thierry LEDRU
- Le 26/01/2020
La fresque de Julien Dossier et Johann Bertrand d’Hy pour représenter une ville et une campagne durables.
(JULIEN DOSSIER, JOHANN BERTRAND D'HY / RENAISSANCE ECOLOGIQUE)
Partir d'une œuvre de la renaissance italienne pour imaginer un monde moins carboné face au changement climatique. C'est la démarche originale entreprise par Julien Dossier dans son livre Renaissance écologique (Actes Sud, 2019). L'auteur, qui dirige le cabinet de conseil Quattrolibri et s'est notamment occupé de la stragérie zéro carbone de la ville de Paris, a réalisé, avec l'aide du dessinateur Johann Bertrand d'Hy, une version contemporaine de L'Allégorie des effets du bon gouvernement, peinte par Ambrogio Lorenzetti en 1338.
En y illustrant "24 chantiers pour le monde de demain", le Nantais propose une vision de la transition écologique pour limiter les effets du réchauffement climatique en cours. Avant son intervention au sommet Change Now, jeudi 30 janvier, au Grand Palais à Paris, franceinfo a interrogé cet expert de la ville durable sur sa démarche.
Franceinfo: Qu'est-ce qui vous a décidé à vous lancer dans une adaptation de la fresque de Lorenzetti ?
Julien Dossier : C'est l'expérience de l'après-sommet mondial des villes durables en 2013 et de l'après-stratégie zéro carbone de la ville de Paris. Dans les deux cas, nous avions une information riche. Mais comment la communiquer ? Comment faire vivre un rapport technique de 367 pages de manière à enclencher une dynamique de transition ? Tout cela pose la question de la diffusion de la connaissance.
Sur le réchauffement climatique, l'information factuelle existe depuis plusieurs décennies. Nous ne manquons pas d'informations pour décrire les effets du changement climatique sur la planète et son origine humaine. Force est de constater que notre cerveau ne réagit pas de manière rationnelle sur ce sujet-là. Nous n'avons pas une traduction pratique de ce qu'on apprend, de ce qu'on comprend... Pour engager des changements de trajectoire, il faut sortir de la pure démonstration logique et toucher d'autres registres. Dans la fresque de Lorenzetti, on voit un monde résilient et quand on analyse les composantes de cette fresque, on a les clés de la transition pour aujourd'hui.
Selon vous, pourquoi la rationalité ne suffit-elle pas face au réchauffement climatique ?
C'est une question qu'on peut poser à tous les fumeurs, qui savent lire "Fumer tue" et qui pourtant prennent un paquet de cigarettes. Il y a un poids de l'habitude, une dépendance par rapport à un mode de vie qui fait qu'on ne change pas de manière radicale. Radicale, pas dans le sens violent, mais dans le sens d'aller à la racine, de toucher les fondements du système qu'on doit aujourd'hui faire bouger. Je pense qu'il y a en partie un problème d'imagination, de marge de manœuvre et d'émotion.
Nous sentons que les sujets sont graves, mais nous espérons ne pas être touchés. Nous nous sentons à l'abri, nous croyons que nous n'avons pas besoin de changer. Ce raisonnement-là est de moins en moins vrai parce que les ramifications des catastrophes climatiques finissent par nous toucher : qualité de l'air, sécheresses, inondations.
Dans votre livre, vous critiquez la vision communément admise du mur vers lequel nous nous dirigeons, ainsi que la notion d'effondrement soudain. Vous écrivez : "Comme dans une pièce de Beckett, nous attendons une forme d’effondrement qui ne viendra pas". Pourquoi ces notions ne vous conviennent pas ?
Nous nous construisons une image de l'effondrement à la manière d'Hollywood, qui livre des films comme Blade Runner 2049, Mad Max ou Wall-E. Dans ces films, on nous montre un monde qui s'est effondré, qui ne marche plus du tout, une vision post-apocalyptique. Ces films disent qu'il y a eu une catastrophe planétaire, un événement unique, qui a eu des conséquences sur toute la planète. Cette vision hollywoodienne nous fait attendre une grande catastrophe, un événement qui va tout casser. Cet imaginaire nous empêche de regarder ce qui est en train de se passer, en Australie ou en Amazonie, ce qui s'est déjà passé et qui devrait nous alerter. Il ne s'agit pas d'attendre une crise ultime, parce qu'en attendant, nous ne sommes pas à l'œuvre pour résoudre les crises actuelles.
Votre livre enjoint le lecteur à se lancer dans une véritable transition écologique. Par où commencer ?
Il faut entrer dans une approche segmentée, pour ne pas proposer de solutions uniformes. Quelqu'un sous la contrainte d'une mobilité subie, qui manque de moyens pour investir, rénover sa maison ou se nourrir autrement ne va pas avoir la même réponse que quelqu'un qui a les moyens de faire tout cela. Nous avons besoin d'avoir une réponse diversifiée, adaptée aux circonstances de chacun.
Le point commun qui va peut-être réunir tout le monde, c'est de consacrer du temps à ce sujet. On peut l'utiliser pour s'informer ou pour changer ses habitudes de transport. Vous pouvez par exemple vous dire, au début, que vous consacrez 15 minutes pour la planète par semaine. Ce quart d'heure, vous pouvez l'allouer à des temps de trajet. Je peux accepter 15 minutes de plus sur mon temps de trajet, divisé par cinq jours actifs, cela fait 3 minutes que je peux consacrer à attendre que quelqu'un vienne me chercher si je fais du covoiturage.
Sur la question écologique, il y a un grand débat entre les gestes individuels et les actions collectives, d'associations ou d'entreprises. Certains se disent : "Cela ne sert à rien que je change mon comportement tant que telle entreprise continue d'extraire des énergies fossiles." Dans votre ouvrage, vous plaidez pour l'action individuelle. Pourquoi ?
Nous avons besoin d'agir sur tous les fronts, de se saisir des moyens dont on dispose, là où on en dispose. Pour moi, l'objectif, c'est de rendre chaque instant que nous vivons dédié à cette urgence climatique. Quand ces choix se traduisent à l'échelle individuelle, agissons à l'échelle individuelle : le contenu de notre assiette, la façon dont on utilise notre temps... Chercher à s'informer sur ces questions-là plutôt que de regarder des vidéos de chats sur internet, c'est un choix individuel.
Ensuite, il y a des actions qui nous engagent dans notre capacité à être parent d'élève, électeur, employeur ou investisseur. C'est le fait de réunir l'action de plusieurs personnes et d'unir nos forces qui donne du sens à ce que chacun d'entre nous peut faire. A l'échelle d'un groupement d'entreprises, on peut parler de covoiturage, d'espace de coworking avec un impact significatif sur un bassin de vie de centaines de milliers de personnes. A plus petite échelle, nous pouvons agir à l'échelle d'un quartier, dans une cage d'immeuble, dans une fête d'école, dans une salle de spectacle. Tous ces leviers-là nous permettent de gagner en impact.
Pour vous, il n'y a donc pas de petits gestes ?
Il faut cibler l'efficacité, ne pas se tromper d'ordre de grandeur. Dans son livre L'énergie durable : Pas que du vent ! (De Boeck, 2015), David MacKay rappelle que quand on débranche un chargeur de téléphone pour éviter de consommer de l'électricité, on touche 0,5% de la consommation du foyer par jour. C'est très bien de le faire, mais l'essentiel est ailleurs. Il y a également une différence entre les "projets petits pas", qui nous font pédaler comme des hamsters dans une roue mais qui ne nous font pas avancer d'un pas, et les "actions premier pas".
Dans le livre, je prends cette image de la craie. Dans une école, un matin, cette craie permet de tracer dans la cour les voies de circulation qui mènent à l'école. Nous pouvons localiser l'habitat des enfants qui vivent à moins de 500 mètres et dans la matinée, nous avons organisé un pédibus [un ramassage scolaire à pied], que nous pouvons mettre à l'œuvre dans l'après-midi.
Après avoir fait cette matinée à la craie, l'étape suivante, c'est de trouver des solutions pour des enfants qui habitent à plus de 500 mètres de l'école. Là, nous avons besoin d'équipements, de vélos, de triporteurs, de trottinettes. Il faut le temps de les acheter, il faut libérer des moyens.
Il faut donc éviter de se dire : "C'est bon, je fais déjà des efforts, je peux m'arrêter là" ?
Il ne faut pas se mentir. J'ai reçu quelques semaines après les fêtes de Noël un message d'un ami, qui disait "Voilà, je suis parti à Oman, maintenant, j'aimerais compenser mon voyage en avion. Qu'est-ce que tu recommandes ?" Je lui ai recommandé un mécanisme de compensation, la location de parcelles forestières dans lesquelles du carbone est séquestré, mais surtout j'ai répondu en disant qu'il est urgent de lire le résumé pour décideurs du rapport spécial du Giec à 1,5°C. Puis, je l'ai invité à poser la question de savoir s'il fallait continuer aujourd'hui de planifier des voyages dans des destinations comme celle-là. N'avons-nous pas d'autres formes d'actions de loisir plus proches de nous qui permettent de se passer de l'avion ?
Il ne s'agit pas de 'renoncer à', il s'agit d'apprendre à aimer autre chose et de se tourner vers d'autres désirs, d'autres sources de plaisir et de découverte.
La compensation peut être un véritable outil. Mais si c'est une simple excuse pour se donner bonne conscience en prenant l'avion pour aller faire la fête à Marrakech, c'est honteux.
Il y a un autre discours, que l'on entend chez les personnes qui rechignent à changer leurs habitudes pour tenir compte de la crise climatique. C'est celui qui consiste à dire : "L'innovation technologique nous sauvera." A l'inverse, dans votre fresque, vous ne proposez que des techniques qui existent déjà. Vous ne croyez pas à cet argument de l'innovation ?
Non. D'abord, parce que nous manquons de temps. Il faut prendre la mesure de l'inertie du déploiement des nouveautés. Quand on parle d'innovation dans le secteur aérien, on parle de quelques pourcents de la flotte de 2050 qui pourra envisager de bénéficier des véritables améliorations techniques. Mais l'immense majorité des avions qui voleront en 2050, s'ils volent encore, existent déjà. Soit ils sont déjà en service, soit ce sont ceux qu'on sort des lignes en ce moment. Ces avions-là ne sont pas compatibles avec les objectifs de neutralité carbone. Inverser la tendance sur des systèmes techniques, c'est long et nous manquons de temps.
La deuxième partie de la réponse, c'est que nous créons des complexités en allant vers des systèmes techniques qui supposent une extraction de matière première, de la consommation d'énergie pour les distribuer et des technologies, y compris numériques, pour en suivre la maintenance... Sur ces variables-là, il y a de forts risques d'approvisionnement : nous manquons de ressources minières en métaux et en terre. Il va y avoir des tas de blocages dans le déploiement de ces technologies. Par exemple, il faut prendre la mesure de la consommation de données de solutions automatisées. Quand on parle de la voiture autonome, c'est le patron d'Intel qui indiquait que les données pour un million de voitures sont équivalentes à celles de 3 milliards de personnes. Nous ne pouvons pas imaginer un déploiement à grande échelle de ces technologies-là. Nous ne ferions que transformer le problème du climat en un problème d'énergie. Nous devons être sobres dans les solutions qu'on utilise et augmenter nos chances de réussite en utilisant ce qu'on maîtrise.
Sur la gauche de votre fresque, vous avez dessiné votre ville durable. Quelles sont ses caractéristiques ?
Il y a une double urgence dans les villes. Nous ne sommes pas seulement dans une urgence d'atténuation des émissions, mais aussi d'adaptation. Quand il a fait 40 °C à Paris l'été dernier, nous pouvons imaginer que les étés prochains ne vont pas être tellement plus froids. Nous devons privilégier des solutions de végétalisation et de déminéralisation des villes pour réduire l'effet "îlot de chaleur". Cela pose une question sur l'aménagement et sur la gestion du foncier. Aujourd'hui, on voit du foncier et on se dit : "Qu'est-ce qu'on va bien pouvoir bâtir dessus ?". Demain, il faudra regarder cela autrement. C'est sur ces espaces-là qu'on va devoir se poser la question de "Comment faire pousser des arbres ?" Nous avons besoin d'arbres : un arbre, c'est trois climatiseurs en ville. Une approche par le végétal a énormément de vertus : elle participe à l'adaptation au changement et réduit la consommation d'énergie.
Cette notion de proximité est aussi un vecteur de lien social. Les villes sont un véritable creuset de mobilisation, on peut se sentir efficace, on se fait confiance les uns les autres dans un réseau urbain de proximité. On croise des visages connus, on est fidèle à tel ou tel commerçant, on peut partager l'effort, il est plus facile dans cette proximité d'adopter des modes de vie type "zéro déchet" où il est normal d'arriver dans un magasin avec des emballages que nous apportons, parce que ça fait partie d'un mode de vie qu'on partage ensemble. Cela crée aussi des débouchés pour des producteurs à proximité des villes qui, aujourd'hui, cherchent à améliorer leurs revenus en vendant en direct ou en réduisant les distances de transport.
Dans les villes, il y a évidemment un stock de bâtiments à rénover. Il y a trop de copropriétés privées qui n'ont pas les moyens de financer leur rénovation. Nous pouvons nous poser la question de la mutualisation des opérations entre les copropriétés solvables et celles qui ne le sont pas. Il y a des questions de redistribution évidentes et d'engagements financiers de la part de grands investisseurs.
Dans la ville que vous dépeignez, la différence frappante avec les métropoles actuelles est l'absence de voitures. Est-ce réaliste ?
Cette fresque est une allégorie. Nous évoquons des fonctions, nous ne cherchons pas une représentation totalement réaliste. De manière générale, dans les villes, l'enjeu pour moi se résume à une question de relocalisation. Avoir une diversité de fonctions, commerces et ressources à proximité, c'est la clé. C'est cela qui nous permet d'avoir un choix de modes de déplacement beaucoup plus riche et beaucoup moins carboné. Si nous avons 15 minutes à pied pour faire tout ce dont on a besoin, à aucun moment nous allons sentir le besoin d'avoir une voiture.
Au centre de votre fresque, il y a une série de bâtiments que vous appelez "la membrane" et qui sépare la ville de la campagne. Pouvez-vous nous expliquer en quoi cela consiste ?
C'est important de revenir sur l'équilibre général de la composition. C'est un grand rectangle, divisé en deux avec, à parts égales, une partie urbaine avec des usages en ville et une partie rurale, avec des usages à la campagne. Pour moi, il est essentiel d'avoir cela en tête, nous sommes dans un système mutuellement dépendant : la partie urbaine a besoin d'une partie naturelle pour produire à manger. C'est là où l'essentiel de l'alimentation des villes se passe. Sans campagne, il n'y a pas de céréales, de bétail, de fruits ou de légumes. Les villes ne peuvent pas fonctionner seules, elles ne disposent pas de la surface nécessaire intra-muros pour cultiver du blé ou de forêts permettant de créer des charpentes pour les ossatures bois.
Ensuite, la zone de frontière n'est pas une séparation, qui oppose l'un à l'autre, mais une zone qui construit l'alliance entre ces deux grands systèmes. Ces zones frontières sont des zones où l'on va retrouver des implantations industrielles, là où on va avoir la rencontre de la main-d'œuvre qui vient des villes et des matières premières acheminées de l'extérieur. C'est aussi là où on va stocker des réserves, qui vont être des silos à grains, des chambres froides... Ce sont des zones ressources qui sont dans des interfaces entre partie urbaine et partie rurale. On y voit également une gamme de solutions de transport : un tram-fret pour transporter passagers et marchandises, du covoiturage, des pistes cyclables aménagées pour des triporteurs, pour nous permettre de sortir de "l'autosolisme", cette façon d'être seul dans sa voiture à moteur thermique.
A droite, vous dessinez une campagne où l'on voit beaucoup de cultures et peu d'élevages. Dans votre monde durable, l'alimentation est donc moins carnée que dans le nôtre ?
Je me suis référé aux travaux de Solagro, un projet qui s'appelle Afterres 2050. C'est la traduction dans le milieu agricole des objectifs de l'accord de Paris. Nous savons que la bascule d'une alimentation d'origine carnée à une alimentation d'origine végétale est beaucoup plus sobre en ressources. Il faut sept fois plus de ressources en surface pour produire la même quantité de protéines animales que de protéines végétales. Nous devons donc réduire massivement les émissions en réduisant notre consommation de viande. Il s'agit d'accompagner cette bascule avec une émergence d'une alimentation qui utilise beaucoup plus les céréales et les légumineuses.
L'animal est présent dans cette fresque, pour rappeler qu'on a besoin de matière organique pour fertiliser le sol. Le réchauffement climatique pose la question du bon dimensionnement de la place de l'animal.
Aujourd'hui, nous avons développé une surconsommation de viande, des mêmes morceaux, nous pensons steak, rumsteak, gigot, blanc de poulet, nous sous-utilisons une grande partie de l'animal. C'est une source de perte d'efficacité.
Il faut multiplier le nombre de bêtes pour faire le même nombre de côtes de bœuf, nous avons des pratiques alimentaires qui ne sont pas efficaces. Le mode d'élevage intensif, souvent hors-sol, dépend de l'importation de tourteaux de soja venant principalement du Brésil, sur des sols conquis sur la forêt primaire en Amazonie. Il y a des effets en cascade qui sont provoqués pour répondre à une tendance actuelle d'extension des élevages en stabulation [des élevages en espaces restreints et clos], avec des circuits d'animaux qui donnent le tournis. J'ai en tête, dans la Loire, des installations qui font venir des veaux d'Italie pour les faire pâturer quelque temps en France, puis les faire repartir. Ce sont des norias de camions derrière.
Ce n'est pas visible dans la fresque, mais vous défendez dans votre livre une agriculture sans pesticides. Que répondez-vous à ceux qui estiment que nous ne pouvons pas nourrir l'ensemble de la population sans l'agrochimie ?
Ce qui est frappant, c'est de constater que l'opposition entre pro et anti-pesticides est aujourd'hui très stérile. Nous avons d'un côté une mesure de la productivité à l'hectare sur une récolte : si je charge mon sol en engrais et que je mets tel traitement chimique, j'obtiens tel rendement. Mais ces gens-là oublient de calculer l'impact élargi de ce genre de techniques, comme le phénomène des algues vertes en Bretagne. Nous n'avons pas imputé aujourd'hui le coût et l'impact de pertes de biodiversité sur les pratiques agricoles. Nous n'imputons pas les externalités négatives au prix du kilo ou au prix à l'hectare.
De l'autre côté, nous avons une mesure de la valeur sur un temps long. Dans l'agroécologie, on a besoin de mesurer la stabilité des écosystèmes sur des temps plus longs, pas seulement sur une saison, mais sur cinq, dix, quinze saisons. On ne mesure pas la même chose sur des horizons de temps différents. J'espère qu'on pourra arriver à un débat apaisé en se mettant d'accord sur les termes du débat. Aujourd'hui, nous n'avons même plus les termes du débat en commun, donc nous avons, forcément, deux visions du monde.
Dans votre fresque, on voit des panneaux solaires en ville, des éoliennes à la campagne, un barrage, un méthaniseur agricole... Est-ce que vous croyez à un scénario 100% énergies renouvelables ? Nous en sommes très éloignés aujourd'hui.
Nous en sommes très loin. Mais, en même temps, nous avons de très nombreuses sources, dont l'Ademe, qui ont fait des modélisations de scénarios 100% énergies renouvelables. On a tendance dans le débat français à se concentrer sur les débats du côté de l'offre et à minimiser le potentiel de la transformation de la demande. Or la proximité est un facteur d'efficacité énergétique. Nous allons réduire les distances et simplifier les outils qu'on va utiliser. Si on se déplace en marchant ou à vélo, le déplacement est beaucoup moins consommateur d'énergie.
Dans cette fresque, l'homme se consacre à un autre objectif que l'accumulation matérielle, donc nous consommons beaucoup moins.
Mais ce n'est pas une vision de décroissance : dans cette fresque, il y a énormément de choses à faire. C'est une vision de plein-emploi, de production pour mettre en œuvre cette transition.
Par exemple, dans cette fresque, il y a un mur à pêches, qui est un véritable réservoir d'efficacité énergétique. C'est un mur de briques qui permet de stocker la chaleur du soleil dans la journée et de la restituer sur une plage élargie. On optimiste la captation du rayonnement solaire, chaque fruit bénéficie d'un maximum d'apport d'énergie du soleil et on coupe le vent, on protège la plante des effets des vents froids en hiver. Cela permet de produire des fruits plus au nord et de ne pas en faire venir de loin. Le cumul de ces actions montre qu'on a un réservoir de réduction de consommation d'énergie considérable.
Dans votre livre, vous plaidez pour un "strict encadrement" de l'économie de marché et pour "une puissance publique forte". Un changement qui risque d'être combattu par les milieux économiques. Comment opérer cette transition ?
Il y a aujourd'hui une tension qui se crée entre des pratiques d'un ancien temps et celles qui sont largement souhaitées et portées par la société. Mais nous avons des alliés économiques qui sont en train de faire basculer les décisions, notamment les investisseurs de long terme, comme les fonds de pension ou les caisses de retraite, qui doivent prendre en compte le climat dans l'impact de leurs investissements, à horizon dix, vingt ou trente ans. Ce sont ces acteurs qui ont été les premiers à peser sur les décisions de désinvestissement dans le charbon. Nous sommes aujourd'hui en train d'élargir le périmètre aux hydrocarbures.
Il faut lire en détail la lettre de Larry Fink, le patron de BlackRock très décrié par ailleurs, quand il prescrit aux patrons des entreprises dans lesquelles son entreprise investit un reporting de leurs actions en fonction de la compatibilité vis-à-vis de l'accord de Paris. Des groupes aujourd'hui très loin de la question vont se retrouver fragilisés pour continuer leurs activités. C'est une première tendance.
Par ailleurs, certains acteurs ont pris la mesure des risques sur les activités dont ils dépendent. Il faut écouter Pierre-Emmanuel Taittinger, qui dit : "Moi, en tant que producteur de champagne, je suis directement impacté par ces évolutions et la continuité de mon activité est en cause."
La crise des "gilets jaunes", déclenchée par la taxe carbone, a montré qu'il y avait un énorme enjeu d'acceptabilité sociale sur ces questions. Dans votre livre, vous faites le diagnostic d'un déficit démocratique sur ces sujets. Comment le combler ?
L'objectif est de devenir collectivement des citoyens actifs et de s'emparer de ce sujet. Il faut regarder étroitement les programmes des candidats aux élections municipales et faire le tri entre celles et ceux qui auront établi l'état d'urgence climatique comme premier point du programme et ceux qui ne seront pas compétents. Nous devons dépasser un moment où nous attendons que les solutions viennent des élus ou du gouvernement, nous devons nous considérer comme coacteurs de ce changement. Soyons actifs, ne soyons pas consommateurs."
-
Promoteurs immobiliers contre population locale
- Par Thierry LEDRU
- Le 25/01/2020
Ce qui me sidère dans ce projet, c'est de voir que la contestation locale ajoutée à celle du Conseil régional pourraient ne pas suffire à annuler définitivement les volontés des promoteurs immobiliers (et des banques qui les soutiennent ).
Comment est-il possible de passer outre une telle contestation, avec des arguments aussi soildes et incontestables ? Comment est-il possible que la puissance financière puisse encore se faire entendre ? C'est avec ce genre d'exemples qu'on réalise à quel point les volontés marchandes ont depuis bien longtemps pris le pas sur le bon sens et à quel point les volontés locales de protection et de développement réfléchi n'ont que peu de pouvoir...Le Conseil régional s'oppose au projet, c'est à dire également la voix populaire puisqu'il s'agit d'élus. Elus contre promoteurs... Affaire à suivre...
(En France, le conseil régional est l'assemblée délibérante des régions. Il gère les affaires de la région. Il exerce des compétences notamment dans le domaine des lycées, des transports dits « régionaux » (transport express régional) et de l'action économique. Depuis 1986, ses membres sont élus au suffrage universel direct pour six ans. Son président exerce les fonctions exécutives.)
PETITION :
https://lareleveetlapeste.fr/un-village-de-luxe-touristique-veut-artificialiser-400ha-dans-une-zone-natura-2000-en-sologne/?fbclid=IwAR0RGlPeKojUrErcSzd_FYUU43-qvTYNlkj76ylAml7pQhxuSX3qhEI5hFA
Un village de luxe touristique veut artificialiser 400ha dans une Zone Natura 2000 en Sologne
24 janvier 2020 - Laurie DeboveA la Ferté-Saint-Cyr, les promoteurs du projet « Chambord Country Club » veulent créer un immense complexe touristique de luxe sur 400ha dans une zone classée Natura 2000. Cela fait pourtant dix ans que la population locale s’oppose au projet, une mobilisation s’organise face à la ténacité des promoteurs.
Un village de luxe en circuit fermé
Le « Chambord country club » prévoit la construction d’un golf de 27 trous, 565 résidences de luxe, des piscines, des tennis et un centre équestre, sur la commune de la Ferté-Saint-Cyr, à quinze kilomètres du château de Chambord, en pleine forêt de Sologne. Ce projet entièrement privé a un coût estimé de 400 millions d’euros. Le but : capter les touristes les plus fortunés qui viennent visiter les châteaux de la Loire.
Ce projet de complexe touristique vise ainsi une population très spécifique (chasseurs, golfeurs, parisiens et retraités), les maisons allant être vendues entre 500 000 et 1,5 million d’euros. Bernard Saunier, gérant de Saneo qui porte le projet, estime que « 20 % des propriétaires devraient y habiter à l’année, soit un minimum de 1.500 € par an et par maison de recette fiscale supplémentaire » pour la Mairie. Ce complexe de luxe promet de créer plus de 200 emplois à terme, un argument que réfute le Conseil régional Centre-Val de Loire.
« La Sologne ne doit pas devenir, plus encore qu’elle ne l’est déjà, une « réserve » pour touristes ou résidents aisés venant « consommer de la nature ». S’arrêter aux 220 emplois potentiels ne peut pas justifier l’implantation de ce projet, car il est trop impactant pour le territoire et parce que la privatisation d’une zone naturelle classée au profit d’une offre touristique et de loisirs réservée à une élite n’est pas acceptable. D’autres alternatives pour l’emploi pourraient exister, qui feraient de la biodiversité et de son respect un atout pour le territoire. » exprime ainsi le Conseil régional Centre-Val de Loire dans ses voeux
Crédit : Wilmotte & Associés Même son de cloche pour les habitants de la Ferté-Saint-Cyr qui s’opposent au projet dans la pétition mise en ligne. Pour eux, ce village de luxe est inutile car « des maisons non reprises se meurent dans les villages voisins ». Surtout, alors que tout est pensé pour que les gens restent et consomment sur place, ce village de luxe en circuit fermé ne va pas inciter ses touristes à dépenser à l’extérieur.
L’artificialisation des sols et usage de l’eau
Proposé une première fois en 2009, le projet avait été rejeté par le tribunal administratif suite à la plainte des habitants locaux qui ne voulaient pas voir la forêt de Sologne déboisée. En effet, à l’heure où la sixième extinction de masse est en cours et où l’on sait que l’artificialisation des sols en est la première cause, comment justifier de dénaturer 400 hectares de forêt pour des habitations secondaires et touristiques ?
Crédit : Wilmotte & Associés « La Sologne est déjà mitée par des projets comme ça ! Ce projet vient se rajouter à plein d’autres, il y a déjà 4 golfs dans un rayon de 25km, et l’un d’entre eux aura même une clôture commune avec le Chambord Country Club ! La Forêt de Sologne est la plus grande zone Natura 2000 d’Europe mais tout le monde met des grillages sur sa propriété ce qui empêche la libre circulation des espèces donc il y a une bataille pour lutter contre l’engrillagement, et ce projet ne va pas arranger la situation. » explique, pour La Relève et La Peste, Charles Fournier, vice président du conseil régional et président du groupe écologiste qui s’oppose au projet
Le Conseil Régional Centre Val de Loire a ainsi voté un nouveau schéma régional d’aménagement du territoire qui fixe la neutralité foncière à 2040. Il est également très préoccupé par les ressources en eau que va nécessiter ce complexe touristique de luxe, notamment les 75 000m3 par an destiné à la pelouse du golf. Un choix de consommation d’eau qui n’est pas en accord avec la réalité de la région qui a été soumise à des interdictions totales de prélèvements d’eau en juillet 2019. Et ces pénuries risquent de se répéter de plus en plus chaque année, la crise climatique étant déjà un « assèchement climatique » en France.
La proximité de la centrale nucléaire pose également question aux élus pour la sécurité des vacanciers en période de haute fréquentation, si jamais la zone devait être évacuée. Face à la polémique, le château de Chambord a demandé à ce que son nom soit retiré du projet, dans lequel il n’intervient pas.
Dans les prochaines semaines, une enquête publique va être lancée sur l’aspect environnemental du projet. De son côté, le Conseil Régional est déterminé à utiliser tous les instruments légaux pour empêcher ce projet « du vieux monde » de voir le jour.
"Session du 19 décembre 2019
Vœu présenté par le groupe écologiste Chambord Country Club : la biodiversité en Sologne ne doit pas être sacrifiée pour un projet immobilier Abandonné en 2014 après un recours en justice de riverains contre le permis d’aménager, le projet de complexe résidentiel, golfique et touristique de luxe Chambord Country Club, au lieu-dit Les Pommereaux, sur les communes de La Ferté-Saint-Cyr et Saint-LaurentNouan dans le Loir-et-Cher, est de retour.
Ce projet privé, coûtant un demi-milliard d’euros, prévoit, sur un terrain de 400 hectares, un ensemble résidentiel de 565 maisons, un hôtel cinq étoiles de 54 chambres, un golf de 27 trous sur 160 hectares, un centre équestre, une piscine et des terrains de tennis. Il est situé sur le site Natura 2000 le plus important d’Europe et qui fait l’identité de la Sologne. La société SANEO, qui porte le projet, entend faire démarrer les travaux en 2021. L’objectif de réduction de l’artificialisation des terres est au cœur des ambitions du SRADDET sur lequel le Conseil régional a travaillé depuis plus d’un an.
Il s’agit là d’un enjeu déterminant pour notre avenir, tant pour protéger la biodiversité en grand danger que pour préserver nos terres agricoles. Nous sommes entrés dans la sixième extinction de masse des espèces, très largement d’origine anthropique. C’est pourquoi nous ne pouvons pas accepter de voir notre biodiversité s’effondrer et laisser à penser que cette perte, lorsqu’elle est causée par des projets comme celui du Chambord Country Club, peut être compensée.
Force est de constater que la compensation écologique, inscrite dans la loi depuis 1976, n’empêche pas la perte de biodiversité. D’abord parce qu’elle ne prend que très rarement en compte la biodiversité dite « ordinaire ». Ensuite parce qu’elle est une compensation structurelle (un habitat ou X espèces) et non fonctionnelle (les fonctions ou les services écologiques fournis). Enfin, parce qu’elle repose sur des mesures d’impacts qui ne regardent que les espèces présentes à un instant T dans le milieu et non les dynamiques qui pourraient être à l’œuvre. Il y a une rupture de continuité, incompatible avec un état écologique préservé et permanent. Le sujet est donc tout sauf comptable.
Les promoteurs du Chambord Country Club se targuent d’une augmentation de 8 % du boisement du site après travaux par rapport à la situation initiale, mais le bon état naturel ne se mesure pas ainsi, à coup de pourcentage de compensation. Ce projet, qui se drape d’apparences « vertes », artificialiserait en réalité des terres agricoles et des zones forestières sur un site Natura 2000 et perturberait intensément l’écosystème. Quel sens donner à ce type de site si nous revenons dessus et que nous ne les protégeons pas ?
Par ailleurs, la zone a été entièrement inondée en 2016. La pression humaine (l’objectif est d’accueillir 2 000 personnes en saison haute) serait incompatible avec les limites naturelles du site. La biodiversité risquerait d’être irrémédiablement perdue, la réhabilitation d’un deuxième forage d’eau laissant présager une forte pression sur la ressource en eau, sans compter la perturbation de l’équilibre hydrologique de cette zone humide.
A cela s’ajouteraient d’autres nuisances : à terme, en situation de pointe le week-end (hors période estivale), le surcroît de fréquentation estimé est d’environ 420 véhicules par jour. C’est également incompatible avec les objectifs de mobilité posés par le SRADDET.
Alors qu’un golf classique de 18 trous consomme 50 000 m3 d’eau à l’année, celui-ci serait de 27 trous. Après la sécheresse de l’été dernier, cette perspective ne semble là aussi pas raisonnable. Ce nouveau golf viendrait également s’ajouter à d’autres sites déjà dédiés à cette pratique en Sologne : le golf des Bordes à Saint-Laurent-Nouan situé à seulement un kilomètre, mais aussi deux golfs à La Ferté-Saint-Aubin, un autre à Marcilly-en-Villette, un à Ardon…
D’un point de vue social, ce projet de plus de 500 maisons se vendant entre 500 000 et 1,8 million d’euros pour les plus luxueuses, interroge. Assurément, l’écrasante majorité des Solognots n’y auront pas accès. La Sologne ne doit pas devenir, plus encore qu’elle ne l’est déjà, une « réserve » pour touristes ou résidents aisés venant « consommer de la nature ». S’arrêter aux 220 emplois potentiels ne peut ni justifier l’implantation de ce projet, car il est trop impactant pour le territoire et parce que la privatisation d’une zone naturelle classée au profit d’une offre touristique et de loisirs réservée à une élite n’est pas acceptable. D’autres alternatives pour l’emploi pourraient exister, qui feraient de la biodiversité et de son respect un atout pour le territoire.
Au 21ème siècle, un tel projet inutile ne se justifie pas et va à l’encontre des urgences climatiques et sociales portées par la Région Centre-Val de Loire dans le cadre du SRADDET ou dans celui de la COP régionale. En conséquence, le Conseil régional Centre-Val de Loire, réuni le 19 décembre 2019 à Orléans : • exprime son désaccord avec le projet Chambord Country Club en Sologne qui va dans le sens contraire des ambitions de réduction de l’artificialisation des terres au cœur des ambitions du SRADDET ; • portera ce point de vue lors de l’enquête publique prévue au premier semestre 2020.
-
THÈME : Nature (10)
- Par Thierry LEDRU
- Le 24/01/2020
Le dixième regroupement d'article
J'aurais sans doute dû commencer par celui-là d'ailleurs étant donné que sans cette Nature, il n'y aurait rien d'autre...
La nature de la Nature (philosophie)
Nourrir l'Humanité entière (Nature)
Cash Investigation sur les pesticides
Cash Investigation ; Pesticides (2)
La nature et l'homme (spiritualité)
Raison et nature (spiritualité)
La Nature et la Grâce (spiritualité)
Biodiversité et monde agricole
Biodiversité et stations de montagne
L'amour de la Nature (spiritualité)
Nature et comportement (spiritualité)
Nature contre Capitalisme (spiritualité)
L'âme de la Nature (spiritualité)
L'eau et la conscience (Nature)
Aimer la Terre (spiritualité et Nature)
La vie autour d'un point d'eau (Nature)
Véganisme, végétarisme (Santé, Nature)
L'agriculture contre nature (Nature)
Une imagination illimitée (Nature)
L'incommensurable Univers ( Nature)
Collaborateurs ou réfractaires ? (humanisme et nature)
les Kogis : Le message des derniers Hommes
Le réchauffement climatique, un mythe ?
"Si le climat était une banque..."
"Les criminels du climat" (Nature)
Réchauffement climatique en Corse
Climato-sceptique : arguments et objections
Sciences étonnantes : réchauffement climatique
Changement climatique : depuis 30 ans
Réchauffement climatique : mécanisme et évolution
Climatiseurs et dissonance cognitive
Changement climatique : un aperçu.
Face à l'urgence climatique, les "J'accuse"...
Sciences et vie : le climat en France
Sciences et vie : la guerre de l'eau
Le changement climatique dans les Alpes
Urgence climatique et croissance
Changements climatiques et épisodes méditerranéens
Zoonoses et dérèglement climatique
Covid et changement climatique
Réchauffement climatique et menaces planétaires
Michael Shellenberger et la peur climatique
Enjeux philosophiques du changement climatique
Philosophie et réchauffement climatique
Analyse des arguments climato-sceptiques
François Couplan, ethnobotaniste
Questions-réponses sur le rapport du GIEC
Lutte contre le réchauffement."Capitalisme et écologie"
"Ecologie, éthique et anarchie." (politique)"
La Terre est vivante" James Lovelock
Gaïa : de la mythologie à nos jours
Inondations et agricultures (Nature)
Damien Dekarz, philosophe de la nature
"Les soulèvements de la Terre"